II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A. DE NOUVELLES DISPOSITIONS N'APPELANT PAS DE RESERVES PARTICULIERES

1. Les modifications relatives à la programmation financière des infrastructures (Titre Ier A/titre IV)

L'Assemblée nationale a complété le rapport annexé par de nouvelles dispositions utiles , notamment : la mention selon laquelle la programmation des dépenses de l'Afitf est appréciée de façon globale (13,7 milliards d'euros sur 2019-2023) pour permettre de lisser sur la durée les dépenses et de rattraper l'écart de 200 millions constaté en 2019 entre le budget de l'Agence et la programmation, l'affectation à l'Afitf du surplus des recettes de la taxe de solidarité sur les billets d'avion , la mention des projets de « RER métropolitains » parmi les opérations à enclencher dans le domaine ferroviaire ou encore la mention selon laquelle la programmation financière tient compte des enjeux en matière d'accessibilité des territoires de montagne, insulaires, ultra-marins et frontaliers.

Par ailleurs, l'article 1 er A relatif aux objectifs de la programmation des infrastructures a été complété pour affirmer l'objectif d'amélioration des offres de déplacements du quotidien et prévoir la prise en compte d'un objectif de sécurité pour le déploiement des nouvelles solutions de mobilité ou des mobilités alternatives .

Enfin, les députés ont inséré dans le titre I er A deux nouveaux articles :

- un article 1 er DA qui habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de 24 mois, toute mesure afin de créer un ou plusieurs établissements publics locaux ayant pour mission le financement d'un ensemble cohérent d'infrastructures de transport terrestre . Il s'agit d'une demande de plusieurs territoires qui souhaitent pouvoir créer, sur le modèle de la Société du Grand Paris, un établissement local permettant de financer une infrastructure de transport ;

- un article 1 er EA qui prévoit qu'en cas de défaillance du maître d'ouvrage à réaliser le bilan économique et social d'un projet d'infrastructure réalisé avec le concours de financements publics cinq ans après sa mise en service, ce bilan est réalisé par un tiers, à la charge du maître d'ouvrage.

2. Les modifications relatives à la gouvernance des mobilités (Titre Ier)

L'Assemblée nationale a adopté de nombreuses modifications qui précisent et complètent le volet « gouvernance » du projet de loi.

À l'article 1 er , une modification a été opérée pour prévoir que les communautés de communes reprenant la compétence d'organisation des mobilités exercée par une région sont tenues de reprendre les différentes catégories de services organisés (réguliers, scolaires, à la demande) en bloc, et non de manière sécable.

À l'article 4 , plusieurs amendements ont été adoptés visant à : ajouter la répartition territoriale des points de vente physiques aux modalités de l'action commune des AOM que coordonne la région ; intégrer les gestionnaires de gares de voyageurs et de pôles d'échanges multimodaux dans la liste des parties au contrat opérationnel de mobilité ; préciser qu'un EPCI ne peut être découpé en plusieurs bassins de mobilité, sauf accord formel de son assemblée délibérante ; permettre la création de bassins de mobilité interrégionaux ; rétablir les comités de suivi des dessertes ferroviaire.

De même, à l'article 5 , plusieurs modifications ont été effectuées afin : d'intégrer des objectifs d'amélioration des conditions de franchissement des passages à niveau ainsi que la lutte contre la pollution sonore dans les plans de mobilité ; de renommer le plan de mobilité rurale « plan de mobilité simplifié » ; de permettre explicitement au règlement d'un plan local d'urbanisme (PLU) d'imposer la réalisation d'aires de livraison ; de préciser que le plan de mobilité n'a pas de portée prescriptive vis-à-vis des PLU en matière de lutte contre l'étalement urbain ; de prévoir que le volet piéton et cycliste du plan de mobilité vise également à améliorer l'information des usagers (signalétique) ; d'intégrer dans le rapport de présentation des PLU portant sur des territoires non couverts par un plan de mobilité une analyse des flux de circulation franchissant les passages à niveau.

À l'article 7 , les amendements adoptés par l'Assemblée nationale visent à : préciser que les mesures particulières prises en faveur des personnes handicapées ou à mobilité réduite (PMR) en matière de transports doivent intégrer la diversité des handicaps (physiques mais aussi psychiques et cognitifs) ; préciser que les mesures tarifaires en faveur des PMR et de leurs accompagnateurs peuvent aller jusqu'à la gratuité ; introduire la notion de services de substitution, comprenant soit des transports de substitution (services spécifiques) soit des mesures de substitution (organisation particulière au sein de services existants) pour diversifier les solutions pouvant être apportées aux personnes handicapées ou à mobilité réduite ; donner la possibilité aux AOM, lorsque la mise en accessibilité d'un arrêt identifié comme prioritaire est techniquement impossible, de mettre en place de services de substitution ou de mettre en accessibilité deux arrêts supplémentaires non prioritaires.

