Rapport n° 471 (2019-2020) de Mme Cathy APOURCEAU-POLY , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 27 mai 2020

Disponible au format PDF (501 Koctets)

Synthèse du rapport (209 Koctets)


N° 471

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 27 mai 2020

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur la proposition de loi relative
au
statut des travailleurs des plateformes numériques ,

Par Mme Cathy APOURCEAU-POLY,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Alain Milon , président ; M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général ; MM. René-Paul Savary, Gérard Dériot, Mme Colette Giudicelli, M. Yves Daudigny, Mmes Michelle Meunier, Élisabeth Doineau, MM. Michel Amiel, Guillaume Arnell, Mme Laurence Cohen, M. Daniel Chasseing , vice-présidents ; M. Michel Forissier, Mmes Pascale Gruny, Corinne Imbert, Corinne Féret, M. Olivier Henno , secrétaires ; Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Stéphane Artano, Mmes Martine Berthet, Christine Bonfanti-Dossat, MM. Bernard Bonne, Jean-Noël Cardoux, Mmes Annie Delmont-Koropoulis, Catherine Deroche, Chantal Deseyne, Nassimah Dindar, Catherine Fournier, Frédérique Gerbaud, M. Bruno Gilles, Mmes Michelle Gréaume, Nadine Grelet-Certenais, Jocelyne Guidez, Véronique Guillotin, M. Xavier Iacovelli, Mme Victoire Jasmin, M. Bernard Jomier, Mme Florence Lassarade, M. Martin Lévrier, Mmes Monique Lubin, Viviane Malet, Brigitte Micouleau, MM. Jean-Marie Morisset, Philippe Mouiller, Mmes Frédérique Puissat, Marie-Pierre Richer, Laurence Rossignol, MM. Jean Sol, Dominique Théophile, Jean-Louis Tourenne, Mme Sabine Van Heghe .

Voir les numéros :

Sénat :

717 (2018-2019) et 472 (2019-2020)

L'ESSENTIEL

_______

I. LE DÉVELOPPEMENT D'UNE NOUVELLE FORME DE TRAVAIL QUI REMET EN CAUSE LES ACQUIS DU DROIT DU TRAVAIL

A. LA DISTINCTION TRADITIONNELLE ENTRE SALARIAT ET TRAVAIL INDÉPENDANT VISE À PROTÉGER LES TRAVAILLEURS EN SITUATION DE SUBORDINATION

1. La construction progressive d'un droit du travail protecteur

La relation entre celui qui possède les moyens de production et celui qui loue sa force de travail est, par nature, une relation déséquilibrée quand bien même elle est organisée par un contrat de travail conclu par les parties. Le salarié est en effet placé dans une relation de subordination vis-à-vis de son employeur, dont il dépend pour la garantie de ses moyens de subsistance.

Afin de remédier à ce déséquilibre, le droit du travail a progressivement construit un socle de garanties protégeant les salariés dont on peut rappeler les principales sans viser à l'exhaustivité.

a) Les garanties en termes de rémunération

Le premier domaine dans lequel les salariés doivent être protégés contre l'exploitation est sans doute celui de la rémunération.

Depuis la loi du 11 février 1950 1 ( * ) , les salariés français se voient ainsi garantir une rémunération au moins égale à un salaire minimal interprofessionnel .

La mensualisation des salaires 2 ( * ) permet en outre de protéger la plupart des salariés contre une trop grande variabilité de leurs revenus.

On peut également mentionner la « prime de précarité » 3 ( * ) , versée aux salariés en contrat à durée déterminée et aux intermittents afin de compenser le caractère dérogatoire de leur forme de travail par rapport à la norme que constitue le contrat à durée indéterminée.

Un employeur ne peut en outre pas proposer à un salarié un contrat portant sur moins de 24 heures par semaine 4 ( * ) .

Enfin, la faculté pour un employeur de mettre fin unilatéralement à un contrat de travail est encadrée par le droit du licenciement qui lui impose notamment d'établir l'existence d'une cause réelle et sérieuse et prévoit le versement d'indemnités.

b) Les garanties en termes de droit au repos

Au fil de l'histoire sociale, les travailleurs ont également su obtenir des garanties en matière de temps de travail et de droit au repos.

Le code du travail prévoit ainsi une durée légale du travail 5 ( * ) , au-delà de laquelle les heures supplémentaires font l'objet d'une rémunération majorée, ainsi qu'une durée maximale par jour 6 ( * ) et par semaine 7 ( * ) visant à éviter que des travailleurs s'épuisent à la tâche et à leur garantir un droit au temps libre.

c) Le dialogue social

Le préambule de la Constitution de 1946 garantit aux travailleurs certains droits sociaux permettant la défense de leurs intérêts.

Ces droits sont notamment le droit syndical 8 ( * ) , le droit de grève 9 ( * ) et le droit de participer, par l'intermédiaire de délégués, à la détermination collective des conditions de travail et à la gestion des entreprise 10 ( * ) .

Ces principes trouvent leur application dans la constitution d'instances représentatives du personnel composées de membres élus et à même de défendre les salariés au sein des entreprises et de peser sur les choix opérés par les employeurs.

d) Le droit à une protection sociale

Au-delà des dispositions visant à rééquilibrer la relation de travail et, ainsi, à protéger les salariés contre l'arbitraire d'un employeur, la France a également su construire un système de protection sociale permettant d'assurer les travailleurs contre un grand nombre de risques de la vie.

Les travailleurs salariés sont notamment assurés contre les accidents du travail et les maladies professionnelles grâce aux cotisations qui sont versées par leurs employeurs, légalement responsables de leur sécurité, à la branche AT-MP de la sécurité sociale.

Si le droit à la couverture maladie de base est devenu universel, le droit à une couverture complémentaire est garanti aux seuls salariés depuis 2016 11 ( * ) .

Enfin, les salariés sont affiliés de droit à l'assurance chômage , financée par des contributions patronales, qui leur offre une protection contre le risque représenté par la perte de leur emploi.

2. Un statut protecteur souvent remis en cause

Les garanties offertes aux travailleurs par le statut de salarié sont principalement financées par les employeurs ou constituent des limitations à leur pouvoir de direction.

Dès lors, les stratégies consistant à assimiler une relation de travail à une prestation de service fournie par un travailleur indépendant à un client ne sont pas nouvelles.

Face à ces tentatives, la jurisprudence affirme clairement et depuis longtemps que la nature de la relation de travail ne dépend pas de la qualification qu'en font les parties. Ainsi, lorsqu'existe, dans les faits, une relation de subordination, le juge peut requalifier en contrat de travail une prestation qui était présentée comme une prestation de services .

Pour apprécier in concreto l'existence d'un lien de subordination, le juge se base sur un faisceau d'indices : d'une part, l'autorité et le contrôle exercés par le donneur d'ordres et, d'autre part, les conditions matérielles d'exercice de l'activité 12 ( * ) .

Le fait que le travail soit effectué au sein d'un service organisé peut par exemple constituer un indice de l'existence d'un lien de subordination lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution.

B. LES PLATEFORMES VIENNENT ENFONCER UN COIN DANS CET ÉDIFICE JURIDIQUE

1. Un nouveau danger pour le droit du travail

Si les stratagèmes tendant à sortir de la relation de salarié pour réduire les coûts salariaux au détriment de la protection des travailleurs ne sont pas apparus au XXI e siècle, les possibilités offertes par le numérique leur ont donné une nouvelle actualité .

En effet, on voit apparaître depuis plusieurs années des entreprises se présentant comme des plateformes mettant en relation des travailleurs indépendants et des clients.

Ces plateformes interviennent dans un nombre croissant de secteurs. Si les chauffeurs de voitures de transport avec chauffeur (VTC) et les livreurs à deux-roues sont, par essence, les plus visibles, on observe que les plateformes numériques interviennent également dans le placement de travailleurs temporaires, contournant les règles imposées au secteur de l'intérim.

Dans ce modèle, les plateformes recueillent le fruit du travail tout en se dégageant de leurs responsabilités sociales et en faisant supporter les risques, économiques mais pas seulement, aux travailleurs.

Elles cherchent en outre à échapper aux règles conventionnelles qui complètent les dispositions législatives et règlementaires du code du travail en n'appliquant pas les conventions collectives des secteurs dans lesquels elles interviennent.

Les stratégies des plateformes numériques visent donc à remettre en cause des années d'acquis sociaux.

2. Une fausse indépendance

Bien que les plateformes se présentent comme de simples intermédiaires , voire simplement comme une version numérique et moderne des Pages Jaunes ou des petites annonces, force est de constater qu'elles jouent souvent un rôle essentiel dans l'organisation des prestations qu'elles proposent.

Ainsi, dans le secteur des VTC ou de la livraison en deux-roues, les travailleurs ne sont généralement pas en mesure de fixer le prix de la prestation qui leur est proposée, qui est déterminé par un algorithme dont ils ne connaissent pas les paramètres.

