Rapport général n° 108 (2017-2018) de M. Emmanuel CAPUS et Mme Sophie TAILLÉ-POLIAN , fait au nom de la commission des finances, déposé le 23 novembre 2017

Disponible au format PDF (646 Koctets)


N° 108

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 novembre 2017

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2018 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES

ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

( seconde partie de la loi de finances )

ANNEXE N° 31

TRAVAIL ET EMPLOI

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : FINANCEMENT NATIONAL DU DÉVELOPPEMENT ET DE LA MODERNISATION DE L'APPRENTISSAGE

Rapporteurs spéciaux : M. Emmanuel CAPUS et Mme Sophie TAILLÉ-POLIAN

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 235 , 264 rect. , 266 rect. , 273 à 278 , 345 et T.A. 33

Sénat : 107 et 109 à 114 (2017-2018)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Les principales observations d'Emmanuel Capus, rapporteur spécial

1. En 2018, les crédits de la mission « Travail et emploi » s'élèveront à 13,7 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 15,4 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) . Si l'exécution 2018 respectait l'enveloppe initiale - ce qui n'a été le cas, depuis 2009, qu'en 2011, 2013 et 2014 en AE, et qu'en 2014 en CP - un effort important serait consenti, de plus de 4 milliards d'euros en AE et de 2 milliards d'euros en CP, hors rebudgétisation de l'ensemble des dépenses d'allocations de solidarité.

2 . Malgré cette importante diminution, les crédits de la mission « Travail et emploi » seront maintenus à un niveau élevé , le plus important depuis 2009, hors prévision 2017, qui était marquée par d'importantes mesures de périmètre, de l'ordre de 2 milliards d'euros.

3. La diminution prévue en 2018 résulte de choix assumés :

- la baisse de l'enveloppe consacrée aux contrats aidés . Seuls 200 000 contrats dans le secteur non-marchand (CUI-CAE) seront conclus en 2018, pour une dépense s'élevant à 765,3 millions d'euros en AE et 1 454,3 millions d'euros en CP, soit une baisse de plus d'un milliard d'euros en AE et de 953 millions d'euros en CP par rapport à 2017. Sans contester l'utilité de ces emplois pour les collectivités territoriales et le secteur associatif, ceux-ci ne constituent pas moins des contrats précaires subventionnés et, partant, une réponse de court-terme, parfois motivée par des raisons purement statistiques, au problème du chômage . Selon la Dares, si « à court terme, les contrats aidés, particulièrement ceux du secteur non-marchand permettent de soutenir efficacement l'emploi », « à plus long terme, en revanche, les effets sur l'insertion professionnelle sont mitigés ». En outre, la diminution de l'enveloppe globale des contrats aidés prévue dans le présent projet de loi de finances va dans le sens préconisé par le Sénat , même si la baisse du volume de contrats aidés votée par notre assemblée ne concernait que le secteur non-marchand. Le choix du Gouvernement de se tenir à l'enveloppe votée par le Parlement tend à améliorer la sincérité du budget . En effet, l'enveloppe consacrée aux contrats aidés était jusqu'alors systématiquement dépassée, se traduisant par un coût très significativement supérieur aux prévisions (de l'ordre de 1,8 milliard d'euros en AE et de 1 milliard d'euros en CP en 2016) ;

- la diminution des subventions pour charges de service public versées aux opérateurs dont les programmes de la mission sont chefs de file (à l'exception de celle versée à l'établissement public d'insertion dans l'emploi), à hauteur de - 50,2 millions d'euros. En particulier, la subvention versée à Pôle emploi devrait passer de 1 507 millions d'euros en 2017 et 1 457 millions d'euros en 2018 . Cette diminution, qui devrait être compensée par une hausse plus que proportionnelle de la contribution de l'Unédic , ne devrait pas avoir d'impact significatif sur l'activité de l'opérateur, dont les résultats enregistrés apparaissent en nette progression depuis la mise en oeuvre de la convention tripartite 2015-2018 ;

- la non-reconduction de certains dispositifs , à l'instar de l'aide à l'embauche à destination des PME , dont la pérennisation aurait conduit à un important effet d'aubaine alors que son coût pour les finances publiques était compris entre 3,5 milliards d'euros et 4 milliards d'euros , ou encore du contrat de génération, dont l'échec était consommé ;

- des efforts en matière d'effectifs et de masse salariale .

4 . À l'inverse, le budget de la mission « Travail et emploi » prévoit le maintien du financement de certains dispositifs utiles :

- l'aide « TPE jeunes apprentis » sera ainsi prolongée . Compte tenu du ciblage de ce dispositif, le risque d'effet d'aubaine apparaît faible . 227 millions d'euros en AE et 195 millions en CP sont ainsi prévus au titre du financement de cette aide ;

- les crédits consacrés aux missions locales, dont la subvention de « fonctionnement » connaîtra une légère progression en 2018 , permettant de soutenir le réseau dans le cadre de la montée en puissance progressive de la Garantie jeunes.

5. L'année 2018 verra en outre la mise en oeuvre du plan d'investissement dans les compétences , qui comportera deux volets :

- la poursuite de la montée en puissance de la Garantie jeunes . 160 millions d'euros seront ainsi versés aux missions locales pour assurer l'accompagnement de 100 000 jeunes ;

- la mise en place d' un plan de formation à destination des demandeurs d'emploi faiblement qualifiés et des jeunes décrocheurs . Au total, deux millions d'actions de formation devraient être proposées sur le quinquennat . Une telle solution, qui permettra d'améliorer l'employabilité des bénéficiaires, semble relever d' une logique de plus long-terme qu'une simple hausse des contrats aidés .

Une interrogation demeure toutefois sur le financement de ce plan, dont le coût est estimé à 13,8 milliards d'euros sur la durée du quinquennat, alors que, dans le même temps, le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit une diminution des CP de la mission de l'ordre de 2,6 milliards d'euros entre 2018 et 2020.

Les principales observations de Sophie Taillé-Polian, rapporteure spéciale

1. La diminution importante des crédits de la mission « Travail et emploi », à hauteur de 2,7 milliards d'euros en AE et de 295 millions d'euros en CP, aura des conséquences néfastes pour les demandeurs d'emploi et les personnes en situation de précarité, alors que le taux de chômage demeure élevé (9,5 % de la population active au deuxième semestre 2017), de même que le nombre de demandeurs d'emploi (5,6 millions de personnes) , et en augmentation pour les publics les plus fragiles.

2. Hors compensation de la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité, la diminution des crédits de la mission « Travail et emploi » sera record et atteindra près de 4,2 milliards d'euros en AE et 2,4 milliards d'euros en CP. Cette dynamique baissière est aggravée par le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, d'autant que cette baisse sera amplifiée par l'inflation (16,68 milliards d'euros en 2017 représenteront 17,62 milliards d'euros en 2022, à inflation moyenne de 1,1 %).

3. Cette baisse affectera principalement les publics les plus fragiles , du fait de :

- la diminution du nombre de contrats aidés . La décision brutale prise à l'été 2017 de redimensionner l'enveloppe de contrats aidés au second semestre 2017 a mis en lumière l'utilité des contrats aidés. Cette décision s'est traduite par d'importantes difficultés pour les collectivités territoriales et les associations à quelques semaines de la rentrée scolaire, sans compter la détresse dans laquelle les bénéficiaires non reconduits ont été jetés.

En outre, ces contrats constituent des instruments importants pour l'insertion sociale et professionnelle des bénéficiaires. En l'absence de contrats aidés, la plupart des personnes concernées n'auraient tout simplement pas eu accès au marché du travail.

Une telle décision, brutale, prise sans concertation ni préavis, entraîne une véritable fragilisation de certains services publics, dans un contexte de diminution des dépenses. De plus, elle jette l'opprobre sur les collectivités territoriales soupçonnées de tirer profit de l'effet d'aubaine provoqué par ce dispositif pour bénéficier de financements complémentaires. Or la grande majorité des collectivités territoriales ont atteint les objectifs fixés par le dispositif initial et mis en place une véritable insertion professionnelle des bénéficiaires de ces contrats.

Par ailleurs, les domaines prioritaires identifiés par le Gouvernement, sur lesquels seront ciblés les 200 000 contrats conclus en 2018, sont trop restreints. Il conviendrait, à tout le moins, d'y ajouter le développement social des quartiers prioritaires de la politique de la ville ainsi que la culture et l'éducation populaire. Enfin, la réduction du taux de prise en charge par l'État risque d'avoir un impact supplémentaire sur le nombre de contrats conclus.

- la mise en extinction de l'aide à l'embauche à destination des PME . Un bilan précis aurait pu permettre un ajustement de cette aide en la ciblant davantage sur les TPE afin d'éviter les effets d'aubaine. Par ailleurs, certaines entreprises n'étant pas allées au bout de la démarche administrative pour percevoir cette aide, cela pose globalement la question de l'utilité réelle de la baisse du coût du travail dans la lutte contre le chômage ;

- la non-reconduction de l'aide financière en faveur des jeunes apprentis , qui constituait pourtant un complément de revenu utile pour des jeunes dont le pouvoir d'achat est très faible. En effet, selon la Dares, le salaire net moyen des apprentis ne s'élevait ainsi en 2014 qu'à 869 euros par mois. Cette décision constitue un très mauvais signal alors que le Gouvernement prétend redynamiser l'apprentissage dont l'un des principaux problèmes est un déficit d'image auprès des jeunes, pour lesquels cette filière est jugée peu valorisante.

- La suppression du contrat de génération. Ce dispositif n'a certes pas fait ses preuves, mais la problématique de l'emploi des séniors demeure extrêmement préoccupante, sans qu'aucune réponse n'y soit apportée.

4. Les opérateurs de la mission seront de surcroît durement mis à contribution :

- la diminution de la subvention pour charges de service public versée à Pôle emploi de 50 millions d'euros , en contradiction avec le montant inscrit dans la convention tripartite Pôle emploi/État/Unédic, ainsi que la baisse prévue des effectifs de l'opérateur inquiètent . L'opérateur commence à peine à relever la tête grâce aux 4 000 postes créés pendant le précédent quinquennat, qui ont rendu possible la mise en place de réformes importantes. Cependant le nombre de demandeurs d'emplois demeure très élevé (3,5 millions de personnes en catégorie A et 5,6 millions de personnes en catégories A, B et C fin septembre 2017), ce qui engendre une usure importante du personnel : les baisses actuelles risquent de mettre en péril ces améliorations observées par l'inspection générale des finances (IGF) et l'inspection générale des affaires sociales (Igas), améliorations qui ne doivent pas masquer une situation encore préoccupante de l'accompagnement des chômeurs les plus en difficulté.

- la baisse des moyens consacrés à l'amélioration des conditions de travail et de la santé au travail , via une diminution du montant de la subvention versée à l'Anact et la poursuite de la réduction des effectifs de l'inspection du travail ;

- la stagnation de la subvention de fonctionnement versée aux missions locales à hauteur de 206 millions d'euros, alors que celles-ci devront « absorber » près de 15 000 jeunes supplémentaires entrant dans la Garantie jeunes et que nombre de ces structures font face à une instabilité chronique de leurs financements liée au retrait de leurs financeurs locaux et à un manque de visibilité.

5. Ces mesures sont révélatrices de l'incohérence de la politique menée par le Gouvernement . En effet, il réduit les moyens des opérateurs et des services consacrés à la politique de l'emploi, et dans le même temps, il met en place un plan d'investissement dans les compétences, qui devrait se traduire par la mise en oeuvre de deux millions d'actions de formation. Par ailleurs, l'effort réel est bien inférieur au montant mis en avant dans la communication du Gouvernement, tant sur le nombre de personnes formées que sur les moyens dégagés. En effet, dans la mesure où les crédits consacrés à la Garantie jeunes et au plan « 500 000 formations » étaient déjà portés par la mission « Travail et emploi », l'effort consenti ne s'élèvera qu'à 750 millions d'euros en AE et 430 millions d'euros en CP. Des questions demeurent en suspens s'agissant du financement de ce plan et des moyens humains qui y seront consacrés .

Enfin, on peut s'interroger sur le nombre de personnes touchées par an, qui sera certainement inférieur au plan 500 000 formations auquel il se substitue .

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 49 % seulement des réponses étaient parvenues à vos rapporteurs spéciaux en ce qui concerne la mission « Travail et emploi » et le CAS « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage » .

I. ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION « TRAVAIL ET EMPLOI » ET DU CAS « FINANCEMENT NATIONAL DU DÉVELOPPEMENT ET DE LA MODERNISATION DE L'APPRENTISSAGE »

1. En 2018, la mission « Travail et emploi » contribuera fortement à l'effort de maîtrise de la dépense publique

Évolution des crédits de la mission « Travail et emploi » entre 2017 et 2018

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

En 2018, les crédits de la mission « Travail et emploi » s'élèveront à 13,7 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 15,4 milliards d'euros en crédits de paiement (CP), soit une diminution de 2,7 milliards d'euros en AE (- 16,6 %) et de 91,7 millions d'euros en CP (- 0,6 %) .

À périmètre courant, la part des crédits de paiement de la mission « Travail et emploi » dans le budget de l'État devrait ainsi passer de 5,7 % en 2017 à 5,5 % en 2018 (5 % à périmètre constant).

Évolution de la part des crédits de paiement de la mission « Travail et emploi » dans le budget de l'État

(y.c FDC et ADP, en valeur, à périmètre courant)

Note : l'évolution des crédits du budget de l'État intègre les dépenses du budget général, des budgets annexes et des comptes spéciaux. Elle comprend les attributions de produit et les fonds de concours. Elle est retraitée des crédits évaluatifs (remboursements et dégrèvements et charge de la dette), de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles (DDAI) et des dépenses exceptionnelles (plan de relance 2008-2009, programmes d'investissement d'avenir, dotation au MES et à la BEI, recapitalisation de Dexia).

Données d'exécution de 2006 à 2016, données LFI pour 2017, données PLF pour 2018

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

La mission « Travail et emploi » sera en outre affectée par une importante mesure de périmètre . En effet, la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité (CES) prévue par l'article 47 du présent projet afin de compenser l'augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG) pour les fonctionnaires se traduira par la rebudgétisation de l'ensemble des dépenses d'allocations de solidarité au sein du programme 102 « Accès et retour à l'emploi » à hauteur de 1,46 milliard d'euros.

Retraitée de ce changement de périmètre, la baisse des crédits de la mission « Travail et emploi » atteindra près de 4,2 milliards d'euros en AE et 2,4 milliards d'euros en CP .

Cette évolution est, pour l'essentiel, imputable à une diminution des crédits du programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et accès à l'emploi », à hauteur de près de 3 milliards d'euros en AE (- 34 %) et de 284 millions d'euros en CP (- 4 %), en lien avec l'extinction de l'aide à l'embauche dans les PME et la suppression du contrat de génération .

L'année 2018 se traduira en outre par une diminution de l'enveloppe consacrée aux contrats aidés, dont le coût s'élèvera à 765,3 millions d'euros en AE et 1 454,3 millions d'euros en CP, soit une baisse de plus d'un milliard d'euros en AE et de 953 millions d'euros en CP par rapport à 2017 .

Évolution des crédits des programmes
de la mission « Travail et emploi »

(en % et en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Logiquement, la baisse des AE concernera principalement les dépenses d'intervention (- 2,6 milliards d'euros) .

Évolution des crédits de la mission « Travail et emploi »
par nature de dépenses

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

2. Une baisse des crédits de paiement de 17 % d'ici 2020 inscrite dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 prévoit une diminution de 17 % des CP de la mission entre 2018 et 2020, correspondant à une baisse de 2,7 milliards d'euros, selon la trajectoire présentée dans le graphique ci-après.

À périmètre constant, les CP de la mission auront diminué de près de 17 % entre 2018 et 2020 (- 2,6 milliards d'euros ). Dans le même temps, les CP du budget général devraient connaître une progression de l'ordre de 3 %.

Évolution des crédits de paiement
de la mission « Travail et emploi » entre 2017 et 2020

(en % et en milliards d'euros)

Champ : hors contribution au CAS « Pensions »

Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

La position du rapporteur spécial Emmanuel Capus

Votre rapporteur spécial estime que si l'exécution 2018 respectait l'enveloppe initiale - ce qui n'a été le cas, depuis 2009, qu'en 2011, 2013 et 2014 en AE, et qu'en 2014 en CP - un effort important serait consenti , de plus de 4 milliards d'euros en AE et de 2 milliards d'euros en CP, hors rebudgétisation de l'ensemble des dépenses d'allocations de solidarité.

Cela supposera notamment que la programmation des contrats aidés et les paramètres financiers sous-jacents soient effectivement respectés.

