Rapport n° 611 (2018-2019) de M. Jean-Raymond HUGONET , fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 26 juin 2019

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N° 611

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 26 juin 2019

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur la proposition de loi , ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE , relative à la création du Centre national de la musique ,

Par M. Jean-Raymond HUGONET,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Morin-Desailly , présidente ; M. Max Brisson, Mme Catherine Dumas, MM. Jacques Grosperrin, Antoine Karam, Mme Françoise Laborde, MM. Jean-Pierre Leleux, Jacques-Bernard Magner, Mme Colette Mélot, M. Pierre Ouzoulias, Mme Sylvie Robert , vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Claude Kern, Mme Claudine Lepage, M. Michel Savin , secrétaires ; MM. Maurice Antiste, David Assouline, Mmes Annick Billon, Maryvonne Blondin, Céline Boulay-Espéronnier, Marie-Thérèse Bruguière, Céline Brulin, M. Joseph Castelli, Mmes Laure Darcos, Nicole Duranton, M. André Gattolin, Mme Samia Ghali, MM. Abdallah Hassani, Jean-Raymond Hugonet, Mmes Mireille Jouve, Claudine Kauffmann, MM. Guy-Dominique Kennel, Laurent Lafon, Michel Laugier, Mme Vivette Lopez, MM. Jean-Jacques Lozach, Claude Malhuret, Christian Manable, Jean-Marie Mizzon, Mme Marie-Pierre Monier, MM. Philippe Nachbar, Olivier Paccaud, Stéphane Piednoir, Mme Sonia de la Provôté, MM. Damien Regnard, Bruno Retailleau, Jean-Yves Roux, Alain Schmitz, Mme Dominique Vérien .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

1813 , 1883 et T.A. 261

Sénat :

482 et 612 (2018-2019)

SYNTHÈSE DES TRAVAUX DE LA COMMISSION

Après l'abandon en 2012 du premier projet de création d'un Centre national de la musique, la relance de la réflexion sur ce sujet en 2017 a ravivé les espoirs de la filière musicale de disposer enfin d'un outil efficace et multidimensionnel de soutien à l'ensemble du secteur de la musique et des variétés . La présente proposition de loi, qui s'inscrit dans la droite ligne des conclusions des rapports de Roch-Olivier Maistre, d'une part, et de Pascal Bois et d'Émilie Cariou, d'autre part, devrait constituer une étape décisive de cette création. Elle prévoit de regrouper au sein du nouvel établissement plusieurs leviers d'action aujourd'hui assurés par différentes structures publiques et privées.

Encore faudra-t-il que les réponses apportées à deux questions absentes de cette proposition de loi permettent aux acteurs de la filière musicale de trouver leur place et de vouloir effectivement se rassembler au sein de cette maison commune. La gouvernance de l'établissement , dont les modalités devraient être déterminées par voie réglementaire, comme son financement , dont la discussion est renvoyée au prochain projet de loi de finances, cristallisent en effet les inquiétudes du secteur. Il appartiendra au Gouvernement, dans les prochains mois, de confirmer son engagement à donner un nouveau souffle à la politique musicale en octroyant au nouvel établissement les moyens de remplir sa mission. Ce besoin apparaît d'autant plus impérieux que le secteur est frappé par de profondes mutations depuis plus d'une dizaine d'années qui nécessitent de parler d'une voix forte et unie sur la scène internationale.

Lors de sa réunion du mercredi 26 juin 2019, la commission de la culture, de l'éducation et de la communication a amendé le texte de la proposition de loi transmis par l'Assemblée nationale afin de clarifier et de conforter les missions du futur établissement et de mieux reconnaître la place des collectivités territoriales dans la définition et la mise en oeuvre de la politique de la musique.

Les principales modifications qu'elle a apportées sont les suivantes :

- inscription des notions d' égale dignité des répertoires et de droits culturels dans le corpus de règles qui doivent présider au fonctionnement du CNM (art. 1 er ) ;

- alignement de la mission de développement international du CNM sur celle actuellement exercée par le Bureau export (art. 1 er ) ;

- consolidation de la mission d'observation du CNM en lui donnant la capacité à recueillir toutes informations utiles, notamment commerciales et financières (art. 1 er ) ;

- renforcement de la mission transversale de développement territorial en octroyant au CNM la possibilité de conclure des contrats et de nouer des partenariats avec les collectivités territoriales et les acteurs de la filière musicale (art. 1 er ) ;

- élargissement de la composition du conseil professionnel à l'ensemble des organisations concernées par l'action du CNM , afin de permettre aux collectivités territoriales et aux structures publiques de la musique en régions d'y siéger (art. 2).

Elle a également supprimé les articles 8 bis et 8 ter , qui concernaient des demandes de rapport, compte tenu des délais accordés à l'administration pour les rédiger, susceptibles de les rendre inexploitables.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LE CENTRE NATIONAL DE LA MUSIQUE : UNE DOUBLE NÉCESSITÉ

Si le cinéma dispose depuis 1947 d'un établissement dédié, le CNC, doté de moyens significatifs et en mesure de faire dialoguer et coordonner les différentes composantes du secteur, tel n'est pas le cas de la musique. Pourtant, la musique enregistrée comme les spectacles de musique et de variétés représentent une part essentielle de la production culturelle française. Avec respectivement 583 millions d'euros de chiffre d'affaires et 930 millions d'euros de recettes de billetterie en 2017, soit 1,5 milliard d'euros , le poids du secteur dans son ensemble est légèrement supérieur à celui du cinéma, qui s'est établi en 2017 à 1,3 milliard d'euros.

L'idée de constituer une « maison commune » de la musique s'impose à la lumière de deux constats formulés de longue date par votre rapporteur.

A. PREMIER CONSTAT : UNE RÉVOLUTION NUMÉRIQUE QUI A BOULEVERSÉ LE SECTEUR

1. Le secteur musical a connu précocement le choc du numérique...

La musique est le premier secteur parmi les industries culturelles à avoir été frappé par la crise due à l'arrivée d'innovations numériques révolutionnant la consommation de produits culturels.

Dès la fin des années 1990, le piratage de morceaux, via Napsters et ses dérivés, a considérablement fragilisé l'économie de la filière. L'édition musicale a été particulièrement touchée, le chiffre d'affaires de la musique enregistrée ayant été divisé par trois entre 2002 et 2015 . Un secteur autrefois florissant a ainsi été très brutalement confronté à une perte massive et rapide de revenus.

2. .. mais semble le premier à avoir repensé son modèle économique

L'édition phonographique est parvenue à renouveler son modèle économique et ses modes de production pour renouer avec la croissance. Faute de pouvoir réellement juguler le piratage de grande ampleur, continuellement renforcé par l'amélioration de la qualité des réseaux, un travail important a été réalisé pour promouvoir des offres légales et plus ergonomiques notamment portées par l'IPod d'Apple, puis des offres légales illimitées.

En 2018, 41 % du chiffre d'affaires de la musique enregistrée provient du marché numérique . Cette croissance nouvelle de l'industrie est en grande partie due au développement d'offres de streaming payantes ou gratuites. Notre collègue Françoise Laborde, dans son rapport pour avis sur la mission « Médias, Livres et industries culturelles » sur le projet de loi de finances pour 2019, soulignait que, depuis 2013, le chiffre d'affaires du streaming a été multiplié par près de trois , le nombre d'écoutes par cinq et le nombre d'abonnés payants par trois. 4,4 millions de foyers ont aujourd'hui souscrits en France à une offre de streaming .

3. Le dynamisme du spectacle vivant

À la différence du marché du phonogramme qui a peiné à s'adapter aux évolutions numériques, le spectacle vivant connaît depuis plusieurs années un dynamisme particulièrement fort . Les concerts sont devenus un nouvel eldorado pour une industrie de la musique en crise. Même si les attentats de 2015 ont sévèrement affecté le spectacle vivant, le public est de nouveau en hausse, comme en témoigne l'augmentation de la fréquentation des festivals ces dernières années.

En 2017, le CNV a recensé 65 420 représentations payantes (en augmentation de 4 %), une moyenne de 404 entrées par représentation payante (+ 5 %), 26,4 millions d'entrées payantes (+ 9 %) et 930 millions d'euros de recettes de billetterie (+ 15 %).

À l'image de l'édition musicale , le spectacle vivant connaît aussi un bouleversement de son modèle économique . La généralisation des « contrats à 360° » ou contrats à droits multiples , qui suppriment les intermédiaires entre le producteur et l'artiste pour la gestion de l'ensemble de ses activités, et notamment les concerts, en est un exemple. Les producteurs essayent désormais de diversifier au maximum leurs activités pour multiplier leurs sources de revenus.

B. SECOND CONSTAT : UN SECTEUR TROP ÉCLATÉ

1. Des acteurs en manque d'unité

Cette révolution numérique a remis en question un équilibre qui reposait sur la suprématie de la musique enregistrée.

Le secteur de la musique apparaît en effet depuis des années traversé par des lignes de fracture multiples : musique enregistrée et spectacle vivant, secteur subventionné et secteur privé, musique « savante » et les autres, pratique professionnelle et amateur...

Les différents acteurs n'ont jusqu'à présent pas su construire une culture commune et présenter un front uni pour défendre des intérêts communs et valoriser le secteur, ce qui ne fait qu'exacerber la question, évoquée infra , de la composition du conseil d'administration du Centre national de la musique. Pourtant, les frontières entre les différentes familles musicales se sont estompées sous l'effet des évolutions connues par le secteur, avec un rapprochement dans les modèles de production et de distribution des différents styles musicaux et des différences devenues moins marquées dans le fonctionnement des établissements publics et des établissements privés. La vie musicale s'est internationalisée pour toutes les esthétiques.

2. Des défis communs à venir

Face à la complexité de la réglementation comme aux possibilités d'accès à la culture de plus en plus étendues, le secteur dans son ensemble a tout intérêt à parler d'une même voix pour être mieux entendu. Des enjeux majeurs vont en effet se présenter dans les années à venir, comme par exemple :

- la défense de la conception européenne du droit d'auteur . La récente adoption de la directive 2019/790 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 sur le droit d'auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique , a été l'occasion de débats extrêmement complexes, qui ont souligné la fragilité du modèle européen du droit moral, par opposition au modèle anglo-saxon du copyright ;

- la recherche d'une répartition plus équitable de la valeur entre l'ensemble des acteurs de la filière musicale face à la position désormais incontournable prise par les plateformes de musique par abonnement. Comme le relevait Sylvie Robert dans son rapport pour avis sur la mission « Culture » du projet de loi de finances pour 2018, « le système de rémunération des artistes sur ces plateformes, qui se base sur le pourcentage d'écoute de leurs streams par rapport au nombre de streams écoutés par l'ensemble des utilisateurs, se traduit par un écrasement de la valeur des artistes traditionnels au profit de ceux qui sont plébiscités par les jeunes consommateurs . » Elle observait également que le marché était faussé par l'apparition d'entreprises qui proposent leurs services pour acheter des streams sur internet ;

- l'impact sur la diversité culturelle des algorithmes mis en oeuvre par les services de streaming , qui sont susceptibles, comme cela est déjà le cas pour l'information, d'influencer très fortement les choix des utilisateurs, au risque d'une uniformisation des goûts.

Face à l'accélération des changements techniques et à l'évolution du modèle économique, l'impératif d'une réelle structuration de la filière se fait plus que jamais ressentir.

II. UN CENTRE NATIONAL DE LA MUSIQUE : « MAINTENANT OU JAMAIS »

A. UNE IDÉE ANCIENNE...

L'idée de donner une forme de cohérence au secteur de la musique a été évoquée dès 2011. Par un courrier en date du 11 avril 2011, le ministre de la culture de l'époque, Frédéric Mitterrand, confiait à M. Didier Selles, conseiller maître à la Cour des comptes, une mission visant à moderniser le cadre juridique du soutien à la filière. La lettre mentionne l'hypothèse d'un « outil de soutien dédié à ce secteur, inspiré le cas échéant du modèle emblématique que représente le CNC ».

Remis au mois de septembre 2011, le rapport, réalisé par MM. Franck Riester, Didier Selles, Alain Chamfort, Daniel Colling et Marc Thonon intitulé « Création musicale et diversité à l'ère numérique » proposait la création « d'un organisme public, qui pourrait prendre le nom de « Centre national de la musique (CNM) ».

Faute de moyens, le projet fut finalement abandonné en 2012 peu après l'arrivée d'Aurélie Filippetti à la tête du ministère chargé de la culture. Même si le contexte n'est plus le même qu'en 2011, notamment parce que la filière musicale est parvenue depuis lors à sortir de la crise dans laquelle elle était plongée, le constat formulé à l'époque reste pertinent dans ses grandes lignes. La musique bénéficie faiblement des aides publiques, à la différence du cinéma, via les taxes affectées au CNC . Le secteur est par ailleurs toujours éclaté entre plusieurs organismes de soutien et peine à fédérer ses acteurs autour d'une stratégie globale et cohérente.

B. ... RELANCÉE IL Y A DEUX ANS...

Face aux profondes transformations subies par la filière musicale et à l'imbrication croissante entre les secteurs de la musique enregistrée et du spectacle vivant, Françoise Nyssen, alors ministre de la culture, a relancé en 2017 l'idée d'une « maison commune de la musique » en confiant à Roch-Olivier Maistre le soin de rédiger un rapport sur le sujet.

Il a confirmé l'intérêt de créer un établissement public pour donner un nouveau souffle à la politique musicale de l'État « au bénéfice de l'ensemble de la vie musicale, et au premier chef des artistes qui en sont l'âme ». Il y a vu un moyen de faire de nouveau primer l'intérêt général et d'offrir à la filière musicale un cadre lui permettant de se rassembler et de traiter en commun les enjeux susceptibles d'émerger à l'avenir. Il identifiait, dans son rapport, trois principaux besoins : « l'observation, l'appui au développement international et le soutien, dans une optique de diversité culturelle ».

Saluées par l'ensemble de la filière, les conclusions du rapport de Roch-Olivier Maistre ont marqué une étape importante dans la relance du projet. Par une lettre en date du 7 mai 2018, le Premier ministre a confié aux députés Pascal Bois et Émilie Cariou une mission de préfiguration du Centre national de la musique qui s'inscrit dans la droite ligne des travaux de Roch-Olivier Maistre. Le rapport a été remis au mois de novembre 2018. Il présente un état complet de l'industrie musicale, trace le cadre d'un projet ambitieux et propose des hypothèses de financement pour le Centre.

C. ... QUI APPARAÎT DÉSORMAIS COMME LA DERNIÈRE CHANCE

Déjà échaudés par le rétrécissement, en décembre dernier, du périmètre du crédit d'impôt pour le spectacle vivant dans le cadre de la loi de finances pour 2019, les acteurs de la filière musicale ne cachent pas leur inquiétude à l'idée que le projet puisse de nouveau échouer , si l'État ne manifestait pas un engagement suffisant pour le faire aboutir. Votre rapporteur a senti combien la relance du projet apparaissait comme l'opération de la dernière chance.

Pourtant, l'intérêt des acteurs de la filière musicale pour le projet reste intact. Il semble même renforcé du fait de l'internationalisation du marché de la musique ces dernières années. Le CNM leur apparaît comme un outil de soutien déterminant pour maintenir ou améliorer la position de notre pays sur le marché international de la musique, où la concurrence est certes accrue sur le marché français, mais où les opportunités de conquérir des parts de marché à l'étranger se sont également multipliées.

Mais les acteurs estiment que si le projet n'aboutit pas sous le ministère de Franck Riester, soutien du projet de la première heure, cela signifie qu'il ne se fera jamais.

C'est pourquoi la création du CNM est aujourd'hui essentielle, l'industrie musicale conservant encore un souvenir amer de l'abandon en 2012 du premier projet de Centre national de la musique .

III. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI

A. UNE PROPOSITION DE LOI QUI FAIT SUITE AU RAPPORT « BOIS-CARIOU »

La proposition de loi relative à la création du Centre national de la musique a été déposée à l'Assemblée nationale le 27 mars 2019 et discutée en séance publique le 6 mai 2019.

Elle fait suite au rapport réalisé par les députés Pascal Bois, membre de la commission des affaires culturelles, et Émilie Cariou, membre de la commission des finances. Ils sont également les deux premiers signataires de la proposition de loi.

La discussion à l'Assemblée nationale a été marquée par un fort consensus sur l'objectif, mais également par des interrogations qui n'ont pas été levées sur la gouvernance et les moyens donnés au futur CNM .

B. LA CRÉATION D'UN EPIC CHARGÉ DANS UN PREMIER TEMPS DE LA MUTUALISATION DE FONCTIONS EXISTANTES

L' article 8 prévoit la création du CNM le 1 er janvier 2020 .

L'article 1 er institue un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) placé sous la tutelle du ministère de la culture. Tout en facilitant la reprise des personnels des organismes qui devraient rejoindre le CNM, ce choix devrait apporter une certaine souplesse dans la gestion , qui paraît nécessaire pour lui permettre de mener à bien ses missions dans un domaine qui connaît de nombreuses évolutions.

Cet article confie au nouvel établissement plusieurs missions dans le champ de la musique et des variétés en matière d'observation, d'information, de formation, d'expertise, de valorisation du patrimoine musical, de développement international et de soutien à ce secteur . Une partie de ces missions étaient précédemment exercées par cinq organismes : un établissement public, le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV), et quatre associations de droit privé, le bureau export (Burex), le club action des labels et des disquaires indépendants français (CALIF), le centre d'informations et de ressources pour les musiques actuelles (IRMA) et le fonds pour la création musicale (FCM). Leurs missions sont étoffées et complétées par de nouvelles responsabilités en matière de développement de l'éducation artistique et culturelle, de promotion de la parité au sein des professions musicales, de veille technologique et de soutien à l'innovation.

Par coordination avec les missions dévolues au CNM, la proposition de loi prévoit l'intégration des cinq organismes existants en son sein. L' article 7 supprime le CNV. L'article 5 prévoit la reprise par le CNM des contrats et conventions conclues par le CNV, ainsi que de ses biens, droits et obligations. Il permet également au CNM de reprendre les biens, droits et obligations des quatre associations de droit privé, sous réserve de leur dissolution volontaire préalable, qui devra être précédée de la signature de conventions relatives aux modalités de leur rattachement.

C. DES FINANCEMENTS EN PROVENANCE DES ORGANISMES FUSIONNÉS

Les ressources du futur Centre national de la musique devraient provenir de quatre sources pour s'élever à 78 millions d'euros.

L'article 4 prévoit ainsi que le Centre recevra la taxe sur les spectacles de variété actuellement perçue par le CNV, pour un montant de 35 millions d'euros par an .

L'article 4 bis propose de donner aux organismes de gestion collective la possibilité d'affecter au CNM les contributions actuellement destinées à l'action culturelle et sociale. A minima , les OGC devraient y consacrer les fonds d'environ six millions d'euros destinés aux organismes qui ont vocation à fusionner au sein du CNM.

L'État subventionne par ailleurs ces mêmes organismes pour sept millions d'euros .

Enfin, l'article 3 donne au Président du CNM la capacité de délivrer au nom du ministre de la culture les agréments fiscaux des crédits d'impôt pour la production d'oeuvres phonographiques et pour les dépenses de production de spectacle vivant, pour un montant total de 30 millions d'euros .