En outre, plusieurs articles additionnels ont été insérés au sein de ce titre :

- un article 1 er bis AA visant à intégrer la création ou l'aménagement de pôles d'échanges multimodaux aux objectifs d'intermodalité de la politique globale des transports ;

- un article 1 er bis A visant à permettre aux communes des îles mono-communales d'interdire la circulation sur l'ensemble de leur territoire ;

- un article 1 er bis B visant à compléter les objectifs du système des transports par une mention expresse de la mobilité active et par la lutte contre la sédentarité ;

- un article 5 bis prévoyant un avis de l'AOM sur les demandes de permis de construire portant sur des projets de construction de plus de deux cents nouveaux logements en habitat collectif , au regard des risques de saturation des infrastructures de transports ;

- un article 7 bis A, excluant de l'obligation de respecter des conditions techniques et de confort fixées par voie réglementaire les véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC) qui contribuent à la préservation du patrimoine automobile et des véhicules adaptés aux personnes à mobilité réduite ;

- un article 8 ter prévoyant que dans les territoires ultramarins archipélagiques, l'AOM met en place une politique de continuité territoriale inter-île .

3. Les modifications relatives à l'ouverture des données et aux nouvelles mobilités (Titre II)
a) Le cadre de l'ouverture des données

En ce qui concerne l'ouverture des données (article 9), plusieurs ajouts adoptés à l'Assemblée nationale sont à souligner :

- la poursuite de l'inclusion de tous les modes de mobilité dans le champ d'application de la démarche d'ouverture des données : inclusion des données de covoiturage à la demande des AOM ; transmission des données des taxis au service Le.Taxi dans des conditions équilibrées - avec la possibilité de passer par une centrale de réservation et la clarification des conditions dans lesquelles l'exploitant peut refuser d'effectuer une prestation de transport ;

- le renforcement de la portée des accords de licence d'utilisation et de réutilisation des données , afin de s'assurer que le réutilisateur respecte le cadre fixé par le producteur de la donnée, en particulier les autorités organisatrices et leurs opérateurs, en permettant à l'Autorité de régulation des transports de sanctionner les manquements aux conditions de réutilisation des données définies dans ces accords en édictant une interdiction temporaire d'accès à tout ou partie des données mises à disposition par le point d'accès national ;

- la possibilité, pour les associations de défense des intérêts des consommateurs , de demander à l'Autorité de régulation des transports de procéder à un contrôle des déclarations de conformité des fournisseurs de données et des fournisseurs de services d'information sur les déplacements.

Les députés ont également introduit une disposition renforçant les obligations actuellement en vigueur relatives à l'ouverture des données relatives aux points de recharge publics pour véhicules électriques ou hybrides .

Enfin, ils ont davantage précisé les étapes du calendrier de l'ouverture des données.

En créant un article 9 bis , l'Assemblée nationale a renforcé la base légale permettant à l'Autorité de régulation des transports d'exercer ses missions au travers de collectes régulières de données.

Le volet relatif aux services de billettique multimodale figurant à l'article 11 a été totalement réécrit suite aux conclusions de la concertation menée par le Gouvernement en parallèle de l'examen de la loi au Sénat
- méthode que la commission n'avait pas manqué de déplorer. L'approche du Sénat consistait à s'assurer que l'ouverture de la billettique n'aurait pas pour effet de priver les autorités organisatrices et leurs opérateurs de la maîtrise de leur politique tarifaire .

Cette préoccupation a été suffisamment prise en compte par les travaux de l'Assemblée nationale , qui prévoient plusieurs « garde-fous », tels que : des obligations générales à respecter par tout service numérique multimodal (intégration de l'ensemble des services de transport de façon à éviter que les plateformes ne choisissent de renseigner que les services rentables tout en délaissant les services les moins rentables ; la transmission au gestionnaire du service de transport des informations sur les déplacements effectués, le service après-vente des produits vendus et la lutte contre la fraude ; l'établissement d'un plan de gestion des informations concernant les services dont il assure la vente qui sont protégées par le secret des affaires ; la transparence des critères de classement utilisés pour présenter les différentes solutions de déplacement...) ; l'obligation de conclure un contrat dont le contenu est encadré, un pouvoir de régulation de l'Autorité de régulation des transports, la précision du dispositif par décret en Conseil d'État et une entrée en vigueur au 1 er juillet 2021 du dispositif de droit d'accès aux produits tarifaires. Par ailleurs, à l'initiative du Gouvernement, la compétence des AOM pour créer des services numériques multimodaux est désormais clairement affirmée.