Évolution de la consommation des crédits
de la mission « Travail et emploi »

(en millions d'euros)

Champ : y compris fonds de concours et attributions de produits

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Malgré cette importante diminution, les crédits de la mission « Travail et emploi » seront maintenus à un niveau très élevé (le plus important depuis 2009, hors prévision 2017, qui était marquée par d'importantes mesures de périmètre, de l'ordre de 2 milliards d'euros) . Ils permettront le financement des dispositifs en faveur de l'emploi des jeunes et des personnes les moins qualifiées en particulier, via la montée en puissance de la Garantie jeunes et le lancement du plan d'investissement dans les compétences .

Le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit en outre que l'effort demandé à la mission « Travail et emploi » sera poursuivi dans les années à venir, celle-ci contribuant de manière importante à la maîtrise de la dépense publique.

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

Votre rapporteure spéciale estime que la diminution importante des crédits de la mission « Travail et emploi », à hauteur de 2 , 7 milliards d'euros en AE et de 295 millions d'euros en CP, est un mauvais signal adressé aux demandeurs d'emploi et aux personnes en situation de précarité, alors que le taux de chômage demeure élevé et en augmentation pour les publics les plus fragiles . 5,6 millions de personnes sont actuellement inscrites à Pôle emploi, toutes catégories confondues (A, B, C). Le nombre de demandeurs d'emplois de plus de 50 ans, en un an, a augmenté de 6 % et a été multiplié par trois en dix ans. La durée moyenne d'inscription à Pôle emploi de ces demandeurs d'emplois est de 671 jours contre 353 pour les autres. Concernant plus spécifiquement, les demandeurs d'emplois en catégorie C, ils ont vu leur nombre augmenter de 11 % 1 ( * ) .

Il convient en outre de rappeler que, hors compensation de la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité, la diminution des crédits de la mission « Travail et emploi » sera record et atteindra près de 4,2 milliards d'euros en AE et 2,4 milliards d'euros en CP .

Votre rapporteure spéciale regrette que le projet de loi de programmation des finances pour les années 2018 à 2022 accentue considérablement la poursuite de cette logique baissière , qui sera amplifiée par la reprise de l'inflation.

3. Le compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage »

Le compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage » compte deux programmes :

- le programme 787 « Répartition de la ressource régionale consacrée au développement de l'apprentissage » , qui vise à répartir le montant de la part fixe de la ressource régionale pour l'apprentissage fixée à 1 544,09 millions d'euros par l'article L. 6241-2 du code du travail. Cette ressource est constituée d'une fraction des recettes de taxe d'apprentissage (51 %) et d'une fraction de TICPE ;

- le programme 790 « Correction financière des disparités régionales de taxe d'apprentissage et incitations au développement de l'apprentissage » , qui vise à répartir l'éventuel solde de la fraction régionale pour l'apprentissage après versement de la part fixe.

Règles de répartition de la ressource régionale
pour l'apprentissage

Source : commission des finances du Sénat

La part fixe de la ressource régionale pour l'apprentissage sera versée aux régions selon la répartition ci-après.

Répartition par région de la part fixe de la ressource régionale
pour l'apprentissage

(en euros)

Auvergne-Rhône-Alpes

154 755 654

Bourgogne-Franche-Comté

61 505 461

Bretagne

61 647 094

Centre-Val de Loire

57 848 583

Corse

6 592 023

Grand Est

127 960 016

Hauts-de-France

120 336 943

Île-de-France

213 429 174

Normandie

75 971 127

Nouvelle Aquitaine

131 211 095

Occitanie

103 484 091

Pays de la Loire

88 641 814

Provence-Alpes-Côte d'Azur

94 394 422

Guadeloupe

23 066 867

Guyane

6 105 011

Martinique

25 505 677

La Réunion

37 170 978

Mayotte

311 802

Total

1 389 937 832

Source : projet annuel de performances pour 2018

Le solde dynamique est quant à lui estimé à 243 millions d'euros en 2018 contre 180 millions d'euros en 2017 . Il fera l'objet d'une répartition entre les régions selon les critères fixés à l'article L. 6241-2 du code du travail :

- pour 60 %, à due proportion du résultat du produit calculé à partir du nombre d'apprentis inscrits dans les centres de formation d'apprentis et les sections d'apprentissage dans la région au 31 décembre de l'année précédente selon un quotient :

a) dont le numérateur est la taxe d'apprentissage par apprenti perçue l'année précédente par les centres de formation d'apprentis et les sections d'apprentissage pour l'ensemble du territoire national ;

b) dont le dénominateur est la taxe d'apprentissage par apprenti perçue lors de cette même année par les centres de formation d'apprentis et les sections d'apprentissage dans la région ;

- pour 26 %, au prorata du nombre d'apprentis inscrits dans les centres de formation d'apprentis et les sections d'apprentissage dans la région au 31 décembre de l'année précédente et préparant un diplôme ou un titre à finalité professionnelle inférieur ou égal au baccalauréat professionnel ;

- pour 14 %, au prorata du nombre d'apprentis inscrits dans les centres de formation d'apprentis et les sections d'apprentissage dans la région au 31 décembre de l'année précédente et préparant un diplôme ou un titre à finalité professionnelle supérieur au baccalauréat professionnel.

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

Votre rapporteure spéciale s'interroge sur la pertinence de la suppression de 150 millions d'euros de ressources fiscales affectées aux chambres de commerce et d'industrie, prévue par l'article 19 du présent projet de loi de finances, pourtant acteurs clés de l'apprentissage.

II. LES TRAITS SAILLANTS DU BUDGET 2018

1. Les moyens consacrés au service public de l'emploi
a) La diminution de la subvention pour charges de service public versée à Pôle emploi

La subvention pour charges de service public versée à Pôle emploi diminuera à hauteur de 50 millions d'euros en AE comme en CP, passant de 1 507 millions d'euros en 2017 à 1 457 millions d'euros en 2018 .

Ce montant est inférieur à celui inscrit dans la convention tripartite État/Pôle emploi/Unédic (1 507 millions d'euros).

Cette baisse résulte notamment d'une diminution importante du nombre d'emplois rémunérés par l'opérateur , qui passeront de 50 228 ETPT en 2017 à 46 445 ETPT (- 3 783 ETPT, dont - 297 ETPT sous plafond et - 3 486 ETPT hors plafond) en 2018.

Pôle emploi a indiqué à vos rapporteurs spéciaux que cette diminution du plafond d'emplois correspondait à la prise en compte de la sous-exécution du plafond d'emplois 2016 et n'était, par conséquent, pas « de nature à empêcher l'exercice par Pôle emploi de ses missions ».

Par ailleurs, selon l'opérateur, l'absence d'inscription d'emplois hors plafond ne préjuge pas de sa capacité à recruter en 2018, dans la mesure où ces emplois sont financés sur ses ressources propres. Selon les organisations syndicales entendues par vos rapporteurs spéciaux 2 ( * ) , le nombre de personnes recrutées hors plafond devrait cependant diminuer alors que ces dernières remplissent des fonctions d'accueil, voire d'accompagnement des demandeurs d'emploi.

La position du rapporteur spécial Emmanuel Capus

Ainsi que l'a indiqué Pôle emploi dans sa réponse au questionnaire de vos rapporteurs spéciaux, la diminution de la subvention pour charges de service public prévue dans le présent projet de loi de finances, à hauteur de 50 millions d'euros, ne devrait pas avoir d'impact majeur pour l'opérateur, dans la mesure où celle-ci devrait être plus que compensée par une hausse de la contribution de l'Unédic .

Il apparaît en outre justifié que les opérateurs soient associés à la maîtrise des dépenses publiques, au même titre que l'État, les collectivités territoriales et les administrations de sécurité sociale .

À cet égard, il convient de saluer les efforts entrepris par Pôle emploi . Dans un rapport de février 2017, l'inspection générale des finances (IGF) et l'inspection générale des affaires sociales (Igas) 3 ( * ) ont dressé un bilan à mi-parcours des réformes lancées par l'opérateur. Quatre chantiers prioritaires ont ainsi été menés :

- le développement d'une offre de service aux entreprises. 4 200 conseillers ont ainsi été redéployés à partir de juillet 2015 ;

- la mise en place d'un nouveau parcours du demandeur d'emploi (NPDE) se traduisant par de nouvelles modalités d'accueil (accueil de flux le matin et sur rendez-vous l'après-midi), un renforcement de la personnalisation de l'accompagnement, la dématérialisation de l'inscription et de l'ouverture des droits, etc. ;

- une offre de service numérique rénovée et plus large, avec, par exemple, le lancement de la plateforme Emploi Store, qui propose plus de 250 services en ligne (cours, salons virtuels, tutoriels, recherche d'emploi ou de formation, etc.) ;

- la mise en place d'un accompagnement intensif pour les demandeurs d'emploi en ayant le plus besoin.

La mission relevait que Pôle emploi avait « engagé rapidement les réformes prévues ». S'agissant du nouveau parcours du demandeur d'emploi, elle estimait que celui-ci répondait « aux faiblesses identifiées de l'entrée des demandeurs d'emploi dans l'accompagnement de leur suivi ». S'agissant de l'accompagnement intensif, elle notait que celui-ci avait un impact positif sur le retour à l'emploi. Enfin, la mission indiquait que le taux de satisfaction des entreprises vis-à-vis de la nouvelle offre de service qui leur était dédiée atteignait 71 % au troisième trimestre 2016. Au total, la mission estimait que Pôle emploi devrait être en mesure d'atteindre la plupart des objectifs fixés dans la convention .

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

Votre rapporteure spéciale estime que la diminution de la subvention pour charges de service public versée à Pôle emploi ainsi que la baisse prévue des effectifs de l'opérateur est révélatrice de l'incohérence de la politique menée par le Gouvernement.

En effet, d'un côté, ce dernier annonce la hausse des moyens consacrés à la formation dans le cadre du grand plan d'investissement dans les compétences, et, de l'autre, il procède à une diminution des moyens attribués à Pôle emploi , alors que, malgré les efforts entrepris par celui-ci, l'opérateur peine à répondre aux besoins des demandeurs d'emploi, et notamment des plus éloignés de l'emploi, dans un contexte de montée de la précarité. En effet, le rapport de l'IGF et de l'Igas précité note que « si l'amélioration est réelle pour le délai de démarrage de l'accompagnement, plus de 50 % des demandeurs d'emplois en accompagnement renforcé n'ont pas encore eu d'entretien avec leur conseiller référent trois mois après leur inscription ». En outre, ce rapport précise que « les demandeurs d'emploi de longue durée sont sous représentés dans l'accompagnement renforcé, où ils représentent 40,1 % de la DEFM, alors qu'ils représentent 47 % dans le reste de la DEFM ».

Par ailleurs, votre rapporteure spéciale rappelle que le régime d'assurance chômage serait équilibré s'il ne participait pas au financement du service public de l'emploi. Ainsi, deux observations méritent d'être faites :

- d'une part, une hausse de la contribution de l'Unedic à Pôle emploi afin de compenser la diminution de la subvention pour charges de service public versée par l'État, accentuera le déficit du régime ;

- d'autre part, les mesures envisagées par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 actuellement en examen, telles que la suppression des cotisations salariales et son remplacement par l'impôt risqueraient d'aggraver ce déficit.

Votre rapporteure spéciale entend donc veiller tout particulièrement à ce que le montant de la subvention versée par l'État à Pôle emploi qui sera inscrit dans la future convention tripartie État/Pôle emploi/Unédic, dont le contenu sera négocié au second semestre 2018, prenne bien en compte la hausse de la charge induite par ces décisions gouvernementales .

b) Une quasi-stagnation des crédits destinés au fonctionnement des missions locales

Créées dans le prolongement des recommandations du rapport « Schwartz » de 1981, les missions locales font partie du service public de l'emploi , dont elles constituent un des acteurs importants.

Les missions locales ont notamment vocation à proposer un « accompagnement global » des jeunes âgés de 16 à 25 ans. Pour cela, l'État les a chargées du portage de certains dispositifs nationaux. Depuis 2012, elles assurent ainsi l'accompagnement des bénéficiaires de la Garantie jeunes.

En 2015, les 445 missions locales que compte le réseau ont été en contact avec 1,4 million de jeunes et en ont reçu 1,2 million en entretien .

Les crédits consacrés aux missions locales s'élèveront à 206 millions d'euros en AE comme en CP, soit un niveau quasi identique à celui prévu en loi de finances pour 2017 (205 millions d'euros).

La position du rapporteur spécial Emmanuel Capus

Votre rapporteur spécial considère que la stabilisation des crédits consacrés au financement des missions locales permettra à ces structures de poursuivre les efforts engagés ces dernières années pour l'accompagnement des jeunes, en particulier dans le cadre de la Garantie jeunes .

Dans le prolongement du rapport de nos collègues François Patriat et Jean-Claude Requier 4 ( * ) , il estime que le soutien financier de l'État ne constitue pas une réponse unique et que celui-ci doit donc s'accompagner d'une rationalisation du réseau, par exemple via la mutualisation de certaines fonctions (ressources humaines, budgétaires et financières, etc.) au niveau départemental, voire régional, qui permettrait de dégager des marges de manoeuvre supplémentaires pour le développement d'initiatives innovantes.

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

Votre rapporteure spéciale regrette la stagnation des crédits consacrés aux missions locales, dans un contexte d'augmentation de leur activité liée, notamment, à la montée en puissance de la Garantie jeunes , et au regard de la baisse des subventions accordées aux autres opérateurs de la mission .

En effet, comme l'ont relevé nos collègues François Patriat et Jean-Claude Requier dans leur rapport précité, certaines de ces structures sont fragilisées du fait de la conjonction de plusieurs phénomènes : l'augmentation de leurs charges liée aux moyens supplémentaires qu'elles ont dû mettre en oeuvre pour assurer l'accompagnement des bénéficiaires de la Garantie jeunes , le retrait de certains financeurs, en particulier des Conseils régionaux, les difficultés pour percevoir l'ensemble des crédits d'accompagnement dus au titre de la Garantie jeunes (du fait notamment d'objectifs quantitatifs et qualitatifs irréalistes), l'instabilité des financements, reposant sur des subventions de dispositifs non pérennes, etc. Au total, selon les auteurs, une structure sur quatre était en situation de déficit en 2015 .

Votre rapporteure spéciale appelle par conséquent à une grande vigilance afin de ne pas prendre des décisions qui seraient de nature à remettre en cause la pérennité des missions locales, dont l'importance du travail en matière d'accompagnement des jeunes en difficulté ainsi que les bons résultats qu'elles enregistrent ont été rappelés par nos collègues François Patriat et Jean-Claude Requier .

Elle estime en outre qu'un fonds non pérenne destiné au financement d'expérimentations en matière de développement du numérique ou de l'apprentissage par exemple et permettant d'accompagner la modernisation du réseau pourrait utilement être mis en place.

*

Au cours des auditions qu'ils ont menées, vos rapporteurs spéciaux ont été frappés de l'absence de vision agrégée de l'ensemble des dispositifs et crédits en faveur de la jeunesse . Ils appellent par conséquent au développement d'outils permettant de disposer d'une telle vision, par exemple via le renforcement des prérogatives du délégué interministériel à la jeunesse.

c) La baisse de la participation de l'État au financement des maisons de l'emploi

Les maisons de l'emploi (MDE) ont été créées par la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale 5 ( * ) .

L'article L. 5313-1 du code du travail leur assigne cinq objectifs principaux :

- concourir à la coordination des politiques publiques et du partenariat local des acteurs publics et privés qui agissent en faveur de l'emploi, de la formation, de l'insertion et du développement économique ;

- à partir d'un diagnostic partagé, exercer une mission d'observation de la situation de l'emploi et d'anticipation des mutations économiques ;

- contribuer à la c oordination des actions du service public de l'emploi et participer en complémentarité avec Pôle emploi, les réseaux spécialisés et les acteurs locaux à l'accueil, l'information, l'orientation et l'accompagnement des personnes à la recherche d'une formation ou d'un emploi et au maintien et au développement de l'activité et de l'emploi ainsi qu'à l'aide à la création et à la reprise d'entreprise ;

- en lien avec les entreprises, les partenaires sociaux, les chambres consulaires et les branches professionnelles, contribuer au développement de la gestion territorialisée des ressources humaines ;

- mener des actions d'information et de sensibilisation aux phénomènes des discriminations à l'embauche et dans l'emploi ainsi que relatives à l'égalité professionnelle et à la réduction des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes.

Les missions des maisons de l'emploi ont cependant fait l'objet d'un recentrage par l'arrêté du 18 décembre 2013 portant modification du cahier des charges des maisons de l'emploi autour de deux champs prioritaires :

- la participation au développement de l'anticipation des mutations économiques, à travers notamment la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et l'ingénierie de développement de l'emploi ;

- la contribution au développement local de l'emploi, à travers notamment le soutien à la création et au développement des entreprises.