En outre, les travailleurs ne connaissent pas toujours à l'avance la destination de la course qu'on leur demande de réaliser et sont tenus de respecter des règles imposées par la plateforme.

Enfin, alors qu'un indépendant n'est en principe pas juridiquement subordonné à son client, le non-respect par ces travailleurs des directives données par les plateformes les exposent à des sanctions pouvant aller jusqu'à la déconnexion, c'est-à-dire une forme de licenciement arbitraire.

Dès lors, les juges saisis de demandes en ce sens ont été amenés à requalifier en contrat de travail la relation entre des travailleurs et des plateformes numériques.

Dans un arrêt du 28 novembre 2018, la Cour de cassation a ainsi fait application de sa jurisprudence classique pour apprécier l'existence d'un lien de subordination entre un livreur et la plateforme de livraison de repas Take Eat Easy 13 ( * ) . En l'espèce, la Cour a jugé que l'existence d'un système de géolocalisation permettant le suivi par la plateforme des livreurs, d'une part, et l'existence d'un pouvoir de sanction, sous la forme d'un système de bonus-malus , d'autre part, caractérisaient un lien de subordination. La Cour a rendu une décision allant dans le même sens, le 4 mars dernier, à propos de la relation entre un chauffeur de VTC et la société Uber .

Il semble qu'il existe là une tendance à la requalification qui ne doit pas pour autant empêcher le législateur d'agir. En effet, compte tenu de l'atomicité et de la précarité des travailleurs des plateformes, ceux-ci ne sont pas nécessairement en mesure de faire valoir leurs droits.

II. L'AVÈNEMENT D'UNE NOUVELLE PRÉCARITÉ

A. LES TRAVAILLEURS DES PLATEFORMES : UN NOUVEAU PROLÉTARIAT

1. Un phénomène encore nouveau mais en plein essor

Si les travailleurs de plateformes ne représentent aujourd'hui qu'une part minoritaire de la population active, leur nombre a tendance à croître à mesure que se développe cette nouvelle forme de travail .

La société Uber revendique ainsi 30 000 chauffeurs de VTC actifs au cours du dernier mois 14 ( * ) et 25 000 coursiers à vélo.

Deliveroo avance de son côté le chiffre de 11 000 coursiers en deux-roues, dont certains travaillent en parallèle avec Uber Eats ou d'autres plateformes.

Au total, si les statistiques manquent, on estime que le nombre de travailleurs de plateformes est compris entre 100 000 et 200 000 personnes, alors que cette forme de travail n'existait pas il y a quelques années 15 ( * ) .

2. Une nouvelle forme de travailleurs précaires

Comme la crise sanitaire que notre pays traverse l'a rappelé, les travailleurs des plateformes font partie des emplois les plus exposés de notre économie.

Les revenus horaires perçus par les travailleurs des plateformes sont souvent dérisoires . Les livreurs à vélo, dont le temps d'attente entre deux courses n'est pas rémunéré, perçoivent ainsi des revenus particulièrement faibles et ne sont généralement pas en mesure de tirer un revenu décent de leur activité.

Certaines plateformes de micro-travail proposent même de fournir des tâches pour quelques euros, voire quelques centimes d'euros. S'il est difficile d'identifier les travailleurs pour lesquelles il s'agit d'une activité complémentaire de ceux pour lesquels il s'agit de l'unique source de revenus, de tels niveaux de rémunération ne peuvent qu'interpeller.

Si le chiffre d'affaires affiché par les chauffeurs VTC est plus important, il ne leur permet pas nécessairement de couvrir leurs charges (coût du véhicule, assurance, carburant...). Lorsqu'ils parviennent à dégager un revenu net substantiel, c'est généralement au prix d'une durée du travail dépassant largement la durée maximale hebdomadaire applicable aux salariés.

Au-delà du simple aspect financier, les travailleurs de plateformes sont nombreux à ne bénéficier ni d'une assurance contre les accidents du travail, pourtant fréquents chez les usagers de la route, ni d'une complémentaire santé. À ce titre, il convient de noter que les assurances proposées par les plateformes sont bien souvent insuffisamment protectrices.

B. FACE À LA MENACE D'UNE CONTAGION, L'ÉMERGENCE D'UNE RÉSISTANCE COLLECTIVE

1. Une évolution logique du capitalisme libéral

Ce phénomène est la suite logique du mouvement général d'externalisation, qui vise à faire sortir les travaux jugés non rentables de l'entreprise jusqu'à transformer les salariés en entrepreneurs indépendants, et d'une recherche continue de flexibilité. Il pourrait donc non seulement connaître un développement exponentiel dans certains secteurs mais encore s'étendre à de nouveaux domaines jusqu'ici épargnés . Cette contagion a un nom, qui a désormais sa place dans les dictionnaires : l'« ubérisation ».

À titre d'exemple, la Caisse d'Épargne Bretagne-Pays de la Loire a annoncé, en février 2020, son projet d'expérimenter l'emploi de conseillers bancaires indépendants dans certaines zones rurales.

De même certaines enseignes de grande distribution auraient-elles employé, pendant la période de confinement de la population liée à la pandémie de Covid-19, des micro-entrepreneurs en tant que caissiers, chefs de rayon ou préparateurs de commandes en recourant à des plateformes de mise en relation 16 ( * ) .

On entrevoit donc la progression de l'économie de plateformes au-delà du numérique, vers des secteurs qui emploient habituellement des salariés. Cette évolution aurait pour corollaire de faire peser toujours davantage le risque économique sur les travailleurs et non plus sur l'entreprise.

2. L'émergence d'îlots de résistance
a) Les prémices d'une organisation des travailleurs

Une proportion non négligeable des travailleurs indépendants aspirent à une forte indépendance professionnelle et sont culturellement éloignés du syndicalisme. Pour les sociologues Sarah Abdelnour et Sophie Bernard, « les chauffeurs Uber ont ainsi tendance à se penser davantage comme concurrents que comme solidaires » 17 ( * ) .

Par ailleurs, cette catégorie professionnelle possède une « culture de l'immédiateté » du bénéfice net qui l'amène souvent à négliger sa protection sociale, qu'elle n'appréhende essentiellement que par son coût.

Pour autant, ces travailleurs sont susceptibles de se mobiliser, à l'image du mouvement concerté des livreurs Deliveroo , en juillet 2019, face à la modification unilatérale de la politique tarifaire de la plateforme.

Ainsi, un mouvement de fond émerge : celui de l'organisation croissante de ces travailleurs . Certaines organisations, telles que le Collectif des livreurs autonomes parisiens (CLAP), se sont ainsi constituées depuis plusieurs années et ont acquis une forme de reconnaissance de la part des plateformes. Par ailleurs, plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel ont entrepris d'investir le champ des travailleurs de plateformes. Enfin, des tentatives de structuration des collectifs existants se dessinent, à l'image de l'association Indépendants.co .

Il n'en reste pas moins que ces tentatives se heurtent à l'absence de reconnaissance dans la loi d'une représentation des travailleurs de plateformes et de règles structurant le dialogue social .

Pour la rapporteure, les instances de dialogue mises en place par certaines plateformes ne doivent pas faire illusion. Ainsi Deliveroo a-t-il créé, en novembre 2019, un « Forum » des livreurs, instance de consultation réunissant vingt-cinq représentants élus des travailleurs ainsi que la direction de la plateforme. Les associations de livreurs contestent toutefois la représentativité de ce forum, qui fonctionne suivant des règles établies unilatéralement par la plateforme.

b) L'apparition de plateformes coopératives

Sur le terrain, des initiatives se développent pour proposer un modèle alternatif à celui promu par les grandes plateformes, notamment sous la forme de sociétés coopératives , fondées sur une gouvernance démocratique et un partage équitable des résultats.

Mettant à disposition depuis 2017 une application développée en open source , CoopCycle constitue aujourd'hui un réseau de coopératives de livraison européennes. Proposant un modèle économique différent de celui des grandes plateformes, ces structures se positionnent sur des niches que ces dernières n'occupent pas pour le moment. Par exemple, la coopérative Lille.bike , opérant dans la métropole lilloise et membre de CoopCycle , propose aux commerçants des services de livraison du « dernier kilomètre ».

Si de telles initiatives présentent le grand intérêt d'offrir à la fois autonomie et protection aux travailleurs concernés, elles ne sauraient toutefois convenir à tous, le modèle coopératif supposant un engagement volontaire et de long terme.

III. LES OBJECTIFS DE LA PROPOSITION DE LOI : GARANTIR LA PROTECTION DES TRAVAILLEURS SANS REMETTRE EN CAUSE LES BÉNÉFICES APPORTÉS À LA SOCIÉTÉ PAR LES OFFRES NOUVELLES

A. LE LÉGISLATEUR A JUSQU'À PRÉSENT RÉAGI DE MANIÈRE INSUFFISANTE

Le principe d'une responsabilité sociale des plateformes , institué par la loi « Travail » du 8 août 2016 18 ( * ) , se traduit par la prise en charge des cotisations d'assurance volontaire contre le risque d'accident du travail, de la cotisation « formation professionnelle » et des frais liés à la validation des acquis de l'expérience (VAE) par les plateformes qui déterminent les caractéristiques de la prestation de service fournie ou du bien vendu et fixent son prix. Cette loi a par ailleurs créé un embryon de droit syndical et de droit de grève au bénéfice des travailleurs de plateformes.