L'Assemblée nationale a inséré un article 11 bis A, qui exige des services numériques d'information sur les déplacements mis en place par les autorités organisatrices de présenter l'ensemble des aides financières individuelles liées à la mobilité recensées ou mises en place dans le cadre de plan d'action sur la mobilité solidaire.

Les députés ont également introduit un article 11 bis obligeant les opérateurs de transport à publier par voie électronique les informations relatives à une annulation ou à un retard susceptible d'ouvrir des droits au voyageur. Entrant en vigueur six mois après la publication de la loi, ce dispositif permettra de renforcer la transparence en la matière et peut donc être accueilli favorablement.

L'Assemblée nationale a voté l'insertion d'un nouvel item de l'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance à l'article 13, et portant sur l'accès des services d'assurance aux données d'état de délégation de conduite enregistrées par les véhicules en cas d'accident de la route. Elle a également inséré la consultation obligatoire de la Commission nationale de l'informatique et des libertés sur les projets d'ordonnances présentés en application de cet article.

b) Le renforcement des aides au covoiturage

Plusieurs modifications ont été réalisées à l'article 15 pour encourager le covoiturage, notamment en permettant aux AOM de verser des aides aux conducteurs même si ceux-ci n'ont pas trouvé de passagers
- afin de les inciter à s'inscrire sur des plateformes de covoiturage -, en permettant que les allocations reçues par les conducteurs excèdent le simple partage de frais pour les déplacements de courte distance - dans la limite de deux déplacements par jour et par conducteur - et en prévoyant une défiscalisation de ces allocations jusqu'en 2022.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a précisé que seuls les taxis , et non l'ensemble des véhicules de transport public particulier de personnes, pourront circuler sur les voies réservées .

Les députés ont adopté un article 18 bis pour étendre aux engins à déplacement personnel et aux vélos à assistance électrique les sanctions prévues par le code de la route en cas de débridage de ces engins (un an d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende)

c) De nouvelles dispositions relatives aux VTC

L'Assemblée nationale a adopté quatre articles additionnels relatifs aux véhicules de transport avec chauffeur (VTC) qui règlent certaines difficultés rencontrées par cette profession :

- la possibilité pour les chambres de métier et de l'artisanat de confier l'organisation des sessions d'examens VTC à des personnes agréées par l'autorité administrative présentant des garanties d'honorabilité', de capacité' d'organisation, d'impartialité' et d'indépendance (article 20 bis ) ;

- la création d'une base de données nationale sur le transport public particulier de personnes recensant les informations relatives aux conducteurs, aux exploitants et aux véhicules, pour permettre la dématérialisation des procédures relatives à l'exercice des professions du transport public particulier au 1 er janvier 2022, et pour faciliter le contrôle des professionnels et la lutte contre les fraudes (article 20 ter ) ;

- le droit d'accès des travailleurs des plateformes a` l'ensemble des données concernant leurs activités propres au sein de la plateforme et permettant de les identifier, dans un format structuré (article 20 quater ) ;

- une habilitation au Gouvernement à légiférer par ordonnance pour déterminer : les modalités de vérification et de délégation de la vérification des conditions d'aptitude professionnelle des transports particuliers de personnes en vue d'améliorer l'organisation de l'examen ; les modalités de représentation des travailleurs indépendants et les conditions d'exercice de cette représentation (article 20 quinquies ).

4. Les modifications relatives aux véhicules propres, aux mobilités actives et à la lutte contre la pollution de l'air (Titre III)
a) Le développement de l'usage du vélo

L'Assemblée nationale a inséré deux nouveaux articles dans le projet de loi relatifs aux servitudes de marchepied et de halage : un article 21 BA qui permet à l'autorité' administrative de restreindre l'usage des servitudes de marchepied afin de préserver la biodiversité, et un article 21 C qui permet à Voies navigables de France (VNF) de promouvoir l'usage du vélo sur le réseau qui lui est confié' et d'ouvrir, sauf impossibilité' technique avérée, les chemins de halage aux cyclistes en passant des conventions avec les personnes publiques concernées.