Ces montants correspondent à la simple fusion d'organes existants. Ils reposent par ailleurs sur la volonté des OGC de continuer leur soutien. Ils devraient cependant en toute logique être complétés par un soutien de l'État qui reste à définir, et par un engagement financier de la filière, les deux étant étroitement reliés.

IV. DEUX CONDITIONS NÉCESSAIRES POUR GARANTIR LE SUCCÈS DU CENTRE NATIONAL DE LA MUSIQUE

Votre rapporteur a la conviction que le Centre national de la musique a l'obligation d'être un succès, afin de ne pas compromettre le destin de toute la filière.

Construction ambitieuse, portée par un ministre de la culture mobilisé dès 2011 sur ce sujet et attendu avec impatience par l'ensemble des acteurs, le CNM ne réunit cependant pas l'adhésion unanime. Il est essentiel que les différents acteurs de la filière musicale n'aient pas le sentiment d'y perdre en se rassemblant au sein de cette maison commune , faute de quoi le risque est grand que certaines des associations de droit privé, dont la composition est aujourd'hui dominée par les acteurs de la filière musicale et qui vont renoncer à leur indépendance sur la gestion des programmes d'aides en rejoignant le CNM, refusent in fine le principe de leur dissolution.

Votre rapporteur estime que deux critères doivent être remplis afin de transformer cette opportunité en chance.

A. UNE MOBILISATION DES ACTEURS QUI PASSE PAR UNE DÉFINITION DE LA GOUVERNANCE RESPECTUEUSE DE CHACUN

Comme le CNM ne relève pas d'une nouvelle catégorie d'établissements publics, puisqu'il existe déjà plusieurs établissements qui poursuivent un objet analogue, à l'image du Centre national du cinéma et de l'image animé, du Centre national du livre ou du Centre national de la danse, l'article 2 de la proposition de loi se borne à fixer les grands principes de gouvernance de l'établissement . À ce titre, il prévoit la présence, à côté d'un conseil d'administration, d'un conseil professionnel destiné à représenter l'ensemble de la filière musicale.

Si aucun des acteurs ne remet en cause la place prépondérante qui pourrait revenir aux représentants de l'État dans le dispositif, tant l'État paraît le seul à même à la fois de porter une vision stratégique intégrant l'ensemble des composantes de la politique musicale et de faire émerger l'intérêt général, beaucoup s'inquiètent de perdre leur pouvoir de décision si, pour des raisons d'efficacité, le choix était fait d'un conseil d'administration resserré. C'est particulièrement vrai pour les organismes de gestion collective, qui sont par ailleurs appelés à contribuer directement au financement du CNM aux côtés de l'État. C'est aussi une question qui anime les entrepreneurs de spectacle vivant, qui ne sont représentés par aucun organisme de gestion collective, et ont le sentiment de contribuer au financement de l'établissement, par le biais de la taxe sur les spectacles de variétés, jusqu'ici affectée au CNV et qui devrait venir abonder les caisses du CNM à compter du 1 er janvier. À l'inverse, les organisations professionnelles du secteur subventionné estiment qu'une ouverture du conseil d'administration du CNM à des entreprises qui définiraient les critères d'attribution de leurs propres aides serait génératrice de conflits d'intérêt.

Le comité de pilotage du CNM, présidée par Catherine Ruggeri, inspectrice générale des affaires culturelles, conduit actuellement des consultations pour déterminer les modalités de composition du conseil d'administration et du conseil professionnel du CNM. Quelles que soient les solutions retenues, il conviendra de trouver un équilibre entre le souci d'efficacité, la préservation de l'intérêt général et la nécessité de permettre à chacun de s'exprimer. À cet égard, il paraît important que les collectivités territoriales ne soient pas les grandes oubliées de cette gouvernance au regard de leur contribution à l'animation et au financement de la politique musicale dans les territoires. La question de l'association des parlementaires au conseil d'administration mériterait également d'être posée tant leur présence permet bien souvent de garantir un équilibre dans la gouvernance lorsque celle-ci se révèle complexe.

Une fois la gouvernance actée, il est primordial d'associer les personnels du futur CNM , majoritairement issus de l'actuel CNV, mais également des structures fusionnés, qui devront former un tout cohérent le 1 er janvier 2020. Ces personnels sont en attente de décisions depuis trop longtemps, et travaillent dans des conditions difficiles qui sont le reflet de l'incertitude persistante des pouvoirs publics. Il est dès lors primordial de pouvoir le plus rapidement possible leur proposer un projet pour l'établissement, prélude à la mobilisation plus large de l'ensemble du secteur .

B. TENIR L'ENGAGEMENT MORAL QUE CONSTITUE LE SOUTIEN DU GOUVERNEMENT À LA PROPOSITION DE LOI

1. Une incertitude qui ranime les divisions

Alors que toute la profession réclame depuis des années la constitution d'un Centre national de la musique, la naissance de celui-ci est entachée par les incertitudes qui pèsent sur son financement et donc, ses capacités d'action. Le calendrier choisi par le Gouvernement respecte l'ordre juridique, avec la création de l'établissement dans une loi ordinaire et le renvoi de la question de ressources suffisantes (articles 4 et 4 bis ) au projet de loi de finances. Cependant, à la différence des transferts de compétences aux collectivités locales qui s'effectuent dans cet ordre , aucune précision chiffrée n'a encore été apportée par le Ministre de la Culture quant au niveau des engagements de l'État .

Dès lors, les acteurs concernés adoptent une forme de méfiance quant à la réalité de l'engagement du Gouvernement, qui semble à l'heure actuelle encore en débat au sein de l'exécutif.

Cet attentisme ravive des divisions entre des acteurs de la filière que la création du CNM était précisément censée rassembler autour d'objectifs communs, comme en témoignent deux lignes de fracture.

Les organismes de gestion collective , qui gèrent des fonds privés pour le compte des auteurs, ont fait part de leur expectative. Depuis 2011 et le rapport « Selles-Riester », ils semblent prêts à participer au financement d'un Centre National de la Musique, mais à la double condition de ne pas être les seuls - ce qui implique des subventions publiques- et de participer à la gouvernance à hauteur de leur contribution. Votre Rapporteur reviendra sur ce point dans son commentaire de l'article 4 bis de la présente proposition de loi.

Les représentants du secteur du spectacle vivant , comme votre Rapporteur y reviendra également dans son commentaire sur l'article 4 , estiment contribuer plus, via la taxe sur les spectacles, que le secteur de la musique enregistrée. Cette position contribue à complexifier le futur organigramme.

2. Conforter l'ambition de la filière

Comme on le voit, l'absence d'engagement de l'État à ce stade fragilise l'adhésion de la profession et pose légitimement la question de l'ambition portée par le CNM, simple outil de regroupement de structures déjà existantes ou bien embryon de « CNC » à même de fédérer la filière. Le chiffre le plus souvent évoqué, issu du rapport « Bois-Cariou », s'élève à environ 20 millions d'euros en année pleine. Il semble faire consensus dans la profession, à tel point qu'il est maintenant considéré comme la subvention référence qui permettra de mesurer l'ambition de l'Etat. Tout engagement inférieur en année pleine sera considéré comme un retrait, même si la forme peut être discutée (subvention directe ou affectation de taxe).

Le fait pour le Gouvernement d'avoir soutenu l'initiative portée par les auteurs de la proposition de loi constitue, aux yeux de votre rapporteur, un engagement moral qui doit trouver sa concrétisation lors du prochain projet de loi de finances. Rien n'obligeait en effet le Gouvernement à mener à bien ce projet, au nom d'impératifs budgétaires bien connus. À ce stade avancé de la procédure, le recul que traduirait une absence de signal budgétaire fort paralyserait les initiatives des acteurs privés et signerait la fin des ambitions de la filière .

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Création d'un établissement public chargé d'une série de missions de soutien à l'ensemble de la filière musicale

Objet : cet article crée un nouvel établissement public à caractère industriel et commercial, dénommé « Centre national de la musique », et lui assigne diverses missions de soutien et d'accompagnement au secteur de la musique enregistrée et du spectacle vivant et de variétés.

I. - Le texte de la proposition de loi

Cet article crée un Centre national de la musique (CNM), à l'instar des centres nationaux qui existent dans d'autres secteurs culturels, tels le cinéma, le livre ou la danse.

Placé sous la tutelle du ministère de la culture comme les autres centres nationaux exerçant dans le secteur culturel, le CNM prendrait la forme d'un établissement public à caractère industriel et commercial . En tant qu'établissement public, il serait doté de la personnalité morale et disposerait d'une autonomie administrative et financière.

Le choix de conférer au CNM le statut d'EPIC n'allait pas forcément de soi, alors que d'autres centres nationaux exerçant dans le domaine culturel, à l'image du Centre national du cinéma et de l'image animé (CNC) ou du Centre national du lire (CNL), disposent du statut d'EPA. Il est motivé par deux raisons.

D'une part, il répond à la volonté de maintenir l'essentiel de la régulation de la filière musicale entre les mains du ministère de la culture . En tant qu'EPIC, le CNM ne devrait pas pouvoir intervenir en propre en matière de régulation du secteur, à la différence du CNC, dont le statut d'EPA lui permet d'exercer directement des prérogatives de puissance publique. Le maintien de la compétence des services du ministère de la culture en matière d'élaboration des politiques publiques de la musique rejoint les préoccupations exprimées par l'Union syndicale des employeurs du secteur public du spectacle vivant (USEP-SV), qui estime que le CNM « ne peut être qu'un établissement de soutien économique au secteur musical » et ne doit pas « se substituer, ni même doubler le rôle joué par le ministère de la culture » au travers de la direction générale de la création artistique (DGCA) et des directions régionales des affaires culturelles (DRAC).

D'autre part, il se justifie par le fait que le CNM n'est pas créé ex nihilo , mais par agrégation de plusieurs organismes existants destinés à soutenir le secteur de la musique, à savoir le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV), qui est un EPIC, mais aussi le Bureau Export (Burex), le centre d'informations et de ressources pour les musiques actuelles (IRMA), le Fonds pour la création musicale (FCM) et le Club action des labels indépendants français (CALIF) , qui sont des associations de droit privé. Le statut d'EPIC du CNM devrait faciliter la transition et la reprise des personnels de ces différents organismes , exerçant sur la base de contrats de droit privé. Comme le relèvent Pascal Bois et Émilie Cariou dans leur rapport de mission de préfiguration du Centre national de la musique, « le statut d'EPA imposerait, par principe, la conclusion de contrats de droit public, y compris pour les agents du futur établissement, voire en toute rigueur la titularisation dans la fonction publique d'État de ceux de ces agents occupant un emploi permanent, sauf dérogation expressément prévue par la loi ».

À la différence de l'actuel Centre national de la chanson, des variétés et du jazz, qui intervient aujourd'hui exclusivement dans le domaine du spectacle vivant de musiques actuelles et de variétés en direction des entreprises assujetties à la taxe sur les recettes de billetterie, le périmètre de compétences de ce nouvel établissement devrait porter sur l'ensemble de la filière musicale , c'est-à-dire à la fois les acteurs du spectacle vivant (producteurs, exploitants, diffuseurs, tourneurs...) et ceux de la musique enregistrée (producteurs, éditeurs, distributeurs...), mais aussi les entreprises lucratives comme les acteurs du secteur subventionné. Toutes les esthétiques musicales seraient concernées, comme le préconise Roch-Olivier Maistre dans son rapport d'octobre 2017 « Rassembler la musique pour un centre national ».

En dépit de ce large périmètre, le CNM ne devrait pas pour autant porter l'ensemble de la politique musicale , comme le prouve le choix de l'EPIC. Dans leur rapport au Premier ministre, Pascal Bois et Émilie Cariou recommandent que l'établissement se concentre sur le soutien aux activités ou aux actions d'initiative privée concourant à l'objectif d'intérêt général de création ou de diffusion de musique, afin de tenir compte des actions déjà menées par le ministère de la culture et ses opérateurs, tels les opéras ou les orchestres, qui contribuent largement à la mise en oeuvre de la politique publique de l'État en matière de musique. Ils précisaient qu'ils entendaient par initiative privée « toute initiative portée par une structure de droit privé - quelle qu'en soit la forme (entreprises, sociétés civiles, GIE, associations, fondations notamment), que cette structure poursuive ou non un but lucratif et quel que soit son niveau de financement éventuel sur fonds publics ».

Le présent article assigne différentes missions à l'établissement. Elles coïncident parfaitement avec les besoins identifiés par Roch-Olivier Maistre dans son rapport de réflexion de 2017 : l'observation, l'information, la formation, le développement international et le soutien.

Le 1° lui confie une mission générale de soutien au secteur professionnel de la musique dans toutes ses composantes et de préservation de sa diversité.

Le 2° dresse la liste des activités de la filière musicale qu'il sera chargé de soutenir, tant au niveau national que dans les territoires, à savoir « la production, l'édition, la promotion, la distribution et la diffusion de musique sous toutes ses formes et auprès de tous les publics », ce qui renvoie aux différents métiers de la musique enregistrée et du spectacle vivant.

Aucune précision n'est en revanche apportée sur la nature de ce soutien et des conditions pour en bénéficier . Ces précisions devraient être apportées par voie réglementaire.

Il existe aujourd'hui plusieurs dispositifs de soutien gérés, soit directement par l'État, à l'image du crédit d'impôt en faveur de la production phonographique ou du crédit d'impôt pour les entreprises du spectacle vivant, soit par les différents organismes qui devraient être absorbés par le futur CNM, telles les aides automatiques et sélectives octroyées par le CNV pour les projets menés dans le domaine du spectacle vivant, les aides aux professionnels de la musique français actifs à l'export accordées par le Burex, les aides financières au spectacle vivant, à la production et à la distribution phonographiques, à la formation d'artiste et aux éditeurs allouées par le FCM ou encore les aides aux disquaires indépendants octroyées par le CALIF. Le CNV appuie également les projets territoriaux dans le domaine de la musique en encourageant la conclusion de conventions tripartites avec la DRAC et les collectivités territoriales (jusqu'ici des régions), dénommées « contrats de filière ».

Dans leur rapport, Pascal Bois et Émilie Cariou alertent sur les risques de contrariété avec les règles du droit de l'Union européenne en matière d'aides d'État dans le cas où la proportion de financements publics apportés à un même projet serait supérieure à un certain seuil. Ils soulignent l'importance d'effectuer « un contrôle systématique du taux d'intensité des aides octroyées ». Cette opération devrait être rendu plus aisée grâce au regroupement du pilotage de ces différents dispositifs d'aide au sein du CNM. Pascal Bois et Émilie Cariou suggèrent de négocier avec la Commission européenne la possibilité d' adapter le plafonnement du taux aux spécificités de chaque segment de la chaîne de valeur et à l'objectif de préservation de la diversité musicale, pour permettre d'apporter un soutien accru aux esthétiques réputées les plus fragiles et aux projets portés par des TPE ou des artistes émergents. Ils plaident par ailleurs en faveur d'un renforcement des aides sélectives par rapport aux aides automatiques de manière à soutenir davantage les projets qui comportent une prise de risques importante au profit de l'innovation, de l'émergence de nouveaux créateurs et du maintien d'une création diversifiée.

Le 3° du présent article confie au CNM une mission de soutien à l'exportation des oeuvres et des artistes français à l'international . Cette mission était jusqu'à présent assurée par le Burex, créé en 1993 pour assurer l'accompagnement de la filière musicale française dans le développement de ses artistes à l'international, dans le domaine des musiques actuelles et de la musique classique et du jazz. L'exercice de cette mission par le CNM paraît totalement essentielle à l'ère du numérique. La disparition des frontières à l'heure de l'internet a également touché la musique, désormais pleinement mondialisée. Il est désormais indispensable de prendre en compte la dimension internationale d'un projet dès le moment de sa conception. Votre rapporteur observe d'ailleurs que l'ensemble de la filière musicale appelle de ses voeux l'exercice d'une mission de soutien à l'export par le CNM. Elle dispose d'un caractère très fédérateur dans l'objectif de rassembler la filière musicale.

Le 4° assigne au nouvel établissement une mission d'observation de l'économie de la filière musicale . Le manque de données fiables et transversales constitue aujourd'hui un handicap pour permettre à l'État d'arrêter les modalités de régulation les plus pertinentes de ce secteur, compte tenu des fortes mutations qu'il connaît, qu'il s'agisse de l'importance prise par le numérique ou des phénomènes de concentration.

La loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine a prévu la mise en place d'un observatoire de l'économie de l'ensemble de la filière musicale qui devait être géré par le CNV. Faute d'accord entre les professionnels sur la composition de son comité d'orientation, celui-ci n'a jamais pu débuter ses travaux. Dans son rapport d'octobre 2017, Roch-Olivier Maistre préconise « la constitution d'un comité scientifique, composé de spécialistes, ainsi que de comités de projet, associant les producteurs de données ». Pascal Bois et Émilie Cariou, pour leur part, suggèrent, sur le modèle du CNC, la mise en place d'une « direction des études et de la veille économique, entièrement financée sur fonds publics, dotée d'équipes expertes et d'un budget lui permettant à la fois de produire et d'acquérir des données et des études ». Quelle que soit la solution retenue, il conviendra qu'elle permette de garantir l'efficacité, la fiabilité et l'indépendance des travaux conduits, afin de ne pas reproduire les blocages passés.

Le 5° du présent article confie au CNM une mission d'information et d'orientation sur le secteur de la musique , aujourd'hui principalement exercée par l'IRMA. Ce centre d'information a élaboré un annuaire des professionnels et des fiches pratiques juridiques et fiscales. Il a conçu une plateforme d'annonce et de mise en relation professionnelle. Il prodigue par ailleurs des conseils individualisés. Ces différents outils seraient désormais gérés par le CNM, qui pourrait proposer sur cette base une plateforme numérique d'information, d'orientation professionnelle et de repérage des acteurs dans le domaine de la musique. Une attention particulière pourrait être accordée aux créateurs et aux structures porteuses de projets dans les territoires ruraux et les zones urbaines prioritaires, qui sont aujourd'hui insuffisamment répertoriées.

Le 6° du présent article attribue au CNM une mission en matière de formation professionnelle à destination des entrepreneurs. L'IRMA propose en effet aujourd'hui un catalogue de formation visant à la professionnalisation et à l'accompagnement des acteurs de la filière. Dans leur rapport de mission, Pascal Bois et Émilie Cariou indiquent néanmoins que le CNM ne devrait pas se substituer au secteur privé en matière d'offre de formation, mais plutôt avoir pour ambition de structurer cette offre, en veillant à ce qu'elle réponde aux besoins particuliers du secteur, notamment lorsqu'apparaissent des demandes pour de nouvelles compétences, et soit accessible aux publics mal desservis, tels les artistes entrepreneurs ou les formateurs eux-mêmes. L'organisation par le CNM de formations en ligne ou de stages courts à destination de certains territoires devrait se concentrer sur les domaines dans lesquels est constatée une carence du secteur privé.

Le 7° du présent article assigne enfin au CNM une mission en matière de veille technologique et de soutien à l'innovation , compte tenu des profondes mutations du secteur, appelées à se poursuivre dans les prochaines années sous l'effet de la révolution numérique. Le bilan des dispositifs de soutien à l'innovation, aujourd'hui directement gérés par les services centraux du ministère de la culture, est mitigé. Chaque année, les crédits ne sont pas totalement consommés, du fait de critères d'attribution trop restrictifs, et financent davantage des projets de mise à niveau d'infrastructures que des investissements véritablement fondés sur une innovation.

II. - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Lors de l'examen de cette proposition de loi en première lecture, les députés ont adopté une trentaine d'amendements à cet article.

Les députés ont notamment étendu le champ d'intervention du CNM aux spectacles de variétés pour, d'une part, garantir l'alignement de son périmètre sur celui du CNV, dont il doit reprendre l'ensemble des attributions en application de l'article 5 de la présente proposition de loi, et, d'autre part, reconnaître la contribution significative de ces spectacles aux recettes de la taxe sur la billetterie et à l'émergence de nouveaux artistes.

Ils ont précisé la méthode de fonctionnement du CNM dans l'exercice de ses missions , qui doit s'appuyer sur la « concertation permanente avec l'ensemble du secteur » et l'écoute des professionnels.

Les députés ont ajouté trois nouvelles missions au CNM :

- celle de favoriser un égal accès des femmes et des hommes aux professions musicales ;

- celle de valoriser le patrimoine musical . La conservation et la valorisation du patrimoine musical font partie des missions que l'article 30 de la loi n° 2002-5 du janvier 2002 relative aux musées de France a confiées, en ce qui concerne la chanson, les variétés et le jazz, au CNV, même si celui-ci ne la remplit pas dans les faits. À titre de comparaison, la conservation, la restauration et la valorisation du patrimoine cinématographique figurent parmi les missions que la loi a confiées au CNC ;

- celle de participer au développement de l'éducation artistique et culturelle (EAC) dans son champ de compétences. Il s'agissait de l'une des préconisations de Roch-Olivier Maistre dans son rapport d'octobre 2017. Cette mission permettrait au futur établissement de ne pas être exclusivement tourné vers l'offre de musique, mais de s'intéresser également à la question des publics. Les organismes de gestion collective (OGC), qui sont appelés à contribuer financièrement au fonctionnement de l'établissement, soutiennent l'élargissement du périmètre du CNM à cette mission, compte tenu des obligations législatives auxquelles ils sont assujettis en application de l'article L. 324-17 du code de la propriété intellectuelle en matière de soutien au développement de l'EAC.

Certains acteurs, à l'image de l'USEP-SV, ne cachent pas leur inquiétude à l'idée que l'établissement puisse être investi d'une mission en matière d'EAC, estimant qu'il ne s'agit pas d'une action culturelle ponctuelle, mais d'une mission de service public dont la mise en oeuvre relève des ministères de la culture et de l'éducation nationale et des collectivités territoriales.

Toutefois, le CNM est également chargé, en vertu du présent article, d'une mission de structuration de la filière à l'échelle des territoires. Il serait regrettable de ne pas profiter des contrats de filière pour encourager les acteurs de la musique à participer à la politique d'éducation artistique et culturelle. Un choix similaire a d'ailleurs été retenu concernant le CNC, dont l'une des missions a trait à l'éducation à l'image.

D'après les informations recueillies par votre rapporteur, l'engagement du CNM en matière d'EAC prendrait avant tout la forme de formations à l'intention des professionnels dans le champ de la médiation. À ce stade, le budget de 3 millions d'euros que l'établissement devrait pouvoir consacrer à cette mission ne lui permettra pas de se substituer à l'action du ministère de la culture en la matière. Il pourrait, à terme, chercher à intervenir dans les domaines ou les territoires où des carences sont constatées.

S'agissant de ses missions de soutien, les députés ont :

- adopté un amendement visant à permettre à l'ensemble du secteur professionnel de la musique, dans toute la diversité de ses pratiques , d'en bénéficier ;

- ajouté la création parmi la liste des activités soutenues par le CNM, pour rappeler le rôle fondamental des artistes dans la chaîne de valeur de la filière musicale. Dans leur rapport de préfiguration, Pascal Bois et Émilie Cariou recommandent d'ailleurs la création d'un dispositif de soutien direct aux auteurs, compositeurs, artistes-interprètes et éditeurs de musique, qui pourrait prendre la forme, soit d'une subvention, soit d'un crédit d'impôt ;

- précisé que le soutien apporté par le CNM était complémentaire des dispositifs directement déployés par le ministère de la culture , afin de garantir que la création du CNM n'ait pas pour effet de remettre en cause le soutien direct et pérenne aux structures reposant sur la subvention publique.

En ce qui concerne la mission de soutien à l'export, les députés ont confié au CNM le soin d'assurer également le rayonnement des oeuvres des artistes français à l'étranger. Ils ont précisé la mission d'information du CNM pour lui donner un rôle d' expertise sur le secteur. Ils ont enfin ouvert le bénéfice de la mission de formation, jusqu'ici limitée aux entreprises de la filière musicale, à tous les porteurs de projets du secteur musical.

À l'initiative de son rapporteur, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a introduit un paragraphe visant à garantir l'association des collectivités territoriales et de leurs groupements à l'exercice des missions du CNM , compte tenu de leur participation déterminante à la politique publique du soutien à la musique. Aucune précision n'est cependant apportée quant aux modalités de cette association, même si le rapport émet le voeu qu'un représentant des collectivités territoriales siège au conseil d'administration de l'établissement.

Les députés ont également autorisé la possibilité de transférer au CNM la gestion du fonds d'intervention pour la sécurité des sites et manifestations culturels en ce qui concerne le spectacle vivant . Ce fonds a été créé par le décret n° 2019-203 du 18 mars 2019 pour aider les entreprises à financer leurs actions destinées à améliorer les conditions de sécurité des manifestations de spectacle vivant. Il vient en remplacement du fonds d'urgence, arrivé à échéance à la fin de l'année 2018 et géré depuis sa création par le CNV. Le ministre chargé de la culture pourra passer une convention avec le CNM pour lui confier l'instruction et la gestion des aides délivrées au titre de ce fonds d'intervention. Ce transfert de compétence paraît logique, puisque le décret qui a institué ce fonds d'intervention donnait déjà compétence au directeur du CNV pour attribuer les aides aux entreprises de spectacles, au-delà de la compétence générale octroyée au ministre chargé de la culture en la matière.

III. - La position de votre commission

Bien que l'intervention du législateur ne soit nécessaire que pour créer de nouvelles catégories d'établissement public, le recours à la loi pour prévoir la création du CNM était important . Plusieurs établissements nationaux ont déjà pour mission de promouvoir des objectifs dans le domaine culturel par l'attribution de concours financiers et forment une catégorie d'établissements publics à laquelle le CNM devrait être rattaché. Toutefois, la plupart d'entre eux sont des EPA. En effet, le statut d'EPIC s'applique généralement aux établissements qui tirent la majorité de leurs ressources de redevances perçues sur les usagers du service qu'ils rendent. À l'inverse, le financement du CNM devrait provenir de l'affectation de taxes, de subventions de l'État et de divers concours publics et privés. C'est ce qui justifie d'avoir conféré par la loi le statut d'EPIC au CNM, pour s'assurer que le juge ne puisse pas le requalifier en EPA en cas de contentieux.

Par ailleurs, l'intervention du législateur était de toute façon nécessaire pour supprimer les dispositions législatives relatives au CNV , que le CNM est appelé à remplacer, prévues à l'article 30 de la loi n° 2002-5 du janvier 2002 relative aux musées de France.

Concernant le champ d'intervention du CNM, votre commission a souhaité préciser sa rédaction, suite à l'ajout justifié par les députés des variétés dans le périmètre de l'établissement. Elle a estimé que la rédaction résultant des travaux de l'Assemblée nationale créait une confusion en distinguant les spectacles de variétés du reste du spectacle vivant dont ils sont pourtant partie intégrante. Elle a donc prévu que le périmètre du CNM porte sur la musique et les variétés, qu'elles soient sous la forme d'un enregistrement ou d'un spectacle (amendement COM-1 ).

Le présent article octroie au CNM des compétences larges qui s'articulent autour de trois piliers :

- améliorer la connaissance du secteur , ce qui justifie son rôle en matière à la fois d'observation et d'information. Votre commission a d'ailleurs estimé que, compte tenu des problèmes posés par le manque de connaissances approfondies du secteur, du fait d'un manque de données agrégées, il convenait de renforcer les moyens à la disposition du nouvel établissement public pour observer correctement le secteur. Elle lui a confié la capacité de recueillir toutes informations utiles , notamment commerciales et financières, sur le secteur et d'en assurer l'information, dans le respect de la protection des données à caractère personnel et du secret des affaires (amendement COM-4 ) ;

- fournir une capacité d'expertise lui permettant de remplir des missions de conseil et d'aide à la structuration et au développement des entreprises, comme des artistes, ce qui recouvre ses missions en matière de formation et de développement international. Votre commission a considéré que la mission confiée au CNM en matière de développement international était plus restreinte que celle exercée jusqu'ici par le Burex. Elle a donc modifié la rédaction de l'alinéa concerné pour que le soutien du CNM porte sur les artistes « made in France » et non exclusivement les artistes français et que l'établissement soit aussi chargé de favoriser la mobilité des artistes (amendement COM-5 ) ;

- soutenir l'ensemble du secteur par le biais de différents programmes d'aide . À ce titre, votre commission a précisé que cette mission de soutien s'exercerait dans le respect à la fois de l' égale dignité des répertoires (amendement COM-2 ) et des droits culturels (amendements identiques COM-33 rectifié de Mme Sylvie Robert et COM-34 rectifié de Mme Sonia de la Provôté).

Elle a également chargé le CMN de favoriser la contribution du secteur de la musique et des variétés à la mise en oeuvre de la politique en matière de protection de l'environnement et de développement durable (amendement COM-11 ).

Votre rapporteur estime que l'action du CNM dans les territoires est primordiale. Dans son rapport, Roch-Olivier Maistre mentionnait expressément, parmi les principaux axes de la mission de soutien qui pourrait être confiée à un futur centre national, « l'appui aux projets territoriaux » afin d'accroître l'équité territoriale. D'après les informations recueillies par votre rapporteur, le CNM devrait poursuivre l'action engagée par le CNM dans le développement des contrats de filière. Par ailleurs, il serait envisagé de confier au DRAC ou au DAC le rôle de délégué territorial du CNM pour permettre à l'établissement de jouer un rôle étroit dans les territoires.

La rédaction actuelle du présent article ne fait toutefois pas directement référence à cette mission territoriale. Elle prévoit simplement que le CNM doit exercer sa mission de soutien au niveau territorial (alinéa 4) et associer « les collectivités territoriales et leurs groupements à l'exercice de ses missions » (alinéa 14). Votre commission a donc souhaité lui confier une mission transversale de structuration de la filière musicale dans les territoires , en lui donnant la possibilité de conclure des conventions et de nouer des partenariats avec les collectivités territoriales et les acteurs de la filière musicale, ce qui devrait lui permettre de poursuivre l'action engagée par le CNV dans le domaine du spectacle vivant avec la signature de contrats de filière (amendement COM-6 ).

S'agissant du rôle du CNM en matière de développement de l'éducation artistique et culturelle , votre commission a précisé la complémentarité de cette intervention avec le rôle central joué par l'État et les collectivités territoriales en la matière (amendement COM-3 ). Le CNM n'a évidemment pas vocation à se substituer à eux.

Enfin, votre commission a levé une ambiguïté rédactionnelle, en précisant que le CNM pourrait gérer l'ensemble de la partie du fonds pour la sécurité des sites et manifestations culturels consacrée au spectacle vivant, c'est-à-dire non seulement les demandes d'aides qui concerneraient des sites et manifestations culturels n'entrant pas dans son champ de compétences, tels des festivals dans le domaine du théâtre, de la danse ou de la photographie pourraient être concernés, mais évidemment les entreprises et festivals du domaine de la musique (amendement COM-7 ).

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié .

Article 2

Règles de gouvernance du Centre national de la musique

Objet : cet article prévoit que le CNM, d'une part, est administré par un conseil d'administration dont la composition est renvoyée à un décret en Conseil d'État et dont le président sera nommé par décret et, d'autre part, comprend un conseil professionnel permettant d'assurer la représentation des organisations privées directement concernées par son action .

I. - Le texte de la proposition de loi

Cet article, qui fixe les principales règles de gouvernance du futur établissement public, dispose que le CNM sera administré par un conseil d'administration. Il renvoie au pouvoir réglementaire, par le biais d'un décret en Conseil d'État, le soin d'en fixer la composition, les modalités de désignation et le rôle. En effet, la composition du conseil d'administration ne relève pas du domaine de la loi, dès lors que l'établissement public ne relève pas d'une nouvelle catégorie d'établissement et que la composition de ses instances de gouvernance ne s'éloigne pas de celle des établissements relevant de la même catégorie.

En principe, la composition des conseils d'administration des EPIC obéit à un certain nombre de règles. L'article 5 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 de démocratisation du secteur public prévoit que les conseils d'administration des EPIC doivent comprendre :

- des représentants de l'État nommés par décret,

- des personnalités qualifiées nommées par décret en raison de leur compétence dans le secteur concerné ou de leur connaissance, soit de celui-ci, soit des aspects territoriaux des activités en cause ;

- des représentants des salariés élus.

Le conseil d'administration du CNV

Le conseil délibère sur les grandes questions intéressant le fonctionnement du CNV et notamment :

- son programme et son rapport annuel d'activités,

- son budget,

- son compte financier,

- son règlement intérieur.

Il est chargé d'approuver formellement toutes les propositions d'aides formulées par les dix commissions chargées d'examiner les dossiers adressés au CNV. Son président est nommé par décret du président de la République. Doté de 32 membres, le conseil réunit :

- 6 représentants du ministère de la Culture, dont le directeur chargé de la musique, le directeur chargé de l'administration générale et 1 directeur régional des affaires culturelles.

- 16 représentants des organisations professionnelles, dont 8 entrepreneurs de spectacles, 7 salariés et 1 auteur désignés par le ministre de la Culture sur proposition des organisations professionnelles représentatives.

- 4 représentants des collectivités territoriales, dont 1 maire ou 1 conseiller municipal désigné par le président de l'Association des Maires de France, 1 président de conseil général ou 1 conseiller général désigné par le président de l'Assemblée des Départements de France, 1 président de conseil régional ou 1 conseiller régional désigné par le président de l'Association des Régions de France, 1 représentant élu d'une collectivité territoriale désigné par le président de la Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture.

- 4 personnalités qualifiées dans le domaine des spectacles de variétés, désignées par le ministre de la Culture sur proposition des organisations professionnelles représentatives.

- 2 représentants élus par le personnel permanent de l'établissement.

Source : CNV

Le présent article précise les modalités de désignation du président de l'établissement , qui devra être nommé par décret sur proposition du ministre de la culture . Le président du CNL est également nommé dans les mêmes conditions. Confier au ministre chargé de la culture un pouvoir de proposition en la matière paraît cohérent avec le rattachement du futur établissement public à ce ministère.

II. - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

En commission des affaires culturelles, l'Assemblée nationale a adopté un amendement pour adjoindre au conseil d'administration un conseil professionnel chargé de représenter l'ensemble des organisations privées directement concernées par l'action du CNM. L'objectif de cet amendement est d'associer le plus largement possible les professionnels du secteur à la gouvernance de l'établissement, qui étaient largement représentés jusqu'ici au sein des instances dirigeantes du CNV, du FCM, du Burex, de l'IRMA et du CALIF, compte tenu de la volonté affichée de restreindre aux alentours de quinze le nombre de membres siégeant au sein du conseil d'administration du futur établissement public et d'y donner une place prépondérante aux représentants de l'État, conformément aux préconisations du rapport de Roch-Olivier Maistre et de celui de Pascal Bois et Émilie Cariou.

En séance publique, les députés ont adopté un amendement pour que les modalités de désignation des membres du conseil d'administration permettent d'assurer « l' égale représentation des femmes et des hommes ».

Les dispositions qui régissent la composition des conseils d'administration des EPIC fixent déjà un certain nombre de dispositions en la matière. L'article 6-1 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public prévoit que « l'écart entre le nombre de femmes et le nombre d'hommes membres du conseil d'administration [d'un EPIC] ne peut être supérieur à un », pour ce qui concerne les membres nommés par décret, à savoir les représentants de l'État et les personnalités qualifiées. Cette même loi prévoit également que les représentants des salariés sont élus au scrutin de liste avec représentation à la plus forte moyenne et sans panachage et que ces listes sont composées alternativement de candidats de chaque sexe. Selon le nombre de listes candidates et le score réalisé par chacune d'entre elles aux élections, ces dispositions n'ont pas empêché que les représentants des personnels siégeant au sein du conseil d'administration soient exclusivement de sexe masculin. Les précisions voulues par les députés devraient donc permettre de garantir davantage le respect de la parité au sein du futur établissement public.

III. - La position de votre commission

La gouvernance du CNM constitue, avec son financement, l'une des clés de la réussite du futur établissement. Jusqu'à présent, le conseil d'administration du CNV, comme ceux des associations de droit privé, sont largement dominés par les représentants de la filière. Comme l'avait observé Roch-Olivier Maistre dans son rapport, l'une des difficultés dans la détermination des règles de gouvernance est de parvenir à dégager une solution qui permette à la fois d'assurer l'efficacité du processus de décision , de garantir l'intérêt général dans un secteur dans lequel les intérêts particuliers des différentes parties prenantes ont régulièrement pris le dessus sous l'effet des mutations qu'il traverse depuis une quinzaine d'années, mais aussi de permettre l'expression de toutes les parties prenantes , compte tenu de la vocation du CNM à rassembler l'ensemble de la filière musicale.

À cet égard, la création d'un conseil professionnel représentatif de la filière est de nature à satisfaire la filière musicale, à condition que chacune des composantes du champ musical s'y sente effectivement représentée, surtout si la composition du conseil d'administration ne permet pas de garantir leur représentation, faute de quoi l'objectif de réunir le secteur ne serait pas rempli. Un équilibre devra nécessairement être trouvé entre la composition du conseil d'administration et celle du conseil professionnel.

Mettre en place un conseil d'administration resserré, composé d'une quinzaine de membres, pourrait constituer un gage d'efficacité. C'est le choix qui a par exemple été retenu pour le CNC depuis 2009, dont le conseil d'administration est aujourd'hui composé de seize membres (le président, deux représentants du Parlement, huit représentants de l'État, trois membres des juridictions et deux représentants du personnel). Une présence majoritaire de l'État au sein du conseil d'administration du CNM serait de nature à favoriser l'intérêt général. Il reste néanmoins à savoir dans quelle mesure le conseil d'administration doit ou non être ouvert aux représentants de la filière et, en particulier, aux organismes de gestion collective (OGC), qui sont appelés à contribuer directement au financement de l'établissement public, en plus des subventions de l'État. Comme le soulignait le Premier ministre dans son discours de politique générale il y a quelques semaines : « Qui décide paye. Qui paye commande. Qui commande assume . » Trois propositions seraient soumises à l'arbitrage du ministre chargé de la culture :

- soit un conseil d'administration restreint à une dizaine de membres et exclusivement constitué de représentants des pouvoirs publics, sur le modèle du CNC, avec le risque qu'il ne se transforme en une chambre d'enregistrement ;

- soit un conseil d'administration de vingt membres , dans lequel l'État resterait majoritaire, mais qui serait ouvert à des personnalités qualifiées représentant la filière musicale et à un représentant des collectivités territoriales, avec le risque que l'ensemble de la filière musicale n'y trouve pas son compte en termes d'équilibre dans la représentation ;

- soit un conseil d'administration de quinze membres , dont les personnalités qualifiées pourraient être proposées par le président afin de refléter le conseil professionnel, avec la difficulté, dans ces conditions, de parvenir à trouver les personnalités idoines.