La loi d'orientation des mobilités (LOM) du 24 décembre 2019 19 ( * ) est allée dans le même sens, notamment en donnant aux plateformes de mobilité la possibilité d'élaborer des chartes déterminant les conditions et modalités d'exercice de leur responsabilité sociale à l'égard des travailleurs avec lesquelles elles collaborent. Elle a également introduit de nouveaux droits au bénéfice des chauffeurs de VTC et des coursiers en deux-roues, tel celui de se voir communiquer par la plateforme, avant chaque prestation, la distance couverte et le prix garanti, ainsi que celui de refuser une course.

Cette construction d'une responsabilité sociale des plateformes témoigne d'une prise en compte de la situation des travailleurs concernés, mais aussi de la timidité du législateur . Les avancées concédées demeurent en effet largement tributaires du bon vouloir des plateformes elles-mêmes. Surtout, elles tendent à consacrer le recours à des travailleurs indépendants pour des tâches qui pourraient être réalisées par des salariés.

Ainsi, d'importants droits ne sont pas garantis par la loi à ces travailleurs : le droit à la négociation collective, l'obligation pour les plateformes de motiver la rupture du contrat commercial, sans oublier le droit au chômage ou la couverture contre les accidents du travail. De même, aucune disposition ne garantit la transparence des décisions algorithmiques des plateformes.

Pour la rapporteure, l'emploi subordonné doit donner accès à un statut protecteur. Aussi, seule la réintégration de ces travailleurs dans le salariat tout en répondant à leur besoin d'autonomie professionnelle est de nature à améliorer réellement leur situation.

B. LA PROPOSITION DE LOI CRÉE UN NOUVEAU STATUT DE SALARIÉ DOTÉ D'AUTONOMIE

1. La création d'un statut ad hoc

Alors que les dispositions adoptées depuis 2016 tendent à renforcer les protections et les droits des travailleurs des plateformes sans remettre en cause leur statut d'indépendant, la proposition de loi déposée par notre collègue Pascal Savoldelli tend, sans revenir sur ces avancées, à créer un nouveau statut de salarié autonome à leur intention.

L' article 1 er crée une nouvelle forme de contrat de travail applicable aux travailleurs de certaines plateformes numériques, à savoir celles pour lesquelles la mise en relation n'est pas l'objet de l'activité mais la modalité d'accès et de réalisation du service.

Les dispositions du code du travail seraient largement applicables à ces travailleurs sous réserve de certains aménagements. En particulier, les travailleurs des plateformes ne seraient pas soumis aux règles relatives au temps de travail , sauf celles qui fixent la durée maximale quotidienne et la durée maximale hebdomadaire de travail.

Le texte laisse une large place à la négociation collective . Ainsi, les modalités de délivrance et de signature des contrats conclus entre les travailleurs et les plateformes, les modalités de construction et de gestion des plannings horaires et les modes de calcul de la rémunération feraient l'objet d'une négociation annuelle avec les représentants des travailleurs . Le résultat de cette négociation constituerait un socle auquel il ne pourrait être dérogé par contrat individuel. Il ferait l'objet d'une information des travailleurs au moment de leur inscription ainsi que d'un accès permanent, simple et clair sur le site de la plateforme.

L' article 2 prévoit l'affiliation obligatoire des travailleurs de plateformes au régime général de la sécurité sociale. En outre, il étend à ces travailleurs le bénéfice de l'allocation d'assurance chômage . L'adaptation des règles de l'assurance chômage est renvoyée à un accord entre les organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs dans le cadre des objectifs fixés par la proposition de loi.

2. L'introduction dans le code du travail d'un droit à la transparence des décisions algorithmiques

L' article 3 de la proposition de loi introduit, au bénéfice de l'ensemble des salariés, un droit d'information et d'expression sur les algorithmes dès lors que ces derniers déterminent certains aspects essentiels de la relation de travail.

Dans ce cadre, les représentants des travailleurs pourraient solliciter le recours à un expert qui serait pris en charge par la plateforme ou l'employeur.

3. L'approfondissement de la responsabilité sociale des plateformes

Enfin, l' article 4 complète les dispositions existantes applicables aux travailleurs indépendants des plateformes. Il élargit ainsi la possibilité d'assurance des travailleurs à la charge de la plateforme en mentionnant, outre le risque d'accident du travail, les maladies professionnelles .

Il tend par ailleurs à laisser aux travailleurs le choix d'adhérer ou non au contrat collectif proposé par la plateforme et impose à cette dernière, lorsque le travailleur souscrit individuellement une autre assurance, de prendre en charge ses cotisations.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier
Contrat de travailleur de plateformes numériques

Cet article tend à créer, à l'intention de certains travailleurs de plateformes, un nouveau type de contrat de travailleur salarié doté d'autonomie.

La commission n'a pas adopté cet article.

I - L'introduction dans le code du travail d'un statut alternatif pour les travailleurs de plateformes

A. Depuis 2016, des droits spécifiques ont été reconnus aux travailleurs de plateformes

1. L'identification juridique de la notion de plateforme

La loi de finances pour 2016 20 ( * ) a créé l'article 242 bis du code général des impôts (CGI), relatif aux entreprises « qui mettent en relation à distance, par voie électronique, des personnes en vue de la vente d'un bien, de la fourniture d'un service ou de l'échange ou du partage d'un bien ou d'un service ».

2. L'inscription des travailleurs de plateformes dans la septième partie du code du travail

La loi du 8 août 2016 (loi « El Khomri ») 21 ( * ) a introduit dans la septième partie du code du travail, relative aux formes particulières d'emploi bénéficiant de certaines des protections du salariat 22 ( * ) , un nouveau chapitre applicable aux « travailleurs indépendants recourant, pour l'exercice de leur activité professionnelle, à une ou plusieurs plateformes de mise en relation par voie électronique » (art. L. 7342-1 et suivants).

Ces dispositions créent une responsabilité sociale incombant aux plateformes répondant à la définition du CGI à l'égard des travailleurs recourant à leurs services.

Cette responsabilité sociale s'exerce par la prise en charge des cotisations d'assurance volontaire contre le risque d'accident du travail (art. L. 7342-2), de la contribution formation professionnelle et des frais d'accompagnement à la validation des acquis de l'expérience (art. L. 7342-3).

Toutefois, le travailleur ne peut bénéficier de ces prises en charge que s'il a réalisé sur la plateforme un chiffre d'affaires au moins égal à 13 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 5 347,68 euros en 2020.

La loi « El Khomri » a par ailleurs inscrit dans le code du travail une forme de droit de grève pour les travailleurs indépendants ayant recours à une plateforme. Les « mouvements de refus concerté » de fournir leurs services en vue de défendre leurs revendications professionnelles ne peuvent ainsi être un motif de rupture de leurs relations avec les plateformes ni justifier des mesures les pénalisant dans l'exercice de leur activité (art. L. 7342-5).

De même, et bien qu'il s'agisse d'une liberté fondamentale, le législateur a souhaité affirmer le droit pour ces travailleurs de constituer une organisation syndicale (art. L. 7342-6).

3. Les nouveaux droits introduits par la loi d'orientation des mobilités

La loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM) 23 ( * ) a complété les dispositions introduites par la loi « El Khomri » et prévu la prise en charge par la plateforme des frais d'accompagnement et d'une indemnité pour l'ensemble des actions concourant au développement des compétences ainsi que l'abondement du compte personnel de formation (CPF) des travailleurs par les plateformes sur lesquelles ils réalisent un chiffre d'affaires supérieur à un seuil fixé par décret.

Elle a également prévu un droit d'accès des travailleurs aux données personnelles relatives à leur activité sur les plateformes 24 ( * ) .

La LOM a par ailleurs introduit dans le code du travail des dispositions spécifiques aux secteurs des voitures de transport avec chauffeur (VTC) et de la livraison de marchandises en véhicule à deux roues, et notamment la possibilité pour les plateformes d'établir une charte déterminant les conditions et modalités d'exercice de leur responsabilité sociale 25 ( * ) . Une telle charte a vocation à préciser, dans le respect des dispositions législatives applicables, les droits et obligations des travailleurs indépendants en relation avec chaque plateforme. Il est précisé que l'existence d'une telle charte, si elle est homologuée par l'autorité administrative, « ne [peut] caractériser l'existence d'un lien de subordination juridique entre la plateforme et les travailleurs ». Il convient de noter que le texte adopté définitivement par l'Assemblée nationale prévoyait que le respect par l'employeur des engagements mentionnés dans la charte ne pouvait pas non plus caractériser l'existence d'un lien de subordination.

Cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel 26 ( * ) , qui a jugé que le législateur méconnaissait l'étendue de sa compétence en permettant ainsi aux plateformes de restreindre le pouvoir d'appréciation du juge. Ainsi, le fait pour les plateformes d'édicter une charte et d'en respecter le contenu ne saurait faire obstacle à une requalification en contrat de travail si le juge constate l'existence d'un lien de subordination.

Cette loi a par ailleurs introduit dans le code des transports de nouveaux droits pour les travailleurs des secteurs des VTC et de la livraison :

- le droit de se voir communiquer par la plateforme, avant chaque prestation, la distance couverte et le prix garanti, ainsi que celui de refuser une proposition de prestation (art. L. 1326-2 du code des transports) ;

- le libre choix des plages horaires d'activité et périodes d'inactivité (art. L. 1326-4).

Elle oblige également les plateformes à publier des indicateurs liés à l'activité et aux revenus des travailleurs (art. L. 1326-3).

Enfin, la LOM a habilité le Gouvernement à déterminer par ordonnance les modalités de représentation des travailleurs indépendants ayant recours à des plateformes .

B. La proposition de loi crée à l'intention des travailleurs de plateformes un nouveau type de contrat de travail

L' article 1 er crée, au sein de la septième partie du code du travail, un nouveau livre VI applicable aux travailleurs des plateformes numériques, définis comme les « personnes qui concluent avec des plateformes numériques des contrats portant sur la location de leur force de travail en vue de la réalisation du service proposé par la plateforme ».

Il convient de relever que ce nouveau livre ne se substitue pas aux dispositions existantes du code du travail concernant les travailleurs indépendants des plateformes mais qu'il introduit une alternative.

En outre, les plateformes concernées ne sont pas définies par référence à l'article 242 bis du CGI, ni en tant qu'elles opèrent dans des secteurs d'activité particuliers, mais sont celles pour lesquelles la mise en relation « n'est pas l'objet de l'activité mais la modalité d'accès et de réalisation du service ».

Les dispositions du code du travail seraient applicables à ces travailleurs sous réserve des aménagements suivants :

- le contrat conclu entre le travailleur et la plateforme pourrait être à durée indéterminée ou à durée déterminée , sans que les cas de recours à l'une ou l'autre forme de contrat soient précisés ;

- les travailleurs des plateformes ne seraient pas soumis aux règles relatives au temps de travail , sauf celles qui fixent la durée maximale quotidienne 27 ( * ) et la durée maximale hebdomadaire de travail 28 ( * ) ;

- leur rémunération devrait être constituée sur une base horaire à l'exclusion des travailleurs exerçant une profession de transport de personnes ;

- les modalités de délivrance et de signature des contrats conclus entre les travailleurs et les plateformes, les modalités de construction et de gestion des plannings horaires et les modes de calcul de la rémunération feraient l'objet d'une négociation annuelle avec les représentants des travailleurs , dont le résultat « constituera un socle auquel il ne pourra être dérogé par contrat individuel » ;

- les représentants des travailleurs auraient le droit de demander à tout moment des explications sur les modifications des algorithmes concernant les conditions de travail, l'organisation du travail et des temps d'attente, les modalités de la mise en relation ainsi que les modalités et le montant des rémunérations, et pourraient solliciter le recours à un expert qui serait pris en charge par la plateforme ( cf . article 3 ) ;

- la rupture du contrat entre le travailleur et la plateforme devrait, comme un licenciement, être justifiée par un motif réel et sérieux ; elle devrait respecter une procédure ad hoc , incluant un entretien préalable et une notification, dont les modalités seraient déterminées par accord collectif ;

- les règles de détermination de la représentativité des organisations syndicales ne s'appliqueraient pleinement qu'au 1 er janvier 2023 ; jusqu'à cette date, l'ancienneté de deux ans requise au 4° de l'article L. 2121-1 du code du travail serait réduite à un an ;

- les règles relatives aux élections au comité social et économique (CSE) feraient l'objet d'aménagements prévoyant notamment des seuils de durée d'activité sur une plateforme pour être électeur (450 heures sur les douze derniers mois) ou éligible (850 heures) ; en outre, la plateforme serait tenue de donner aux candidats un « accès simple et efficace » aux noms et coordonnées des travailleurs habilités à voter ;

- le résultat des négociations annuelles devrait faire l'objet d'une information des travailleurs au moment de leur inscription ainsi que d'un accès permanent, simple et clair sur le site et l'application de la plateforme. Les modalités de cet accès feraient également l'objet d'une négociation annuelle ;

- de même, les coordonnées des organisations de travailleurs parties à la négociation avec la plateforme devraient être accessibles de manière permanente, simple et claire sur le site et l'application.

II - Un dispositif rejeté par la commission contre l'avis de la rapporteure

Pour la rapporteure, l'emploi doit donner accès à un statut protecteur et les travailleurs des plateformes, qui subissent une forme insidieuse de subordination, doivent être considérés comme des salariés.

De plus, cet article a le mérite de laisser une large place à la négociation collective dans la détermination du statut de ces travailleurs, ce qui soulève la question importante de leur représentation.

Toutefois, la commission des affaires sociales considère que le dispositif proposé ne résout pas la problématique du droit social applicable aux travailleurs de plateformes .

La commission estime qu'il convient de dépasser le débat sur le statut des travailleurs de plateformes et de poursuivre l'amélioration concrète des protections dont bénéficient ces travailleurs.

La commission a rejeté cet article.

Article 2
Protection sociale des travailleurs de plateformes numériques

Cet article prévoit l'affiliation des travailleurs des plateformes numériques au régime général de la sécurité sociale et à l'assurance chômage.

La commission n'a pas adopté cet article.

I - Un article qui tend à prévoir la couverture des travailleurs des plateformes contre les risques sociaux

A. Affiliation au régime général de la sécurité sociale

L'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale (CSS) énumère des travailleurs affiliés obligatoirement au régime obligatoire de la sécurité sociale « même s'ils ne sont pas occupés dans l'établissement de l'employeur ou du chef d'entreprise » et « même s'ils possèdent tout ou partie de l'outillage nécessaire à leur travail ».

Le présent article tend à prévoir l'affiliation au régime général des travailleurs des plateformes tels que définis par l'article 1 er en les mentionnant dans un 36° créé au sein de l'article L. 311-3 du CSS .

B. Affiliation à l'assurance chômage

L'article L. 5422-1 du code du travail définit les bénéficiaires de l'assurance chômage. Il vise d'une part les demandeurs d'emploi dont la privation de travail est involontaire ou résulte d'une rupture conventionnelle (I) et d'autre part les demandeurs d'emploi qui ont démissionné dans le cadre d'un projet de reconversion professionnelle (II).

Le présent article tend à ouvrir le droit à l'assurance chômage aux travailleurs des plateformes et crée à cet effet un III à l'article L. 5422-1 .

Aux termes de la rédaction proposée, les travailleurs de plateformes tels que définis à l'article 1 er de la proposition de loi auraient droit à l'allocation d'assurance chômage à condition d'être aptes au travail, de rechercher un emploi et de satisfaire à une obligation de durée antérieure d'activité.

Il est prévu une adaptation des règles du régime d'assurance chômage à la situation particulière de ces travailleurs par un accord entre les organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs. Il est précisé que cette adaptation devra tenir compte d'un certain nombre d'objectifs , dont certains sont des critères impératifs.

Ainsi, les droits pourraient être ouverts sous une condition d'activité antérieure correspondant à 450 heures de travail au cours des 12 derniers mois .

Le droit à l'allocation chômage serait réservé aux travailleurs dont le contrat a été rompu dans les conditions prévues par l'article 1 er de la proposition de loi.

Pour bénéficier de l'allocation, les personnes concernées devront s'inscrire dans un délai de douze mois à compter de la rupture de leur contrat.

Il est précisé que le montant de l'allocation serait calculé en prenant en considération les ré munérations des douze mois civils précédant la rupture du contrat, à l'exclusion des sommes dont l'attribution est liée à la rupture ou à l'arrivée à son terme du contrat.

II - Un article rejeté par la commission contre l'avis de la rapporteure

La rapporteure considère qu'il est essentiel que les travailleurs de plateformes puisse bénéficier des acquis sociaux que représentent la sécurité sociale et l'assurance chômage.

Toutefois, contre son avis, la commission a rejeté cet article.

La commission a rejeté cet article.

Article 3
Droit d'information et d'expression des salariés sur les algorithmes

Cet article tend à introduire au bénéfice de l'ensemble des salariés un droit à l'information et à l'expression sur les algorithmes, dès lors que ces derniers déterminent certains aspects essentiels de la relation de travail.

La commission n'a pas adopté cet article.