S'agissant des vélos , l'Assemblée nationale a complété et précisé les articles insérés au Sénat, notamment en :

- prévoyant que l'autorisation donnée à un ou plusieurs copropriétaires d'effectuer à leurs frais les travaux permettant le stationnement sécurisé des vélos dans les parties communes peut être décidée à la majorité simple des copropriétaires présents (22 bis AAA) ;

- inscrivant dans le code de la voirie routière une définition des véloroutes (article 22 bis ) ;

- étendant l'obligation de créer des stationnements pour vélos sécurisés aux travaux réalisés sur un parc de stationnement annexe à un ensemble d'habitations, à un bâtiment commercial et à un bâtiment accueillant du public (article 22 bis C) ;

- indiquant que la création d'itinéraires cyclables lors de la réalisation ou de la rénovation de voies urbaines peut être satisfaite en autorisant les cyclistes à emprunter une voie en site propre destinée aux transports collectifs, mais uniquement si l'emprise est insuffisante pour permettre la réalisation d'une bande cyclable (article 22 ter A) ;

- rendant la création d'un itinéraire cyclable obligatoire lors de la réalisation ou de l'aménagement d'une voie interurbaine lorsque, sur le fondement de l'étude préalable, le besoin est avéré - et sauf impossibilité technique et financière - (article 22 ter ) ;

- prévoyant que la continuité des aménagements piétons et cyclables existants doit être maintenue à l'issue de la construction et de la réhabilitation d'infrastructures de transport terrestre ou fluvial, en cas de besoin avéré et de faisabilité technique et financière (article 22 quater ).

b) Le développement des véhicules propres

Dans la continuité des travaux du Sénat, les députés ont encouragé le développement des véhicules propres .

Concernant le développement des infrastructures pour la mobilité durable, l'Assemblée a introduit plusieurs dispositions nouvelles à l'article 23, notamment celles visant à faciliter le raccordement au réseau public de distribution d'électricité des bornes de recharges pour véhicules électriques en autorisant leur raccordement indirect, à donner davantage de souplesse au raccordement indirect des infrastructures de recharge , en prévoyant que l'installation d'un mécanisme de décompte individuel n'est obligatoire qu'en cas de demande expressément formulée, et à appliquer des sanctions pénales en cas de méconnaissance des nouvelles obligations de pré-équipement des bâtiments proposées par le projet de loi.

Sur le sujet des infrastructures, les députés ont également inséré deux articles nouveaux :

- un article 23 quater visant à la mise en place de schémas territoriaux de développement des bornes de recharge de véhicules électriques , non contraignants, par les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), les autorités organisatrice de la mobilité (AOM) ou les autorités organisatrices de la distribution d'électricité (AODE) , accompagnés d'une prolongation de la réfaction tarifaire sur les raccordements entre 2022 et 2025 pour inciter les territoires à la mise en oeuvre de ces dispositions ;

- un article 24 bis prévoyant une compétence des métropoles pour créer des points de ravitaillement en gaz ou en hydrogène pour véhicules ou pour navires.

Les députés ont par ailleurs adopté des dispositions relatives aux aires de stationnement :

- un article 23 bis A, qui ouvre la faculté pour les organismes HLM de sous-louer leurs aires de stationnement ;

- un article 25 ter visant à garantir l'application de l'article L. 151-31 du code de l'urbanisme qui permet de réduire de 15 % les obligations réglementaires de construction de parkings dans les immeubles neufs dans le cas où des véhicules électriques dotées de bornes ou des véhicules propres en auto-partage sont mis à disposition par le promoteur.

L'Assemblée nationale a en outre largement modifié l'article 23 ter qui avait été introduit en première lecture au Sénat. Cet article définit désormais un régime juridique général relatif aux carburants alternatifs : définition des carburants alternatifs, principales propriétés attendues des infrastructures de recharge et d'avitaillement en carburants alternatifs, règles techniques d'utilisation, amendes administratives en cas de non-respect de l'obligation de mise en oeuvre de l'interopérabilité de l'infrastructure pour permettre l'itinérance de la recharge ou du ravitaillement.

L'Assemblée nationale a également adopté des dispositions relatives aux obligations de renouvellement des flottes de véhicules :

- un article 26 AC qui prévoit un renforcement substantiel des obligations de verdissement des flottes publiques ;

- un article 26 CB qui repousse à 2023 les obligations législatives de renouvellement du parc automobile pour les véhicules de transport de marchandises , en raison de l'offre insuffisante de véhicules utilitaires légers propres.