Compte tenu de l'engagement des collectivités territoriales dans l'animation et le financement de la politique publique de la musique à l'échelle des territoires, leur représentation dans la gouvernance du CNM paraît indispensable . Seule l'une des solutions aujourd'hui sur la table prévoit qu'elles disposent d'un siège au conseil d'administration de l'établissement. Il reste à savoir à quel échelon territorial ce siège reviendrait. Le fait que des contrats de filière aient été conclus par le CNV avec pratiquement toutes les régions plaide pour retenir cet échelon.

Il n'en demeure pas moins que le CNM a vocation à poursuivre la mission de développement territorial mise en place par le CNV et que des contrats de filière pourraient tout à fait être conclus avec d'autres échelons territoriaux. Il pourrait, de ce fait, être souhaitable de trouver une solution qui permette aux associations d'élus de s'entendre sur la désignation d'un candidat commun.

Une dernière option serait de désigner deux parlementaires au sein du conseil d'administration du CNM, compte tenu du rôle dévolu au Sénat, en application de l'article 24 de la Constitution du 4 octobre 1958, de représentation des collectivités territoriales de la République. La présence de parlementaires au sein des conseils d'administration des établissements publics présente l'avantage de garantir un certain équilibre dans la gouvernance lorsque celle-ci se révèle complexe.

Au-delà de la question de leur représentation au sein du conseil d'administration, il est essentiel que les collectivités territoriales puissent également siéger au sein du conseil professionnel . Or, la rédaction actuelle du présent article ne permet qu'à des organisations privées d'être intégrées au conseil professionnel. C'est pourquoi votre commission l'a modifié pour qu'elle permette à l'ensemble des organisations concernées par l'action du CNM de pouvoir y être représentées (amendements identique COM-8 de votre rapporteur et COM-29 de Mme Sylvie Robert).

Votre commission a également adopté un amendement pour que les modalités de désignation du conseil professionnel permettent, comme au conseil d'administration, d'assurer la parité (amendement COM-31 ).

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié .

Article 3

Compétence du Centre national de la musique (CNM) pour la délivrance des agréments fiscaux de deux crédits d'impôt

Objet : le présent article vise à donner au Président du CNM la possibilité de délivrer, au nom du ministre de la culture, les agréments prévus pour le bénéfice de deux crédits d'impôt.

I. Le droit en vigueur

Le secteur de la musique bénéficie de deux crédits d'impôt : le crédit d'impôt au titre des dépenses de production et de développement d'oeuvres phonographiques (CIPP) et le crédit d'impôt en faveur de la production de spectacle vivant musical (CISV) .

A. Le crédit d'impôt au titre des dépenses de production et de développement d'oeuvres phonographiques (CIPP)

L'article 36 de la loi n° 2006-961 du 1 er août 2006 relative aux droits d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, dite DADVSI, a instauré le crédit d'impôt au titre des dépenses de production et de développement d'oeuvres phonographiques au bénéfice de productions concernant des nouveaux talents , entré en application le 1 er janvier 2006.

Le dispositif, défini à l'article 220 octies du code général des impôts a pour objectifs le maintien, voire le renforcement, de la diversité musicale des enregistrements produits et le soutien structurel aux entreprises, au premier rang desquelles les plus modestes en taille, particulièrement fragilisées par la mutation du secteur.

Dans sa version initiale, le CIPP représentait 20 % du montant total des dépenses de production et/ou de postproduction d'un disque et des dépenses liées au développement de ces productions . Les dépenses de développement éligibles au crédit d'impôt étaient plafonnées à 350 000 euros par enregistrement mais, dans tous les cas, la somme des crédits d'impôt ne pouvait excéder 700 000 euros par entreprise et par exercice.

Unanimement saluée par les professionnels et après une première prolongation de trois ans entre 2009 et 2012, la mesure a été maintenue et renforcée par l'article 28 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013. Cette nouvelle version du crédit d'impôt phonographique a été autorisée par la Commission européenne au titre des aides d'État le 14 février 2013 pour une durée de quatre ans, soit jusqu'au 31 décembre 2016.

Le renforcement du dispositif s'est alors traduit par :

- la revalorisation du taux de crédit d'impôt (de 20 à 30 % du montant total des dépenses éligibles) en faveur des entreprises qui répondent à la définition de la PME européenne ;

- la création d'un plafond unique (somme des crédits d'impôt calculés au titre des dépenses éligibles par entreprise et par exercice) à hauteur de 800 000 euros, contre 700 000 euros précédemment.

Puis la mesure a obtenu une prolongation de trois ans supplémentaires, ainsi qu'un renforcement dans le cadre de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014. Aux termes du décret n° 2015-704 du 19 juin 2015, plusieurs modifications ont à nouveau été apportées au dispositif :

- une réduction du critère d'ancienneté de trois ans à un an des entreprises de production phonographiques éligibles ;

- une augmentation du plafond de crédit d'impôt de 800 000 euros à 1,1 million d'euros par an et par entreprise ;

- pour les petites et moyennes entreprises, la prise en compte de la rémunération des dirigeants dans l'assiette des dépenses éligibles , au prorata du temps passé sur l'oeuvre et dans la limite d'un plafond de 45 000 euros par dirigeant ;

- pour les autres labels, la suppression de la « décote » 1 ( * ) dans la comptabilisation des projets éligibles, en contrepartie d'un abaissement du taux de crédit d'impôt de 20 % à 15 %.

L'article 143 de la loi de finances pour 2019 a fait évoluer le crédit d'impôt : d'une part, il cible davantage les entreprises au moment où celles-ci amorcent leur activité, d'autre part, il supprime le seuil du nombre de 100 000 ventes à compter du 1 er janvier 2020 , désormais inadapté au développement de l'écoute sur les plateformes de streaming et renvoie à un décret, qui sera publié d'ici là, la définition d'un seuil de ventes et d'écoutes pertinent.

L'article 19 de la loi de finances rectificative pour 2017 avait par ailleurs prorogé le dispositif pour une année, soit jusqu'au 31 décembre 2019.

Le Rapporteure pour avis de la commission de la culture du Sénat sur la mission « Médias, Livre et Industries culturelles », notre collègue Françoise Laborde, avait plaidé dans son rapport 2 ( * ) et à l'occasion de la discussion des crédits budgétaires pour la pérennisation de ce crédit d'impôt , d'un montant modeste (11 M€/an en 2017), mais qui s'avère essentiel aux yeux des acteurs de l'industrie musicale.

L'évaluation de l'efficacité du CIPP

Le ministère de la culture a confié à la société Bearing Point une étude sur l'efficacité du crédit d'impôt, rendue publique en juillet 2017.

Cette étude a permis de mettre en lumière plusieurs points, justifiant non seulement la prorogation du dispositif, mais également sa pérennisation.

Le coût du CIPP est stabilisé autour de 10 M€ par an (11 M€ pour 2017, mais 8 M€ en 2016).

Le CIPP s'avère utile dans une optique d'aménagement du territoire. Il bénéficie en effet à des entreprises sur l'ensemble du territoire, même si on note une forte concentration sur le territoire francilien, qui capte 60 % des montants.

Le CIPP est précieux dans le soutien aux petites entreprises, qui représentent 50 % des dépenses. En 2017, 70 entreprises ont ainsi été aidées par ce canal.

Sous toutes les réserves méthodologiques d'usage, l'étude estime que les projets ayant bénéficié du CIPP ont donné lieu au versement de cotisations fiscales et sociales dans un rapport de 2,46 euros de contribution pour 1 euro de crédit d'impôt.

L'étude suggère plusieurs voies d'amélioration . Elle recommande notamment que les prorogations du dispositif soient a minima de trois ans pour donner une meilleure visibilité aux entreprises et donc les inciter à prendre des risques créatifs. Elle pointe également les risques inhérents à une remise en cause du CIPP, qui risquerait d'entraîner la disparition d'un grand nombre de très petites entreprises , un affaiblissement des champions français de la production indépendante , et un désengagement des « majors » qui délaisseraient la production d'artistes francophones émergents et la prise de risque , pour se concentrer sur la distribution et la promotion de leurs catalogues internationaux.

Source : rapport pour avis de Françoise Laborde sur le projet de loi de finances pour 2019,
mission Médias et Industries Culturelles

À l'initiative de son Rapporteur général, la commission des finances de l'Assemblée nationale a adopté un article 55 terdecies , devenu article 144 de la loi de finances pour 2019, qui prolonge ce crédit d'impôt jusqu'en 2022.

La loi de finances pour 2019 n'a pas fourni d'estimation des montants pour 2019, qui devraient cependant s'élever à environ neuf millions d'euros . En 2018, 955 projets ont ainsi été soutenus par le crédit d'impôt, contre 894 en 2017.

B. Le crédit d'impôt en faveur de la production de spectacle vivant musical (CISV)

Le crédit d'impôt pour dépenses de production de spectacles vivants musicaux ou de variétés (CISV) a été institué par l'article 113 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016. Il est défini à l'article 220 quindecies du code général des impôts.

Il est réservé aux entreprises qui supportent les frais de création, d'exploitation et de numérisation d'un spectacle vivant musical et de variété . Il permet de soutenir les entreprises qui défendent la production d'artistes émergents ou en développement.

Les dépenses qui ouvrent droit au bénéfice du CISV sont celles réalisées par des entreprises établies en France, dans un autre État membre de l'Union européenne. Les dépenses éligibles au crédit d'impôt sont plafonnées à 500 000 euros par spectacle.

Le crédit d'impôt est égal à 15 % du montant des dépenses engagées. Il est porté à 30 % pour les micro-entreprises et les petites et moyennes entreprises. Il est plafonné à 750 000 euros par entreprise et par exercice .

Initialement , les catégories de spectacles vivants pouvant bénéficier du crédit d'impôt regroupaient les concerts et tours de chant, les spectacles d'humour entendus comme une suite de sketchs ou un récital parlé donné par un ou plusieurs artistes non interchangeables, enfin les comédies musicales et les spectacles lyriques. Les entreprises devaient également promouvoir des artistes ou groupes d'artistes dont aucun spectacle ne comptabilisait plus de 12 000 entrées payantes au cours des trois années précédentes.

L'article 147 de la loi de finances pour 2019 a modifié le CISV en le recentrant sur les artistes musicaux en devenir, précisé par le décret 3 ( * ) du 18 juin 2019.

A ainsi été supprimée la condition selon laquelle les spectacles ouvrant droit au crédit d'impôt doivent porter sur des artistes dont aucun spectacle n'a comptabilisé plus de 12 000 entrées payantes. Cette condition est remplacée par un nombre minimal de quatre représentations dans au moins trois lieux différents et une certaine taille de la salle définie par le décret en fonction de la catégorie de spectacle.

Le bénéfice du crédit d'impôt est maintenant réservé aux spectacles musicaux, excluant donc les spectacles de variété et d'humour. A l'initiative de Sylvie Robert, au nom de la commission de la culture, le Sénat avait adopté un amendement au projet de loi de finances pour 2019 afin de maintenir les spectacles de variété et d'humour. Cette rédaction n'a cependant pas été retenue par l'Assemblée nationale dans le texte de loi définitif .

Tout comme pour le CIPP, l'article 144 de la loi de finances pour 2019 a prorogé le dispositif jusqu'en 2022 .

Le coût de ce crédit d'impôt est évalué à environ 20 millions d'euros en année pleine par le ministère de la culture, pour environ 150 entreprises bénéficiaires.

C. Le rôle de l'agrément

Les articles 220 octies (CCIP) et 220 quindecies (CISV) du code général des impôts reposent sur un mécanisme d'agrément qui permet de s'assurer que les oeuvres enregistrées ou les spectacles produits remplissent bien les critères prévus et exposés supra .

Les agréments sont, dans les deux cas, délivrés par le ministre de la culture, après avis d'un comité d'experts. Les directeurs généraux de la création artistique et des médias et des industries culturelles (DGMIC) et un représentant de l'Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC) sont membres des deux comités, complétés, pour le CIPP, de deux représentants des sociétés civiles de perception des droits d'auteur et, pour le CISV, d'un représentant du CNV et d'un représentant de la SACEM.

Le ministre délivre dans un premier temps un agrément provisoire, le bénéfice définitif du crédit d'impôt étant subordonné à la délivrance d'un nouvel agrément qui certifie que l'oeuvre ou le spectacle ont bien satisfait aux conditions posées par le code général des impôts .

En cas de non-obtention de l'agrément définitif, l'entreprise doit reverser le crédit d'impôt dont elle a bénéficié .

II. Le texte de la proposition de loi

L'article 3 de la proposition de loi propose de confier au Président du CNM la mission de délivrer, au nom du ministre chargé de la culture , les agréments prévus pour le bénéfice des crédits d'impôts en faveur du secteur de la musique et de la filière musicale.

Cette mission rapproche le Président du CNM du Président du CNC, sans toutefois l'aligner pleinement . En effet, le Président du CNC délivre en application de l'article 220 sexies du code général des impôts l'agrément ouvrant droit au bénéfice du crédit d'impôt « cinéma » en son nom propre , et non pas en celui du ministre. Le statut d'EPIC du futur CNM ne lui permet en effet pas, comme le CNC, de délivrer directement un agrément.

Les articles 220 octies et quindecies ne sont cependant pas modifiés, ce qui implique que la procédure requiert toujours l'avis d'un comité d'expert, dont la composition pourrait donc être amenée à évoluer suivant les décisions du Président du CNM.

III. Les modifications adoptées à l'assemblée nationale

À l'initiative de sa commission des affaires culturelles, l'Assemblée nationale a supprimé la très large formulation initiale du champ des crédits d'impôt pour mentionner explicitement le CIPP (article 220 octies ) et le CISV (article 220 quindecies ).

IV. La position de votre commission

L'idée de confier la gestion des crédits d'impôt au CNM a été formulée dès 2017 dans le rapport de Roch-Olivier Maistre :

« Dans une optique de rationalisation, la gestion opérationnelle des deux crédits d'impôts, qui doivent être pérennisés, pourrait être transférée au centre national. [...] Par ailleurs, il n'affecterait pas la compétence de l'État pour déterminer les évolutions à apporter à ces mécanismes fiscaux ; il traduirait aussi la confiance portée au nouveau centre national . Au-delà, il pourrait tirer profit de l'expérience acquise en matière fiscale par l'établissement public existant qu'est le CNV, chargé depuis 2005 du recouvrement de la taxe affectée qui le finance, et permettrait au nouvel opérateur de renforcer sa connaissance des acteurs, au bénéfice de sa mission d'observation ».

La capacité de délivrer, au nom du ministre, les agréments fiscaux présente donc, aux yeux de votre Rapporteur, deux avantages :

- d'une part, et comme le souligne le rapport précité, il permet au CNM de disposer d'une vision très large de l'ensemble du secteur , ce qui nourrira très utilement sa fonction d'expertise ;

- d'autre part, il donne au CNM une grande crédibilité auprès des acteurs du secteur de la musique, en le constituant en interlocuteur incontournable.

Cette mission essentielle ne pourra cependant être pleinement remplie que si les moyens de l'exercer lui sont donnés. Là encore, les dispositions de la loi de finances pour 2020 devront être examinées avec une grande attention.

Votre commission a adopté cet article sans modification

Article 4

Taxe sur les spectacles de variété

Objet : le présent article propose de transférer au CNM le produit de la taxe sur les spectacles de variété jusqu'à présent perçue par le CNV.

I. - Le droit en vigueur

Le CNV bénéficie du produit de la taxe sur les spectacles de variétés , créée par l'article 76 de la loi n° 2003-1312 de finances rectificative pour 2003 sous forme de taxe parafiscale affectée à l'établissement. Son statut a évolué avec l'article 86 de la loi n° 2004-1484 de finances pour 2005 qui, conformément au nouveau cadre budgétaire dressé par la LOLF, l'a transformée en imposition de toute nature affectée à un organisme public 4 ( * ) .

Cette taxe représente 3,5 % sur les recettes des représentations de spectacles de variétés et de musiques actuelles - à savoir tous les spectacles de musique, à l'exception de la musique classique, et les spectacles d'humour. Elle représente 94 % des ressources du CNV.

Les fonds collectés sont redistribués aux acteurs de la filière selon une clé de répartition arrêtée à l'article 26 du Règlement intérieur du CNV de la manière suivante :

- 65 % sous la forme de droit de tirage pour contribuer, dans un délai de trois ans, à la production d'un nouveau spectacle , ce qui assure au redevable, sous réserve d'être affilié au CNV, de récupérer 65 % des sommes qu'il a versées au titre de la taxe ;

- 35 % en aides sélectives , remboursables ou non remboursables, afin de soutenir les différents aspects de la vie du secteur des variétés et des musiques actuelles : les salles de spectacle, les projets de production et de diffusion de spectacle ou de festivals, le développement à l'international de carrière d'artistes, de création et de diffusion de spectacles, l'équipement de salles de spectacles ou encore diverses actions d'intérêt général du secteur, en particulier la structuration professionnelle.

Les ressources du CNV ont augmenté mécaniquement ces dernières années sous l'effet d'une plus grande efficacité des opérations de perception, d'une augmentation des recettes de billetterie et de l'élargissement du périmètre du CNV aux musiques électroniques et aux arts du cirque. Elles sont ainsi passées de 13 millions d'euros en 2004 à 35 millions d'euros en 2018 .

L 'article 46 de la loi de finances pour 2012 a cependant posé le principe d'un plafonnement des taxes affectées , ce qui signifie que tout excédent au-delà des plafonds doit être automatiquement versé au budget général de l'État. Il avait alors fixé le plafond de la taxe affectée au CNV à 27 millions d'euros , avant qu'il ne soit réduit à 24 millions d'euros en 2013 , puis rehaussé à 28 millions d'euros en 2014 et enfin à 30 millions d'euros en 2015.

David Assouline , Rapporteur pour avis pour la commission de la culture sur la création et le cinéma sur le projet de loi de finances pour 2017, avait souligné les risques de ce plafonnement pour le CNV : « le plafonnement est susceptible d'avoir des effets désastreux sur la santé financière du CNV. En effet, lorsque le secteur est en croissance, le plafond se traduit mécaniquement par des pertes pour le CNV, contraint de verser les 65 % de l'écrêtement en droit de tirage : autrement dit, tout dépassement du plafond d'1 million d'euros engendre 1,65 million d'euros de dépenses supplémentaires pour le CNV , avec des conséquences inévitables sur le montant des aides sélectives octroyées ».

L'article 4 de la loi de finances rectificative pour 2016 a tenu compte de ces craintes, et a porté ce montant à 50 millions d'euros , très supérieur à celui actuellement perçu.

II. - Le texte de la proposition de loi

Le présent article 4 propose d'affecter au CNM la taxe sur les spectacles de variété. Il prévoit également que le CNM pourrait à l'avenir percevoir d'autres taxes, prélèvements ou produits susceptibles de lui être affectés.