Cet arrêté a en outre fixé le plafond de la participation annuelle de l'État à un million d'euros par structure et a modifié le taux d'intervention de l'État, qui est passé de 70 % maximum à 60 % maximum du coût des actions conventionnées .

Par ailleurs, depuis 2016, un dispositif de budgétisation par la performance a été mis en place .

En 2018, la participation de l'État au financement des maisons de l'emploi devrait s'élever à 10,5 millions d'euros en 2018 en AE et CP, contre 21 millions d'euros en 2017.

La position du rapporteur spécial Emmanuel Capus

Votre rapporteur spécial considère que la mise en place d'un pilotage par la performance des maisons de l'emploi va dans le bon sens .

Le retrait progressif de l'État dans le financement de ces structures doit cependant s'effectuer dans le cadre d'un dialogue entre les différents acteurs et aboutir à la définition d'un schéma clair d'évolution du positionnement et des missions des maisons de l'emploi.

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

Votre rapporteure spéciale estime que la diminution par deux des crédits consacrés aux maisons de l'emploi ne leur permettra pas d'assurer leurs missions dans de bonnes conditions .

Elle s'interroge par conséquent sur les motifs réels ayant conduit le Gouvernement à faire ce choix : l'insuffisance des financements se traduisant par une réduction de leur champ d'intervention, celle-ci justifiant in fine leur mise en extinction.

Or ces structures constituent des instruments indispensables en matière d'ingénierie territoriale . Leur suppression aurait par conséquent un impact négatif sur la qualité des politiques en faveur de l'emploi menées localement, et notamment dans les territoires touchés par la diminution de 33 % du nombre d'implantation de Pôle Emploi entre 2009 et 2016 .

2. Une baisse importante du nombre de contrats aidés et du taux de prise en charge en 2018

Le terme « contrats aidés » recouvre différents dispositifs dérogatoires du droit commun.

La loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion a mis en place le contrat unique d'insertion (CUI), entré en vigueur à compter du 1 er janvier 2010 dans l'hexagone, un an plus tard en outre-mer et le 1 er mars 2012 à Mayotte. Le CUI s'est substitué aux quatre dispositifs antérieurs (contrat d'accompagnement dans l'emploi, contrat d'insertion dans l'emploi, contrat d'avenir et contrat d'insertion - revenu minimal d'activité).

Le CUI se décline en deux « versions » dont les régimes juridiques sont harmonisés : le contrat initiative emploi (CUI-CIE), dans le secteur marchand et le contrat d'accompagnement dans l'emploi (CUI-CAE), dans le secteur non-marchand.

Le CUI peut prendre la forme d'un contrat à durée déterminée (CDD) ou d'un contrat à durée indéterminée (CDI). La durée hebdomadaire du travail est comprise entre 20 heures et 35 heures. Il est destiné aux personnes reconnues par les institutions comme rencontrant des difficultés particulières pour l'accès à l'emploi : chômeurs de longue durée, séniors, travailleurs handicapés, bénéficiaires de certains minima sociaux (revenu de solidarité active, allocation de solidarité spécifique, allocation aux adultes handicapés).

En contrepartie du recrutement d'un salarié en contrat aidé, l'employeur bénéficie d'une aide, dont le montant varie selon sa catégorie et son secteur d'activité, des actions prévues en matière d'accompagnement et de formation, des conditions économiques locales et des difficultés d'accès à l'emploi rencontrées par le salarié. Cette aide est plafonnée à 95 % du SMIC dans le secteur non-marchand et à 47 % dans le secteur marchand .

Ce dispositif a été complété par la loi du 26 octobre 2012 6 ( * ) portant création des emplois d'avenir. Ce dispositif s'adresse aux jeunes de 16 à 25 ans (jusqu'à 30 ans pour les jeunes reconnus travailleurs handicapés) à la date de la signature du contrat :

- sans diplôme ou titulaires d'un CAP/BEP, et n'étant ni en emploi, ni en formation ;

- présentant des difficultés particulières d'accès à l'emploi ;

- avec une priorité dans les zones où les jeunes sont plus nombreux à rencontrer des difficultés d'insertion : dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), les zones de revitalisation rurale (ZRR), les départements et collectivités d'outre-mer, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Les emplois aidés prennent la forme d'un CUI-CAE pour lequel l'aide de l'État atteint 75 % du Smic pour les structures du secteur non-marchand et 35 % du Smic pour les structures du secteur marchand.

Évolution du nombre et du coût des contrats aidés

* Volume inscrit en LFI hors débasage de 100 000 CUI-CAE aides au poste dans le cadre de la réforme du financement des structures d'insertion par l'activité économique

** Exécution au 30 juin 2017

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Comme le montre le graphique ci-après, l'enveloppe de contrats aidés inscrite en loi de finances initiale est systématiquement dépassée. Si en 2013, 2014 et 2015 ce dépassement n'est intervenu qu'en fin d'année, en 2016, le nombre de contrats aidés a excédé les prévisions dès le mois d'août .

Entrées mensuelles en contrats aidés

Source : commission des finances du Sénat, d'après des données Dares

Le projet de loi de finances pour 2018 prévoit que seuls 200 000 contrats aidés seront conclus en 2018. Ils ne concerneront que le secteur non-marchand (CUI-CAE) et seront concentrés sur trois domaines prioritaires : les territoires ultramarins et ruraux, l'accompagnement des enfants en situation de handicap en milieu scolaire et l'urgence sanitaire et sociale (aide alimentaire, accompagnement social ou hébergement - notamment médicalisé - des jeunes enfants, des personnes dépendantes, sans abri ou atteintes d'un handicap).

Aucun contrat dans le secteur marchand (CUI-CIE) ni emploi d'avenir ne serait donc conclu en 2018 : seul le « stock » de ces contrats serait financé.

Si l'enveloppe prévue dans le projet de loi de finances était respectée, la réduction serait significative, le nombre de contrats aidés étant inférieur de plus de 100 000 par rapport à la prévision d'exécution 2017 et de plus de 250 000 par rapport aux exécutions 2014, 2015 et 2016.

Dans les réponses au questionnaire budgétaire, le ministère du travail indique que cet objectif tient compte « de la reprise économique, de la hausse de l'emploi marchand et de la stabilisation baissière du taux de chômage, amorcée depuis le début de l'année 2016 ». Cette diminution en volume du nombre de contrats aidés doit en outre s'accompagner de plusieurs mesures conçues pour améliorer l'insertion des bénéficiaires : meilleure sélection des employeurs afin de proposer des postes « permettant l'acquisition de compétences directement valorisables », obligations renforcées en matière de formation et meilleur suivi et accompagnement à la sortie du dispositif.

Le taux moyen de prise en charge par l'État sera en outre revu à la baisse, passant de 72,1 % du SMIC brut en 2017 à 50 % du SMIC brut en 2018 .

Au total, en 2018, la dépense consacrée aux contrats aidés s'élèvera à 765,3 millions d'euros en AE et 1 454,3 millions d'euros en CP, soit une baisse de plus d'un milliard d'euros en AE et de 953 millions d'euros en CP par rapport à 2017 .

La position du rapporteur spécial Emmanuel Capus

Votre rapporteur spécial ne conteste pas l'utilité des contrats aidés pour les collectivités territoriales et le secteur associatif. Il estime que la décision prise à l'été 2017 de redimensionner l'enveloppe de contrats aidés était nécessaire pour éviter un dérapage du budget identifié par la Cour des comptes, même si ses conditions de mise en oeuvre auraient dû faire l'objet d'une négociation préalable avec les acteurs concernés. Il regrette à cet égard l'irresponsabilité du précédent Gouvernement, qui avait incité les collectivités territoriales à recruter des personnes en contrats aidés en sachant que l'enveloppe votée par le Parlement serait dépassée .

Il considère cependant que les contrats aidés constituent trop souvent une forme de « précarité subventionnée » et, partant, une réponse de court-terme, parfois motivée par des raisons purement statistiques, au problème du chômage .

Selon une étude de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) 7 ( * ) , en 2014, seuls 67 % des bénéficiaires d'un CUI-CIE et 41 % des bénéficiaires d'un CUI-CAE étaient en emploi six mois après la sortie de leur contrat . Ces taux n'étaient que de respectivement 57 % et 26 % s'agissant de l'emploi durable . Au total, selon la Dares, si « à court terme, les contrats aidés, particulièrement ceux du secteur non marchand permettent de soutenir efficacement l'emploi », « à plus long terme, en revanche, les effets sur l'insertion professionnelle sont mitigés . Si le passage en contrat aidé du secteur marchand semble avoir un effet positif sur la reprise d'emploi, les contrats aidés du secteur non marchand semblent plutôt, au vu des études existantes, réduire légèrement les chances d'être en emploi non aidé après la fin du contrat ».

Votre rapporteur spécial relève que la diminution de l'enveloppe globale des contrats aidés prévue dans le présent projet de loi de finances va dans le sens préconisé par le Sénat . À l'occasion de l'examen des projets de loi de finances pour 2015 et 2016, des amendements visant à diminuer le nombre de contrats aidés - à hauteur de 45 000 par rapport aux crédits votés par l'Assemblée nationale dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2015 et de 160 000 par rapport à ce qui était inscrit dans le projet de loi de finances pour 2016 - ont ainsi été adoptés par le Sénat, sur proposition de sa commission des finances.

Nombre de contrats aidés proposé par le Sénat lors de l'examen des PLF
pour 2015 et pour 2016

* Après débasage de 100 000 CUI-CAE transformés en aides au poste

Source : commission des finances du Sénat

Certes, la baisse préconisée par le Sénat se concentrait sur les contrats aidés dans le secteur non-marchand (CUI-CAE et emplois d'avenir), compte tenu de leur faible taux de sortie vers l'emploi. Pour autant, votre rapporteur spécial considère que le choix du Gouvernement de conserver une enveloppe de 200 000 CUI-CAE se justifie pour trois raisons principales .

En premier lieu, les difficultés rencontrées par les collectivités territoriales à la suite du redimensionnement de l'enveloppe de contrats aidés dans le courant de l'année 2017 attestent de l'utilité de ces emplois, même si celle-ci ne constitue pas leur vocation première . À cet égard, le ciblage des contrats aidés sur les territoires ou dans les secteurs où les besoins sont les plus importants, apparaît pertinent .

En deuxième lieu, le fait que le taux d'insertion dans l'emploi des bénéficiaires de contrats aidés dans le secteur marchand soit plus élevé résulte notamment du fait que les publics concernés sont généralement moins éloignés du marché du travail.

En troisième lieu, les recrutements en contrat aidé dans le secteur marchand peuvent correspondre à un effet d'aubaine, les entreprises bénéficiant d'une aide pour un recrutement auquel elles auraient de toute façon procédé . Ainsi, selon l'étude de la Dares précitée, « dans le secteur marchand, financer un emploi crée moins d'un emploi ».

Votre rapporteur spécial estime enfin que le choix du Gouvernement de se tenir à l'enveloppe votée par le Parlement va dans le sens d'une amélioration de la sincérité du budget, qui était appelée de ses voeux par le Sénat . Il constate ainsi que l'enveloppe consacrée aux contrats aidés était jusqu'alors systématiquement dépassée, se traduisant par un coût très significativement supérieur aux prévisions (de l'ordre de 1,8 milliard d'euros en AE et de 1 milliard d'euros en CP en 2016). Par ailleurs, comme l'a indiqué la direction du budget à vos rapporteurs spéciaux 8 ( * ) , au premier semestre 2017, 70 % de l'enveloppe votée avait été consommée. Au total, le nombre de contrats aidés conclus en 2017 devrait s'élever à 310 000, contre 280 000 prévus. Il apparaissait par conséquent indispensable de mettre un terme à cette dérive, critiquée tant par votre commission des finances 9 ( * ) que par la Cour des comptes 10 ( * ) .

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

Les contrats aidés sont souvent décriés comme étant source de dérapage budgétaire. Certes, il existe une difficulté à prévoir le nombre de contrats aidés, notamment car leur prescription est très décentralisée, proche du terrain et des besoins. Cependant, si le nombre d'emplois aidés réellement signés a toujours été supérieur à la prévision, in fine l'écart à la prévision budgétaire a pu se révéler négatif, comme cela a été le cas en 2013.

Votre rapporteure spéciale tient à indiquer qu'elle regrette vivement le choix du Gouvernement de redimensionner l'enveloppe de contrats aidés intervenu au second semestre 2017 . Cette décision brutale s'est traduite par d'importantes difficultés pour les collectivités territoriales , pour lesquelles ces emplois étaient indispensables afin d'assurer dans de bonnes conditions les activités périscolaires liées à la mise en oeuvre des nouveaux rythmes scolaires, la restauration scolaire, l'entretien des voieries, des espaces verts, etc.

Une telle décision, brutale, prise sans concertation ni préavis, entraîne une véritable fragilisation de certains services publics, dans un contexte de diminution des dépenses : d'une part, certains emplois n'ont pas été reconduits ou ne le seront pas, d'autre part, le montant qui sera pris en charge par l'État passera de 70 % à 50 %. De plus, ce choix jette l'opprobre sur les collectivités territoriales soupçonnées de tirer profit de l'effet d'aubaine provoqué par ce dispositif pour bénéficier de financements complémentaires. Or la grande majorité des collectivités territoriales a atteint les objectifs fixés par le dispositif initial et mis en place une véritable insertion professionnelle des bénéficiaires de ces contrats.

Cette décision a également mis à mal le tissu associatif , les associations concernées n'étant pas en mesure de recruter sans l'aide financière apportée par l'État.

La diminution du nombre de contrats aidés ainsi que la baisse de la prise en charge de ces derniers par l'État prévues dans le présent projet de loi de finances accentueront ces difficultés . Votre rapporteure spéciale ne peut, par conséquent, que s'opposer à une telle décision, dont les conséquences sociales seront importantes .

En effet, outre l'utilité de ces contrats pour les collectivités territoriales et le tissu associatif de notre pays, ils constituent aussi des instruments importants pour l'insertion sociale et professionnelle des bénéficiaires. Les taux de sorties positives rappelés précédemment doivent ainsi s'analyser au regard du public concerné . Or, comme le souligne la Dares dans son enquête précitée, « en 2015, 9 nouveaux bénéficiaires d'un CUI ou d'un emploi d'avenir sur 10 présentaient des difficultés particulières pour trouver un emploi [...] Les bénéficiaires de minima sociaux et les chômeurs inscrits à Pôle emploi depuis deux ans ou plus sont plus nombreux parmi les embauches en contrats uniques d'insertion du secteur non marchand ». En l'absence de contrats aidés, la plupart des personnes concernées n'auraient tout simplement pas eu accès au marché du travail . Ces derniers constituaient par conséquent pour leurs bénéficiaires un « pied à l'étrier » dont la suppression se fera certainement durement sentir en 2018 et au-delà. Or si le nombre de demandeurs d'emploi en catégorie A tend à diminuer (- 0,5 % entre septembre 2016 et septembre 2017), cela n'est pas le cas pour les catégories B et C (+ 8 % sur la même période).

Par ailleurs, votre rapporteure spéciale estime que les domaines prioritaires identifiés par le Gouvernement, sur lesquels seront ciblés les 200 000 contrats conclus en 2018, sont trop restreints . Il conviendrait, à tout le moins, d'y ajouter le développement social des quartiers prioritaires de la politique de la ville, ainsi que la culture et l'éducation populaire .

3. La mise en oeuvre du grand plan d'investissement

Annoncé par le Premier ministre le 25 septembre 2017, le grand plan d'investissement mobilisera 57 milliards d'euros sur le quinquennat .

Sur ce montant, 13,8 milliards d'euros seront portés par la mission « Travail et emploi » dans le cadre du « plan d'investissement dans les compétences ».

En 2018, ce plan comportera deux volets financés par la mission, pour un montant total s'élevant à 1,3 milliard d'euros en AE et 930 millions d'euros en CP .

a) La montée en puissance de la Garantie jeunes

514,6 millions d'euros en AE et 503,3 millions d'euros en CP sont inscrits au titre du grand plan d'investissement sur la nouvelle action 03 « Plan d'investissement des compétences » du programme 102 « Accès et retour à l'emploi ».

Ces crédits seront consacrés au financement de la Garanties jeunes . Ils étaient auparavant inscrits sur la sous-action 2 « Accompagnement des publics les plus en difficultés » de l'action 02 « Amélioration des dispositifs en faveur de l'emploi des personnes les plus éloignées du marché du travail ».

La Garantie jeunes

La Garantie jeunes est issue du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale de 2013. Elle s'adresse aux jeunes de 18 à 25 ans révolus qui ne sont ni étudiants, ni en emploi, ni en formation (NEET) et pour lesquels il existe un risque d'exclusion sociale.