Les députés ont aussi adopté des dispositions tendant à garantir le respect des dispositions législatives et réglementaires relatives aux véhicules propres par :

- l'introduction à l'article 29 d'un régime de sanctions pour les personnes faisant réaliser sur un véhicule des transformations ayant pour effet de supprimer un dispositif de maîtrise de la pollution ;

- un nouvel article 29 bis visant à interdire aux exploitants de centres de contrôle technique de véhicules l'exercice d'une activité dans le commerce ou la réparation automobile.

Enfin, un nouvel article 26 ABA introduit par l'Assemblée nationale habilite le Gouvernement à transposer la directive modifiant la directive 2009/33/CE relative à la promotion de véhicules de transport routier propres et économes en énergie 8 ( * ) .

c) La lutte contre la pollution de l'air

L'Assemblée nationale a adopté plusieurs modifications substantielles à l'article 26 , en incluant la question de l'amélioration des mobilités domicile-travail dans les négociations obligatoires des entreprises dont plus de cinquante salariés sont employés sur un même site, et en rendant la mise en place d'un plan de mobilité employeur obligatoire en cas d'absence d'accord sur ce sujet - ce plan devant dans ce cas inclure des dispositions relatives aux déplacements domicile-travail

Cela conduirait des entreprises de plus de cinquante salariés à devoir mettre en place un tel plan de mobilité, alors que cette obligation ne concerne aujourd'hui que les entreprises regroupant plus de cent salariés , soit une diminution par deux du seuil qui pourrait être contraignante pour les plus petites entreprises.

S'agissant du forfait mobilités durables , les députés ont :

- étendu le bénéfice de ce forfait à l'utilisation d'autres services de mobilité définis par décret ;

- prévu que le montant, les modalités et les critères d'attribution de la participation aux frais de déplacement des entreprises soient déterminés par accord d'entreprise, par accord interentreprises ou par accord de branche - à défaut d'un tel accord, cette prise en charge sera mise en oeuvre par décision unilatérale de l'employeur ;

- prévu que cette prise en charge puisse prendre la forme d'une solution de paiement spécifique (titre-mobilité), dématérialisé et prépayé.

Par ailleurs, un nouvel article 26 bis A a été inséré habilitant le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour définir les conditions de la prise en charge par l'employeur des frais de transport au regard d'un bilan effectué 18 mois après la promulgation de la loi, et permettre d'expérimenter des modalités particulières à certaines régions selon lesquelles l'employeur prend en charge une partie des frais de transport.

En matière de lutte contre la pollution de l'air , l'Assemblée nationale a adopté des mesures visant à :

- prévoir l'affichage obligatoire, lors de la vente d'un véhicule à moteur, de la catégorie Crit'Air à laquelle il appartient (article 26 bis ) ;

- prévoir que les associations agréées de surveillance de la qualité de l'air (AASQA) sont consultées avant l'adoption du plan d'actions de lutte contre la pollution de l'air par l'EPCI concerné (article 27) ;

- prévoir que les objectifs de réduction des émissions de polluants atmosphériques contenus dans les plans d'action de lutte contre la pollution de l'air sont biennaux, et non fixés à 2025 et 2030 (article 27) ;

- prévoir que la révision du plan de lutte contre la pollution de l'air lorsque les objectifs biennaux ne sont pas atteints n'emporte pas la révision du PCAET ;

- rendre obligatoire la mise en place d'une zone à faibles émissions dans les territoires où les normes de pollution de l'air ne seraient pas respectées à l'avenir (article 28) ;

- permettre aux maires de restreindre ou d'interdire de manière permanente - et non pas seulement à des horaires particuliers - la circulation sur les voies eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement (article 28 bis B).

d) La lutte contre les nuisances sonores

Dans la continuité du travail du Sénat en première lecture, les députés ont adopté plusieurs dispositions relatives aux nuisances sonores :

- l'évaluation et la détermination d'une unité de mesure spécifique relative aux vibrations ferroviaires (article 28 quater A) ;

- l'expérimentation, pendant deux ans, de la constatation des niveaux d'émissions sonores des véhicules par des appareils de contrôle automatique fixes et mobiles (article 28 quater B) ;

- la définition, dans le code de l'environnement, d'un objectif de mise en oeuvre du droit reconnu à chacun de vivre dans un environnement sonore sain (article 28 quater) ;

- l'information des acquéreurs et des locataires de biens situés dans une zone de bruit des aérodromes par un document spécifique dans le dossier de diagnostic technique fourni par le vendeur (article 28 quinquies ).