I - La proposition de loi introduit un principe de transparence des algorithmes dans le droit du travail

Selon la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), un algorithme est « la description d'une suite d'étapes permettant d'obtenir un résultat à partir d'éléments fournis en entrée » 29 ( * ) . Lorsqu'ils sont mis en oeuvre par un ordinateur, les algorithmes sont exprimés dans un langage informatique sous la forme d'une application. Ils permettent alors de réaliser des tâches et de résoudre des problèmes à partir de grandes masses de données en un temps très réduit. De tels programmes sont toutefois difficilement intelligibles par les non-spécialistes.

La loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique 30 ( * ) a imposé la transparence des algorithmes publics : une décision individuelle prise sur le fondement d'un traitement algorithmique doit ainsi comporter une mention explicite en informant l'intéressé, laquelle indique la finalité poursuivie par le traitement. Les règles définissant cet algorithme ainsi que les principales caractéristiques de sa mise en oeuvre sont communiquées par l'administration à l'intéressé s'il en fait la demande 31 ( * ) . En outre, sous réserve des secrets protégés par la loi, les administrations doivent publier en ligne les règles définissant les principaux traitements algorithmiques utilisés dans l'accomplissement de leurs missions, lorsqu'ils fondent des décisions individuelles 32 ( * ) .

La même loi a imposé aux opérateurs de plateforme en ligne l' obligation de délivrer au consommateur une information loyale, claire et transparente sur « les conditions générales d'utilisation du service d'intermédiation qu'il propose et sur les modalités de référencement, de classement et de déréférencement des contenus, des biens ou des services auxquels ce service permet d'accéder » 33 ( * ) .

En revanche, aucune disposition du code du travail ne garantit la transparence des algorithmes à l'égard des salariés .

L' article 3 introduit ainsi au sein du code du travail un nouvel article L. 2281-12 prévoyant que, lorsque les conditions de travail, l'organisation du travail, les modalités de la mise en relation, les modalités, le montant ou le mode de rémunération sont déterminés au travers d'algorithmes, ceux-ci doivent faire l'objet « d'une information, d'une consultation ou d'une négociation, selon les champs concernés ».

Par renvoi aux dispositions correspondantes de l'article premier, les représentants des travailleurs auraient le droit, en cas de doute sur une modification des algorithmes, de solliciter le recours à un expert qui serait pris en charge par l'employeur.

II - La position de la commission : un article supprimé contre l'avis de la rapporteure

Pour la rapporteure, un nombre de croissant de décisions concernant l'organisation du travail sont transférées à des algorithmes qui constituent de véritables « boîtes noires » . Or, il est essentiel que les travailleurs puissent avoir accès à ces informations et bénéficier de l'assistance d'un expert.

S'agissant des plateformes numériques, le « management algorithmique » est en effet devenu une réalité dans la mesure où les outils de contrôle développés par certaines plateformes d'intermédiation (notation, suivi en temps réel des performances, dispositifs d'incitation et de fidélisation, shifts , etc.) entravent en pratique l'autonomie des travailleurs, malgré leur indépendance formelle. Le rapport de l'Institut Montaigne 34 ( * ) recommande ainsi d'« augmenter la transparence des algorithmes concernant les paramètres pris en compte ainsi que leurs effets (par exemple, les critères de notation et l'impact de ces notes sur les mises en relation avec les clients) » et de « garantir la neutralité des algorithmes pour éviter tout phénomène de discrimination, même indirect ou involontaire, réprimé par la loi ».

En revanche, cette problématique n'a pas été identifiée concernant les salariés « classiques », pour lesquels la commission des affaires sociales considère qu'une modification du champ du droit d'expression ne s'impose pas.

Outre que la transparence des algorithmes est limitée par la protection du secret industriel, il convient de rappeler que les algorithmes ne constituent que l'outil ou le procédé ; c'est avant tout sur les modifications de leurs conditions de travail et de rémunération elles-mêmes que les travailleurs doivent être informés et consultés.

La commission a rejeté cet article.

Article 4
Assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Cet article permet aux travailleurs de choisir entre un contrat collectif souscrit par la plateforme et l'assurance volontaire contre les accidents du travail de la sécurité sociale.

La commission n'a pas adopté cet article.

I - La loi du 8 août 2016 a prévu la prise en charge par les plateformes de l'auto-assurance contre les accidents du travail

L'article L. 7342-2 du code du travail, créé par la loi du 8 août 2016, prévoit la prise en charge par la plateforme numérique des cotisations lorsqu'un travailleur indépendant choisit de souscrire une assurance contre les accidents du travail . Il peut s'agir soit d'une assurance privée soit de l'affiliation volontaire à l'assurance contre les accidents du travail de la sécurité sociale (article L. 743-1 du code de la sécurité sociale 35 ( * ) ).

Alternativement la plateforme peut financer un contrat collectif d'assurance , à condition que les garanties offertes soient au moins équivalentes à celles de l'assurance volontaire.

II - Un article qui tend à renforcer la protection des travailleurs des plateformes

Le présent article tend à élargir la possibilité d'assurance en mentionnant également les maladies professionnelles 36 ( * ) . Il s'appliquerait aux travailleurs de plateformes n'entrant pas dans le champ du salariat autonome prévu par l'article 1 er du projet de loi.

Il tend par ailleurs à laisser aux travailleurs le choix d'adhérer ou non au contrat collectif proposé par la plateforme et impose à cette dernière, lorsque le travailleur opte pour une autre assurance, de prendre en charge ses cotisations.

III - Un article rejeté par la commission contre l'avis de la rapporteure

La rapporteure considère que cet article va dans le sens d'une plus grande protection des travailleurs des plateformes, qui sont souvent particulièrement exposés au risque d'accidents du travail. Toutefois, la commission a rejeté cet article.

La commission a rejeté cet article.

EXAMEN EN COMMISSION

___________

Réunie le mercredi 27 mai 2020, sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission examine le rapport de Mme Cathy Apourceau-Poly, rapporteure, sur la proposition de loi n° 717 (2018-2019) de MM. Pascal Salvoldelli, Fabien Gay, Mmes  Cathy Apourceau-Poly, Laurence Cohen, Michelle Gréaume et plusieurs de leurs collègues relative au statut des travailleurs des plateformes numériques.

M. Alain Milon , président . - Nous passons à l'examen du rapport de notre collègue Cathy Aporceau-Poly sur la proposition de loi relative au statut des travailleurs des plateformes numériques. Je salue la présence de Pascal Savoldelli, auteur de la proposition de loi.

Mme Cathy Apourceau-Poly , rapporteure . - Merci aux personnes que nous avons pu auditionner dans des délais très courts, en une journée, dont vous trouverez la liste dans mon rapport.

La proposition de loi de notre collègue Pascal Savoldelli, que j'ai cosignée avec les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, vise à créer un statut protecteur pour certains travailleurs qui, depuis l'apparition des plateformes numériques, restent des oubliés du droit du travail et de la protection sociale.

Ces « travailleurs de plateformes », qu'ils soient livreurs à vélo ou chauffeurs de voiture de transport avec chauffeur (VTC), se voient refuser la qualification de travailleur salarié au motif que leurs donneurs d'ordres ne seraient que des intermédiaires leur permettant d'accéder à une clientèle.

Partant du constat que les plateformes de travail ne sont pas de simples intermédiaires, mais des organisations productives s'inspirant, plus encore que les entreprises traditionnelles, des logiques de concurrence qui gouvernent le marché, cette proposition de loi vise à adapter le droit du travail à cette situation afin d'intégrer ces travailleurs dans le salariat.

À titre liminaire, et bien qu'aucun amendement n'ait été déposé à ce stade, il me revient de vous proposer un périmètre pour l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution.

Je considère que ce périmètre comprend des dispositions relatives au statut des travailleurs utilisant une plateforme numérique ; à leur affiliation à la sécurité sociale et à l'assurance chômage ; aux modalités de représentation de ces travailleurs et à leurs relations avec les plateformes ; à l'accès de ces travailleurs aux algorithmes utilisés par les plateformes numériques.

En revanche, seraient dépourvus de tout lien avec le texte des amendements relatifs aux droits sociaux des travailleurs autres que ceux des plateformes numériques ; à la régulation des secteurs économiques dans lesquels interviennent des plateformes numériques ; au régime de la micro-entreprise ; à la fiscalité applicable aux travailleurs des plateformes et aux plateformes ; enfin, aux règles de santé au travail.

La relation entre celui qui possède les moyens de production et celui qui loue sa force de travail est, par nature, une relation déséquilibrée : le salarié est placé dans une relation de subordination vis-à-vis de son employeur, dont il dépend pour ses moyens de subsistance. Pour remédier à ce déséquilibre, le droit du travail a progressivement construit un socle de garanties protégeant les salariés, en particulier une rémunération minimale, la mensualisation du salaire et la « prime de précarité » versée aux salariés en contrat à durée déterminée. Les salariés bénéficient également de garanties en matière de temps de travail et de droit au repos. Le préambule de la Constitution de 1946 garantit aux travailleurs des droits sociaux pour la défense de leurs intérêts : le droit syndical, le droit de grève et le droit de participer, par l'intermédiaire de délégués, à la détermination collective des conditions de travail et à la gestion des entreprises.