Lancée dans 10 départements en 2013, l'expérimentation a été étendue à 62 nouveaux départements en 2015. En 2016, 19 départements supplémentaires devraient rejoindre le dispositif, soit un total de 91 départements.

L'article 46 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a prévu la généralisation de la Garantie jeunes à compter du 1 er janvier 2017.

Aux termes de l'article L. 5131-6 du code du travail, « la garantie jeunes est une modalité spécifique du parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie ». Elle constitue « un droit ouvert aux jeunes de seize à vingt-cinq ans qui vivent hors du foyer de leurs parents ou au sein de ce foyer sans recevoir de soutien financier de leurs parents, qui ne sont pas étudiants, ne suivent pas une formation et n'occupent pas un emploi et dont le niveau de ressources ne dépasse pas un montant fixé par décret , dès lors qu'ils s'engagent à respecter les engagements conclus dans le cadre de leur parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie ».

La Garantie jeunes comporte deux volets : un accompagnement intensif en principe mis en oeuvre par les missions locales et une allocation versée par ces dernières. Son montant est fixé à 480,02 euros. Cette aide est cumulable avec des revenus d'activité s'ils ne dépassent pas le plafond de 300 euros par mois. Au-delà de ce plafond, l'allocation est dégressive et n'est plus versée lorsque le total des ressources atteint 1 184,21 euros.

Le coût total de la Garantie jeunes pour 2018 s'élèvera à 515 millions d'euros en AE et 503 millions d'euros en CP , dont 160 millions d'euros en AE et 147 millions d'euros en CP au titre de l'accompagnement et 355 millions d'euros en AE comme en CP au titre de l'allocation.

Ces crédits permettront de financer la montée en puissance du dispositif. Il est ainsi prévu que 100 000 jeunes soient accompagnés contre 85 000 environ en 2017 .

L'effort net lié à la mise en place du grand plan d'investissement ne s'élève par conséquent qu'à 16 millions d'euros en AE et 83 millions d'euros en CP, dans la mesure où les crédits consacrés à la Garantie jeunes étaient déjà portés par le programme 102 .

Dans un rapport intermédiaire de novembre 2016, le comité scientifique chargé de l'évaluation de la Garantie jeunes dresse un bilan positif des premières années de mise en oeuvre de ce dispositif .

Le comité note en particulier que la Garantie jeunes « semble avoir atteint le public cible » : « leur niveau de qualification est faibl e (plus des trois-quarts des jeunes entrés dans les premières vagues avaient ainsi un niveau de diplôme inférieur au baccalauréat, et un cinquième d'entre eux avait quitté le système scolaire à l'âge de 16 ans ou avant) ; plus d'un quart vivent dans un quartier prioritaire de la ville (QPV) ou dans une zone urbaine sensible (Zus) . Plus d'un quart (27 %) déclarent que lorsqu'ils étaient au collège, la situation financière de leurs parents était difficile ou très difficile et la même proportion (27%) indiquent que leurs parents devaient faire attention. 33 % ont déjà eu dans leur vie de grosses difficultés de logement, ne sachant pas où loger ou dormir et 6 % étaient dans une situation de logement instable ou sans abri dans les mois précédant l'entrée en Garantie Jeunes . 34 % n'ont pas eu de contacts avec leur père au cours des douze derniers mois (21 % ne sont plus en contact et 13 % ont un père décédé ou qu'ils n'ont pas connu). La même proportion de jeunes bénéficiaires (34 %) déclare ne connaître personne qui pourrait les dépanner en cas de problèmes d'argent, et 18 % n'ont personne sur qui compter pour prendre des décisions difficiles ».

Le rapport met en outre en avant les bons résultats enregistrés par ce dispositif en matière d'emploi : « les résultats pour la première cohorte font ressortir des effets positifs sur les taux d'emploi (et notamment en emploi durable), plus particulièrement au moment de la deuxième interrogation (où plus de 80% des bénéficiaires sont déjà sortis du dispositif). L'impact apparaît maximal au début du programme, et dans les mois suivants la sortie : 14 mois en moyenne après l'entrée en Garantie Jeunes, l'impact évalué de la Garantie Jeunes est positif et très significatif : il s'élève à + 6,3 points de pourcentage sur le taux d'emploi total, et + 4,6 points sur le taux d'emploi en emploi durable. Autrement dit, la part des jeunes pré-identifiés dans les territoires pilotes qui sont en emploi est de 40,4 %, au lieu de 34,1 % si la Garantie Jeunes n'avait pas été introduite. De même, leur part en emploi durable est de 20,5 %, au lieu des 15,9 % que l'on aurait constatés sans la Garantie Jeunes ».

b) Le plan de formation et d'accompagnement des demandeurs d'emploi faiblement qualifiés et des jeunes décrocheurs

En 2018, le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » comportera une nouvelle action 03 « Plan d'investissement des compétences » sur laquelle seront inscrits les crédits consacrés à la mise en oeuvre de ce plan. Ces derniers s'élèveront à 752 millions d'euros en AE et 653 millions d'euro en CP .

Deux actions seront ainsi financées :

- la formation des demandeurs d'emploi faiblement qualifiés . Un million d'actions de formation et 250 000 actions de formation ouvertes à distance (FOAD) devraient être financées sur le quinquennat ;

- l'accompagnement et la formation de jeunes décrocheurs . Cette action devrait concerner un million de jeunes supplémentaires. Il est prévu que 470 000 actions de formation et 330 000 actions de préparation aux dispositifs d'alternance soient financées sur la durée du quinquennat.

Ce double dispositif succède au plan « 500 000 formations supplémentaires » mis en oeuvre dans le cadre du plan d'urgence pour l'emploi dont le coût s'était élevé à 987 millions d'euros en AE et 369 millions d'euros en CP en 2016 11 ( * ) et était estimé à 196,5 millions d'euros en CP pour 2017.

Le plan 500 000 formations supplémentaires

Lancé en 2016, le plan « 500 000 formations pour les demandeurs d'emploi » constituait l'un des deux piliers du « plan d'urgence pour l'emploi », avec l'aide à l'embauche dans les TPE/PME. Ce plan comportait quatre volets :

- le doublement des actions de formation pour les personnes en recherche d'emploi, soit 330 000 actions supplémentaires en 2016 ;

- 10 000 validations des acquis de l'expérience pour la qualification et l'emploi des demandeurs d'emploi ;

- 50 000 contrats de professionnalisation pour les demandeurs d'emploi et 70 000 accompagnements de demandeurs d'emploi à la création d'entreprise ;

- un marché national de 25 000 actions pour répondre aux besoins qui n'étaient pas pris en compte par les achats régionaux et pour lever

La mise en oeuvre de ce plan devait reposer sur un partenariat entre l'État, les régions, Pôle emploi et les partenaires sociaux.

Des objectifs étaient fixés par l'État, région par région, pour l'année 2016 en fonction du nombre d'actions de formations engagées l'année précédente. Chaque région pouvait ensuite s'engager sur un nombre de formations supplémentaires dans le cadre d'une convention. Chaque formation supplémentaire ouvrait droit à une prise en charge forfaitaire de 3 000 euros par l'État, en principe versée à la région, dans la limite des cibles fixées en amont. Il revenait ensuite à la région de reverser une partie de cette aide à Pôle emploi, au titre des formations prises en charge par l'opérateur. Les régions pouvaient également demander à l'État de procéder directement à la répartition de sa contribution.

Lorsque les régions ne souhaitaient pas s'engager dans cette démarche, l'État versait directement une contribution à Pôle emploi.

Un bilan provisoire de ce plan a été réalisé dans le courant de l'année 2017.

S'agissant du volet 330 000 formations supplémentaires, les objectifs quantitatifs ont été atteints. En 2016, une hausse de 47 % des entrées en formation (+ 683 000 entrées) a pu être constatée par rapport à 2015. Au total 1 005 000 entrées ont été recensées.

D'un point de vue qualitatif, l'étude souligne que la durée moyenne des formations s'est élevée à 3,8 mois. 39 % d'entre elles étaient certifiantes. Le taux de satisfaction des bénéficiaires apparaît élevé et atteint 87 %. Le taux de retour à l'emploi s'élevait à plus de 51 %, soit un niveau identique à celui constaté en 2015.

S'agissant du volet contrat de professionnalisation, plus de 67 000 contrats ont été prescrits en 2016 pour des demandeurs d'emploi. Au total, près de 186 000 nouveaux contrats ont été conclus, soit le nombre le plus élevé depuis 2014.

Selon le projet annuel de performances pour 2018, il s'en distingue toutefois dans la mesure où il se concentrera sur les formations longues et certifiantes, comportera des actions d'accompagnement des bénéficiaires avant et après leur formation et s'accompagnera d'un effort en matière d'amélioration de la qualité de l'offre de formation.

Au total, l'effort net par rapport à 2017 s'élèvera à 752 millions d'euros en AE et 428 millions d'euros en CP .

La position du rapporteur spécial Emmanuel Capus

Votre rapporteur spécial juge bienvenue la poursuite de la montée en puissance de la Garantie jeunes, dont le bilan, tant du point de vue quantitatif que qualitatif, apparaît positif.

S'agissant du plan de formation des demandeurs d'emploi et des décrocheurs, votre rapporteur spécial estime en effet préférable de mettre l'accent sur la formation de ces derniers pour accroître leur employabilité plutôt que de leur proposer des solutions de court terme comme des contrats aidés .

Au total, même si une partie des crédits consacrés au plan d'investissement dans les compétences était déjà portée par la mission « Travail et emploi », l'effort « net » par rapport à 2017 prévu par le Gouvernement est important, de l'ordre de 750 millions d'euros en AE et de 430 millions d'euros en CP .

Votre rapporteur spécial s'interroge toutefois sur les modalités de financement du plan d'investissement dans les compétences dont le coût devrait atteindre 13,8 milliards d'euros sur le quinquennat , alors que dans le même temps la trajectoire pluriannuelle prévue dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 prévoit une diminution significative des crédits de la mission travail et emploi entre 2018 et 2020.

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

Votre rapporteure spéciale approuve la décision du Gouvernement d'accompagner la montée en puissance de la Garantie jeunes, dont la généralisation était prévue par l'article 46 de la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels 12 ( * ) . En effet , ce dispositif enregistre des résultats positifs et il convient par conséquent d'en amplifier la portée . Néanmoins, elle s'interroge sur la capacité des missions locales à le faire.

Elle note également que, dans la mesure où les crédits consacrés à la Garantie jeunes étaient déjà portés par la mission « Travail et emploi », l'effort net n'est que de 16 millions d'euros en AE et 83 millions d'euros en CP .

S'agissant du volet « formation » du plan d'investissement dans les compétences, votre rapporteure spéciale considère que la poursuite des efforts engagés par le précédent Gouvernement dans le cadre du plan « 500 000 formations supplémentaires » va dans le bon sens, en ce qu'il va porter ces efforts sur la qualité des formations. Néanmoins, le risque d'une diminution de bénéficiaires existe puisque les objectifs de 2 millions de formations, lissés sur 5 ans ne représentent que 400 000 personnes réellement suivies.

En outre, elle note le souhait de développer la formation ouverte et à distance, alors que ce type de formation est moins adapté aux décrocheurs et aux personnes les plus éloignées de l'emploi. Il faudra donc être vigilent sur les publics touchés par cette mesure et veiller à leur accompagnement.

Elle s'interroge enfin sur les modalités de financement de ce nouveau plan . En effet, l'évaluation du plan « 500 000 formations supplémentaires » laisse apparaître que l'effort a essentiellement été porté par Pôle emploi. Si la trajectoire inscrite dans le projet de loi de programmation des finances publiques se traduisait par une poursuite de la diminution de la subvention pour charges de service public versée à l'opérateur, celui-ci ne serait certainement pas en capacité de tenir les objectifs ambitieux fixés par le Gouvernement , comme il l'a fait dans le cadre du précédent plan de formation.

4. La fin de l'aide à l'embauche à destination des PME

Créée par le décret n° 2016-40 du 25 janvier 2016 13 ( * ) , l'aide à l'embauche à destination des PME faisait partie du plan d'urgence pour l'emploi.

D'un montant maximum de 4 000 euros , elle était attribuée aux entreprises ou associations de moins de 250 salariés qui embauchaient un salarié, en contrat à durée indéterminée (CDI) ou en contrat à durée déterminée (CDD) de six mois et plus, pour un niveau de salaire pouvant atteindre jusqu'à 1,3 SMIC .

Initialement prévue comme une mesure temporaire n'ayant vocation à s'appliquer qu'aux contrats dont l'exécution débutait entre le 18 janvier 2016 et le 31 décembre 2016, ce dispositif a été prorogé jusqu'au 30 juin 2017.

L'extinction de cette aide explique la majeure partie de la baisse des crédits du programme 103 et de la mission « Travail et emploi ». Les crédits consacrés à cette aide s'élèveront ainsi à 1,1 milliard d'euros en 2018 en CP , afin de couvrir les paiements restant à effectuer au titre des embauches intervenues jusqu'au 30 juin 2017, contre 3,6 milliards d'euros en AE (- 3,6 milliards d'euros) et 1,9 milliard d'euros en CP en 2017 (- 800 millions d'euros) .

Fin juillet 2017, 1,9 million de demandes d'aides ont été reçues par l'Agence de services et de paiement et 1,7 million d'aides ont été validées. Ces demandes concernaient en majorité des embauches en contrats à durée indéterminée (près de 70 % du total).

Les secteurs les plus concernés étaient l'hébergement et la restauration (21 % des demandes), le commerce (18 %), l'industrie (10 %), le bâtiment (9 %), les services administratifs et de soutien (9 %), le secteur sanitaire et social (8 %) et les transports (7 %).

L'impact de cette aide sur les embauches dans les PME est discuté .

Dans une note d'août 2016 basée sur les données enregistrées au premier trimestre 2016 14 ( * ) , la direction générale du Trésor estimait que cette aide devait contribuer à la création de 60 000 emplois pour 2016 . Elle rappelait cependant que le caractère temporaire d'une telle mesure permettait d'en limiter les effets d'aubaine .

Sur la base des données du 1 er semestre 2016, l'Insee 15 ( * ) concluait pour sa part que les données disponibles ne permettaient pas d'évaluer les effets de l'aide sur les embauches, du fait du peu de recul sur le dispositif .

La position du rapporteur spécial Emmanuel Capus

Votre rapporteur spécial rappelle que l'aide à l'embauche à destination des PME constituait un dispositif ponctuel qui ne concernait, au départ, que les contrats dont l'exécution débutait entre le 18 janvier 2016 et le 31 décembre 2016. Le précédent Gouvernement a certes prolongé cette aide mais n'en a pas prévu pour autant la pérennisation .

Par ailleurs, les éléments de bilan communiqués à vos rapporteurs spéciaux apparaissent mitigés. Selon la direction du budget, près de 15 % des entreprises ayant effectué les démarches pour obtenir l'aide ne sont pas allées jusqu'au bout du processus , traduisant un probable effet d'aubaine.

Faute d'évaluation attestant de l'impact positif de cette aide sur les embauches et de l'absence d'effet d'aubaine dans le long terme, et compte tenu de son coût très élevé pour les finances publiques, estimé par le ministère du travail à un montant compris entre 3,5 milliards d'euros et 4 milliards d'euros, votre rapporteur spécial estime que la non-reconduction de cette aide se justifiait .

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

Votre rapporteure spéciale pend acte de la décision du Gouvernement de ne pas reconduire l'aide à l'embauche à destination des PME.

Elle estime qu' une évaluation aurait dû être conduite en 2017 pour mesurer précisément l'impact de cette mesure, que de nombreuses entreprises s'étaient appropriées . Un tel bilan aurait pu permettre de procéder à un ajustement de cette aide, par exemple en la ciblant davantage vers les TPE, afin d'en limiter les effets d'aubaine.

Par ailleurs, certaines entreprises n'étant pas allées au bout de la démarche administrative pour percevoir cette aide, cela pose globalement la question de l'utilité réelle de la baisse du coût du travail dans la lutte contre le chômage.

5. La suppression du contrat de génération

Mis en place par la loi du 1 er mars 2013 16 ( * ) , le contrat de génération visait à la fois à augmenter le taux d'emploi et l'insertion durable des jeunes en emploi, en privilégiant les recrutements en CDI, et le maintien en emploi voire le recrutement de séniors.