5. Les modifications relatives à la sécurité dans les transports et au transport maritime et fluvial (Titre V)

L'Assemblée nationale a inséré plusieurs dispositions au texte avec lesquelles la commission est en accord.

a) La sécurité et la sûreté dans les transports

Certaines modifications portent sur le renforcement de la sécurité dans les transports , notamment par le renforcement des contrôles. Il s'agit en particulier de :

- l'obligation d'apposer sur des poids lourds, à compter du 1 er janvier 2021, une signalisation matérialisant la position des angles morts , afin de renforcer la sécurité routière (article 22 bis A) ;

- la mise en vente d'éthylotests à proximité des étalages de boissons alcooliques dans les débits de boissons à emporter (article 31 bis B), qui correspond à la mesure n° 11 du Comité interministériel de la sécurité routière du 9 janvier 2018 ;

- le renforcement de la protection sociale des conducteurs de véhicules utilitaires légers , auxquels les employeurs doivent assurer des conditions d'hébergement compatibles avec la dignité humaine et respectueuses de leur santé (article 31 bis D) ;

- la possibilité de recourir à des dispositifs fixes de c ontrôle automatisé d'infractions aux règles relatives au poids maximum autorisé de véhicules de transport routier de marchandises et de transport en commun routier de personnes (article 31 bis E) ;

- le renforcement des contrôles dans les transports par l'élargissement du champ d'intervention des agents qui en ont la charge, en leur permettant notamment d'effectuer des contrôles sur de nouveaux sites, comme les lieux de prise en charge et de dépose de passagers ainsi que les locaux des centrales de réservation (article 31 quater ) ;

- l'obligation d'étiquetage des bagages par les voyageurs des services de transport routier international (article 31 sexies A) ;

- l'allongement du délai de paiement des amendes pour les transports en commun de deux à trois mois prévu à l'article 31 quinquies A, qui permettra aux exploitants de recouvrer plus aisément les amendes qui leur sont dues ;

- la ratification de l'article 6 de l'ordonnance relative à la préparation du retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, qui vise à garantir la sûreté du tunnel sous la manche (article 32 quinques B ) ;

- la participation du gestionnaire d'infrastructure ferroviaire à l'élaboration des schémas de cohérence territoriale et des plans locaux d'urbanisme concernant des zones qui comprennent des passages à niveau (article 33 quinquies ) ;

- la précision selon laquelle les AOM prennent toute mesure permettant de faciliter sur leur ressort territorial la mobilité des services de secours et des forces de police (article 33 bis A) ;

- l'obligation de déposer un dossier de conception accompagné d'un rapport sur la sécurité au début de la phase de conception détaillée des véhicules ferroviaires (article 34 bis A) ;

- l'obligation de subordonner la mise en service d'ouvrages et systèmes de transports dédiés aux activités de cyclodraisine à une autorisation délivrée par l'autorité compétente (article 34 bis A).

Plusieurs articles adoptés à l'Assemblée portent également sur les violences et atteintes à caractère sexiste dans les transports publics . L'article 32 quinquies prévoit la transmission d'un bilan sur cette question par les exploitants de service de transport et l'article 32 sexies A vise à mettre en place des actions de formation des personnels quant à la prévention de ces violences et atteintes.

Enfin, certaines dispositions introduites à l'Assemblée nationale concourent au renforcement de la sûreté des transports par l'amélioration de la diffusion de l'information auprès des usagers . Il s'agit notamment des articles 31 sexies B et 33 sexies , qui concernent le transport par autocar et prévoient respectivement le renforcement de l'information des voyageurs sur les limites maximales de transports de tabac, boissons alcoolisées et espèces protégées et l'introduction d'un dispositif informatif sur les règles de sécurité et les consignes d'évacuation.

b) Le transport maritime et fluvial

L'Assemblée nationale a introduit une série de dispositions relatives au transport maritime et fluvial, portant sur des sujets divers, qui ne soulèvent pas de difficultés aux yeux du rapporteur et constituent des mesures positives , même si certains éléments appellent une vigilance particulière .

Les députés ont adopté un amendement habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la loi, les mesures relevant du domaine de la loi pour créer un nouvel établissement public portuaire intégrant les GPM maritimes de Rouen et du Havre et le port autonome de Paris pour instituer, sur l'axe Seine, un système portuaire comparable à ceux que l'on retrouve en Europe du Nord 9 ( * ) .