Au-delà des dispositions visant à rééquilibrer la relation de travail, donc à protéger les salariés contre l'arbitraire d'un employeur, la France assure les travailleurs contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, elle garantit à tous les salariés une couverture santé complémentaire et tous les salariés sont affiliés de droit à l'assurance chômage, qui leur offre une protection contre le risque de perte de leur emploi.

Ces protections offertes par le statut de salarié sont principalement assurées et financées par les employeurs, ou elles limitent leur pouvoir de direction. Aussi les stratégies consistant à assimiler une relation de travail à une prestation de service fournie par un travailleur indépendant sont-elles aussi anciennes que le droit du travail. Face à ces tentatives, la jurisprudence affirme clairement que la nature de la relation de travail est d'ordre public et qu'elle ne dépend pas de la qualification qu'en font les parties.

Pour apprécier l'existence d'un lien de subordination, le juge se fonde sur un faisceau d'indices : l'autorité et le contrôle exercés par le donneur d'ordres, ainsi que les conditions matérielles d'exercice de l'activité. Le fait que le travail soit effectué au sein d'un service organisé, par exemple, peut constituer un indice du lien de subordination. Si celui-ci est démontré, le juge peut alors requalifier en contrat de travail ce qui était présenté comme un contrat de prestation de services.

Les possibilités offertes par le numérique ont donné une nouvelle actualité à ce problème ancien.

Les plateformes, comme l'a montré le rapport de nos collègues Michel Forissier, Catherine Fournier et Frédérique Puissat, interviennent dans un nombre croissant de secteurs. Si les chauffeurs de VTC et les livreurs à deux-roues sont les plus visibles, les plateformes numériques interviennent aussi dans le placement de travailleurs temporaires, contournant les règles imposées au secteur de l'intérim. En réalité, ces plateformes jouent souvent un rôle essentiel dans l'organisation des prestations qu'elles proposent.

Dans les secteurs des VTC ou de la livraison, les travailleurs ne sont généralement pas en mesure de fixer le prix de la prestation qui leur est proposée. Le tarif est déterminé par un algorithme dont les travailleurs ne connaissent pas les paramètres, pas plus qu'ils ne connaissent toujours à l'avance la destination de la course qu'on leur demande, tout en étant tenus de respecter des règles imposées par la plateforme. Enfin, alors que, en principe, un indépendant n'est pas juridiquement subordonné à son client, le non-respect par ces travailleurs des directives données par les plateformes les expose à des sanctions pouvant aller jusqu'à la déconnexion, c'est-à-dire une forme de licenciement arbitraire. Ces travailleurs connaissent donc tous les inconvénients de l'indépendance sans en avoir les avantages.

Les juges ont déjà requalifié en contrat de travail la relation entre des travailleurs et des plateformes numériques. Dans un arrêt du 28 novembre 2018, la Cour de cassation a fait application de sa jurisprudence classique pour apprécier l'existence d'un lien de subordination entre un livreur et l'ancienne plateforme de livraison de repas Take Eat Easy. Elle a rendu une décision dans le même sens, le 4 mars dernier, à propos de la relation entre un chauffeur de VTC et la société Uber. Une tendance à la requalification se dessine. Toutefois, on ne saurait se satisfaire de laisser les juges requalifier au cas par cas des situations individuelles.

Les travailleurs de plateformes portent en germe une nouvelle classe de travailleurs précaires. Certes, ils sont encore peu nombreux - entre 100 000 et 200 000 personnes - mais leur nombre croît à mesure que se développe l'« ubérisation » de notre société.

Surtout, comme le rappelle la crise sanitaire que notre pays traverse, les travailleurs des plateformes font partie des emplois les plus exposés de notre économie.

Les revenus perçus par les travailleurs des plateformes, notamment par les livreurs à vélo, sont souvent dérisoires. Si le chiffre d'affaires affiché par les chauffeurs VTC est plus important, il ne leur permet pas toujours de couvrir leurs charges. En plus d'être faiblement rémunérés, les travailleurs de plateformes sont nombreux à ne bénéficier ni d'une assurance contre les accidents du travail, pourtant fréquents chez les usagers de la route, ni d'une complémentaire santé.

Ce phénomène est la suite logique du mouvement général d'externalisation, qui fait sortir les travaux jugés non rentables de l'entreprise jusqu'à transformer les salariés en entrepreneurs faussement indépendants, et qui recherche toujours plus de flexibilité. Il pourrait donc connaître un développement exponentiel dans certains secteurs et s'étendre à de nouveaux domaines jusqu'ici épargnés, comme le montre le projet de certains groupes bancaires d'expérimenter l'emploi de conseillers indépendants.

Cette évolution a pour corollaire de faire peser toujours davantage le risque économique sur les travailleurs.

Face à cette tendance, on assiste cependant à l'émergence d'îlots de résistance. Malgré leur éloignement spontané du syndicalisme et une certaine « culture de l'immédiateté », ces travailleurs peuvent se mobiliser, à l'image du mouvement concerté des livreurs Deliveroo, en juillet 2019, face à la modification de la politique tarifaire de la plateforme.

Un mouvement de fond émerge : celui de l'organisation croissante de ces travailleurs. Certaines organisations, telles que le Collectif des livreurs autonomes de Paris (CLAP), se sont constituées depuis plusieurs années et ont acquis une forme de reconnaissance de la part des plateformes. Plusieurs organisations syndicales de salariés s'intéressent aux travailleurs de plateformes. Enfin, des tentatives de structuration des collectifs se dessinent.

Ces tentatives butent sur l'absence de reconnaissance légale d'une représentation des travailleurs de plateformes et de règles structurant le dialogue social.

Les instances de dialogue mises en place par certaines plateformes ne doivent pas faire illusion. Les associations de livreurs contestent la représentativité du Forum Deliveroo, l'instance de consultation créée par la plateforme en novembre dernier, qui fonctionne suivant des règles qu'elle a établies unilatéralement.

Des initiatives proposent un modèle alternatif, notamment sous la forme de sociétés coopératives fondées sur une gouvernance démocratique et un partage équitable des résultats. Ainsi, CoopCycle, qui met à disposition depuis 2017 une application développée en open source, constitue un réseau de coopératives de livraison européennes. Ces structures, employant des salariés coopérateurs, proposent un modèle économique différent de celui des grandes plateformes et se positionnent sur des niches que ces dernières n'occupent pas - la coopérative Lille.bike, par exemple, propose aux commerçants de la métropole lilloise des services de livraison du « dernier kilomètre ». Si de telles initiatives présentent le grand intérêt d'offrir à la fois autonomie et protection aux travailleurs concernés, elles ne sauraient convenir à tous les travailleurs, car le modèle coopératif suppose un engagement volontaire et de long terme.

Face à cette situation, le législateur s'est montré bien timide jusqu'à aujourd'hui.

Le principe d'une responsabilité sociale des plateformes, institué par la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, se traduit par la prise en charge par les plateformes des cotisations d'assurance volontaire contre le risque d'accident du travail, de la cotisation « formation professionnelle » et des frais liés à la validation des acquis de l'expérience. Cette loi a aussi créé un embryon de droit syndical et de droit de grève au bénéfice des travailleurs.

La loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM) est allée dans le même sens, en donnant aux plateformes de mobilité la possibilité d'élaborer des chartes déterminant les conditions et modalités d'exercice de leur responsabilité sociale. Elle a également introduit de nouveaux droits au bénéfice des chauffeurs de VTC et des coursiers à deux-roues, tel celui de se voir communiquer par la plateforme, avant chaque prestation, la distance couverte et le prix garanti, ainsi que celui de refuser une course.

Cette construction d'une responsabilité sociale des plateformes témoigne d'une prise en compte de la situation des travailleurs concernés. Cependant, les avancées concédées demeurent largement tributaires du bon vouloir des plateformes elles-mêmes. Surtout, elles consacrent le recours à des travailleurs indépendants pour des tâches qui pourraient être réalisées par des salariés.

Ainsi, d'importants droits ne sont pas garantis par la loi à ces travailleurs : le droit à la négociation collective, l'obligation pour les plateformes de motiver la rupture du contrat commercial, sans oublier le droit à l'assurance chômage ou la couverture contre les accidents du travail. Ensuite, rien ne garantit la transparence des décisions que les plateformes prennent sur le fondement d'algorithmes.

Il est temps de reconnaître que l'emploi subordonné doit donner accès à un statut protecteur. En réalité, seule l'intégration de ces travailleurs dans le salariat, tout en prenant en considération leur besoin d'autonomie professionnelle, peut améliorer réellement leur situation.

La proposition de loi déposée par notre collègue Pascal Savoldelli crée un nouveau statut de salarié doté d'autonomie, sans remettre en cause les bénéfices apportés à la société par les offres nouvelles.