Le contrat de génération

Le contrat de génération s'adressait à l'ensemble des entreprises et à leurs salariés selon deux modalités différentes d'incitation :

- les entreprises et groupes de moins de 300 salariés pouvaient bénéficier d'une aide financière d'un montant de 4 000 euros par an pendant trois ans pour le recrutement en CDI de jeunes de moins de 26 ans (ou moins de 30 ans pour les travailleurs reconnus handicapés) et le maintien dans l'emploi de salariés de 57 ans ou plus (ou recrutés à partir de 55 ans) ou de 55 ans et plus pour les travailleurs reconnus handicapés ;

- les entreprises et groupes de 300 salariés et plus étaient invités à négocier un accord d'entreprise reprenant les enjeux du contrat de génération, sous peine de devoir verser une pénalité financière.

L'article 20 de la loi relative à la formation professionnelle, l'emploi et la démocratie sociale du 5 mars 2014 a modifié les dispositions relatives au contrat de génération afin d'en faciliter l'accès :

- s'agissant de l'aide financière, dans le cadre de la transmission d'entreprises de moins de 50 salariés, la limite d'âge maximale pour le jeune a été relevée de 26 à 30 ans ;

- pour les entreprises de 50 à 299 salariés, ou appartenant à un groupe de 50 à 299 salariés, les conditions d'accès direct à l'aide ont été alignées sur celles prévues pour les entreprises de moins de 50 salariés, sans nécessité de négociation préalable.

Dans un souci d'élargissement de l'accès à l'aide, le décret n° 2014-1046 du 12 septembre 2014 portant majoration de l'aide accordée au titre du contrat de génération avait renforcé l'incitation à recruter un jeune ainsi qu'un sénior puisque l'aide financière était doublée en cas de double recrutement.

Parallèlement, ces entreprises étaient incitées à négocier sur le contrat de génération : elles devaient ainsi être couvertes par un accord ou plan d'action d'entreprises, ou un accord de branche. Cet accord, ou plan d'action, était valable trois ans et devait comporter des mesures visant à favoriser :

- l'insertion durable des jeunes dans l'emploi (modalité d'intégration, de formation, de l'entretien de suivi, la désignation d'un référent, etc.) ;

- l'emploi des salariés expérimentés (prévention de la pénibilité, coopération intergénérationnelle, formation, etc.) ;

- la transmission des savoirs et des compétences (binôme d'échange, diversité des âges dans les équipes de travail).

S'agissant du volet négociation , les résultats apparaissent mitigés. Si le projet annuel de performances 2018 relève que « la question des âges apparaît désormais bien intégrée dans les entreprises », la Cour des comptes note quant à elle que les négociations collectives se sont généralement révélées « incomplètes et peu ambitieuses » 17 ( * ) .

S'agissant du volet financier , un recours limité au dispositif a pu être constaté, 63 972 contrats ayant été enregistrés depuis 2013, pour un objectif initial de 500 000 .

Ce dispositif a par conséquent été supprimé par l'article 9 de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail à compter du 24 septembre 2017 .

L'aide financière continuera cependant d'être versée aux employeurs en ayant fait la demande avant le 23 septembre 2017.

La position du rapporteur spécial Emmanuel Capus

Votre rapporteur spécial estime que la suppression du contrat de génération était logique compte tenu du très faible succès rencontré par ce dispositif .

Moins de 64 000 contrats ont ainsi été enregistrés depuis sa création, pour un objectif initial fixé à 500 000 .

Votre rapporteur spécial estime néanmoins qu'une évaluation précise des causes de cet échec serait profitable pour éclairer une nouvelle réflexion à mener sur la gestion intergénérationnelle de l'emploi, le maintien en emploi des seniors et la transmission des savoirs .

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

Votre rapporteure spéciale considère que, compte tenu du faible succès rencontré par le contrat de génération, s'interroger sur sa prorogation n'était pas illégitime.

Elle estime cependant que la problématique de l'emploi des séniors demeure d'actualité dans la mesure où le taux d'emploi des séniors demeure faible (50,7 % des 55-64 ans). Le nombre de demandeurs d'emplois de plus de 50 ans, en un an, a augmenté de 6 % et a été multiplié par trois en dix ans. La durée moyenne d'inscription à Pôle emploi de ces demandeurs d'emplois est de 671 jours contre 353 pour les autres. Par ailleurs, les départs anticipés de séniors nuisent gravement à la transmission des connaissances et savoir-faire dans de nombreuses entreprises.

Or, dans sa réponse au questionnaire de vos rapporteurs spéciaux, le ministère du travail indique simplement que la question de la « gestion des âges » sera « réintégrée aux accords GPEC [gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences] de droit commun, de façon à simplifier les démarches des entreprises ». Votre rapporteure spéciale estime par conséquent que des mesures d'envergure devraient être prises sur cette importante question .

6. Les dispositions concernant l'apprentissage

Selon le projet annuel de performances du CAS « FNDMA », le nombre d'apprentis devrait atteindre 430 000 en 2018, contre 420 000 en prévision actualisée pour 2017. Cette dernière s'élevait à 500 000 dans le projet annuel de performances pour 2017.

a) Dispositifs d'exonérations

Destinés aux jeunes de 16 à 25 ans (certaines dérogations peuvent être accordées pour les jeunes âgés de 15 à 30 ans), les contrats d'apprentissage prennent la forme d'un CDD ou d'un CDI. Ils permettent à l'apprenti de suivre une formation en alternance en entreprise sous la responsabilité d'un maître d'apprentissage et en centre de formation des apprentis (CFA) pendant 1 à 3 ans. Ils sont exonérés de cotisations sociales et bénéficient d'un abattement de 11 points sur l'ensemble des cotisations légales et conventionnelles. Le budget 2018 prévoyant un léger rebond de l'apprentissage l'année prochaine, le montant des crédits consacrés au financement de cette exonération sera supérieur à celui inscrit en loi de finances pour 2017 (1,28 milliard d'euros en AE et en CP en 2018, contre 1,25 milliard d'euros en 2017) .

b) L'aide TPE jeunes apprentis, une mesure dont les effets sur les entrées en apprentissage semblent positifs et dont le maintien apparaît bienvenu

Annoncée par le Président de la République François Hollande le 9 juin 2015 dans le cadre d'un plan de mobilisation pour l'apprentissage et créée par le décret n° 2015-773 du 29 juin 2015 18 ( * ) , l'aide en faveur des très petites entreprises embauchant des jeunes apprentis concerne l'ensemble des embauches d'apprentis de moins de 18 ans par les entreprises de moins de 11 salariés . Elle vise à couvrir l'intégralité de la rémunération versée jusqu'à un montant de 4 400 euros par an. Cette aide est versée trimestriellement par l'Agence de services et de paiement à hauteur de 1 100 euros par trimestre exécuté du contrat.

Au 15 août 2017, 110 000 demandes de prises en charge ont été déposées par les employeurs, correspondant à un taux de recours à l'aide de 73 % .

Dans ses réponses au questionnaire budgétaire, le ministère du travail note que « l'effet de cette mesure paraît positif , au regard des entrées de mineurs en apprentissage constatées dans les entreprises de moins de 11 salariés lors de la campagne 2015-2016 (juin à mai) ». 80 500 contrats de mineurs ont ainsi été enregistrés , soit « 12 % de plus que lors de la campagne précédente sans l'aide en question ».

Compte tenu de l'augmentation attendue du nombre d'apprentis éligibles (55 200 en 2018 contre 50 000 initialement prévus et 54 400 attendus en 2017), les crédits consacrés à cette aide s'élèveront à 227 millions d'euros en AE (+ 32,5 millions d'euros, soit une augmentation de plus de 16 % par rapport à 2017) et de 195 millions d'euros en CP (+ 59,3 millions d'euros en CP, soit une augmentation de près de 44 % par rapport à 2017) .

La position des rapporteurs spéciaux

L'augmentation des crédits consacrés au financement de l'aide en faveur des très petites entreprises embauchant des jeunes apprentis, qui s'élèveront à 227 millions d'euros en AE et 195 millions d'euros en CP, est justifiée. En effet, cette aide semble avoir un impact positif sur le recrutement d'apprentis par les très petites entreprises - plus particulièrement dans les secteurs de l'industrie manufacturière (notamment la boulangerie-pâtisserie, le commerce, la construction, le bâtiment et l'hébergement restauration - pour lesquelles le coût d'un salaire constitue souvent un obstacle au recrutement .

L'éventuel effet d'aubaine d'un tel dispositif apparaît par conséquent limité , l'aide ayant un caractère déterminant dans la décision d'embaucher.

c) La non-reconduction de l'aide financière en faveur des jeunes apprentis

Mise en place par le décret n° 2017-267 du 28 février 2017 19 ( * ) , l'aide financière en faveur des jeunes apprentis était versée aux jeunes de moins de 21 ans ayant conclu un contrat d'apprentissage débutant entre le 1 er juin 2016 (de manière rétroactive) et le 31 mai 2017 . Son montant était forfaitaire et s'élevait à 335 euros .

Dans ses réponses au questionnaire budgétaire, le ministère du travail note que « 190 994 courriers ont été envoyés aux apprentis au titre de contrats 2016 et 156 676 de ces apprentis ont imprimé leur formulaire à partir du portail en ligne, soit un taux de recours (définitif, le portail ayant fermé au 31 mai pour les contrats 2016) de 82 %. Concernant les contrats 2017, au 11 septembre 2017, 6 287 courriers ont été envoyés et 4 200 apprentis concernés ont déjà imprimé leur formulaire à partir du portail en ligne ».

80 millions d'euros en AE comme en CP étaient inscrits à ce titre sur le programme 103 en 2017 .

Cette aide ne sera pas reconduite en 2018.

La position du rapporteur spécial Emmanuel Capus

Votre rapporteur spécial rappelle que l'aide financière en faveur des jeunes apprentis créée par le décret du 28 février 2017 ne concernait que les contrats conclus entre le 1 er juin 2016 et le 31 mai 2017 et n'avait donc pas vocation à être prolongée au-delà de cette date .

Il s'interroge en outre sur la finalité réelle de cette aide temporaire, opportunément mise en place à l'approche des échéances électorales de 2017 .

Plutôt que la multiplication de mesures ponctuelles, dont le coût n'est pas négligeable pour les finances publiques, il considère qu'une réflexion plus large sur l'apprentissage et la formation professionnelle - comme celle qui lancée à l'automne par le Gouvernement et qui devrait aboutir à un projet de loi présenté avant le début du printemps 2018 - s'avère plus pertinente .

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

Votre rapporteure spéciale regrette la suppression de l'aide financière en faveur des jeunes apprentis.

En effet, comme le montre le taux très élevé de recours, de l'ordre de 82 % pour les contrats conclus en 2016, cette aide constituait un complément de revenu utile pour des jeunes dont le pouvoir d'achat apparaît faible .

Le salaire minimal des apprentis, qui dépend de l'âge et de l'année d'étude, est compris entre 370 euros et 1 155 euros . Selon la Dares 20 ( * ) , le salaire net moyen des apprentis s'élevait ainsi en 2014 à 869 euros par mois .

Cette décision constitue un très mauvais signal alors que le Gouvernement prétend dynamiser l'apprentissage, dont l'image est parfois peu valorisée.

Salaire minimal des apprentis au 1 er juillet 2017

(en pourcentage du Smic et en euros
pour un temps complet de 151,67 heures mensuelles)

Source : https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/F32038

D'une manière générale, votre rapporteure spéciale regrette le manque de volontarisme du Gouvernement en matière d'apprentissage , le présent projet de loi de finances ne comprenant aucune mesure nouvelle destinée au soutien à l'apprentissage. Au-delà, les baisses de crédits à destination des chambres de commerce et d'industrie apparaissent comme un mauvais signal. Il apparaît par conséquent indispensable que le projet de loi relatif à la formation professionnelle et à l'apprentissage, qui devrait être discuté dans le courant de l'année 2018, contienne des mesures destinées à faciliter le recrutement d'apprentis par les entreprises et à améliorer les conditions de vie et de travail de ces jeunes, ce type de formations constituant une voie d'accès privilégiée vers l'emploi 21 ( * ) .

7. Les mesures en faveur de l'amélioration des conditions de travail
a) La santé au travail

Les crédits de la mission « Travail et emploi » au titre de la santé au travail sont portés par l'action 01 « Santé et sécurité au travail » du programme 111 « Amélioration de l'emploi et des relations du travail ».

Cette action sera dotée de 24,4 millions d'euros en AE et de 24,1 millions d'euros en CP .

Ces crédits sont principalement destinés au versement d'une subvention pour charges de services publics de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et de l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact), dont le programme 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et d relations du travail » est chef de file.

L'Anact bénéficiera ainsi d'une subvention s'élevant à 11,5 millions d'euros, contre 11,8 millions d'euros l'an passé.

Ses effectifs devraient être en légère diminution et atteindre à 83 ETPT, contre 84 ETPT en 2017.

La position du rapporteur spécial Emmanuel Capus

Votre rapporteur spécial considère que l'action de l'Anact est importante pour l'amélioration des conditions de travail, en particulier dans les domaines de l'organisation du travail et des relations professionnelles.

La diminution des crédits consacrés à cette agence, de l'ordre de 300 000 euros en 2018, se traduira, d'une part, par une diminution de son fonds de roulement, dont le montant atteignait 2,9 millions d'euros en 2017 et, d'autre part, par un baisse de ses effectifs (de l'ordre d'un à deux emplois).

Votre rapporteur spécial estime que cette diminution ne devrait pas bouleverser l'activité de l'agence. Il considère en outre qu'un rapprochement avec l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS), dont le champ d'activités apparaît complémentaire du sien, pourrait être utilement étudié .

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

Votre rapporteure spéciale estime que la diminution des crédits consacrés à l'Anact procède de la mise en oeuvre d'une politique de courte vue . En effet, l'agence joue un rôle fondamental dans le développement de la prévention des nouveaux risques professionnels, en particulier psycho-sociaux. Or, selon une étude de l'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (EU-Osha) 22 ( * ) , un euro dépensé dans le domaine de la santé au travail se traduit pour les entreprises par une économie de treize euros .

Dans un contexte de profondes mutations du monde du travail, qui bouleversent les relations professionnelles, il apparaît plus que jamais indispensable de préserver l'action d'institutions comme l'Anact .

b) La poursuite de la réforme du service de l'inspection du travail, dont les missions ont été recentrées autour de trois priorités

L'inspection du travail a pour mission de « veiller à l'application de la législation du travail, droit d'origine légale ou conventionnelle dans les entreprises, ainsi que des autres dispositions qui régissent les relations et conditions de travail dans les secteurs de l'agriculture, des transports, et des activités maritimes ».

Dans le cadre du plan « ministère fort » lancée fin 2012, le service public de l'inspection du travail a fait l'objet d'importantes réformes. Il prévoyait en particulier la transformation progressive des emplois de contrôleur du travail (catégorie B) dans le corps de l'inspection du travail (catégorie A), par la mise en place d'un concours réservé .

Évolution des effectifs de l'inspection du travail

(en ETP)

Corps

2012

2013

Évolution
(en %)

2014

Évolution
(en %)

2015

Évolution
(en %)

2016

Évolution
(en %)

Inspection du travail

1 713,16

1 793,50

4,7 %

2 006,60

11,9 %

2 203,30

9,8 %

2 374,50

7,8 %

Dont administration centrale

66,66

69,10

3,7 %

65,10

- 5,8 %

64,50

- 0,9 %

72,70

12,7 %

Dont DIRECTTE

1 646,50

1 724,40

4,7 %

1 941,50

12,6 %

2 138,80

10,2 %

2 301,80

7,6 %

Contrôleurs du travail

3 201,90

2 960,70

- 7,5 %

2 628,20

- 11,2 %

2 292,20

- 12,8 %

1 906,20

- 16,8 %

Dont administration centrale

7,80

11,80

51,3 %

9,60

- 18,6 %

14,60

52,1 %

12,60

- 13,7 %

Dont DIRECTTE

3 194,10

2 948,90

- 7,7 %

2 618,60

- 11,2 %

2 277,60

- 13,0 %

1 893,60

- 16,9 %

Total

4 915,06

4 754,20

- 3,3 %

4 634,80

- 2,5 %

4 495,50

- 3,0 %

4 280,70

- 4,8 %

Source : réponse au questionnaire budgétaire

L'activité de l'inspection du travail se concentre majoritairement autour de trois priorités :

- la santé et la sécurité au travail ;

- la lutte contre le travail illégal et la fraude au détachement ;

- les relations individuelles et collectives du travail, notamment la préservation des droits des salariés.

Ces priorités, déclinées en axes prioritaires, ont ainsi donné lieu à :

- 7 660 interventions, qui ont concerné la lutte contre le « risque amiante » ;

- 12 340 interventions, qui ont eu lieu dans le champ de la prévention des risques de chute de hauteur ;

- 6 000 interventions, qui ont concerné des prestations de service internationales ;

- 16 096 interventions, qui ont concerné la lutte contre travail illégal ;

- 1 500 interventions, qui ont eu lieu dans le champ de l'égalité professionnelle ;

- 2 200 interventions, qui ont concerné des actions spécifiques en direction des TPE.