Cette habilitation, qui constitue désormais l' article 34 quater du projet de loi, permet au Gouvernement de prendre toute mesure visant à faciliter la transformation des établissements existants et la création du nouvel établissement, y compris dans le domaine fiscal, tout en maintenant trois implantations territoriales . Elle est également nécessaire pour adapter la législation existante, en matière environnementale, domaniale, fiscale, sociale et de procédure administrative afin de faciliter l'exercice, par le nouvel établissement, de ses missions. Ce projet est conçu pour renforcer la compétitivité et l'attractivité des ports concernés . Une équipe de préfiguration a été mise en place et devrait proposer d'ici décembre 2020, un plan stratégique 2020-2025 pour l'axe Seine. Si ce projet est intéressant pour soutenir le développement des ports de l'axe Seine, la commission attire l'attention du Gouvernement sur son aspect social et sur la nécessité d'établir un dialogue de confiance avec les organisations syndicales.

S'agissant du développement économique des ports maritimes , les députés ont introduit un nouvel article 35 bis A afin d'ouvrir la possibilité d'hypothéquer un droit réel ou un bien immobilier en vue de garantir un emprunt destiné à financer la réalisation d'un autre bien sur une dépendance domaniale occupée par la même entité, qui bénéficierait de plusieurs titres au sein de la circonscription d'un même grand port maritime ou dans les limites administratives d'un port décentralisé .

À l' article 36 , relatif à l'évolution du statut de la Société du Canal Seine-Nord Europe (SCSNE), les députés ont adopté plusieurs modifications allant dans le sens souhaité par la commission et les acteurs locaux, en particulier les collectivités territoriales concernées. Les députés ont ainsi adopté un amendement du Gouvernement qui remplace l'habilitation à légiférer par ordonnance par des dispositions législatives qui remplissent les objectifs de l'habilitation et portent sur la gouvernance, le financement et les attributions de la SCSNE . La Commission européenne pourra par ailleurs ainsi désigner un représentant au conseil de surveillance de la société de projet (sans droit de vote), conformément à la demande du président de la Région Hauts-de-France.

Plusieurs articles introduits par les députés constituent des réponses ponctuelles pragmatiques à certains enjeux identifiés dans le secteur maritime . Il en va ainsi :

- de l' article 37 bis AAA , qui assouplit les possibilités de francisation des navires , pour faciliter l'inscription des navires qui n'entrent habituellement pas dans le champ d'application du code international de gestion de la sécurité dit « code ISM » 10 ( * ) afin d'accroître l'attractivité du pavillon français. Cette disposition répond à une demande de la fédération des industries nautiques (FIN) ;

- de l' article 37 bis AAB , qui institue une obligation de déclaration des substances nocives et potentiellement dangereuses (SNPD) reçues par voie maritime sur le sol français. La préparation de la ratification du protocole de 2010 modifiant la convention internationale sur la responsabilité et l'indemnisation pour les dommages liés au transport par mer SNPD de l'Organisation maritime internationale de mai 1996 suppose en effet de mettre en place une obligation de déclaration afin de pouvoir comptabiliser précisément les quantités reçues ;

- de l' article 37 bis AAC , qui permet aux délégués de bord de bénéficier de la protection instituée par l'article L. 1235-3-1 du code du travail , prévoyant un déplafonnement des indemnités dues par l'employeur en cas de nullité du licenciement d'un salarié protégé en raison de l'exercice de son mandat ;

- l' article 37 bis AAD , qui étend les compétences de la Commission nationale de la négociation collective maritime et en change le nom . Cette commission, qui devient la Commission nationale de la négociation collective maritime, de l'emploi et de la formation professionnelle, est désormais chargée d'émettre un avis sur les projets de loi, d'ordonnance et de décret dans le domaine de la politique de l'emploi, de l'orientation et de la formation professionnelle initiale et continue. Elle comprend des représentants des régions, des départements et des collectivités ultramarines ;

- l' article 37 bis AAE , qui abroge la réserve de nationalité pour les équipages à Mayotte , afin d'assurer la conformité de l'article L. 5725-2 du code des transports avec le droit européen 11 ( * ) ;

- l' article 37 bis AA , qui prévoit qu'à compter du 1 er janvier 2022, dans les ports de plaisance d'une capacité de plus de cent places, au moins 1 % des postes à quai privés sont réservés à des navires électriques . Unanimement saluée par les gestionnaires de ports 12 ( * ) , cette disposition doit permettre d'accompagner la réduction des émissions de dioxyde de carbone dans le secteur maritime ;

- l' article 37 bis AB , qui consolide le cadre juridique de la signalisation maritime . Ces articles clarifient la responsabilité de l'État en matière de police de la signalisation et devrait permettre de renforcer la sécurité de la navigation maritime , ce dont le rapporteur se réjouit, en lien avec la récente mission commune d'information conduite par le Sénat sur le sauvetage en mer 13 ( * ) ;

