B. PRÉSERVER LES DESSERTES TGV UTILES À L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

Lors de l'examen de la proposition de loi du président de votre commission Hervé Maurey et du sénateur Louis Nègre relative à l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs, le Sénat, dans son ensemble, a exprimé de vives inquiétudes au sujet du maintien de la desserte TGV des villes moyennes dans le contexte de l'ouverture à la concurrence.

Aujourd'hui, les services dits TGV 9 ( * ) sont pour l'essentiel des services commerciaux assurés par SNCF Mobilités. Ils permettent un maillage fin du territoire, par la desserte de 230 villes. Un mécanisme de péréquation interne permet à l'opérateur, en situation de monopole, d'effectuer des liaisons considérées comme non rentables.

Dans le contexte de l'ouverture à la concurrence, l'opérateur historique ne pourra plus assumer les mêmes contraintes sans compensation, et l'ensemble des entreprises ferroviaires vont chercher à assurer les liaisons les plus rentables, comme cela s'est observé lors de la libéralisation d'autres secteurs, comme les télécommunications. En conséquence, en l'absence de dispositif spécifique, les dessertes peu ou non rentables seraient menacées de disparition, alors qu'elles sont indispensables à l'aménagement du territoire.

Votre commission déplore que les réponses apportées à ce sujet par le Gouvernement ne soient pas suffisantes pour assurer la pérennité du modèle français de desserte TGV.

En premier lieu, le dispositif de modulation des péages prévu à l'article 1 er bis , ne suffira pas à préserver l'ensemble des dessertes directes TGV des villes moyennes dans le contexte de l'ouverture à la concurrence : selon le Gouvernement lui-même, une desserte TGV sur six serait encore menacée de disparition après la mise en oeuvre de ce dispositif, et nécessiterait donc la conclusion d'un contrat de service public pour continuer à être effectuée.

Or, si le présent projet de loi permet à l'État de conclure des contrats pour garantir la pérennité de certains services TGV menacés de disparition ou dont la disparition est constatée à la suite de l'ouverture à la concurrence, le Gouvernement, qui compte beaucoup sur le levier de la modulation des péages, n'a pas témoigné d'une volonté ferme de s'engager dans cette voie, d'autant qu'il vient de transférer aux régions une grande partie des services Intercités qu'il gérait auparavant en tant qu'autorité organisatrice.

Dans ce contexte, la possibilité offerte aux régions de conclure des contrats de services publics pour des liaisons effectuées au-delà de leur ressort territorial peut faire craindre un report de la charge liée à la préservation des dessertes TGV actuelles sur les régions.

Or, votre commission estime que la responsabilité du maintien de ces dessertes d'intérêt national doit revenir à l'État. Si les régions peuvent avoir à jouer un rôle pour garantir la desserte fine de leur territoire, comme c'est déjà le cas avec les TER-GV , elles ne sauraient être tenues responsables de la pérennité des liaisons TGV d'intérêt national répondant à des préoccupations d'aménagement du territoire , surtout en l'absence de financements spécifiques.

C'est la raison pour laquelle, à l'initiative de son rapporteur, elle a réintroduit à l'unanimité , à l'article 2 ter, le dispositif de la proposition de loi d'Hervé Maurey et Louis Nègre adoptée par le Sénat le 29 mars dernier, qui prévoit la conclusion, par l'État, de contrats de service public pour répondre aux besoins d'aménagement du territoire et préserver des dessertes directes sans correspondance .

Dans un contexte de concurrence intermodale forte, et de perte d'attractivité du mode ferroviaire, il apparaît en effet primordial que l'État garantisse le maintien de dessertes sans correspondance.

Votre commission a également prévu, à l'article 3 bis B, que l'État soit systématiquement informé par les entreprises ferroviaires préalablement à la modification de la consistance d'un service librement organisé, pour qu'il puisse être en mesure, en cas de suppression d'un service, de conclure un contrat de service public pour garantir le maintien de la desserte.

Votre commission estime en effet que l'ouverture à la concurrence doit se traduire par une amélioration du service rendu aux voyageurs, et non à une contrition de l'offre proposée.

En complément, votre commission a souhaité ajuster les conditions de répartition des capacités d'infrastructures entre les entreprises ferroviaires. En adoptant l'article additionnel 1 ter A, elle a ainsi prévu la définition de critères de priorité en faveur des services assurant des dessertes pertinentes pour l'aménagement du territoire lorsque certaines lignes seront saturées, et de mesures facilitant l'attribution de sillons aux services de fret ferroviaire .


* 9 Ces services ne sont pas tous effectués à grande vitesse au sens strict, cf. commentaire de l'article 1 er ter .

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