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

La baisse des effectifs observée, se traduira certainement par une dégradation de la qualité des politiques publiques mises en oeuvre par les services concernés . Suite à l'application des ordonnances « Travail », la multiplication des sources de droit (accord de branches, d'entreprises sur de nouveaux sujets) va rendre les dossiers plus complexes, avec un niveau de qualité juridique des textes qui sera certainement hétérogène. L'extension des accords possibles au niveau des entreprises va très certainement augmenter très significativement le nombre de demandes de renseignements émanant des salariés sans que de nouveaux moyens puissent y être consacrés, alors qu'il s'agit là d'une mission essentielle de l'inspection du travail.

D'autre part, la création des amendes administratives, censées rendre plus efficaces les contrôles puisque permettant d'éviter systématiquement le recours au juge après procès-verbal est un point positif, mais a généré une augmentation substantielle de la charge de travail (traitement des demandes d'amendes administratives, avec une procédure de validation au niveau régional), qui n'est pas compensée par la création de nouveaux postes.

Ainsi, le projet « Ministère fort », parce qu'il a été conjugué aux évolutions récentes du droit du travail et aux baisses d'effectifs constantes, risque de nuire à la qualité du service public rendu par l'inspection du travail.

8. Les mesures en faveur de l'emploi des personnes handicapées

377 millions d'euros sont inscrits au sein de l'action 02 « Amélioration des dispositifs de l'emploi des personnes les plus éloignées du marché du travail » du programme 102 « Accès et retour à l'emploi » afin de financer différentes mesures en faveur de l'emploi des personnes handicapées , dont :

- 338,47 millions d'euros pour le financement de 24 036 aides au poste dans les entreprises adaptées ;

- 33,34 millions d'euros pour le financement de la subvention spécifique versée aux entreprises adaptées, qui vise à compenser les surcoûts liés à l'emploi majoritaire de personnes handicapées ;

- 5 millions d'euros pour le financement de mesures particulières en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés (aides individuelles, programmes régionaux pour l'insertion des travailleurs handicapés).

Les crédits consacrés aux aides au poste devraient ainsi progresser de plus de 3 millions d'euros en 2018 afin de permettre le financement de 1 000 aides supplémentaires . Il convient de rappeler que cette dépense intègre une économie de 8 millions d'euros liée à la modification des modalités de financement de l'aide au poste à compter du 1 er juillet 2018.

La dépense en faveur de la subvention d'accompagnement et de développement versée aux entreprises adaptées devrait quant à elle diminuer de plus de 7 millions d'euros par rapport à 2017. Cette diminution est liée à une modification à venir des modalités de calcul de cette subvention .

La position de vos rapporteurs spéciaux

Vos rapporteurs spéciaux prennent acte de l'augmentation prévue en 2018 du nombre d'aides au poste financées, à hauteur de 1 000 aides supplémentaires, cependant réalisée sur la base d'une diminution de l'aide unitaire. Les crédits consacrés à l'emploi des personnes handicapées devraient ainsi progresser de l'ordre de 3 millions d'euros par rapport à 2017.

Ils considèrent en outre que des évolutions en matière de financement de l'aide au poste et de versement de la subvention spécifique versée aux entreprises adaptées, qui iraient dans le sens d'une plus grande lisibilité de celles-ci, peuvent se justifier . En particulier, les multiples critères pris en compte pour le calcul du montant de la subvention spécifique (montant des investissements, âge des personnes employées, prime de mobilité professionnelle, etc.) constituent une source de complexité pour ces entreprises.

Vos rapporteurs spéciaux constatent cependant que les modalités précises de ces réformes ne sont pas encore connues et suscitent l'inquiétude des acteurs du secteur.

C'est pourquoi ils considèrent qu'une grande vigilance est de mise afin d'éviter qu'elles ne se traduisent par une dégradation de l'emploi des personnes handicapées et par une fragilisation des entreprises adaptées, dont l'utilité sociale est incontestable .

9. La poursuite de la maîtrise des effectifs et de la masse salariale

Les dépenses de personnel (titre 2) s'élèveront à 621,4 millions d'euros en AE comme en CP, soit une diminution de 8 millions d'euros par rapport à 2017 (- 1,3 %).

Entre 2009 et 2018, les dépenses de titre 2 devraient progresser de près de 8 % contre 9 % pour l'État. La part représentée par la mission dans le total des dépenses de personnel de l'État est stable sur la période (0,5 %).

Évolution des dépenses de personnel
de la mission « Travail et emploi » et de l'État

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat

Hors contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions », les dépenses de personnel diminueront de près 2 millions d'euros, passant de 433,5 millions d'euros à 431,7 millions d'euros.

Il convient de noter que le présent projet de loi de finances prévoit 1,7 millions d'euros au titre des mesures catégorielles, hors contribution au CAS « Pensions », dont un million d'euros au titre de la mise en oeuvre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) .

Or l'annonce par le ministre de l'action et des comptes publics du report des mesures prévues pour 2018 lors du rendez-vous salarial du 16 octobre 2017 pourrait se traduire par une diminution à due concurrence des crédits de la mission « Travail et emploi » .

Facteurs d'évolution des dépenses de personnel
hors contribution au CAS « Pensions »

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Cette évolution résulte notamment de l'impact des schémas d'emploi 2017 et 2018, qui devrait se traduire par la baisse des effectifs de la mission à hauteur de 150 ETP (équivalents temps plein) en 2017 et de 239 ETP en 2018.

Corrélativement, le plafond d'emplois de la mission devrait diminuer à hauteur de 184 ETPT, passant de 9 523 ETPT (équivalents temps plein travaillé) à 9 251 ETPT. Cette évolution résulte de plusieurs phénomènes :

- l'extension en année pleine du schéma d'emplois 2017 sur 2018 (- 46 ETPT) ;

- l'impact du schéma d'emplois 2018 (- 138 ETPT) ;

- la réduction de la taille des cabinets ministériels (- 30 ETPT) ;

- mesures de périmètres (- 58 ETPT).

Entre 2009 et 2018, le plafond d'emplois de la mission aura ainsi diminué de près de 13 %, quand celui de l'État aura progressé de près de 7 % sur la même période.

Évolution du plafond d'emplois de la mission « Travail et emploi » et de l'État

(en ETPT et en %)

Source : commission des finances du Sénat

La position du rapporteur spécial Emmanuel Capus

Votre rapporteur spécial estime que la poursuite de l'effort en matière d'effectifs et de masse salariale va dans le bons sens . Le plafond d'emplois de la mission devrait ainsi diminuer pour la cinquième année consécutive, se traduisant par une diminution des dépenses de personnel de l'ordre de 8 millions d'euros.

La position de la rapporteure spéciale Sophie Taillé-Polian

Votre rapporteure spéciale s'interroge sur la nature des services affectés par ces diminutions, sur la catégorie de fonctionnaires concernés, sur les conséquences de cette diminution du plafond d'emploi, notamment sur les conditions de travail des agents, sur le déroulement de leur carrière et sur les services rendus aux usagers. Interrogé sur ce sujet, le cabinet de la ministre du travail n'a pas pu apporter de précisions.

10. Une installation en 2018 des nouveaux conseillers prud'hommes se traduisant par des dépenses de formation s'élevant à 13,7 millions d'euros

La loi du 18 décembre 2014 23 ( * ) , modifiée par l'article 8 de la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi 24 ( * ) , a autorisé le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance, dans un délai de 18 mois à compter de sa promulgation, les dispositions pour mettre en place de nouvelles modalités de désignation des conseillers prud'hommes à partir de 2017.

L'ordonnance n° 2016-388 du 31 mars 2016 relative à la désignation des conseillers prud'hommes, ratifiée par la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a défini les principes de ce nouveau mode de désignation :

- un renouvellement général ayant lieu tous les quatre ans, à l'issue du cycle de mesure de l'audience syndicale et patronale ;

- un total de 14 512 sièges ;

- les organisations ayant obtenu des sièges présentent des listes de candidats par conseil, collège et section avec respect de la parité femmes/hommes, par conseil et collège ;

- ces candidatures font l'objet d'un examen de recevabilité par les services du ministère du travail et du ministère de la justice.

La publication d'un arrêté interministériel des ministres chargés du travail et de la justice est prévue en décembre 2017 pour nommer les conseillers prud'hommes en vue de leur installation en janvier 2018.

Or, conformément aux dispositions de l'article L. 1442-1 du code du travail, il revient à l'État de prendre en charge les coûts de formation des conseillers prud'hommes.

13,7 millions d'euros sont inscrits à ce titre dans le présent projet de loi de finances, contre 7,3 millions d'euros en 2017, permettant le financement de 68 500 jours de formation.

11. La mise en place des défenseurs syndicaux

Créé par l'article 258 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économ iques 25 ( * ) , le défenseur syndical fait l'objet des articles L. 1454-3 et suivants du code du travail.

Aux termes de l'article L. 1454-3 précité, le défenseur syndical est chargé d' « exercer des fonctions d'assistance ou de représentation devant les conseils de prud'hommes et les cours d'appel en matière prud'homale ».

Au 1 er avril 2017, 4 605 défenseurs syndicaux étaient recensés sur les listes préfectorales, dont 59 défenseurs syndicaux employeurs.

7,8 millions d'euros en AE comme en CP sont inscrits au sein de l'action 02 « Qualité et effectivité du droit » du programme 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail ». Ces crédits permettront notamment de financer le remboursement aux employeurs du maintien du salaire pendant les heures de délégation pour l'exercice de leurs fonctions, dans les établissements d'au moins onze salariés et dans la limite de 10 heures par mois, conformément aux dispositions de l'article L. 1453-6 du code du travail.

12. La mesure d es audiences syndicales et patronales

L'année 2017 a vu la réalisation du deuxième cycle de mesure de l'audience syndicale (achevé en mars 2017) et du premier cycle de mesure de l'audience patronale (achevé en avril 2017), qui constituent l'un des principaux critères de la mesure de la représentativité ( cf . graphiques ci-après).

Règles de représentativité des organisations syndicales

Source : commission des finances du Sénat

Règles de représentativité des organisations patronales

Source : commission des finances du Sénat

S'agissant des organisations syndicales, l'arrêté du 22 juin 2017 a confirmé la représentativité de la CFDT, de la CGT, de la CGT-FO, de la CFE-CGC et de la CFTC au niveau national et interprofessionnel. Par ailleurs, 184 arrêtés de représentativité au niveau des branches professionnelles ont été pris. L'intégralité des arrêtés de représentativité devrait être prise d'ici la fin de l'année 2017.

S'agissant des organisations patronales, par arrêté du 22 juin 2017, ont été déclarés représentatifs au niveau national et interprofessionnel : le MEDEF, la CPME et l'U2P. 178 arrêtés de représentativité ont été pris au niveau des branches professionnelles. Les arrêtés fixant la liste des organisations représentatives au niveau national et multiprofessionnel devraient être publiés d'ici la fin de l'année.

Le présent projet de loi de finances prévoit 2,49 millions d'euros en AE et 2,38 millions d'euros en CP au titre du financement du troisième cycle de la mesure de l'audience syndicale (2017-2020).

LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements :

- avec l'avis favorable de la commission des finances, un amendement du Gouvernement visant à abonder les crédits du programme 103 à hauteur de 180 millions d'euros en AE et 11,7 millions d'euros en CP afin de permettre le financement de l'expérimentation des emplois francs (cf. commentaire de l'article 66) ;

- avec un avis de sagesse de la commission des finances et un avis favorable du Gouvernement, un amendement de notre collègue député Bruno Fuchs (apparenté au groupe Mouvement Démocrate et apparentés) et de plusieurs de ses collègues, visant à abonder les crédits du programme 102 à hauteur de 1,5 million d'euros en AE comme en CP afin d'accompagner financièrement les maisons de l'emploi dont la valeur ajoutée aura été démontrée. Cette dépense supplémentaire est gagée sur l'action 02 « Amélioration de l'insertion dans l'emploi par l'adaptation es qualifications et la reconnaissance des compétences » du programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi ».

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté, avec l'avis favorable de sa commission des finances, un amendement du Gouvernement visant à diminuer les crédits de la mission à hauteur de 15,2 millions d'euros en AE comme en CP . Cette baisse résulte :

- d'une hausse de 2,1 millions d'euros des crédits du programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail » liée, d'une part, à une majoration de 3,1 millions d'euros des crédits de titre 2 au titre du coût de la mise en place d'une indemnité destinée à compenser la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) pour les agents publics et, d'autre part, une minoration de 1 million d'euros, correspondant à l'économie résultant du décalage du calendrier de mise en oeuvre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) ;

- d'économies supplémentaires à hauteur de 17,3 millions d'euros, dont 13,2 millions d'euros sur le programme 102 » Accès et retour à l'emploi » et 4 millions d'euros sur le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi ».

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

ARTICLE 66 (nouveau) - Expérimentation des emplois francs

Commentaire : le présent article prévoit le lancement d'une expérimentation des « emplois francs » entre le 1 er avril 2018 et le 31 décembre 2019.

I. LE DROIT EXISTANT

Lancée à la fin du mois de juin 2013 , l'expérimentation « emplois francs » poursuivait deux objectifs : lutter contre le chômage des jeunes des zones urbaines sensibles et contre les discriminations à l'embauche.

Aux termes du décret du 26 juin 2013 26 ( * ) , ce dispositif s'adressait aux jeunes de moins de 30 ans , diplômés ou non diplômés, résidant en zone urbaine sensible depuis au moins six mois consécutifs et faisant état d'une durée de recherche d'emploi d'au moins douze mois au cours des dix-huit derniers mois .

Il prenait la forme d' une aide forfaitaire de 5 000 euros, versée en deux fois par Pôle emploi .

Les employeurs bénéficiaires de cette aide relevaient prioritairement du secteur marchand (quel que soit leur lieu d'implantation) et s'engageaient à embaucher un jeune répondant aux conditions d'éligibilité, sous contrat à durée indéterminée et à temps plein .

Initialement déployé dans les zones urbaines sensibles de dix intercommunalités, il a été étendu à 33 sites supplémentaires à l'automne 2013.

L'objectif initial était la signature de 5 000 contrats en 2014. Or, au 29 août 2014, environ 280 emplois francs seulement avaient été créés.

Au cours du deuxième trimestre 2014, une mission a été confiée au préfet Jean-François Carenco, préfet de la région Rhône-Alpes, pour identifier les freins à la montée en charge du dispositif. Quatre limites principales ont ainsi été relevées :

- un public cible limité : peu de jeunes étaient en mesure de justifier d'une recherche d'emploi d'une durée d'au moins 12 mois au cours des 18 derniers mois ;

- des conditions d'embauche contraignantes par rapport aux autres contrats aidés et aux pratiques du marché du travail : les embauches de jeunes directement en CDI sont rares, en particulier pour des jeunes éloignés de l'emploi ;

- un montant d'aide peu incitatif au regard des conditions exigées et des autres contrats aidés ;

- des systèmes d'information ne permettant pas aux structures chargées de l'accompagnement des jeunes (missions locales, Pôle emploi, etc.) d'identifier instantanément les personnes localisées dans les zones urbaines sensibles .

Le précédent Gouvernement n'ayant pas souhaité prolonger ce dispositif, y compris en y apportant des ajustements, le décret du 2 juillet 2015 27 ( * ) a mis fin à cette expérimentation.

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le I du présent article est issu d'un amendement du Gouvernement, sous-amendé par notre collègue Stéphane Viry (Les Républicains) 28 ( * ) , et adopté par l'Assemblée nationale avec l'avis favorable de la commission des finances.

Il prévoit la mise en place d'une nouvelle expérimentation des emplois francs entre le 1 er avril 2018 et le 31 décembre 2019.

Ce dispositif est destiné aux entreprises embauchant un demandeur d'emploi résidant dans l'un des quartiers prioritaires de la politique de la ville , dont la liste doit être fixée par arrêté des ministres chargés de l'emploi, de la ville et du budget, en contrat à durée indéterminée ou déterminée d'une durée d'au moins six mois .

Les conditions de mise en oeuvre de ce dispositif sont définies par décret (second alinéa du I du présent article).

Le II du présent article prévoit qu'un rapport procédant à l'évaluation de cette expérimentation est remis au Parlement au plus tard le 15 décembre 2019.

Le coût de ce dispositif est estimé à 180 millions d'euros en AE et 11,7 millions d'euros en CP en 2018. Le coût global de l'expérimentation est quant à lui estimé à 458 millions d'euros en AE et 307 millions d'euros en CP sur la période 2018-2022.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UNE SITUATION ÉCONOMIQUE ET SOCIALE DANS LES QUARTIERS PRIORITAIRES QUI DEMEURE PRÉOCCUPANTE

Selon l'Observatoire national de la politique de la ville 29 ( * ) , le taux de chômage des 15-64 ans résidant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville s'élevait à 26,4 % en 2015 .