- l' article 37 bis AC , qui vise à renforcer l'effectivité des contrôles des navires en mer en prévoyant que, lorsque l'auteur de l'infraction se trouve hors d'état de justifier d'un domicile ou d'emploi sur le territoire français, le navire puisse être dérouté vers une position ou un port appropriés puis immobilisé, sous le contrôle de l'autorité judiciaire. Ces mesures sont conçues pour garantir le paiement des amendes ;

- l' article 37 bis AD , qui clarifie d'une part, la responsabilité du capitaine d'un navire en cohérence avec l'évolution de la jurisprudence, en particulier l'arrêt Costedoat de la Cour de cassation du 25 février 2000, et d'autre part la relation entre le capitaine et l'armateur ;

- l' article 37 bis AE , qui étend aux capitaines de navires la procédure de conciliation , en cas de litige lié au contrat de travail ;

- l' article 37 bis AF , qui étend les prérogatives des agents des entreprises privées de protection des navires dans le but de mieux protéger les navires contre la piraterie et le terrorisme . Ces agents pourront procéder à l' inspection visuelle des bagages et, avec le consentement de leur propriétaire, à leur fouille. En cas de circonstances particulières liées à l'existence de menaces graves pour la sécurité publique, ils pourront également procéder, avec le consentement exprès des personnes, à des palpations de sécurité ;

- l' article 37 ter , inséré par l'adoption d'un amendement du Gouvernement, qui permet le t ransfert des biens du domaine public fluvial de l'État à Voies navigables de France et donne la possibilité à un syndicat mixte ouvert de bénéficier d'un transfert en pleine propriété de ces biens à titre gratuit. Cette mesure vise à corriger les lacunes de l'article 22 de la loi du 7 août 2015 dite NOTRe.

c) Dispositions diverses

Plusieurs dispositions tirent des conséquences de l'ouverture à la concurrence des transports ferroviaire et portent sur les compétences de l'Autorité de régulation des transports , dont la structure se voit renforcer (article 38 bis B).

Aussi, l'article 43 bis vise à sécuriser les garanties des salariés de la SNCF en cas de transferts de contrat de travail à un attributaire de service public non soumis à la convention collective de la branche ferroviaire.

En outre, un article vise à confier à l'Autorité de régulation des transports la compétence de règlement des différends entre Île-de-France Mobilités et la RATP lors de la détermination des effectifs à transférer dans le cadre des appels d'offre en cas de changement d'exploitant d'un service public de bus en Île-de-France.

S'agissant du transport routier , la libéralisation progressive du marché des pièces détachées visibles pour l'automobile est prévue à l'article 31 sexies , afin notamment de permettre la baisse des coûts pour les consommateurs et de renforcer la compétitivité des équipementiers. Par ailleurs, un article rend obligatoire, en cas d'avis défavorable de l'Autorité de régulation des transports, la motivation de la délivrance de l'agrément préalable à la conclusion des contrats des concessionnaires d'autoroutes pour la construction, l'exploitation et l'entretien des installations annexes. Un article inséré en commission à l'Assemblée nationale prévoit en outre d'alléger les procédures relatives à certains marchés jugés non sensibles des sociétés concessionnaires d'autoroutes (article 40 ter C).


* 8 Directive (UE) 2019/1161 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 modifiant la directive 2009/33/CE relative à la promotion de véhicules de transport routier propres et économes en énergie.

* 9 Le processus de fusion des ports de l'axe de Seine avait été annoncé lors du comité interministériel de la mer du 15 novembre 2018.

* 10 Le navire concerné pourra être francisé si le gestionnaire prouve qu'il assure depuis la France les mesures équivalentes de gestion.

* 11 L'article L. 5522-1 du code des transports dispose déjà, pour la métropole, que l'équipage d'un navire immatriculé au registre international français comporte une proportion minimale de ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européenne ou de la Confédération suisse ou d'un État partie à tout accord international ayant la même portée en matière de droit au séjour et au travail. En cohérence, l'article 37 bis AAE introduit par les députés vise à harmoniser l'article L. 5725-2 du même code, qui définit les mesures adaptées de cette disposition à Mayotte.

* 12 Notamment : la fédération française des ports de plaisance, les ports de l'Atlantique, les ports de Bretagne.

* 13 Voir le rapport n° 81 (2019-2020), Sauvetage en mer : replacer les bénévoles au coeur de la décision, de Didier Mandelli, fait au nom de la MCI sur le sauvetage en mer.

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