Cette disposition, très large, ne peut cependant recevoir de concrétisation avant l'examen de la loi de finances pour 2020, où seront déterminés le montant et la nature des ressources du CNM.

Quelles taxes affecter au CNM ?

Le rapport de Pascal Bois et Émilie Cariou précité préconise ainsi d'affecter au CNM un tiers de la fraction de la taxe sur les services fournis par les opérateurs de communication électronique (TOCE) affectée à France Télévisions, soit 29 millions d'euros, éventuellement complété à plus long terme d'une partie de la taxe dite « YouTube ».

Le rapport précité de 2011 de Franck Riester et Didier Selles avait pour sa part adopté une approche différente, en proposant d'affecter au CNM une partie de la taxe sur les services de télévision (TST) : « [...] la mission juge légitime que les opérateurs de télécommunications contribuent au financement de la création et de la diversité musicales. Pour atteindre cet objectif, le prélèvement d'une partie du produit de la taxe sur les services de télévision (TST), volet « distributeurs », aujourd'hui versée par les opérateurs de télécommunication au Centre national du cinéma (CNC), est à la fois la solution la plus légitime sur le plan des principes et la plus réaliste à court terme . »

Source : commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat

En ce qui concerne l'affectation de la taxe, la suppression du CNV a pour conséquence la disparition des règles posées par l'extinction des dispositions de son Règlement Intérieur, et donc de la clé de répartition 65/35 entre les aides automatiques et les aides sélectives . Cette idée est envisagée clairement dans le rapport précité de Pascal Bois et Émilie Cariou : « Ce redéploiement du produit de la taxe pourra notamment servir, comme indiqué au point 3.4, à accroître le caractère sélectif et redistributif des aides octroyées au spectacle vivant, caractérisées à ce jour par un automatisme prépondérant (à hauteur des 2/3 pour les aides du CNV, à comparer aux 60 % utilisés en règle générale au CNC pour les aides au cinéma et à l'audiovisuel) ».

III. - Les modifications apportées à l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cinq amendements de coordination, afin de substituer à la mention « Centre national de la chanson, de la variété et du jazz » celle de « Centre national de la musique » à l'article 46 de la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 (plafonnement du produit de la taxe) ainsi qu'à l'article 76 de la loi de finances rectificative pour 2003 (création de la taxe sur les spectacles de variété).

IV. - La position de votre commission

L'affectation au profit du CNM de la principale ressource du CNV respecte la logique d'ensemble qui préside à la création de l'établissement. Elle soulève cependant deux séries de craintes.

La première oppose les bénéficiaires des aides automatiques et ceux qui souhaitent l'extension des aides sélectives .

Il n'est en effet pas prévu de reconduire la clé de répartition 65 % / 35 %. De manière schématique, les actuels bénéficiaires du soutien automatique qui, en dépit du caractère fiscal de la taxe, peuvent avoir tendance à la considérer comme une ressource propre , craignent d'en perdre la part de produit qui leur revient, en faveur des aides sélectives - ce qui est au demeurant la position du rapport Bois-Cariou.

La seconde crainte oppose le domaine du spectacle vivant à celui de la musique enregistrée .

Le champ d'intervention du CNM, tel que défini à l'article premier du présent projet de loi, recouvre en effet ces deux secteurs, longtemps séparés pour des raisons évoquées par votre Rapporteur dans son exposé général. Vont ainsi cohabiter deux mondes proches , néanmoins attachés à défendre leurs intérêts. Or si la taxe sur les spectacles constitue bien une ressource fiscale affectée, elle est perçue exclusivement sur le spectacle vivant. La création d'un budget commun fait donc craindre que les payeurs ne soient plus les bénéficiaires, et que le domaine de la musique enregistrée, qui ne contribue pas au même niveau, ne profite des efforts fournis par les autres.

À l'occasion de son discours de clôture du MIDEM le 5 juin 2019, le Ministre de la culture a tenu à rassurer la profession, en apportant des précisions sur sa vision de cette question : « Il n'est pas souhaitable de rigidifier la structure par une politique de fléchage, mais il est évident que les contributeurs actuels du CNV - Centre national de la chanson, des Variétés et du Jazz, ne doivent pas voir le soutien qui leur est accordé diminuer . En ce qui concerne plus spécifiquement la question des réserves du CNV, il est essentiel qu'elles soient employées dans le cadre du périmètre actuel de l'établissement public . » L'idée qui semble se dessiner est donc une forme de « gel des positions » au niveau actuel pour les bénéficiaires, et une affectation qui pourrait évoluer dans ses principes pour les futurs surplus.

Votre rapporteur, qui tient à se faire l'écho des préoccupations recueillies durant les auditions, reconnait bien entendu la légitimité des craintes exprimées de part et d'autre. Pour autant, elles lui paraissent devoir être dépassées, non pas tant dans une logique de rationalisation et de simplification qu'au nom des évolutions récentes du secteur de la musique, qui ont considérablement brouillé les frontières entre la musique enregistrée et le spectacle vivant . Le rapport entre les deux, en termes strictement financier, est maintenant à l'avantage du spectacle, qui représente un peu plus de 60 % du chiffre d'affaires du secteur, conséquence de l'effondrement du marché du phonogramme, plus précisément de ses nouveaux usages .

Il convient ainsi de mettre en garde contre des logiques mortifères héritées du passé, qui ne tiendraient pas compte de cette révolution. Le CNM a précisément vocation à devenir une maison commune, à même de permettre un dialogue, puis une unité de vue entre les différents métiers d'un même secteur, la musique.

Votre commission a adopté cet article sans modification .

Article 4 bis

Perception des fonds d'action culturelle
des organismes de gestion collective

Objet : le présent article propose de permettre au CNM de percevoir des fonds des organismes de gestion collective destinés aux actions culturelles, sur une base volontaire .

I. - Le droit en vigueur

En plus de répartir les revenus issus des droits d'auteur et des droits voisins, les organismes de gestion collective disposent de la faculté de mener une politique autonome en matière culturelle. Le fondement de ce droit est posé par le II de l'article L. 321-1 du code de la propriété intellectuelle : « Les organismes de gestion collective peuvent mener des actions de promotion de la culture et fournir des services sociaux, culturels et éducatifs dans l'intérêt des titulaires de droits qu'ils représentent et du public . »

L'article L. 321-17 du code précité fixe les principes de ce mécanisme. Les OGC doivent y consacrer :

- 25 % des sommes provenant de la rémunération pour copie privée ;

- et la totalité des « irrépartissables » , soit les montants de droits collectés qui n'ont pu être versés aux titulaires, principalement parce qu'ils n'ont pas été identifiés. Le délai permettant de considérer les sommes comme « irrépartissables » a été abaissé de 10 ans à cinq ans suite à l'adoption de l'ordonnance du 22 décembre 2016.

Les sommes ainsi recouvrées doivent être utilisées à « des actions d'aide à la création, à la diffusion du spectacle vivant, au développement de l'éducation artistique et culturelle et à des actions de formation des artistes ».

La commission de contrôle des organismes de gestion des droits d'auteur et des droits voisins a consacré une large partie de son rapport 2019 5 ( * ) à la gestion par les OGC de ces fonds. Ainsi, le montant total des ressources d'action artistique et culturelles (AAC) est passé de 108,19 millions d'euros en 2013 à 183,27 millions d'euros en 2017 , soit une progression de 69 % . Les OGC qui disposent des plus grands ressources sont la SACEM (57,12 millions d'euros) et l'ADAMI (37,05 millions d'euros).

L'origine de ces fonds a connu de fortes évolutions entre 2013 et 2017. La part attribuable à la copie privée demeure prépondérante, avec 39 % des ressources, mais structurellement en baisse. Les « irrépartissables » représentent environ 22 % du total, alors que les crédits non consommés et reportés s'élèvent à plus de 30 %.

Cela traduit une sous consommation importante des crédits. Ainsi, le montant total affecté aux actions passe entre 2013 et 2017 de 76,98 millions d'euros à 125,61 millions d'euros , soit une progression de 63 % inférieure à celle des ressources. La Commission de contrôle souligne ainsi que « les OGC continuent à ne pas affecter le surplus de recettes qu'ils peuvent consacrer à l'AAC », tout en notant des situations très différenciées entre les organismes. Globalement, le taux de consommation des crédits est relativement faible, à 66 % entre 2013 et 2017 .

La Commission de contrôle formule un jugement plutôt critique de la gestion par les OGC de ces fonds, dont les règles de fonctionnement et d'attribution gagneraient à être clarifiées et améliorées.

II. - Le texte de l'Assemblée nationale

À l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté en séance publique un nouvel article 4 bis qui offre la possibilité aux OGC de verser une partie des fonds perçus au titre de la copie privée ou des irrépartissables au CNM. Ce dernier pourra les utiliser pour « des actions culturelles et éducatives au bénéfice des titulaires de droits ».

Cette possibilité avait été évoquée dans le rapport précité de Franck Riester et Didier Selles 2011. Les auteurs mentionnaient cependant « une certaine hostilité » des OGC. La SCPP et la SPPF avaient néanmoins indiqué à l'époque qu'elles étaient prêtes à aller au-delà des sommes consacrées aux organismes mutualisés, « en contrepartie de l'effort conséquent de l'Etat en faveur des producteurs de phonogrammes », pour un montant alors estimé à 12 millions d'euros.

Le Rapporteur de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale avait exprimé son accord en séance, en indiquant que « Actuellement, les OGC financent les associations qui mettent en oeuvre les aides aux professionnels de la musique - Fonds pour la création musicale, Bureau export, notamment. Le code de la propriété intellectuelle prévoit qu'ils consacrent 25 % des sommes collectées dans le cadre de la copie privée à des actions d'aide à la création et à la diffusion de spectacles vivants ainsi que de développement de l'éducation artistique et culturelle. Cet amendement garantira que les sommes versées par les OGC au CNM serviront à ces actions » .

Cette contribution des OGC ne peut être réalisée que sur une base strictement volontaire, les fonds étant de nature privée. Le rapport précité de Roch-Olivier Maistre souligne ce point : « En revanche, même si l'association au projet de « maison commune de la musique » des organismes de gestion collective (OGC) relève de l'évidence, toute contribution de leur part, issue par exemple des sommes que ces sociétés sont tenues d'affecter à leur action culturelle, ne pourrait être envisagée que sur une base volontaire ».

Le rapport de préfiguration d'Emilie Cariou et Pascal Bois a spécifiquement travaillé sur cette hypothèse, et a pu entamer le dialogue avec les OGC : « La présente mission se félicite ainsi que les travaux de concertation qu'elle a engagés aient permis de faire émerger, sur proposition de l'ADAMI, un accord de principe des OGC présentes à mutualiser, par leur affectation au futur CNM, des moyens financiers actuellement consacrés par chacune d'entre elles, de manière isolée, à des actions en matière d'éducation artistique et culturelle (EAC). Le montant précis de cette contribution n'a pas été arrêté dans le cadre de la concertation, mais la mission considère qu'au regard des équilibres de financement du CNM et du caractère prioritaire de l'EAC pour le ministère de la Culture, une dotation de 3 M€ permettrait à l'établissement de soutenir des actions significatives . »

Sur le périmètre de la musique, soit la SACEM, l'ADAMI, la SPEDIDAM, la SCPP et la SPPF, le montant global des ressources en 2017 s'élève à 151 millions d'euros , dont 91 millions d'euros perçus dans l'année (56 millions au titre de la copie privée, 35 pour les irrépartissables), le reste étant constitué des reports et des produits financiers.

L'intégration au sein du CNM du FCM, du Bureau-Export, du CALIF et de l'IRMA, financés à hauteur 5,67 millions d'euros 6 ( * ) par des contributions des OGC, devrait très logiquement entrainer l'affectation à son profit des sommes jusqu'alors destinées à ces organismes. Ce transfert implique cependant l'accord des OGC concernées.

Au-delà, la question d'une contribution plus importante peut légitiment se poser, dans un secteur où les effets de levier sont importants . Le faible taux de consommation des crédits montre que des moyens significatifs pourraient être avantageusement dégagés par les OGC si le CNM parvient à les fédérer autour de projets porteurs pour la filière musicale. Telle est la position du ministre de la culture, qui déclarait à l'Assemblée nationale : « Il faut préciser que ces OGC financent déjà les institutions que nous rassemblons dans le CNM. Le but de l'amendement est donc avant tout que cela continue. Si les organisations de gestion collective souhaitent approfondir les bonnes relations que le CNM entretiendra avec elles - ce dont je suis convaincu, car c'est du moins la mission qui sera la sienne -, elles pourront par ailleurs transférer d'autres moyens, mais elles n'y seront pas obligées . »

III. - La position de votre commission

Une bonne intégration des OGC apparaît à votre Rapporteur comme une condition indispensable de succès du CNM. Il serait ainsi éminemment souhaitable que leur engagement aille au-delà des sommes actuellement allouées aux organismes fusionnés, et ce pour trois raisons :

- d'une part, les sommes permettraient de donner au CNM des marges de manoeuvre plus conséquentes , dans un contexte où la ressource publique se raréfie ;

- d'autre part, cela permettrait de conforter l'unité de la profession en donnant une image plus équilibrée de la contribution de la musique enregistrée, notamment vis-à-vis du spectacle vivant , qui s'estime déjà contributeur à travers l'affectation au CNM de la taxe sur les spectacles ;

- enfin, les données rassemblées par votre Rapporteur à travers le rapport de la commission de contrôle montrent l'existence de marges de manoeuvre significatives , sur le périmètre de la contribution de la copie privée (56 millions d'euros), plus encore si on y ajoute les irrépartissables (35 millions d'euros, soit 91 millions d'euros ), compte tenu de la sous consommation chronique des crédits.

La participation financière des OGC, qui traduirait en réalité l'engagement des auteurs , apparaît cependant conditionnée à celle de l'État. Ils sont encore dans une position attentiste , qui souligne moins un manque d'adhésion au projet que la crainte d'un soutien financier de l'Etat très en deçà des attentes de la profession, voire d'une création du CNM qu'elles devraient se retrouver à financer seules .

Les OGC entendent de plus peser sur les orientations du CNM, à travers leur participation aux instances dirigeantes, ce qui est compris comme une juste contrepartie de leur apport financier.

En cela, votre Rapporteur ne peut qu'exprimer sa compréhension face à cette démarche prudente et constater, une nouvelle fois, que les deux questions qui restent à résoudre après l'adoption de la proposition de loi, celles de la gouvernance et des moyens , sont étroitement liés et devront trouver des solutions satisfaisantes pour ne pas hypothéquer dès l'origine les chances de succès du CNM, voire contribuer à susciter des tensions au sein de la profession .

Votre Rapporteur vous propose un amendement de précision COM-35 , qui vise à aligner le champ d'intervention posé par le présent article pour les contributions des OGC, actuellement « des actions culturelles et éducatives au bénéfice des titulaires de droits », par un simple renvoi au premier paragraphe à l'article L. 324-17, également mentionné au présent article, mais plus large puisque les actions peuvent servir à financer « la création, à la diffusion du spectacle vivant, au développement de l'éducation artistique et culturelle et à des actions de formation des artistes. » Cette précision pourrait au passage rassurer les OGC en conservant une définition qui leur est familière.

Votre commission a adopté cet article ainsi amendé.

Article 5

Modalités d'intégration du CNV, du FCM, du Burex, du CALIF et de l'IRMA au sein du CNM

Objet : cet article prévoit de substituer le CNM au CNV, à compter de sa dissolution, dans ses contrats et conventions, ainsi que dans ses biens, droits et obligations. Il l'autorise également à accepter les biens, droits et obligations du FCM, du Burex, du CALIF et de l'IRMA à la date d'effet de leur dissolution.

I. - Le texte de la proposition de loi

Comme le CNM a vocation à remplir les missions précédemment exercées par plusieurs organismes, cet article organise les modalités de leur intégration en son sein.

Il prévoit la reprise par le CNM des contrats et conventions que le CNV, le FCM et l'IRMA avaient passés pour l'accomplissement de leurs missions, ainsi que le transfert de leurs biens, droits et obligations , ce qui recouvre à la fois leurs créances et leurs dettes.

Il précise que ces transferts sont effectués à titre gratuit et ne peuvent donner lieu à aucun versement financier , ni au profit des organismes dissous, ni au profit de l'État, de ses agents ou de toute autre personne publique, telle que le CNM.

II. - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Pour tenir compte du principe de la liberté d'association, qui implique un acte volontaire de dissolution, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a remanié la rédaction de cet article afin d'opérer une distinction entre la situation du CNV et celle des associations de droit privé ayant vocation à rejoindre le CNM.

À la différence du CNV, dont le transfert des contrats, conventions et des actifs au profit du CNM est de droit à la date d'effet de sa dissolution, fixée, en application de l'article 7 de la présente proposition de loi, au 1 er janvier 2020, le transfert au CNM des actifs des associations de droit privé ne pourra être réalisé de plein droit qu'après une décision volontaire de dissolution desdites associations.

À l'initiative du Gouvernement, les députés ont élargi , en séance publique, le bénéfice de ces dispositions, à la fois :

- au Burex pour permettre à cette association de rejoindre le CNM compte tenu du rôle confié au nouvel établissement public en matière de développement de la filière musicale ;

- et au CALIF , ce qui permettrait au CNM de reprendre les attributions de cette association en matière de soutien au secteur de la distribution physique indépendante.

À l'initiative de plusieurs députés du groupe Les Républicains, l'Assemblée nationale a également prévu que des conventions seraient conclues entre chacune des associations et le CNM préalablement à leur dissolution. Ces conventions devraient fixer les principes applicables aux transferts en matière de personnels, d'immobilier et de gestion et d'affectation des réserves financières et au devenir des programmes d'aides qu'elles portent.

III. - La position de votre commission

La possibilité d'intégrer le Burex dans le périmètre du futur établissement public était largement souhaitée par la filière musicale, compte tenu du caractère désormais mondialisé du marché de la musique. Les enjeux économiques sont devenus globaux sous l'effet du développement des plateformes et de la croissance du streaming . Si les entreprises françaises doivent faire face à une concurrence accrue des entreprises étrangères sur le marché français, elles ont également l'opportunité de conquérir de nouvelles parts de marché à l'étranger. Sous réserve que le conseil d'administration du Burex accepte le principe de sa fusion avec le CNM, ce dernier pourrait alors profiter de l'expérience acquise par cette association depuis vingt ans pour remplir à bien sa mission en matière de développement international du secteur.

De même, l'intégration du CALIF permettra au CNM de reprendre à son compte les programmes d'aides destinés à faciliter le maintien de l'activité ou l'implantation de nouveaux disquaires indépendants. Ces programmes profitent au maillage territorial et à la diversité de la filière musicale, autant d'objectifs de toute façon assignés au CNM en application de l'article 1 er de la présente proposition de loi.

L'intégration de ces quatre associations de droit privé au sein du CNM aura pour effet de leur faire perdre leur indépendance dans la gestion des programmes d'aides , compte tenu de la présence majoritaire de l'État au sein de la gouvernance de l'établissement. Votre rapporteur a constaté, à l'occasion des auditions qu'il a réalisées, qu'elles semblaient prêtes à y consentir , dans la mesure où la création de cet établissement public apporte l'espoir de constituer un outil puissant au service d'une filière musicale enfin rassemblée, dont tous les enjeux pourraient être traités de manière coordonnée.