Taux de chômage en quartiers prioritaires

(en %)

Source : Observatoire national de la politique de la ville, Rapport 2016, 6 avril 2017

Au deuxième trimestre 2017, le nombre de demandeurs d'emploi s'élevait pour la seule catégorie A à 533 500 personnes, à 760 200 personnes pour les catégories A, B et C, et à 835 400 personnes pour les catégories A, B, C, D et E.

Au total, comme le rappelle l'Insee dans une note de 2016 30 ( * ) , « en France métropolitaine, 4,8 millions de personnes vivent dans les 1 300 quartiers de la politique de la ville . La population de ces quartiers, de par leur définition même, est fréquemment touchée par la pauvreté . Les habitants sont plus jeunes qu'en moyenne dans la population urbaine. Il s'agit également plus souvent de familles nombreuses ou monoparentales ou d'étrangers . Au-delà de la pauvreté monétaire, la population des quartiers de la politique de la ville présente des fragilités dans plusieurs domaines. Notamment, elle s'insère difficilement sur le marché du travail et manque de formation et de qualification . Dans les quartiers de la politique de la ville, le logement social est très présent : 8 logements sociaux pour 10 ménages, soit trois fois plus que dans l'urbain englobant ces quartiers ».

B. UNE EXPÉRIMENTATION UTILE MAIS DONT LES CRITÈRES DEVRONT ÊTRE PRÉCISÉS

Selon l'exposé sommaire de l'amendement gouvernemental à l'origine du présent article, ce dispositif prendra la forme d'une aide de 5 000 euros par an versée sur trois ans maximum, soit 15 000 euros au total , pour les embauches en contrat à durée indéterminée, et de 2 500 euros par an versée sur deux ans maximum pour les embauches en contrat à durée déterminée .

Il est en outre prévu que ces montants soient proratisés en fonction de la quotité de travail et de la durée effective du contrat de travail.

Les difficultés identifiées par la mission « Carenco » semblent donc avoir été prises en compte par le Gouvernement : montant de l'aide plus incitatif, passant de 5 000 euros à 15 000 euros sur trois ans, pas de condition de durée de résidence et conditions d'embauche moins restrictives.

Pour autant, vos rapporteurs spéciaux considèrent que le dispositif proposé devra être précisé par le décret d'application : trop restreint lors de la précédente expérimentation, il ne faudrait pas tomber dans l'excès inverse en élargissant trop les critères d'éligibilité au risque d'aider des demandeurs d'emplois qui n'en n'auraient pas besoin.

En tout état de cause, la durée limitée de l'expérimentation et la remise d'un rapport d'évaluation avant le 15 septembre 2019 permettront au Parlement de juger de la pertinence ou non de ce dispositif et donc de sa reconduction au-delà du 31 décembre 2019.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

EXAMEN EN COMMISSION

M. Emmanuel Capus , rapporteur spécial . - En 2018, les crédits de la mission « Travail et emploi » s'élèveront à 13,7 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 15,4 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Ce budget traduit des choix clairs, et d'abord celui d'une réduction importante des dépenses de plus de quatre milliards d'euros en AE et de deux milliards d'euros en CP, hors rebudgétisation de l'ensemble des dépenses d'allocations de solidarité. Cet effort traduit la participation de la mission à la baisse des déficits publics.

Quatre leviers principaux seront utilisés. Premièrement, la diminution des subventions pour charges de service public versées aux opérateurs de la mission, à hauteur de 50,2 millions d'euros. En particulier, la subvention versée à Pôle emploi devrait passer de 1,5 milliard d'euros en 2017 à 1,46 milliard d'euros en 2018. Cette diminution sera plus que compensée par une hausse de la contribution de l'Unédic et ne devrait donc pas avoir d'impact significatif sur l'activité de l'opérateur.

Deuxièmement, la non-reconduction de certains dispositifs, tels que l'aide à l'embauche à destination des PME, créée en 2016 et opportunément prolongée jusqu'en 2017 par le précédent Gouvernement. La pérennisation de cette aide aurait conduit à un important effet d'aubaine alors que son coût pour les finances publiques était compris entre 3,5 milliards d'euros et 4 milliards d'euros. De même, le contrat de génération, qui n'a pas fonctionné, ne sera pas reconduit.

Troisièmement, l'enveloppe de contrats aidés sera revue à la baisse. Seuls 200 000 contrats dans le secteur non-marchand seront conclus. 765 millions d'euros en AE et 1,45 milliard d'euros en CP seront consacrés aux contrats aidés, soit une baisse de plus d'un milliard d'euros en AE et de 950 millions d'euros en CP par rapport à 2017.

Enfin, quatrièmement, les efforts en matière d'effectifs et de masse salariale, qui avaient été engagés par le précédent Gouvernement, seront poursuivis.

Ce budget réduit les dépenses tout en restant efficace. En effet, les crédits de la mission « Travail et emploi » seront maintenus à un niveau élevé, le plus important depuis 2009, hors prévision 2017, qui était marquée par d'importantes mesures de périmètre, de l'ordre de deux milliards d'euros.

Le choix a cependant été fait de cibler la dépense sur ce qui fonctionne. Bien évidemment, on ne peut nier l'utilité des contrats aidés pour les collectivités territoriales et le secteur associatif. Cependant, le recours à ces contrats était une réponse de court-terme, parfois motivée par des raisons purement statistiques, au problème du chômage. C'est pourquoi un plan ambitieux d'investissement dans les compétences a semblé préférable à cette solution de facilité. Il garantira d'une part la poursuite de la montée en puissance de la Garantie jeunes, avec 160 millions d'euros en CP versés aux missions locales pour assurer l'accompagnement de 100 000 jeunes. Il facilitera d'autre part la mise en place d'un plan de formation à destination des demandeurs d'emploi faiblement qualifiés et des jeunes décrocheurs. Au total, deux millions d'actions de formation devraient être proposées sur le quinquennat.

Plus de 14,5 milliards d'euros seront consacrés à ce plan sur le quinquennat, dont près de 14 milliards d'euros sur la mission « Travail et emploi ».

Enfin, le présent budget fait le choix de la sincérité. La décision prise à l'été 2017 de redimensionner l'enveloppe de contrats aidés n'était pas facile. Elle a été rapide, elle était nécessaire. Pas moins de 70 % de l'enveloppe votée en loi de finances initiale avait été consommée dès le premier semestre 2017, le précédent Gouvernement ayant poussé les collectivités territoriales à recruter. On s'acheminait vers un dérapage comparable à celui des années précédentes. En 2016, la dépense en faveur des contrats aidés avait été supérieure aux prévisions à hauteur de 1,8 milliard d'euros en AE et de 1 milliard d'euros en CP en 2016. Je rappelle cependant que 310 000 contrats seront conclus en 2017 contre 280 000 programmés.

Pour 2018, les choses sont claires et le choix affiché du Gouvernement de se tenir à l'enveloppe votée par le Parlement permettra d'améliorer la sincérité du budget.

Je rappelle que, depuis 2009, la prévision n'a été respectée qu'en 2011, 2013 et 2014 en AE, et qu'en 2014 en CP.

La diminution de l'enveloppe globale des contrats aidés prévue dans le présent projet de loi de finances va en outre très clairement dans le sens préconisé par le Sénat et par sa commission des finances, lors de l'examen des projets de lois de finances pour 2015 et 2016, même si la baisse du volume de contrats aidés votée par notre assemblée ne concernait que le secteur non-marchand.

Le budget qui nous est présenté est un budget de transformation, qui se concentre sur l'essentiel : améliorer l'employabilité des personnes les plus éloignées du marché du travail. Des choix clairs de politique publique y sont exprimés, au prix c'est vrai de la non-reconduction de dispositifs dont l'efficacité statistique est indéniable mais dont l'impact sur le marché du travail est faible.

C'est pourquoi je vous propose d'adopter sans modification les crédits de la mission « Travail et emploi » et du compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage ».

Mme Sophie Taillé-Polian , rapporteure spéciale . - Cela ne vous surprendra pas, la tonalité de mon intervention sera quelque peu différente de celle de mon collègue co-rapporteur. Nous sommes cependant d'accord sur un point : le choix est à la baisse des dépenses.

Je considère que la diminution des crédits de la mission « Travail et emploi », de 2,7 milliards d'euros en AE et de 295 millions d'euros en CP, est un très mauvais signal adressé aux personnes précaires, alors que le taux de chômage demeure élevé - 9,5 % de la population active au deuxième semestre 2017 - de même que le nombre de demandeurs d'emploi, qui s'élevait à 5,6 millions de personnes. Bien sûr, certains diront que le chômage est en baisse pour certaines catégories. Il n'en reste pas moins qu'il a augmenté de 6 % pour les personnes de plus de cinquante ans et de plus de 11 % pour les demandeurs d'emploi de la catégorie C. L'embellie des chiffres cache des disparités très importantes.

Comme l'a rappelé mon collège Emmanuel Capus, hors compensation de la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité, la diminution des crédits de la mission sera record et atteindra près de 4,2 milliards d'euros en AE et 2,4 milliards d'euros en CP.

Force est tout d'abord de constater que la baisse des crédits prévue par le présent budget touchera principalement les personnes les plus fragiles. La diminution du nombre de contrats aidés en est probablement l'exemple le plus emblématique.

Pourtant, la décision brutale prise à l'été 2017 de réduire l'enveloppe de contrats aidés - qui s'est traduite par d'importantes difficultés pour les collectivités territoriales et les associations - a bien montré l'utilité de ces derniers, sans parler de la détresse dans laquelle les bénéficiaires non reconduits ont été jetés...

Ces contrats constituent des instruments importants pour l'insertion sociale et professionnelle des bénéficiaires. En l'absence de contrats aidés, la plupart des personnes concernées n'auraient tout simplement pas eu accès au marché du travail.

La baisse prévue dans le présent budget conduira donc à une fragilisation de certains services publics et de certaines actions associatives, et elle aura des conséquences sociales importantes.

Elle jette en outre l'opprobre sur les collectivités territoriales soupçonnées de tirer profit de l'effet d'aubaine provoqué par ce dispositif pour bénéficier de financements complémentaires. Or les recrutements réalisés l'ont souvent été à la demande de l'État et la grande majorité des collectivités territoriales ont mis en place une véritable insertion professionnelle des bénéficiaires. En plus de la réduction du nombre de contrats aidés, le taux de prise en charge sera revu à la baisse de 70 % à 50 %.

Ce budget porte un coup aux actions en faveur de l'amélioration des conditions de travail avec la baisse du montant de la subvention versée à l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact) et la poursuite de la réduction des effectifs de l'inspection du travail, alors même que la mise en oeuvre des ordonnances « Travail » complexifie et favorise une hétérogénéité du droit.

Le budget qui est soumis à notre examen est révélateur de l'incohérence de la politique menée par le Gouvernement qui souhaite relancer l'apprentissage et « en même temps » supprime l'aide financière en faveur des jeunes apprentis, alors même que les centres de formation d'apprentis ont du mal à recruter.

Le Gouvernement lance un grand plan d'investissement dans les compétences et, « en même temps », il diminue les crédits consacrés aux opérateurs. La subvention pour charges de service public versée à Pôle emploi diminuera ainsi de 50 millions d'euros, en contradiction avec le montant inscrit dans la convention tripartite Pôle emploi/État/Unédic. Certes, l'Unédic augmentera sa contribution, mais dans le même temps les effectifs de l'opérateur devraient diminuer de 297 ETPT, 3 783 ETPT si l'on inclut les effectifs hors plafond. Pôle emploi risque d'être en difficulté pour accompagner les demandeurs d'emploi.

Que dire de la division par deux des crédits consacrés aux maisons de l'emploi ? En les privant des moyens leur permettant d'exercer leurs missions on crée les conditions de leur suppression...

Le Gouvernement ne réévalue pas sa contribution au financement des missions locales, alors que celles-ci devront accompagner près de 15 000 jeunes supplémentaires avec la généralisation de la Garantie jeunes.

Le Gouvernement estime que la baisse du coût du travail, qui se traduira par la transformation du CICE en diminution de cotisations patronales en 2019, doit favoriser les recrutements et, « en même temps », il supprime l'aide à l'embauche à destination des petites et moyennes entreprises.

Concernant le plan d'investissement dans les compétences, présenté par le Gouvernement comme l'alpha et l'oméga de sa politique de l'emploi, je constate que l'effort réel est bien inférieur au montant mis en avant dans la communication du Gouvernement, tant sur le nombre de personnes formées que sur les moyens dégagés. En effet, dans la mesure où les crédits consacrés à la Garantie jeunes et au plan « 500 000 formations » étaient déjà portés par la mission « Travail et emploi », l'effort consenti ne s'élèvera qu'à 750 millions d'euros en AE et 430 millions d'euros en CP. Des questions demeurent en suspens s'agissant du financement de ce plan et des moyens humains qui y seront consacrés. On peut aussi s'interroger sur le nombre de personnes touchées, qui sera certainement inférieur au plan 500 000 formations auquel il se substitue. On nous annonce deux millions de formation sur cinq ans, soit 400 000 personnes accompagnées chaque année.

Le budget 2018 de la mission « Travail et emploi » est un mauvais budget, car il accompagnera moins les personnes en difficulté. La dynamique baissière qu'il contient sera en outre aggravée par le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, qui prévoit une diminution des crédits de 17 % entre 2018 et 2020.

Je vous propose de rejeter les crédits de la mission « Travail et emploi », car ils ne sont pas adaptés à la situation sociale et à la hausse du chômage des publics en difficulté qui se poursuit.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je partage le point de vue du rapporteur spécial Emmanuel Capus. Je ne suis pas un fanatique des contrats aidés, qui servent davantage à améliorer les statistiques du chômage qu'à la réinsertion sur le marché de l'emploi. Le taux de contrats aidés qui débouchent à la sortie sur une embauche reste faible et cela d'autant plus dans le secteur non-marchand que dans le secteur marchand. Sans politique d'accompagnement, ce dispositif ne peut pas être efficace. Mieux vaut privilégier la formation des personnes durablement éloignées de l'emploi.

M. Philippe Dallier . - Je n'ai pas bien compris si l'on nous proposait d'adopter les crédits de cette mission ou pas. Je n'ai jamais été un grand « fan » des contrats aidés à tout prix. Pourtant, j'y ai eu recours comme maire, il y a quelques années, pour former des jeunes susceptibles de remplacer des personnes qui partaient à la retraite. En 2016, les emplois aidés ont été beaucoup utilisés pour améliorer les statistiques du chômage. Je regrette surtout la brutalité de la décision qui a été prise d'en réduire le nombre. Les préfets avaient écrit aux maires pour qu'ils incitent les associations à recruter des contrats aidés et d'un coup, tout s'arrête. La méthode est extrême. Pour autant, j'adopterai les crédits de la mission.

M. Michel Canevet . - En 2017 et 2018 les CP ont augmenté de manière significative. Cette hausse correspond-elle à des changements de périmètre ?

La brutalité de la baisse du nombre des contrats aidés m'a aussi frappé. Cependant, ces contrats doivent être un moyen d'insertion professionnelle et pas une activité occupationnelle. Nous sommes face à un paradoxe : on recense près de six millions d'inscrits à Pôle emploi et pourtant les employeurs peinent à trouver de la main d'oeuvre. C'est le signe d'une inadaptation flagrante entre l'offre d'emploi et les besoins des employeurs. La mission de Pôle emploi est-elle pleinement assurée ? Les employeurs recourent à d'autres supports dans 70 % des cas. Il faudrait une remise à plat complète. Les crédits de cette mission doivent baisser si l'on veut réduire le déficit public.

M. Éric Jeansannetas . - S'agissant des missions locales, vous avez en commun de privilégier la vigilance et de nourrir une certaine satisfaction à l'idée que les crédits seront reconduits. L'État n'est pas le seul partenaire des missions locales. Dans un contexte de baisse des dotations, les subventions des communes, des départements et des régions aux missions locales stagnent voire diminuent. Dans la Creuse, le département a baissé ses subventions à la mission locale qui a dû accomplir un travail de mutualisation en regroupant ses trois permanences d'accueil, d'information et d'orientation.

Dans leur rapport, François Patriat et Jean-Claude Requier préconisent de pérenniser la dotation de base aux missions locales en la stabilisant. En effet, la Garantie jeunes a changé le financement d'une mission locale. La subvention versée est supérieure lorsque le jeune sort du dispositif en situation d'emploi ou de formation. Les missions locales qui sont souvent des associations et des groupements d'intérêt public et dont les recettes ne sont pas stabilisées doivent faire des provisions pour risques afin de garantir la situation de ces jeunes en situation délicate. Les missions locales sont le dernier rempart contre l'exclusion.