L'article 1 er crée une nouvelle forme de contrat de travail applicable aux travailleurs de certaines plateformes numériques, celles pour lesquelles la mise en relation n'est pas l'objet de l'activité mais la modalité d'accès et de réalisation du service. Il s'agit en particulier des principales plateformes du secteur des transports. Les dispositions du code du travail seraient largement applicables à ces travailleurs sous réserve de certains aménagements. Les travailleurs des plateformes ne seraient pas soumis aux règles relatives au temps de travail, sauf celles qui fixent la durée maximale quotidienne et la durée maximale hebdomadaire de travail.

Le texte laisse une large place à la négociation collective. Ainsi, les modalités de délivrance et de signature des contrats conclus entre les travailleurs et les plateformes, les modalités de construction et de gestion des plannings horaires et les modes de calcul de la rémunération feraient l'objet d'une négociation annuelle avec les représentants des travailleurs. Le résultat de cette négociation constituerait un socle auquel il ne pourrait être dérogé par contrat individuel. Il ferait l'objet d'une information des travailleurs au moment de leur inscription, ainsi que d'un accès permanent, simple et clair sur le site de la plateforme.

L'article 2 prévoit l'affiliation obligatoire des travailleurs de plateformes au régime général de la sécurité sociale. Il étend à ces travailleurs le bénéfice de l'assurance chômage.

Les décisions algorithmiques prennent une place croissante dans la sphère du travail et du management. L'article 3 introduit, au bénéfice de l'ensemble des salariés, un droit d'information et d'expression sur les algorithmes dès lors que ces derniers déterminent certains aspects essentiels de la relation de travail. Les représentants des travailleurs pourraient solliciter le recours à un expert qui serait pris en charge par la plateforme ou l'employeur.

Enfin, l'article 4 complète les dispositions du code du travail applicables aux travailleurs indépendants des plateformes. Il élargit la possibilité d'assurance des travailleurs à la charge de la plateforme en mentionnant, outre le risque d'accident du travail, les maladies professionnelles. Il laisse aux travailleurs le choix d'adhérer au contrat collectif proposé par la plateforme et impose à cette dernière, lorsque le travailleur souscrit individuellement une autre assurance, de prendre en charge ses cotisations.

Cette proposition de loi n'entend donc pas sécuriser le modèle des plateformes, qui repose sur de faux indépendants et engendre de la précarité, mais tranche clairement, dans la lignée des décisions récentes de la Cour de cassation, en faveur d'une assimilation à des salariés de ces travailleurs qui n'ont pas la pleine maîtrise de leur travail, dont tirent profit quelques grandes entreprises.

M. Pascal Savoldelli , auteur de la proposition de loi. - Les plateformes numériques de travail sont un sujet tout à fait nouveau et, avec cette proposition de loi, nous disons tout net ce dont nous ne voulons pas. Nous n'entendons pas proposer un nouveau modèle pour ces plateformes, qui sont un nouvel hybride d'entreprise et de marché : ne nous trompons pas d'objectif.

Nous ne confondons pas le salariat et le travail indépendant. Les indépendants assurent une activité à leur compte et ils en assument les risques, mais ce n'est pas du tout le cas des travailleurs des plateformes numériques. Ce que nous voulons, ce n'est pas définir un statut nouveau, mais sécuriser des travailleurs - qui sont et seront toujours davantage des travailleuses -, en leur ouvrant le droit du travail et la protection sociale.

J'insiste sur cet angle précis, car ces plateformes posent bien d'autres problèmes passionnants, par exemple celui de l'évasion fiscale - je suis prêt à y travailler également, mais ce n'est pas notre question du jour. Cependant, notre angle précis a bien des implications, je pense en particulier - et je vous invite à penser - au tissu économique existant : une fois que ces travailleurs disposeront des protections qui sont celles du code du travail, les plateformes ne pourront plus organiser une concurrence déloyale avec les entreprises vertueuses et avec les artisans, lesquels ont des comptes à rendre parce qu'ils exercent une responsabilité sociale, définie elle-même par tout un ensemble de règles fixées par le code de commerce et le code du travail. En réalité, le code du travail est prêt à accueillir ces travailleurs nouveaux, la jurisprudence est là, assise sur la législation sociale.

Nous avons construit ce texte pendant deux ans, par des rencontres parfois difficiles sur le terrain - le débat a été vif avec ces travailleurs qui se demandaient ce qu'on leur voulait. Il a fallu trouver un équilibre, prévoir de la souplesse : c'est ce que fait ce texte. Cette proposition de loi laisse ainsi les travailleurs des plateformes parfaitement libres de travailler quand ils le veulent, de faire les heures qu'ils souhaitent, de travailler pour plusieurs plateformes, mais elle leur accorde, quand ils ont fait un certain nombre d'heures, le droit d'avoir des représentants, de discuter de leurs conditions de travail et de leur rémunération, alors qu'ils sont les seuls, actuellement, à ne pas pouvoir le faire.

Enfin, il y a la question de l'algorithme, dont on parle beaucoup. En réalité, l'algorithme n'est qu'une suite d'opérations et d'instructions, c'est un outil qui fait ce qu'on lui demande de faire. Et nous ne faisons que donner aux travailleurs, non pas un contre-pouvoir, mais un droit d'information et de visibilité sur cet outil via le data scientist que nous mettons à leur disposition.

Des outils nouveaux existent, que ma génération n'a pas connus, il faut les démocratiser, c'est notre rôle de parlementaires de proposer une telle avancée.

M. Alain Milon , président . - Il y a effectivement matière à débattre.

Mme Frédérique Puissat . - Merci à Pascal Salvoldelli pour son initiative et à Cathy Apourceau-Poly pour son travail, en particulier pour les auditions qu'elle a dû réaliser dans un délai très contraint. Ce sujet passionnant est complexe parce qu'il est difficile de recueillir une parole unique pour élaborer des règles fixes, tant les usages sont diffus et les réalités diverses. Cette diversité de situations nous a conduits, dans le rapport que nous avons écrit avec Michel Forissier et Catherine Fournier, et que la commission a adopté la semaine passée, à constater que la réalité, dans sa diversité, débordait le principe de requalification des contrats, à l'inverse donc de ce que nous proposent aujourd'hui nos collègues dans la mesure où ils préconisent des contrats à durée déterminée ou indéterminée avec les plateformes, ce qui revient en fait à une requalification. Nous proposons, quant à nous, de sortir de la question du statut, pour universaliser certains droits sociaux qui font aujourd'hui défaut, ce qui demande une intervention du législateur.

Cette proposition de loi allant à l'encontre de notre rapport, nous y serons opposés, mais nous pouvons nous abstenir pour que nous en débattions en séance plénière, car il y a effectivement matière à débat.

La question des algorithmes, en particulier, est très complexe, car, au-delà des bonnes intentions, nos auditions nous ont fait mesurer combien il est difficile de régler l'intervention de spécialistes en algorithme, qui sont nombreux et pas toujours au fait du droit du travail. Il en est de même pour la représentation des travailleurs des plateformes, où nous avons aussi pris des positions qui demandent à être débattues.

Enfin, cette proposition de loi comprend des risques constitutionnels, en déléguant à la négociation avec les utilisateurs des plateformes, des pouvoirs que la Constitution fait entrer dans le domaine de la loi.

Mme Catherine Fournier . - Je m'associe aux propos de Frédérique Puissat, le problème posé est effectif et visible, quoiqu'il ne concerne directement qu'une partie infime de la population active, moins de 1 %, comme nous l'avons constaté dans le rapport que nous avons présenté la semaine dernière. Cette proposition de loi est un texte d'appel : ses défenseurs nous disent qu'elle ne vise pas à sécuriser le modèle des plateformes, mais à choisir l'alternative, dans le droit fil de la jurisprudence de la Cour de cassation, c'est-à-dire l'assimilation des travailleurs concernés au statut de salarié. Or, les liens de subordination qui ont motivé des requalifications sont très précis, loin d'être généraux.

Ces travailleurs ne bénéficient pas suffisamment de protections en matière d'accident du travail et de maladie professionnelle, nous en sommes bien d'accord. Mais ce sont des travailleurs indépendants, et ils bénéficient à ce titre d'un régime simplifié de protection sociale : ils ne sont donc pas sans protection, c'est important de le dire.

En fait, si des problèmes se posent, liés en particulier à l'utilisation abusive du statut de travailleur indépendant par les plateformes, si nous sommes d'accord avec l'idée de clarifier les règles, en particulier celles de la micro-entreprise, nous pensons qu'on ne saurait le faire dans une simple proposition de loi, qui simplifierait nécessairement les choses. Nos auditions nous ont montré que les travailleurs concernés sont des travailleurs indépendants, et que très peu d'entre eux réclament le statut de salarié. Faut-il dès lors les assimiler à des salariés ? Imaginer un statut de salarié où le salarié travaillerait quand il veut ?... Ce serait quelque peu choquant, car cela revient à ne conserver que les avantages du statut de l'indépendant.