Les associations ont néanmoins besoin d'un certain nombre garanties avant d'accepter le principe de leur dissolution. Elles concernent à la fois la reprise de leurs salariés, le financement de leurs baux immobiliers en cours et le fléchage de leurs réserves financières, comme les évolutions susceptibles d'affecter les programmes d'aide qu'elles ont mis en place. Ces questions devraient faire l'objet de conventions avec le CNM, conformément au principe posé par les députés en première lecture à l'Assemblée nationale. Il n'en demeure pas moins que les crédits supplémentaires que l'État apportera au CNM dans le cadre de la loi de finances pour 2020 par rapport au montant des subventions qu'il accordait précédemment au CNV, au FCM, au Burex, à l'IRMA et au CALIF devraient également jouer un rôle déterminant dans la décision des associations de rejoindre ou non le CNM. Le risque est grand, si l'une d'entre elles décidait de ne pas rejoindre le nouvel établissement public, que les autres suivent sa décision, au motif que le projet annoncé par le Gouvernement serait dénaturé.

Votre commission a adopté cet article sans modification .

Article 6

Conditions d'application de la présente loi

Objet : le présent article prévoit la publication d'un décret en Conseil d'État pour déterminer les conditions d'application de la présente loi .

Le présent article prévoit un décret en Conseil d'État destiné à préciser les conditions d'application de la loi. Ce décret précisera principalement les dispositions relatives à la gouvernance prévues à l'article 2 du présent projet de loi.

Votre commission a adopté cet article sans modification .

Article 7

Abrogation des dispositions législatives
relatives au Centre national de la chanson, des variétés et du jazz

Objet : cet article abroge l'article 30 de la loi n° 2002-5 du 4 janvier 2002 relative aux musées de France, qui a institué le CNV .

I. - Le texte de la proposition de loi

Cet article abroge l'article 30 de la loi n° 2002-5 du 4 janvier 2002 relative aux musées de France, qui a institué le CNV et en définit les principales caractéristiques et modalités de fonctionnement. Cette abrogation constitue une coordination avec les dispositions de l'article 5 de la présente proposition de loi, qui organise la substitution du CNM au CNV pour l'accomplissement des missions dont il était jusqu'ici chargé.

L'article 30 de la loi du 4 janvier 2002 précitée est le seul article de loi en vigueur mentionnant le CNV, si l'on excepte trois autres dispositions législatives de nature financière , qui devraient être modifiées à l'automne dans le cadre de la loi de finances pour 2020, à savoir :

- l'article 76 de la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 de finances rectificative pour 2003, qui institue la taxe sur les spectacles de variétés, dont le produit est affecté au CNV pour financer des actions de soutien aux spectacles de chanson, de variétés et de jazz ;

- l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, qui fixe le plafonnement de ladite taxe sur les spectacles de variétés, dont le montant est de 50 millions d'euros depuis la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016 ;

- et l'article 278-0 bis du code général des impôts sur le taux réduit de TVA, qui exclut les établissements affiliés au CNV de la possibilité d'appliquer le taux de 5,5 % institué en faveur des spectacles de théâtre, des spectacles de cirque, des concerts et des spectacles de variétés.

II. - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Cet article n'a fait l'objet d' aucune modification lors de son examen en première lecture à l'Assemblée nationale.

III. - La position de votre commission

L'abrogation de l'article 30 de la loi du 4 janvier 2002 est indispensable pour permettre l'absorption du CNV par le CNM et ne pas laisser les deux organismes coexister, puisque le CNV deviendra une coquille vide à compter de la création du CNM le 1 er janvier 2020.

Votre commission a adopté cet article sans modification .

Article 7 bis

Coordination dans le code général des impôts

Objet : le présent article assure une coordination dans le code général des impôts .

Introduit en séance publique à l'initiative du Rapporteur Patrick Bois, le présent article constitue une coordination dans le code général des impôts. Il permet de supprimer la référence, obsolète en cas d'adoption de la présente proposition de loi, du CNV au bénéfice du CNM au sein de l'article 278-O bis du code précité qui traite des taux réduits de TVA dans le domaine du spectacle.

Votre commission a adopté cet article sans modification .

Article 8

Entrée en vigueur différée de la proposition de loi

Objet : cet article diffère l'entrée en vigueur de l'ensemble des dispositions de la présente proposition de loi au 1 er janvier 2020.

I. - Le texte de la proposition de loi

Le présent article reporte au 1 er janvier 2020 l'entrée en vigueur des différents articles de cette proposition de loi.

II. - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Cet article n'a fait l'objet d' aucune modification lors de son examen en première lecture à l'Assemblée nationale.

III. - La position de votre commission

Depuis sa première esquisse en 2011, le projet de CNM a été repoussé à plusieurs reprises. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2019, dans lequel aucun crédit n'était formellement inscrit pour l'amorçage du CNM, en dehors de 5 millions d'euros que le ministre de la culture promettait de dégager en gestion, votre commission de la culture, de l'éducation et de la communication s'était inquiétée du risque de décevoir les acteurs de la filière musicale et de finir par leur faire perdre leur intérêt pour ce projet.

À l'occasion de la remise du rapport de Pascal Bois et Émilie Cariou fin janvier 2019, le Premier ministre, Édouard Philippe, s'était finalement engagé en faveur « de la mise en place opérationnelle de l'établissement au 1 er janvier 2020, après une phase d'amorçage en 2019 ». Le délai de mise en oeuvre prévu au présent article répond à cet engagement.

Il paraît incompressible , compte tenu de la nécessité, dans cet intervalle , d'adopter les textes de nature réglementaire prévus par la présente proposition de loi, de rédiger le règlement de l'établissement et de le doter, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2020, des financements adéquats à l'exercice de ses missions. Ces différentes étapes, conduites sous l'impulsion du comité opérationnel de préfiguration, présidée par Catherine Ruggeri, mis en place à la fin du mois de mars 2019, sont indispensables pour permettre au CNM de pouvoir démarrer ses activités à compter du 1 er janvier 2020.

Votre commission a adopté cet article sans modification .

Article 8 bis

Rapport sur la mise en place et le financement du CNM

Objet : le présent article prévoit la remise d'un rapport au Parlement dans les quatre mois qui suivent la promulgation de la loi .

Introduit à l'occasion de la discussion en séance publique à l'initiative de Mme Frédérique Dumas, avec un sous-amendement de la commission des affaires culturelles et un avis favorable du Ministre, le présent article prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport quatre mois après la promulgation de la présente loi sur « la mise en place et le financement du Centre national de la musique. Ce rapport évalue notamment les coûts de sa mise en place ».

Ce rapport répond à la principale préoccupation qui entoure le futur CNM, à savoir son financement. Le montant des dotations budgétaires ou bien d'éventuelles nouvelles affectations de taxes devraient être fixés à l'occasion de la discussion du projet de loi de finances. Le délai de quatre mois, à supposer une promulgation en septembre , renvoie au mois de janvier 2020, soit après l'adoption de la loi de finances.

Dans ce contexte, votre Rapporteur a proposé par amendement COM-36 la suppression de cet article .

Votre commission a supprimé cet article.

Article 8 ter

Rapport sur les modalités de rattachement
du FCM, de l'IRMA et du Burex au CNM

Objet : cet article demande la transmission au Parlement d'un rapport relatif aux modalités de rattachement du FCM, de l'IRMA et, éventuellement, du Burex au CNV. Ce rapport porterait sur les conditions et le calendrier des dissolutions volontaires de ces associations, les modalités de transfert des contrats et conventions en cours et sur l'évolution de leurs actuels programmes d'aides .

I. - Le texte de l'Assemblée nationale

Cet article a été introduit en première lecture par les députés, à l'initiative de Brigitte Kuster, lors de l'examen du texte en séance publique. Il vise à obtenir la transmission d'un rapport au Parlement sur les modalités du rattachement du FCM, de l'IRMA et éventuellement du Burex au CNM, en suggérant la voie du conventionnement . Il devrait notamment examiner les conditions et calendriers des dissolutions volontaires de ces associations, les modalités de transfert de leurs contrats et conventions en cours, ainsi que l'évolution de leurs programmes d'aides.

L'objectif de cet article est de sécuriser l'absorption de ces trois associations de droit privé par le futur établissement public. Un certain nombre de questions se posent en effet à cette occasion, en particulier :

- la question du sort réservé aux baux en cours, avec une difficulté aiguë pour l'une des trois associations, le FCM, qui vient de renouveler son bail pour une durée de six ans ;

- la question des transferts de personnel travaillant au sein de ces structures ;

- la question de la gestion des réserves financières de ces associations ;

- et la question de la reprise et de la pérennisation des programmes d'aides mis en oeuvre par ces différentes associations. Les auteurs de cette disposition soulignent la souplesse qui préside aujourd'hui à l'évolution de ces programmes, sous l'impulsion des professionnels, et souhaitent qu'un tel mode de gestion soit conservé au sein du CNM.

D'après les informations recueillies par votre rapporteur, les programmes existants devraient être, en tout état de cause, poursuivis sous leur forme actuelle dans un premier temps, avant d'évoluer éventuellement sur la base des résultats des concertations qui pourraient avoir lieu au sein des instances de décision du nouvel établissement public.

Un sous-amendement du rapporteur de la commission des affaires culturelles, Pascal Bois, a reporté de trois à six mois le délai pour la transmission de ce rapport.

II. - La position de votre commission

Soucieux de respecter le domaine de la loi, le Sénat est, par principe, peu enclin à accepter les demandes de rapport.

Votre rapporteur observe que l'un des principaux objectifs de cet article est de s'assurer que l'État apporte des garanties aux associations de droit privé sur les conséquences de leur absorption par le CNM. Or, le principe de la signature de conventions entre chacune des associations et le CNM a déjà été inscrit par les députés à l'article 5 , ce qui est de nature à rassurer les différentes associations sur le fait que l'ensemble des questions à prendre en compte seront effectivement traitées pour permettre à leur conseil d'administration de voter la dissolution en toute connaissance de cause.

Le délai de six mois fixé pour la remise du rapport est beaucoup trop lointain pour que ce rapport soit véritablement utile . Compte tenu des délais d'examen de la présente proposition de loi, le rapport pourrait n'être transmis que dans les premiers mois de l'année 2020, alors que les associations auront probablement déjà largement engagé leur réflexion sur les modalités de leur intégration au CNM, puisque l'objectif serait, d'après les informations communiquées à votre rapporteur, que les différentes associations se prononcent sur leur dissolution dans le courant du premier semestre 2020.

Dans ces conditions, votre commission a jugé que cet article pouvait être supprimé (amendements identiques COM-9 de votre rapporteur et COM-30 de Mme Mélot).

Votre commission a supprimé cet article .

Article 9 (supprimé)

Gage

Objet : le présent article prévoit la création d'une taxe additionnelle afin de compenser les charges qui pourraient résulter pour l'Etat de la création du CNM .

La pratique parlementaire à l'Assemblée nationale comme au Sénat a conduit à une grande libéralité dans l'application de l'article 40 de la Constitution sur les propositions de loi. Le rapport de Philippe Marini consacré à cette question 7 ( * ) précise ainsi : « Le Bureau du Sénat est compétent pour statuer sur la recevabilité des propositions de loi en application des dispositions de l'article 24 du Règlement du Sénat. Il est d'usage, dans les deux assemblées, que les propositions de loi au sein desquelles une création ou une aggravation de charge est assortie d'une compensation soient admises . »

Dans le cas d'espèce, l'article 9 prévoit que les charges supplémentaires induites par la création du CNM seraient compensées par une taxe additionnelle.

À l'initiative du Gouvernement, l'article 9 a été supprimé, et le gage ainsi levé.

Votre commission a confirmé la suppression de cet article .

*

* *

Votre commission a adopté l'ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée .

EXAMEN EN COMMISSION

MERCREDI 26 JUIN 2019

___________

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Ça y est ! L'arlésienne est de retour : le Centre national de la musique (CNM) refait surface. Alors que le cinéma dispose depuis 1947 d'un établissement dédié, le Centre national du cinéma (CNC), doté de moyens significatifs et en mesure de faire dialoguer et coordonner les différentes composantes du secteur, tel n'est pas le cas de la musique.

Pourtant, la musique enregistrée et les spectacles représentent une part essentielle de la production culturelle française, avec un chiffre d'affaires global de 1,5 milliard d'euros, supérieur à celui du cinéma. C'est peut-être pour cela que ce regroupement n'existe pas...

La création d'un centre national de la musique est évoquée depuis 2011, à la suite du rapport réalisé par Franck Riester et Didier Selles. À l'époque, et alors que l'ensemble des acteurs, en pleine panique, étaient prêts à s'engager, le projet avait été abandonné, faute de moyens, peu après l'arrivée en poste d'Aurélie Filippetti, ce dont la filière garde un fort ressentiment - les auditions l'ont confirmé.

Pour autant, la nécessité de constituer un centre national dédié est plus que jamais d'actualité, et repose sur deux séries de constats.

Premier constat, la révolution numérique a profondément bouleversé le secteur. Le numérique avait affecté la création dans les années 1980. Parmi les industries culturelles, la musique est le premier secteur à avoir été frappé par la crise due à l'arrivée d'innovations numériques révolutionnant la consommation de produits culturels.

Dès la fin des années 90, le piratage de morceaux, via Napster et ses dérivés, a considérablement fragilisé l'économie de la filière. L'édition musicale a été particulièrement touchée, le chiffre d'affaires de la musique enregistrée ayant été divisé par trois entre 2002 et 2015. Un secteur autrefois florissant a ainsi été très brutalement confronté à une perte massive et rapide de revenus. C'est ce que j'appelais le moment de panique - et le mot n'est pas trop fort.

L'édition phonographique est cependant parvenue à renouveler son modèle économique et ses modes de production pour renouer avec la croissance. Je renvoie à l'excellent rapport pour avis de notre collègue Françoise Laborde sur le dernier projet de loi de finances, qui a souligné que, depuis 2013, le chiffre d'affaires du streaming avait été multiplié par près de trois, le nombre d'écoutes par cinq et le nombre d'abonnés payants par trois : les foyers français sont 4,4 millions à être abonnés.

Cette crise contraste avec la situation, bien meilleure, du spectacle vivant, qui pèse presque deux fois plus que la musique enregistrée. Les concerts sont en quelque sorte devenus un nouvel eldorado pour l'industrie musicale, même si cela ne va pas sans un certain nombre de difficultés, avec une concentration croissante des acteurs. Par ailleurs, le secteur du spectacle vivant est fragilisé ces dernières années par l'explosion des coûts de sécurité à cause du risque d'attentats. Je vous renvoie aux nombreuses communications que notre collègue Sylvie Robert, rapporteure pour avis des crédits « Création », nous a faites à ce sujet ces deux dernières années.

Second constat : le secteur demeure toujours très éclaté. La révolution numérique a remis en question un équilibre qui reposait sur la suprématie de la musique enregistrée. À l'instar de la situation sociale de notre pays, le secteur de la musique est en effet traversé depuis des années par des lignes de fracture multiples : musique enregistrée et spectacle vivant, secteur subventionné et secteur privé, musique savante et musiques populaires, pratique professionnelle et pratique amateur... Dans le métier, on a coutume de dire qu'on a un oeil sur la partition... et un oeil sur le tiroir-caisse !

Les différents acteurs n'ont pas su jusqu'à présent construire une culture commune et présenter un front uni pour défendre des intérêts communs et valoriser le secteur, ce qui ne fait qu'exacerber la question de la composition du conseil d'administration du Centre national de la musique. Platon disait que si l'on veut connaître un peuple, il faut écouter sa musique. C'est particulièrement vrai pour notre pays aujourd'hui. Cette incapacité à susciter du consensus comporte des risques importants à moyen terme.

En effet, la musique va devoir affronter des enjeux majeurs liés à l'expansion des technologies numériques : la défense de la conception européenne du droit d'auteur, par opposition au modèle anglo-saxon du copyright , menacée jusqu'à Bruxelles comme l'ont montré les difficultés d'adoption de la directive sur les droits d'auteur ; la question du partage de la valeur entre l'ensemble des acteurs de la filière musicale, à commencer par les artistes, face à la position désormais incontournable prise par les plateformes de musique en ligne par abonnement ; l'impact sur la diversité culturelle des algorithmes mis en oeuvre par les services de streaming , qui sont susceptibles, comme cela est déjà le cas pour l'information - un sujet sur lequel notre présidente a beaucoup travaillé - d'influencer très fortement les choix des utilisateurs, au risque d'une uniformisation des goûts.

L'industrie musicale avait très mal vécu l'abandon en 2012 du premier projet de Centre national de la musique. Dans ce contexte, la relance du projet au printemps 2017 par Françoise Nyssen, alors ministre de la culture, a fait renaître beaucoup d'espoir. Les conclusions du rapport de Roch-Olivier Maistre - intitulé « rassembler la musique », titre qui dit tout - en faveur d'un établissement public chargé d'observer, d'appuyer le développement international et de soutenir le secteur, dans une optique de diversité culturelle, ont été unanimement saluées par les acteurs de la filière.

La mission de préfiguration du centre confiée aux députés Pascal Bois et Émilie Cariou, avec lesquels j'ai pu échanger la semaine dernière, a débouché sur le dépôt, le 27 mars dernier, d'une proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale le 6 mai.

Première grande idée de la proposition de loi, la création, au 1 er janvier prochain, d'un EPIC placé sous la tutelle du ministère de la culture, dénommé Centre national de la musique et intervenant dans le champ de la musique et des variétés - et quand je dis musique, je fais évidemment référence à toutes les esthétiques musicales : il faut en finir avec les chapelles. Cet établissement a vocation à rassembler plusieurs organismes qui interviennent aujourd'hui en appui à ce secteur : d'une part un établissement public, le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz, communément appelé CNV, qui a pour mission de soutenir le spectacle vivant de musiques actuelles et de variétés, et d'autre part, quatre associations de droit privé, à savoir le Bureau export ou Burex, qui accompagne la filière musicale française dans l'accompagnement de ses artistes à l'export, le Fonds pour la création musicale (FCM), qui apporte son soutien à la création musicale au sens large - vidéos, festivals, concerts, tournées, premières parties, disques, et j'en passe - le centre d'information et de ressources pour les musiques actuelles, plus connu sous le nom d'Irma, qui remplit une mission d'information, d'orientation, de conseil et de formation à destination des acteurs des musiques actuelles, et le Club action des labels et disquaires indépendants (Calif) qui soutient le maintien de l'activité et l'implantation de magasins de disques dans nos territoires.

Savez-vous, à ce propos, combien y a-t-il de disquaires à Paris ?

Mme Annick Billon . - Cinquante ?

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Ils sont soixante.

M. Bruno Retailleau . - Et dans le reste de la France ?

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Il faudra que je le demande au Calif. Il vous a été distribué un document présentant le schéma global de la fusion de ces structures.

Le CNM a vocation à exercer les missions précédemment dévolues à ces organismes en matière d'information, de formation, d'expertise, de valorisation du patrimoine musical, de développement international, de développement territorial et de soutien à ce secteur, en les étendant à l'ensemble du champ musical.