M. Marc Laménie . - Des crédits de 15,4 milliards d'euros en CP, c'est important. Or la santé et la sécurité au travail ne représentent qu'une partie infime de cette mission, alors que ces domaines devraient être prioritaires. Comment interpréter la faiblesse du montant qui leur est consacré ?

M. Alain Joyandet . - La période actuelle oblige les citoyens à se former et à s'adapter aux nouvelles missions qui leur sont proposées. Beaucoup d'employeurs cherchent à embaucher sans trouver de candidat aux postes qu'ils offrent. Nous sommes dans une période de mutation de l'emploi. Supprimer les emplois aidés ne contribuera pas à améliorer la situation de l'emploi.

Les évolutions rugueuses du marché du travail font qu'il est difficile de s'y insérer. Il est indispensable que le secteur public intervienne pour faciliter l'insertion professionnelle.

Je m'interroge : on supprime les emplois aidés par mesure d'économie ? Pourtant l'Assemblée nationale vient de voter le transfert du financement de l'assurance chômage des cotisations sociales vers la CSG augmentée de 1,7 point. Cela signifie-t-il que l'on devra augmenter la CSG l'an prochain pour payer les chômeurs supplémentaires ? C'est incohérent. On déplace des emplois aidés financés par l'État vers le chômage également financé par l'État. C'est n'importe quoi, tant du point de vue budgétaire que du point de vue humain : les emplois aidés jouent un rôle important dans les petites collectivités. On aurait pu attendre que le chômage baisse avant de réduire le nombre des emplois aidés.

M. Bernard Delcros . - Je suis en désaccord avec les orientations prises sur les contrats aidés. Le taux de sortie positive ne peut être le seul critère. D'ailleurs, si l'on supprime les contrats des quelque 60 % ou 70 % qui ne sont pas en emploi après leur contrat, ils deviendront des demandeurs d'emploi, ce qui a aussi un coût pour la collectivité. Bien sûr, les bénéficiaires préfèreraient un emploi durable - mais ils préfèrent aussi un contrat aidé à un statut de demandeur d'emploi. Quelle est la part des renouvellements dans le chiffre de 310 000 contrats aidés pour 2017 ?

Les crédits pour la formation augmentent, mais nous consacrons déjà 30 milliards d'euros par an à ce poste : ne pourrait-on plutôt optimiser la dépense existante ?

Les contrats aidés sont utiles pour leurs bénéficiaires, bien sûr, mais aussi pour les associations et les collectivités territoriales, surtout en milieu rural, où certains services ne pourraient sans doute pas être maintenus si ces contrats étaient supprimés.

M. Claude Raynal . - Je ne suis guère convaincu par la présentation d'Emmanuel Capus. Ce n'est pas parce que nous sommes en commission des finances que notre vision doit être déshumanisée. Or vos propos sont ceux d'un animal à sang froid. Comme Alain Joyandet, je souhaite rappeler que derrière ces chiffres, il y a de la pâte humaine. D'ailleurs, les résultats ne sont pas si mauvais, même si vous parlez d'inefficacité. Même dans l'entreprise, les taux de réembauche n'atteignent pas 100 % six mois après la fin d'un contrat. Et si leur effet est que des jeunes très éloignés de l'emploi acquièrent une expérience professionnelle et se remettent dans l'idée de travailler, les contrats aidés restent très positifs - même s'ils ne garantissent pas un emploi à vie. Je suis effondré par le lien entre chômage, maladie et dépression. Aussi me semble-t-il que ce coût budgétaire ne doit pas être immédiatement tranché.

De plus, la continuité de l'État, mentionnée par Philippe Dallier, n'est pas un gros mot ! Il est pour le moins étrange que des représentants de l'État incitent, interrompent... Cette mesure est prise dans un but exclusivement budgétaire, selon une argumentation contestable et qui mériterait une analyse plus qualitative. En même temps qu'on supprime brutalement ces aides, on se prive des recettes de l'ISF. Comment ne pas faire le parallèle ? Pourtant, il y avait moins urgence à diminuer l'ISF qu'à supprimer les crédits des emplois aidés.

Notre gestion publique a ses qualités et ses défauts, mais toutes les études ont montré que, grâce à ce type de dispositifs, qui constituent le fondement social de notre République, la France est le pays qui a le mieux absorbé les conséquences de la crise. Gardons-nous donc de casser ces amortisseurs !

Mme Sylvie Vermeillet . - Les contrats aidés étaient intéressants pour les bénéficiaires comme pour leurs employeurs, et je dénonce la brutalité de leur suppression, quinze jours avant la rentrée scolaire. C'est comme si l'on pensait que la suppression des allocations chômage ferait disparaître les chômeurs... L'économie que cette suppression représente pour l'État est en fait prélevée sur les collectivités territoriales. La charge ainsi transférée a-t-elle été chiffrée ? Est-elle incluse dans les 13 milliards d'euros demandés aux collectivités territoriales ?

M. Jean-Marc Gabouty . - Maire, j'ai utilisé pendant deux décennies les contrats aidés, en essayant toujours de les faire déboucher sur une embauche. Mais le dispositif a dérapé, puisqu'on a atteint en 2015-2016 le chiffre de 400 000 contrats, sans doute en vue d'inverser la courbe du chômage. Alors que ces contrats ont vocation à aider des jeunes éloignés de l'emploi et se heurtant à des difficultés d'insertion, certaines collectivités territoriales et associations ont pris l'habitude de les utiliser pour procéder à des recrutements dans des conditions financières allégeant leurs charges de personnel. La mesure va donc dans la bonne direction, même si j'en regrette la brutalité - quoique celle-ci résulte du fait que le financement n'avait pas été assuré jusqu'à la fin de l'année. Les contrats aidés ne sont pas supprimés, puisque 200 000 contrats sont prévus pour 2018, ce qui est un niveau plus raisonnable, et correspond mieux aux besoins d'insertion, qui sont le critère prioritaire.

Mme Sophie Taillé-Polian , rapporteure spéciale . - Si c'est dans le secteur public que les contrats aidés ont le taux de sortie vers l'emploi le plus faible, c'est aussi que le profil des personnes retenues est différent : les personnes les moins éloignées de l'emploi sont embauchées par le secteur marchand.

Il s'agit tout de même d'une manière de proposer une activité ayant une utilité sociale. Ainsi, à Pôle Emploi, le travail d'accueil effectué par ces personnes est très apprécié.

Pour répondre à Michel Canevet, l'ensemble des allocations de solidarité ont été rebudgétisées du fait de la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité destinée à compenser la hausse de la CSG pour les fonctionnaires. À périmètre constant, la baisse des crédits est très importante.

Pôle Emploi a dédié 4 000 conseillers au travail avec les entreprises pour mieux analyser le marché de l'emploi local. Ce travail porte ses fruits, et nombre d'entreprises se déclarent satisfaites de cette amélioration. Pour autant, Pôle Emploi n'a pas les moyens de mettre en oeuvre un accompagnement fort des personnes éloignées de l'emploi : seules 40 % d'entre elles en bénéficient. D'après l'inspection générale des finances et l'inspection générale des affaires sociales, 50 % des personnes en accompagnement renforcé n'ont pas de rendez-vous trois mois après leur inscription. Et la dématérialisation totale de la procédure allonge sans doute le délai d'inscription des personnes très éloignées de l'emploi.

Les crédits des missions locales sont maintenus, mais 15 000 jeunes supplémentaires bénéficieront de la Garantie jeunes et le financement intégral n'est pas toujours acquis : il faut accomplir nombre de démarches, et l'insertion totale du jeune est requise. Un mouvement de mutualisation est en marche, mais nous devons rester vigilants.

La santé et la sécurité au travail représentent une petite part du budget de cette mission, qui comporte notamment les crédits de l'inspection du travail. L'accession des contrôleurs au statut d'inspecteurs du travail a demandé des efforts de formation et des moyens supplémentaires, puisque c'est un passage - bienvenu - de la catégorie B à la catégorie A. mais ce mouvement s'est accompagné d'une diminution du nombre d'agents sur le terrain. Il faudra donc rester vigilant.

Quant à la question de savoir si les contrats aidés supprimés comptent dans les 13 milliards d'euros demandés aux collectivités territoriales, nous n'y avons pas la réponse !

M. Emmanuel Capus , rapporteur spécial . - J'avais conscience, en demandant ce rapport, que la mission serait délicate et l'équilibre, difficile à trouver. J'avais peut-être sous-estimé la tâche ! Il est vrai que certains ont changé d'avis en fonction des récentes élections...

Le rapporteur général partage mon souci de maîtrise des dépenses publiques, et je l'en remercie. Philippe Dallier n'est pas un « fan » des contrats aidés et constate qu'ils ont beaucoup servi à un traitement statistique du chômage. Il s'inquiète de la rapidité de suppression de certains contrats. Soyons clairs : la situation était invraisemblable, puisque le Parlement avait autorisé 295 000 emplois aidés pour 2016 et que le Gouvernement en a validé 458 697. Scandaleux !

M. Claude Raynal . - Le terme est excessif...

M. Emmanuel Capus , rapporteur spécial . - Même chose en 2017 : en août, 70 % de l'enveloppe de contrats était déjà consommée. Le choix était simple : laisser filer sans se soucier du vote du Parlement, ou reprendre le contrôle et limiter le nombre de contrats à 310 000 à 320 000. Certes, il aurait pu y avoir davantage de concertation.

Michel Canevet, ma collègue, Sophie Taillé-Polian vous a déjà répondu, en 2017, certaines exonérations de charges ont été rebudgétisées et en 2018, la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité est compensée par le budget de l'État.

Alain Joyandet nous dit que ce n'est pas le moment de supprimer les contrats aidés. Je veux bien être humble, puisque je n'étais pas là il y a deux ans. Mais pourquoi, alors, son groupe a-t-il demandé la suppression pure et simple des contrats aidés dans le secteur non-marchand ? La situation économique, ce me semble, n'a guère changé depuis. Et cette année, il ne faudrait plus les supprimer ? D'ailleurs, il n'est pas proposé de les supprimer, car dans le secteur non-marchand ils ont une utilité, et pour les territoires et pour les bénéficiaires. C'est pourquoi je ne vous propose pas de supprimer les 200 000 contrats prévus l'an prochain.

Marc Laménie, le budget de la santé et de la sécurité au travail est quasi-stable, il augmente de 0,13 % en AE mais baisse de 2,15 % en CP.

Claude Raynal, la chaleur de mon propos montre assez, je crois, que je ne suis pas un animal à sang froid. Sans doute l'Anjou et sa douceur chantée par du Bellay sont-ils trop éloignés de la Haute-Garonne ? Je suis un Gaulliste libéral et, comme Jean Bodin, je considère qu'il n'est de richesse que d'hommes. Aussi n'ai-je pas de leçons d'humanisme à recevoir de votre banc.

La question de Sylvie Vermeillet est sans doute la plus pertinente : l'an dernier, vous proposiez de supprimer les contrats aidés dans le secteur non-marchand...

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Pour des raisons liées exclusivement au taux d'insertion à la sortie.

M. Emmanuel Capus , rapporteur spécial . - La question est de savoir s'il faut les maintenir plutôt dans le secteur marchand ou non-marchand. Les points de vue divergent. Alain Joyandet estime que, dans le secteur non-marchand, ils sont indispensables, et le Gouvernement propose d'en maintenir 200 000. Cela me paraît la bonne décision.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Travail et Emploi », ainsi que ceux du compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2017, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission des finances, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter sans modification les crédits de la mission « Travail et Emploi » et ceux du compte d'affectation spéciale, ainsi que l'article 66.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Cabinet de la ministre du travail

- M. Antoine FOUCHER, directeur du cabinet ;

- Mme Fanny FOREST-BACCIALONE, conseillère parlementaire.

Direction du budget

- M. Jean-François JUÉRY, sous-directeur de la 6 e sous-direction ;

- M. Stéphane PAILLAUD, chef du bureau « Emploi et formation professionnelle ».

Pôle emploi

Contribution écrite de la direction générale ;

- CGT : Mme Nathalie POTAVIN et M. Arnaud MIRAMON ;

- CGT-FO : MM. Sébastien SOCIAS et Yann RENAUD ;

- CFDT : MM. David VALLAPERTA et Jean-Manuel GOMES ;

- SNU-FSU : Mme Danielle DAWIN et M. Jean-Charles STEYGER ;

- CFE-CGC : M. Frédéric-Paul MARTIN.

Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact)

- M. Richard ABADIE, directeur.

Délégation ministérielle aux missions locales

- M. Jean-Marc SEIJO-LOPEZ, délégué ministériel aux missions locales ;

- Mme Amaria SEKOURI, adjointe au délégué ministériel.

Institut national de recherche et de sécurité (INRS)

- Mme Marie DEFRANCE, responsable des relations institutionnelles.

Association des maires de France (AMF)

- Mme Marie-Claude JARROT, maire de Montceau-les-Mines ;

- M. Wilfried SCHWARTZ, maire de La Riche ;

- Mme Charlotte de FONTAINES, chargée des relations avec le Parlement ;

- Mme Valérie BRASSART, conseillère.


* 1 Dares indicateurs, octobre 2017, n° 069.

* 2 Table ronde du jeudi 26 octobre 2017.

* 3 Inspection générale des finances, Inspection générale des affaires sociales, Évaluation à mi-parcours de la convention tripartite Pôle emploi/État/Unédic, février 2017.

* 4 « Les missions locales : du rapport Schwartz à la Garantie jeunes, trente années d'accompagnement des jeunes en difficulté », rapport d'information de François Patriat et Jean-Claude Requier, fait au nom de la commission des finances n° 575 (2016-2017) - 7 juin 2017.

* 5 Loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.

* 6 Loi n° 2012-1189 du 26 octobre 2012 portant création des emplois d'avenir.

* 7 Dares, « Les contrats aidés : quels objectifs, quel bilan ? », Dares analyses n° 21, mars 2017.

* 8 Audition du 31 octobre 2017.

* 9 « Projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2016 : Exposé général et examen des articles », rapport n° 645 (2016-2017) d'Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 juillet 2017.

* 10 Cour des comptes, « La situation et les perspectives des finances publiques, audit », juin 2017.

* 11 La mise en oeuvre de ce plan ayant été décidée en début d'année 2016, aucun crédit n'avait été prévu en loi de finances initiale pour 2016.

* 12 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

* 13 Décret n° 2016-40 du 25 janvier 2016 instituant une aide à l'embauche dans les petites et moyennes entreprises.

* 14 Direction générale du Trésor, « Les aides à l'embauche : un outil efficace de soutien à l'emploi ? », Trésor-éco, n° 177, août 2016.

* 15 Insee, « Prime à l'embauche dans les petites et moyennes entreprises : une première évaluation à partir des déclarations d'embauche », Insee analyses n° 29, décembre 2016.

* 16 Loi n° 2013-185 du 1 er mars 2013 portant création du contrat de génération.

* 17 Cour des comptes, « Le contrat de génération : les raisons d'un échec » Rapport public annuel 2016, février 2016.

* 18 Décret n° 2015-773 du 29 juin 2015 portant création d'une aide en faveur des très petites entreprises embauchant des jeunes apprentis.

* 19 Décret n° 2017-267 du 28 février 2017 instituant une aide financière en faveur des jeunes apprentis.

* 20 Dares, « L'apprentissage en 2016 », Dares résultats n° 57, septembre 2017.

* 21 Selon une étude de la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l'éducation nationale (DEPP) de juin 2017, en février 2016, près 70 % des jeunes ayant suivi des études en apprentissage du niveau du CAP au BTS ont un emploi sept mois après la fin de leur formation .

* 22 European Agency for Safety and Health at Work - EU-OSHA, Calculating the cost of work-related stress and psychosocial risks, European Risk Observatory Literature Review.

* 23 Loi n° 2014-1528 du 18 décembre 2014 relative à la désignation des conseillers prud'hommes.

* 24 Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi.

* 25 Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

* 26 Décret n° 2013-549 du 26 juin 2013 relatif à l'expérimentation d'emplois francs.

* 27 Décret n° 2015-811 du 2 juillet 2015 portant abrogation du décret n° 2013-549 du 26 juin 2013 relatif à l'expérimentation d'emplois francs.

* 28 Avec l'avis favorable de la commission des finances et du Gouvernement.

* 29 Observatoire national de la politique de la ville, Rapport 2016, 6 avril 2017.

* 30 Insee, « Les habitants des quartiers de la politique de la ville, La pauvreté côtoie d'autres fragilités », Insee première n° 1593, mai 2016.

Page mise à jour le

Partager cette page