Il devrait également être chargé d'une mission d'observation confiée au CNV par la loi relative à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine (LCAP), mais que celui-ci n'avait jamais pu exercer jusqu'ici, faute d'accord sur la gouvernance de l'observatoire. L'exploitation de données agrégées est un point très important, car le secteur dispose d'une mine d'informations qu'il est difficile de rassembler.

Il devrait par ailleurs disposer de nouvelles responsabilités en matière de développement de l'éducation artistique et culturelle, de promotion de la parité au sein des professions musicales, de veille technologique et de soutien à l'innovation.

Je vous proposerai plusieurs amendements pour clarifier ces différentes missions ou leur exercice. La compétence du CNM en matière de structuration de la filière à l'échelle des territoires me semble notamment trop imprécise.

Qui dit regroupement de structures existantes dit organisation des modalités de leur rattachement. C'est évidemment bien plus aisé pour le CNV qui est un établissement public. La proposition de loi prévoit sa suppression le 1 er janvier 2020 pour lui permettre de se fondre dans le CNM. En revanche, il faudra que les quatre associations de droit privé votent leur dissolution avant de rejoindre le CNM. Elles pourront conclure des conventions avec l'établissement pour organiser préalablement les modalités de leur rattachement, que ce soit en ce qui concerne la reprise de leurs personnels, le fléchage de leurs réserves financières, ou les évolutions susceptibles d'affecter les programmes d'aides qu'elles ont mis en place. Le FCM occupe des locaux dont les baux devront être résiliés : l'intégration ne sera pas toujours facile.

Deuxième idée, les moyens d'action du futur CNM devraient provenir de quatre sources : la taxe sur les spectacles de variétés actuellement perçue par le CNV, des subventions de l'État et des fonds accordés volontairement par les organismes de gestion collective, ainsi que de la gestion de deux crédits d'impôt, pour s'élever à 78 millions d'euros.

La viabilité d'un centre qui n'est à l'heure actuelle que la collection d'organismes existants n'est pas certaine. S'il y a bien une logique juridique à créer le CNM par la loi, la cohérence d'ensemble aurait dû conduire le Gouvernement à s'engager lors du débat sur le montant qu'il entendait y consacrer. Le rapport Bois-Cariou a fixé un plancher de 20 millions d'euros - quand on connaît l'expertise financière d'Émilie Cariou et de Catherine Ruggeri, présidente du comité de pilotage, on sait que ce n'est pas une parole en l'air. Or, dans le contexte actuel de raréfaction de la ressource publique et d'attaques répétées contre les crédits d'impôt destinés à la création, aucune décision ne semble avoir été prise, ce qui plonge tous nos interlocuteurs dans l'expectative et ravive de fortes divisions dans la profession.

J'estime pour ma part que le soutien du Gouvernement à la proposition de loi devra se concrétiser lors du prochain projet de loi de finances. À ce stade avancé de la procédure, le recul que traduirait l'absence d'un signal budgétaire fort paralyserait les initiatives des acteurs privés et signerait la fin des ambitions de la filière.

Nous sommes donc dans la situation paradoxale de devoir nous prononcer sur un texte dont nous partageons tous, je crois, très largement les finalités, mais « à l'aveugle » - nous commençons à en avoir l'habitude - tant que les moyens n'auront pas été clairement arrêtés en loi de finances. Notre commission s'est maintes fois penchée sur la question des ressources liées à la création, avec à chaque fois le même constat : les ressources du cinéma, en particulier via la fiscalité affectée, sont infiniment plus importantes que celles de la musique ! Ce n'est pas normal. Ce poids du CNC - qui souligne, au passage, l'intérêt pour un secteur d'activité de disposer d'un établissement public - attire d'ailleurs régulièrement l'attention de certains collègues députés, qui voudraient réduire sensiblement ses moyens... En tout état de cause, plusieurs solutions existent, comme affecter la taxe dite « YouTube » au CNM plutôt qu'au CNC, ce qui rapporterait environ 7 millions d'euros par an. Cette hypothèse est d'ailleurs reprise par Pascal Bois et Émilie Cariou, qui souhaite également affecter une partie de la taxe sur les opérateurs de communications électroniques (TOCE) pour environ 10 millions. Toujours est-il que le débat promet d'être vif : donner des moyens au CNM revient soit à priver le CNC de ressources, soit à creuser un peu plus le déficit... Nous en débattrons lors de l'examen de la loi de finances.

De la même manière, nous n'avons pas véritablement la main sur les modalités de gouvernance, objet de l'article 2. Comme le CNM ne constitue pas une nouvelle catégorie d'établissement public, puisqu'il existe déjà plusieurs établissements qui poursuivent un objet analogue - Centre national du cinéma, Centre national du livre, Centre national de la danse -, la composition de son conseil d'administration relève du pouvoir réglementaire, sauf à ce que nous voulions une gouvernance totalement différente, ce qui n'est pas notre cas.

Je ne vous cache pas que ces questions de gouvernance agitent particulièrement la filière musicale. Les représentants de celle-ci sont aujourd'hui majoritaires dans la composition des conseils d'administration des cinq organismes qui devraient disparaître au profit du CNM. Aucun des acteurs ne remet en cause la place prépondérante qui pourrait revenir aux représentants de l'État dans le dispositif, tant l'État semble le seul à même à la fois de porter une vision stratégique intégrant l'ensemble des composantes de la politique musicale et de faire émerger l'intérêt général. Chacun se souvient des paroles fortes du Premier ministre dans son discours de politique générale : « qui paie décide, qui décide assume. »

Mais beaucoup s'inquiètent de perdre leur pouvoir de décision si, pour des raisons d'efficacité auxquelles je souscris, il était décidé de mettre en place un conseil d'administration à effectif réduit. Gardons à l'esprit que certains acteurs de la filière musicale, à savoir les organismes de gestion collective, sont appelés à contribuer directement au financement de l'établissement. D'autres, comme les entrepreneurs de spectacles vivants, devraient y contribuer indirectement par le biais de la taxe sur les spectacles de variétés, dont le produit devrait être affecté au CNM.

Nos collègues députés ont eu la bonne idée de suivre l'une des recommandations du rapport Bois-Cariou et de créer un conseil professionnel destiné à représenter l'ensemble de la filière musicale. Il faudra veiller à assurer un équilibre entre la composition du conseil d'administration et celle du conseil professionnel pour réussir à concilier efficacité du processus de décision, préservation de l'intérêt général et nécessité de permettre à chacun de s'exprimer. Il me paraît essentiel que les différents acteurs de la filière musicale n'aient pas le sentiment d'y perdre en se rassemblant au sein de cette nouvelle maison commune, faute de quoi le risque serait que certaines des associations de droit privé refusent in fine de rejoindre le CNM, ce qui ferait perdre beaucoup de son intérêt au projet.

Pour ma part, je crois aussi que les collectivités territoriales ne doivent pas être oubliées dans cette gouvernance au regard de leur contribution à l'animation et au financement de la politique musicale dans les territoires - c'est dans le rôle du Sénat d'y veiller. Je vous proposerai un amendement en ce sens. Je m'interroge également sur la présence de parlementaires dans le conseil d'administration du CNM qui se révèle bien souvent bénéfique pour dégager des équilibres dans les établissements où la gouvernance se révèle complexe - je pense à Radio France. L'ensemble de ces questions devraient être tranchées dans les prochaines semaines par le comité de pilotage du CNM, sur la base des arbitrages rendus par le ministre de la culture.

En dehors de ces points de vigilance, nous ne pouvons qu'apporter notre soutien à cette proposition de loi qui rejoint nos préoccupations. La séance publique sera pour nous l'occasion de faire préciser au ministre sa pensée sur les moyens et la gouvernance, et de préparer le débat budgétaire qui constituera le vrai lancement du CNM - ou sa fin. Je termine en rappelant le rôle central des auteurs-compositeurs, sans qui la musique n'existe pas.

Mme Sylvie Robert . - Merci à notre rapporteur, qui nous a permis d'assister à des auditions très intéressantes. Je partage la quasi-totalité de ce propos. Le CNM est attendu depuis tant d'années, maintenant... Je commencerai sans doute mon intervention en discussion générale en disant : « c'est maintenant ou jamais ! ». Nous avons l'expérience de textes peu consensuels entre l'Assemblée nationale et le Sénat. J'espère que ce ne sera pas le cas ici. Il ne faudrait pas que le CNM soit un CNV amélioré, comme le CNV avait été un fonds de soutien amélioré. De grandes mutations sont à l'oeuvre ; l'idéal serait que le CNM devienne non seulement un outil de régulation et de promotion du secteur, mais qu'il agisse au service d'une politique publique.

Je n'oublie pas les artistes : ce sont eux, les créateurs de valeur, et on a trop tendance à l'oublier. Il faut prendre en compte les usages nouveaux. Nous sommes tous embarrassés : nous ne savons pas de quels financements le CNM pourra bénéficier, ce qui inquiète toute la filière. Mais nous ne percevons pas de signaux de la part du ministère. Ce qui est attendu, au-delà des 20 millions d'euros dont parle le rapport, c'est un vrai geste de sa part. Il est incroyable que personne ne parle de la taxe YouTube et de la TOCE. Le projet de loi de finances sera la prochaine étape. Je plaide pour que le CNM soit régi par un contrat d'objectifs et de moyens, dans lequel une prise en compte de la pluri-annualité serait bienvenue.

L'État doit être actionnaire majoritaire, si l'on peut dire, du CNM, mais il doit arbitrer vraiment. Toute la gouvernance est renvoyée à un décret. Celle du CNV était pourtant précisée dans la loi Musées de 2002 qui l'a créé. Pourquoi ne pas procéder de la même façon ?

Bien des obstacles ont été franchis dans la négociation avec les acteurs de la filière, grâce à Mme Ruggeri. Le Burex y participe, alors qu'on ne l'attendait pas. J'espère que les conditions pour faire atterrir ce projet seront réunies. Le secteur de la musique est en grande mutation - j'ai ainsi déposé un amendement sur la métadonnée, car il faut avoir une analyse digne du XXI e siècle sur ce sujet.

Mme Sonia de la Provôté . - Il serait malvenu d'empêcher que ce CNM se constitue. Après 8 ans de réflexion, il est temps ! Le risque d'une disparition complète du projet existe.

Une thématique est centrale, la diversité. L'un des rôles du CNM sera d'assurer la diversité des répertoires et celle des types de pratiques entre amateurs et professionnels, mais aussi de maintenir la vie des labels indépendants quoi font la vie de nos territoires et cette effervescence liée aux festivals qui ne présentent pas des blockbusters . La composition de son conseil d'administration et son financement seront essentiels. Diversité sur le territoire, diversité des acteurs, mais aussi diversité culturelle : la promotion de la chanson francophone est importante. Nous le devons au monde, à qui la langue française apporte des valeurs et des façons de penser différentes.

La musique est une industrie culturelle qui pèse dans le secteur. Ce centre doit l'aider à progresser. Elle représente en effet de très nombreux emplois ailleurs que dans les métropoles. Au moment où la fracture territoriale est reconnue comme un problème central, cela compte.

L'éducation musicale et artistique peut aussi être un outil au service de la diversité : le pass culture devrait s'appuyer sur ce CNM pour éviter le formatage des oreilles des jeunes.

M. Pierre Ouzoulias . - Je remercie vivement notre rapporteur, qui a mené ses auditions avec compétence et... tambour battant ! ( sourires ). Il a lu la partition du gouvernement rubato : avec ce détachement qui est la marque de fabrique du Sénat. Or comme le disait le grand pédagogue de la musique René Leibowitz, « il n'y a pas de musique possible sans rubato ». Je partage vos réserves, notamment sur le plan financier. On peut craindre un système qui ne repose que sur des ressources indépendantes - crédits d'impôt ou taxes affectées - ce qui prive l'État, et en particulier le Parlement, de contrôle sur les décisions. En bon républicain, je regrette toujours que l'État s'interdise d'intervenir directement, par des crédits budgétaires, dans un domaine, quel qu'il soit.

Mais il est devenu indispensable de réaliser ce mécano administratif, dont on peut espérer qu'il crée une guilde, une corporation garantissant un minimum de cohérence pour résister aux Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft). Aujourd'hui, le monde musical est divisé en différentes chapelles, autant de maisons de paille ou de bois qui ne résisteraient pas bien longtemps, s'il venait à l'idée au grand méchant loup de souffler dessus...

Nous voterons en faveur de cette proposition de loi, mais avec les réserves que nous ré-exprimerons lors de la discussion budgétaire. Nous attendons les engagements du ministre, avec d'autant plus de vigilance que nous attendons toujours que soient tenus ceux d'une autre ministre, celle de l'enseignement supérieur, concernant le déplafonnement de la contribution de vie étudiante et de campus...

Mme Françoise Laborde . - Je remercie moi aussi notre rapporteur. J'ai assisté à certaines auditions, ce qui m'a permis par exemple d'apprendre que les variétés comprenaient aussi l'humour, le cabaret et le cirque.

Nous partageons l'idée que le CNM est un bon levier : le CNC a pour ainsi dire montré la voie. Comme le dit justement Sylvie Robert, c'est maintenant ou jamais.

Réunir un établissement public avec des acteurs de droit privé ne sera pas facile. Le CNV avait déjà comme objectif de réunir des données, et a des difficultés à le faire. Le CNM le fera-t-il plus facilement grâce au regroupement ainsi proposé ? Je l'espère.

S'agissant de la gouvernance, une majorité de représentants de l'État au sein du conseil d'administration ne choque personne. Sauf qu'il doit se donner les moyens de peser - je parle de moyens financiers. On parle de 20 millions d'euros. D'où viendront-ils, selon quels critères seront-ils gérés ?

Nous devons attendre la loi de finances. Cela m'inquiète : j'ai peur que l'on déshabille le CNC, ce qui ne serait pas bien accepté. Mais sinon, d'où viendraient ces 20 millions d'euros ? Globalement, nous sommes favorables à l'aboutissement de ce texte.

M. Claude Malhuret . - Je m'associe aux félicitations que mérite notre rapporteur, qui a fait une présentation claire et exhaustive de son rapport. Notre groupe est favorable à la création d'un CNM - véritable arlésienne - capable de promouvoir d'une seule voix la création musicale et son rayonnement. Nous partageons les remarques du rapporteur sur l'absence de précisions concernant le budget. Nous aurions préféré que les mesures financières aient été à tout le moins annoncées au moment de la discussion de ce texte. Nous approuvons les amendements du rapporteur. Nous proposerons par ailleurs notamment de préciser que le conseil professionnel doit être paritaire.

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Toutes les filières souhaitent être représentées. La musique classique ou savante se sent en effet écartée, pour ainsi dire le parent pauvre du ministère. Ce sont les collectivités territoriales qui la portent à travers les grands orchestres nationaux ; il faut donc qu'elles soient très clairement associées à cette ambition. L'avenir de ces ensembles mérite une vraie discussion. N'oublions aucun répertoire.

Sur les questions de financement, lorsque nous avons voté la taxe YouTube, j'avais formellement rappelé qu'elle devait aussi financer la musique. Il pourra être utile de le rappeler lors de la discussion de la loi de finances.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Merci pour vos remerciements. Oui, monsieur Ouzoulias, il faut du rubato dans la musique.

Concernant l'application de l'article 45 de la Constitution, je vous propose que le périmètre d'application du texte permettant de juger de la recevabilité des amendements inclue les dispositions relatives au statut, aux missions, à l'organisation ainsi qu'aux modalités d'administration du CNM qu'il est proposé de créer.

Je vous suggère en revanche de considérer que ne présentent pas de lien, même indirect, avec le texte déposé, les dispositions sans rapport avec le CNM relatives à l'organisation, au fonctionnement et au financement de la filière musicale et de ses différents acteurs.

Compte tenu du périmètre ainsi défini, aucun des amendements déposés n'est susceptible d'être déclaré irrecevable sur le fondement de cet article.

Examen des articles

Article 1 er

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Nous commençons par l'amendement de précision rédactionnelle COM-1 . La rédaction résultant des travaux de l'Assemblée nationale crée une confusion en distinguant les spectacles de variétés du reste du spectacle vivant dont ils sont pourtant partie intégrante. Je propose donc d'inscrire que le périmètre du CNM porte sur la musique et les variétés, ce qui recouvre à la fois les enregistrements et les spectacles et demande à Mme Robert de retirer son amendement COM-24 au profit de celui que je viens de présenter.

Mme Sylvie Robert . - Je me rallie à votre rédaction.

L'amendement COM-24 est retiré. L'amendement COM-1 est adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - L'amendement COM-2 porte sur un sujet qui m'est personnellement cher : l'égale dignité des répertoires. Roch-Olivier Maistre a eu raison de vouloir « rassembler la musique » et non « les musiques » : il n'y en a qu'une. Parler de musique savante est insupportable. Les passerelles se font d'ailleurs aujourd'hui de plus en plus naturellement.

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Tout à fait.

L'amendement COM-2 est adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Les amendements identiques n os COM-33 et COM-34 visent à ce que le CNM respecte le principe des droits culturels - principes défendus depuis plusieurs années par notre commission, qui a contribué à les inscrire dans la loi Notre et dans la loi LCAP - pour favoriser la diversité culturelle, lorsqu'il exerce sa mission de soutien au secteur de la musique et des variétés.

Je suis donc tout à fait favorable à ces amendements, sous réserve d'une rectification pour que leur rédaction concorde avec celle de mon amendement COM-2, que nous venons d'adopter, qui mentionne « le respect de l'égale dignité des répertoires ». Ils seraient alors rédigés ainsi : « Compléter cet alinéa par les mots : et des droits culturels ». S'ils étaient adoptés, l'alinéa 3 de l'article 1 er se lirait comme suit : « Soutenir l'ensemble du secteur professionnel, dans toutes ses pratiques et dans toutes ses composantes, et en garantir la diversité, dans le respect de l'égale dignité des répertoires et des droits culturels ; »

Mme Sylvie Robert . - Très bonne idée !

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Le Sénat inscrirait ainsi une troisième fois dans la loi les droits culturels, qui avaient été retoqués dans un premier temps par l'Assemblée nationale.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Ils ont tellement imprégné cette maison que même les sénateurs qui n'étaient pas encore élus à l'époque de leur inscription dans les précédentes lois se les sont appropriés.

Mme Sonia de la Provôté . - J'accepte moi aussi la rectification.

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Ces amendements deviennent les amendements COM-33 et COM-34 rectifiés.

Les amendements identiques COM-33 rectifié et COM-34 rectifié sont adoptés.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - L'amendement COM-23 a été présenté par une collègue qui n'est pas membre de notre commission, Mme Raimond-Pavero. Si je souscris à son objectif de faire en sorte que le CNM exerce sa mission en concertation avec les collectivités territoriales, il me semble satisfait par l'alinéa 14.

L'amendement n° COM-23 n'est pas adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - L'amendement COM-16 confie au CNM une mission spécifique en matière de développement territorial de l'écosystème musical. C'est en effet nécessaire, mais je proposerai un amendement à l'alinéa 14 en ce sens, qui devrait satisfaire ses auteurs. Il me semble en effet que cette mission territoriale gagnerait à être prévue en fin d'article, pour en faire une mission transversale que le CNM devrait prendre en compte dans l'ensemble de ses interventions.

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Étant satisfait, il pourrait être retiré.

M. Claude Malhuret . - Soit.

L'amendement COM-16 est retiré.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Avant de devenir sénateur, j'avais entendu dire que la qualité du texte était améliorée par son passage au Sénat. L'amendement COM-5 en est l'illustration : en parlant d'artistes français, le texte de l'Assemblée nationale exclurait Stromae et Angèle, par exemple, et bien d'autres artistes, africains notamment, qui sont produits en France sans être français. Il est préférable de cibler le « made in France ».

L'amendement COM-5 est adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Madame Robert, accepteriez-vous de vous rallier à cet amendement, et de retirer votre amendement COM-25 ?

Mme Sylvie Robert . - Il parle de « contribuer » et non de « favoriser », comme le vôtre, et me semble donc plus proactif. Mais l'esprit étant le même, je le retire.

L'amendement COM-25 est retiré.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Compte tenu de l'enjeu en matière de développement durable, il n'est pas inutile de préciser avec l'amendement COM-11 que le CNM, en sa qualité d'établissement public, pourra encourager les acteurs de la filière musicale à contribuer à la mise en oeuvre de la politique de l'État en matière de protection de l'environnement.

L'amendement COM-11 est adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - L'une des principales missions du CNM devrait être l'observation du secteur. Le manque de données agrégées disponibles fait aujourd'hui cruellement défaut pour mieux comprendre les enjeux de la filière musicale, évaluer l'effet des politiques publiques mises en oeuvre et, le cas échéant, les adapter de manière appropriée.

Pour remplir à bien cette mission, le CNM a besoin de pouvoir recueillir les informations, directement auprès des organismes et des entreprises qui opèrent au sein de la filière musicale. La loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine avait prévu un mécanisme pour faciliter la transmission des informations relatives aux données de billetterie, mais d'autres données seront également nécessaires pour permettre au CNM de mener à bien sa mission. C'est l'objet de l'amendement COM-4 , qui rappelle en même temps la responsabilité qu'aura le CNM, dans ces conditions, en matière de protection des données à caractère personnel et de respect du secret des affaires.

L'amendement COM-4 est adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - L'amendement COM-26 précise que le CNM doit analyser les données. Cela fait à mon sens partie intégrante de sa mission d'observation et il ne me semble pas nécessaire de le mentionner. Le but d'un observatoire est de recueillir des informations, de les exploiter et de restituer les résultats de ces analyses.

Prenons garde à ne pas rajouter trop de détails qui, a contrario , pourrait faire penser que d'autres activités, comme le recueil et la restitution de ses observations, ne seraient pas incluses dans le périmètre de ses missions. Avis défavorable.

Mme Sylvie Robert . - Je le maintiens et m'expliquerai en séance.

L'amendement COM-26 n'est pas adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - L'amendement COM-22 autorise le CNM à gérer le fonds d'intervention pour la sécurité des sites et des manifestations culturels, créé par un décret du 18 mars 2019.

L'Assemblée nationale a déjà prévu, à l'alinéa 14 du présent article, la possibilité pour le ministre de la culture de confier la gestion de ce fonds au CNM. Il ne le nomme pas en tant que tel pour qu'il puisse continuer à le gérer même s'il devait changer d'appellation - comme ce fut déjà le cas cette année. Je vous présenterai dans quelques instants un amendement pour bien garantir que l'ensemble de la gestion de ce fonds pour sa partie consacrée au spectacle vivant puisse bien être confié au CNM. Avis défavorable.

L'amendement COM-22 n'est pas adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - L'élargissement du champ d'intervention du CNM à l'éducation artistique et culturelle faisait partie des préconisations du rapport de Roch-Olivier Maistre, au regard des enjeux actuels en matière de démocratisation culturelle et d'égalité des chances. Il s'agit également d'un enjeu pour la filière musicale car, au-delà de la sensibilisation de nouveaux publics à la musique, ce peut être aussi un moyen de faire naître chez certains d'entre eux la vocation de devenir un professionnel de la musique. Pour autant, il est important de préciser avec l'amendement COM-3 que le CNM n'a pas vocation à se substituer au rôle clé joué par l'État, ministère de la culture et ministère de l'éducation nationale en tête, et les collectivités territoriales en matière d'éducation artistique et culturelle dans le domaine musical.

L'amendement COM-3 est adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - L'amendement COM-6 confie au CNM une mission à part entière de structuration de la filière musicale dans les territoires. Une telle mission a été initiée par le CNV ces dernières années dans le domaine du spectacle vivant, avec la signature de contrats de filière avec les collectivités territoriales et les services déconcentrés de l'État. Il est essentiel que le CNM puisse poursuivre cette mission et l'amplifier à l'ensemble de la filière musicale.

L'amendement COM-6 est adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Madame Robert, je vous propose de retirer votre amendement COM-27 au profit du précédent.

Mme Sylvie Robert . - Il y a une différence importante entre les deux : j'intègre les non-professionnels, dont le secteur est très largement structuré par les collectivités territoriales.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Loin de moi l'idée de bouter les non-professionnels hors du dispositif. Mais il est déjà difficile de mettre les professionnels autour de la table ! Nous n'en sommes pas encore là ! Comme l'a dit le ministre, le CNM ne doit pas être un ministère de la culture bis . Et il peut être difficile de séparer professionnels et non-professionnels.

L'amendement COM-27 n'est pas adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - L'amendement COM-7 précise la capacité du CNM à pouvoir gérer l'ensemble du fonds d'intervention pour la sécurité des sites et manifestations culturels pour sa partie consacrée au spectacle vivant.

L'amendement COM-7 est adopté.

L'article 1 er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 2

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - L'amendement COM-17 fixe les missions qui seraient dévolues au conseil d'administration du CNM. Cela me semble prématuré, alors que l'on ignore à ce stade sa composition comme celle du conseil professionnel. J'ajoute que l'approbation du budget, qui est généralement l'une des missions clés confiées à un conseil d'administration, n'est pas citée. Avis défavorable.

L'amendement COM-17 n'est pas adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Les amendements COM-13 et COM-28 détaillent la composition du conseil d'administration du CNM. Les deux visent à y faire figurer des représentants de l'État et des collectivités territoriales comme des représentants des salariés de l'établissement. En revanche ils diffèrent sur le reste de la composition. Le premier propose d'intégrer des représentants des différents acteurs de la filière musicale (auteurs, artistes, entrepreneurs de spectacle vivant, producteur phonographique et éditeurs), tandis que le second ne rentre pas dans le détail des professionnels appelés à y siéger et mentionne également la présence impérative de représentants des OGC et de personnalités qualifiées.

Comme je l'ai indiqué dans mon intervention générale, il est logique de renvoyer au pouvoir réglementaire le soin de fixer la composition du conseil d'administration d'un établissement public à partir du moment où celui-ci ne relève pas d'une nouvelle catégorie d'établissements publics.

Je comprends que la question de la gouvernance vous préoccupe. Mais, nous voyons bien avec ces deux amendements qu'il n'y a pas véritablement d'accord sur les personnalités appelées à y figurer. Il me semblerait par ailleurs regrettable que nous mettions en danger les discussions au sein du comité de pilotage du CNM en prenant des décisions trop hâtives. J'ajoute par ailleurs que l'objectif est d'aboutir à un accord en CMP avec l'Assemblée nationale. Pour avoir rencontré le rapporteur Pascal Bois il y a quelques jours, je crains que ce type de détails ne constitue un casus belli . Avis défavorable.

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Je suis moins convaincue par votre dernier argument : je crois que nous devons pousser nos convictions jusqu'au bout, quitte à faire des concessions en commission mixte paritaire (CMP). Mais cela n'enlève rien à vos autres arguments.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Ces amendements pourront être redéposés en séance ; ainsi le ministre pourra préciser ce qu'il prévoit de faire.

L'amendement COM-13 n'est pas adopté, non plus que l'amendement COM-28.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Le mot « privées » nous a fait bondir, suscitant les amendements identiques COM-8 et COM-29 qui le suppriment. L'ouverture du conseil professionnel à l'ensemble des organisations concernées par l'action du CNM est indispensable.

Les amendements identiques COM-8 et COM-29 sont adoptés.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - L'amendement COM-31 précise que les modalités de désignation permettent de garantir la parité au sein du conseil professionnel. Avis favorable.

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Est-il nécessaire de le préciser ?

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Pour un conseil professionnel, oui.

L'amendement COM-31 est adopté.

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Il est vrai que la loi prévoit que la représentativité des organisations syndicales s'apprécie à l'aune de différents critères, au nombre desquels le respect des valeurs républicaines, l'indépendance, la transparence financière, l'ancienneté, l'audience, et autres.

Comme je l'ai expliqué dans mon intervention générale, la composition du conseil professionnel devra s'articuler avec celle du conseil d'administration. Il me paraîtrait regrettable d'exclure à ce stade, par l'adoption d'un tel critère, comme le proposent les amendements identiques COM-15 et COM-32 , un certain nombre d'organisations de la possibilité de siéger au sein du conseil professionnel, alors que nous ignorons la manière dont sera composé le conseil d'administration. Il est important que les règles de gouvernance permettent de garantir l'expression de toutes les parties prenantes. Rappelons qu'à la base de ce projet, il y a l'idée de rassembler enfin toute la filière musicale. Par ailleurs, ce critère n'est pas applicable à bon nombre d'organisations appelées à siéger au sein du conseil professionnel.

Rien n'empêchera, de toute façon, le pouvoir réglementaire d'inscrire ce principe dans le décret s'il se révèle pertinent en fonction des solutions qui auront été dégagées pour la gouvernance de l'établissement. Avis défavorable.

Les amendements identiques COM-15 et COM-32 ne sont pas adoptés.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3

L'article 3 est adopté sans modification.

Article 4

L'article 4 est adopté sans modification.

Article 4 bis (nouveau)

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - L'amendement COM-35 étend les missions que pourraient souhaiter confier les organismes de gestion collective (OGC) au CNM.

En effet, dans sa rédaction actuelle, le champ d'intervention du CNM avec les fonds confiés par les OGC serait limité aux « actions culturelles et éducatives », alors que l'article L. 324-17 du code de la propriété intellectuelle est plus large, puisqu'il comprend les « actions d'aide à la création, à la diffusion du spectacle vivant, au développement de l'éducation artistique et culturelle et à des actions de formation des artistes ».

La nouvelle rédaction proposée par le présent amendement propose donc un simple renvoi à ce paragraphe, afin d'aligner pleinement le champ d'action du CNM sur celui des organismes de gestion collective. Cela pourrait faciliter la mutualisation souhaitable des actions entre les OGC et le CNM.

L'amendement COM-35 est adopté.

L'article 4 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 5

L'article 5 est adopté sans modification.

Article 6

L'article 6 est adopté sans modification.

Article 7

L'article 7 est adopté sans modification.

Article 7 bis (nouveau)

L'article 7 bis est adopté sans modification.

Article 8

L'article 8 est adopté sans modification.

Article 8 bis (nouveau)

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Les articles 8 bis et le suivant sont des demandes de rapports, dont le Sénat n'est guère friand... Celui prévu à l'article 8 bis fixe un délai de quatre mois. Il nous serait donc présenté à la fumée des cierges - trop tard ! D'où mon amendement de suppression COM-36 .

L'amendement COM-36 est adopté et l'article 8 bis (nouveau) est supprimé.

Article 8 ter (nouveau)

M. Jean-Raymond Hugonet , rapporteur . - Même objet, même punition. Le délai est ici de six mois. On peut comprendre les craintes des députés, mais le principe d'une signature de conventions entre chacune des associations et le CNM inscrit à l'article 5, devrait les rassurer. D'où les amendements identiques COM-9 et COM-30 .

Les amendements identiques COM-9 COM-30 sont adoptés et l'article 8 ter (nouveau) est supprimé. L'amendement COM-20 devient sans objet, ainsi que l'amendement COM-21 .

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Les députés ont examiné ce matin le texte sur Notre-Dame de Paris...

M. Pierre Ouzoulias . - A la fumée des cierges ?

Mme Catherine Morin-Desailly , présidente . - Il sera intéressant de voir ce qu'il en est ressorti.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Article 1 er

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. HUGONET, rapporteur

1

Précision rédactionnelle relative au champ d'intervention de l'établissement

Adopté

Mme Sylvie ROBERT

24

Précision rédactionnelle relative au champ d'intervention de l'établissement

Satisfait ou sans objet

M. HUGONET, rapporteur

2

Nécessité pour le CNM de respecter l'égale dignité des répertoires

Adopté

Mme de la PROVÔTÉ

33

Nécessité pour le CNM de respecter les droits culturels

Adopté avec modification

Mme Sylvie ROBERT

34

Nécessité pour le CNM de respecter les droits culturels

Adopté avec modification

Mme RAIMOND-PAVERO

23

Précision sur le caractère concerté avec les collectivités territoriales de la mission de soutien du CNM

Rejeté

Mme MÉLOT

16

Création d'une mission de développement territorial

Retiré

M. HUGONET, rapporteur

5

Alignement de la mission de développement international sur les compétences actuelles du Burex

Adopté

Mme Sylvie ROBERT

25

Alignement de la mission de développement international sur les compétences actuelles du Burex

Satisfait ou sans objet

M. HUGONET, rapporteur

11

Contribution du CNM à la politique de l'Etat en matière de protection de l'environnement et de développement durable

Adopté

M. HUGONET, rapporteur

4

Capacité du CNM à recueillir des données pour sa mission d'observation

Adopté

Mme Sylvie ROBERT

26

Analyse des données recueillies par le CNM

Rejeté

Mme RAIMOND-PAVERO

22

Gestion par le CNM du fonds d'intervention pour la sécurité des sites et des manifestations culturels

Rejeté

M. HUGONET, rapporteur

3

Rappel du rôle clé joué par l'Etat et les collectivités territoriales en matière d'EAC

Adopté

M. HUGONET, rapporteur

6

Capacité du CNM à nouer des partenariats et conclure des contrats dans les territoires

Adopté

Mme Sylvie ROBERT

27

Inscription des contrats de filière dans la loi

Rejeté

M. HUGONET, rapporteur

7

Précision sur la capacité du CNM à pouvoir gérer l'ensemble du fonds d'intervention pour la sécurité des sites et manifestations culturels pour sa partie consacrée au spectacle vivant

Adopté

Article 2

Mme MÉLOT

17

Missions dévolues au conseil d'administration du CNM

Rejeté

Mme MÉLOT

13

Détail de la composition du conseil d'administration du CNM

Rejeté

Mme Sylvie ROBERT

28

Détail de la composition du conseil d'administration du CNM

Rejeté

M. HUGONET, rapporteur

8

Ouverture du conseil professionnel à l'ensemble des organisations concernées par l'action du CNM

Adopté

Mme Sylvie ROBERT

29

Élargissement du conseil professionnel à toutes les organisations directement concernées par l'action du CNM

Adopté

Mme MÉLOT

31

Cet amendement vise à ce que les modalités de désignation permettent de garantir la parité au sein du conseil professionnel

Adopté

Mme MÉLOT

15

Obligation de respecter un critère de représentativité pour les organisations professionnelles appelées à siéger au sein du conseil professionnel

Rejeté

Mme LABORDE

32

Obligation de respecter un critère de représentativité pour les organisations professionnelles appelées à siéger au sein du conseil professionnel

Rejeté

Article 4 bis (nouveau)

M. HUGONET, rapporteur

35

Élargissement du périmètre des actions culturelles susceptibles de faire l'objet d'une contribution des OGC

Adopté

Article 8 bis (nouveau)

M. HUGONET, rapporteur

36

Suppression de l'article

Adopté

Article 8 ter (nouveau)

M. HUGONET, rapporteur

9

Suppression de l'article

Adopté

Mme MÉLOT

30

Suppression de l'article

Adopté

Mme MÉLOT

20

Intégration obligatoire du Burex dans le champ de l'article 8 ter

Satisfait ou sans objet

Mme MÉLOT

21

Intégration du CALIF dans le champ de l'article 8 ter

Satisfait ou sans objet

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Jeudi 13 juin 2019

Club Action des Labels Indépendants Français (CALIF) : M. Pascal Bussy, directeur / Disquaire Day

Mardi 18 juin 2019

Centre d'information et de ressources pour les musiques actuelles (Irma) : Mme Geneviève Girard, présidente , et M. Gilles Castagnac, directeur

Comité opérationnel de création du Centre national de la musique : Mme Catherine Ruggeri, inspectrice générale des affaires culturelles , ministère de la culture, et Mme Blanche Berger, stagiaire au ministère de la culture

Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV) : M. Philippe Nicolas, directeur

Le Fonds pour la création musicale (FCM) : M. François Chesnais, directeur

Mercredi 19 juin 2019

Le Bureau Export : M. Marc Thonon, directeur général

Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) : MM. David El Sayegh, secrétaire général , Blaise Mistler, directeur des relations institutionnelles , et M. Juliette Poiret, chargée de mission à la direction des relations institutionnelles

Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV) : M. Gilles Petit, président

Jeudi 20 juin 2019

M. Pascal Bois et Mme Émilie Cariou, députés , auteurs du rapport de préfiguration du CNM

Contributions écrites :

- Coopération des réseaux régionaux, Fédération des acteurs et actrices des musiques et danses traditionnelles (FAMDT), Fédération des lieux de musiques actuelles (FEDELIMA), Fédération nationale des labels indépendants (FELIN), la Fédération des radios associatives Rock (FERAROCK), la Fédération nationale des écoles d'influences jazz et musiques actuelles (FNEIJMA), le Syndicat des musiques actuelles (SMA), l'Union fédérale d'intervention des structures culturelles (UFISC) et Zone Franche : contribution commune ;

- Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture (FNCC)

- Syndicat national de l'édition phonographique (SNEP)

- Syndicat national du spectacle musical et de variété (PRODISS)

- Union syndicale des employeurs du secteur public du spectacle vivant (USEP-SV)


* 1 Une clause d'effort était demandée aux entreprises les plus importantes, consistant à ne prendre en compte, dans la base de calcul du crédit d'impôt, que les dépenses pour les seules productions qui excédaient la moyenne, après application d'une décote de 70 %, des productions au titre des deux derniers exercices.

* 2 https://www.senat.fr/rap/a18-151-43/a18-151-43.html

* 3 Décret n° 2019-607 du 18 juin 2019 modifiant le décret n° 2016-1209 du 7 septembre 2016 relatif au crédit d'impôt au titre des dépenses de création, d'exploitation et de numérisation d'un spectacle vivant musical ou de variétés prévu à l'article 220 quindecies du code général des impôts, paru au Journal officiel du 19 juin 2019.

* 4 L'article 34 de la LOLF réserve à la première partie de la loi de finances l'affectation des impositions de toute nature à une personne morale autre que l'État.

* 5 Rapport annuel de la commission, avril 2019 : https://www.ccomptes.fr/system/files/2019-06/20190605-rapport-CCOGDADV-2.pdf

* 6 Répartis de la manière suivante selon les informations fournies à votre Rapporteur : 4,5 millions d'euros pour le FCM, 1 million d'euros pour le BUREX, 110 000 euros pour l'IRMA et 60 000 euros pour le CALIF.

* 7 La recevabilité financière des amendements et des propositions de loi au Sénat, Rapport d'information n° 263 (2013-2014), fait au nom de la commission des finances, déposé le 7 janvier 2014 https://www.senat.fr/rap/r13-263/r13-263_mono.html

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