Ensuite, nombre de plateformes numériques ne sont pas rentables à l'heure actuelle, et si tous ceux qui travaillent pour elles devenaient des salariés, il n'y aurait tout simplement plus de plateformes en France. Est-ce ce que nous voulons, alors même que nous y avons grand recours, surtout en ville, dans la crise que nous traversons ? Ce modèle particulier doit être traité en tant que tel. Cette proposition de loi est trop restrictive, je suis en désaccord sur le fond. Pour que le débat ait lieu en séance, cependant, je m'abstiendrai.

Mme Laurence Cohen . - Nous touchons le coeur de ce débat important, qui doit avoir lieu dans l'hémicycle. Je trouve nos collègues Frédérique Puissat et Catherine Fournier un peu dures d'exiger d'une proposition de loi qu'elle épuise un tel sujet - depuis 2011 que je suis sénatrice, je ne souviens pas qu'une proposition de loi ait suffi à régler l'entièreté d'une problématique importante...

Ensuite, ce texte ne reproduit pas une parole unique, comme je l'ai entendu : cette proposition de loi a été construite à partir du terrain, au gré de consultations très nombreuses depuis l'année dernière. Son objectif, outre le débat, c'est d'assurer une meilleure protection aux travailleurs de ces plateformes, en ayant en perspective le recours que nous avons à ces travailleurs peu protégés. Ces plateformes contribuent à dégrader les conditions de travail de salariés d'autres entreprises, je pense en particulier à Amazon. Il faut donc accompagner ces travailleurs pour les faire accéder à des droits sociaux pleins et entiers, précis, en proposant des innovations en vue de protéger les droits individuels et collectifs. Aujourd'hui, ces travailleurs ne sont pas assez protégés et, même s'ils sont peu nombreux, il est de notre devoir de leur apporter les protections nécessaires, propres à garantir qu'ils ne soient pas corvéables à merci - car le lien de subordination existe bel et bien.

Mme Monique Lubin . - Je m'associe aux remerciements adressés à Mme la rapporteure et à M. Savoldelli pour le travail mené sur ce sujet que nous abordons pour la troisième fois devant notre commission.

J'ai quelques doutes sur la façon dont la question a été traitée par les auteurs de la proposition de loi : ils proposent de créer un espace particulier, une sorte de sous-statut, au sein du code du travail - c'est du moins ainsi que je perçois le résultat de leur travail.

On ne peut pas laisser perdurer un modèle comme celui des plateformes numériques. Ces travailleurs sont peut-être minoritaires, mais on voit leur nombre croître. Derrière les livreurs de repas se développe toute une économie qui va finir par concerner des pans entiers de métiers.

Nous ne sommes pas très nombreux à nous intéresser à ce sujet. Ces métiers sont souvent regardés avec condescendance, et nombreux sont ceux qui pensent que ces travailleurs ne peuvent pas faire autre chose, qu'ils sont des perdants. C'est la pensée dominante, qui n'est bien sûr pas celle de la commission !

Je suis peut-être archaïque, mais, pour moi, la seule méthode valable, c'est celle du contrat de travail, avec la protection apportée par le code du travail. J'entends qu'une partie de ces travailleurs veut un modèle qui leur offre, selon eux, de la liberté.

Mme Pascale Gruny . - À chacun sa liberté !

Mme Monique Lubin . - Devons-nous adapter le code du travail à un modèle économique qui ne permet pas à un travailleur de vivre dignement de son métier ? En tant qu'utilisateurs, devons-nous accepter de recourir à un service qui, certes, coûte très peu cher, mais qui ne permet peut-être pas à celui qui l'a fourni de vivre décemment ?

Je ne suis pas tout à fait en phase avec la façon d'adapter le code du travail à ces métiers qui nous est ici proposée. Mais c'est déjà un moyen de faire avancer le débat, tout comme le rapport de nos collègues que nous avons examiné la semaine dernière. À force de débattre de ce sujet, nous finirons par arriver à quelque chose ! Il faut réfléchir aux adaptations qui peuvent être apportées au droit du travail, dans le respect du salarié. Le préalable devrait être que tout travail doit permettre à celui qui l'exerce de vivre dignement. Vaste débat...

M. Philippe Mouiller . - Je félicite l'auteur et la rapporteure de la proposition de loi. Ce débat d'actualité est passionnant, et s'inscrit dans la lignée du rapport présenté par nos trois collègues la semaine dernière.

Je veux vous faire part d'un témoignage : mon fils, qui est étudiant à Nantes, fait aussi des livraisons. Il trouve le système extraordinaire, car il travaille quand il veut, quand il peut. Tout est automatisé, et ce qu'il gagne est versé directement sur son compte en banque. Il n'a pas de papiers à remplir, il est satisfait de la rémunération. La sécurité et l'accompagnement, dont nous venons de parler, ne sont pas des problèmes pour lui ; il ne se soucie que d'obtenir un revenu. Nous sommes dans cette logique de mission à la tâche, pour récupérer rapidement une rémunération.

La proposition de loi est intéressante. Mais il faut avoir une vision globale, car le débat est à la fois économique et social. Les propositions vont dans le bon sens - apporter un statut à ces travailleurs -, mais le modèle économique des plateformes est extrêmement fragile et mondialisé. Quelles particularités « à la française » pourrions-nous apporter pour introduire des éléments de protection sans pour autant casser ce modèle ?

Durant la crise, nous avons été heureux de trouver les plateformes pour nous faire livrer ! Dans ma commune, la livraison des repas était pratiquement vue comme un service public...

Je suis très heureux que nous puissions avoir cette discussion en séance. Il faudrait élargir le débat, et impliquer nos collègues de la commission des affaires économiques. Merci pour cette initiative très intéressante.

M. Pascal Savoldelli . - En écoutant vos critiques constructives, je me disais que cette proposition de loi mérite vraiment une abstention, pour qu'un débat puisse avoir lieu en séance. Car pour l'instant il n'y a rien ! Au moment où les institutions sont bousculées, il est bon que le Sénat s'inscrive dans la contemporanéité de ces mutations modernes. Car on ne voit pas venir d'initiatives de l'Assemblée nationale.

Ce n'est pas la quantité de travailleurs concernés qui peut justifier l'appréciation que l'on porte sur la proposition de loi. Il y a 200 000 médecins en France, et personne ne se permettrait de dire qu'ils ne représentent que tel pourcentage de la population active. La société est violente et secouée, il faut prêter attention à tous.

On nous dit qu'il faut une proposition de loi globale, qui traite de tous les aspects. Mais il faut légiférer sur cette question, car aujourd'hui il y a un vide. Nous avons travaillé deux années sur ce sujet, pour lequel nous nous sommes passionnés, en allant largement sur le terrain. J'ai rencontré des livreurs à vélo qui défendent de véritables projets de société : ils répondent aux enjeux climatiques en exerçant cette activité ; d'autres ont un salaire horaire supérieur au Smic. Mais le modèle est hybride et nous devons en débattre. Quelles qualifications ont ces travailleurs ? Nous devons faire preuve d'anticipation. Regardez les dix premières offres sur le site de Pôle emploi : elles concernent des métiers assez peu qualifiés, pour lesquels la demande n'est pas satisfaite. Sans proposition de loi - peut-être pas la nôtre, mais nous devons accélérer nos travaux -, des centaines de milliers, voire un million ou un million et demi de travailleurs basculeront vers ce type de travail proposé via des plateformes numériques.

Mme Cathy Apourceau-Poly , rapporteure . - Je partage évidemment les propos de Pascal Savoldelli. Je plaide aussi pour une abstention, afin que nous puissions avoir ce débat.

Cette proposition de loi n'est qu'un texte d'appel. Aucune disposition ne prévoit de salarier les travailleurs qui ne souhaitent pas l'être. Les plateformes finiront par détruire le lien social, et leurs travailleurs seront les nouveaux canuts : ce n'est pas moi qui le dis, ces propos ont été tenus par le président de ma région, Xavier Bertrand ! Pour l'instant, ces plateformes contournent les règles fiscales et sociales.

M. Alain Milon , président . - Je demande à M. Savoldelli de bien vouloir nous quitter afin que nous puissions procéder au vote. (M. Pascal Savoldelli quitte la salle.)

Mes chers collègues, je vous rappelle que si elle est adoptée, la proposition de loi deviendra le texte de la commission ; si tel n'est pas le cas, elle sera tout de même examinée en séance publique, mais en tant que proposition de loi du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

EXAMEN DES ARTICLES

Les articles 1 er , 2, 3 et 4 ne sont pas adoptés.

En conséquence, la proposition de loi n'est pas adoptée.

Conformément au premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion en séance publique portera sur le texte initial de la proposition de loi déposée sur le Bureau du Sénat.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES ET DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

___________

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

• Dominique Méda, professeure de sociologie, directrice de l'Institut de recherche interdisciplinaire en sciences sociales (Irisso)

• Sarah Abdelnour, maîtresse de conférences en sociologie au sein de l'Irisso à l'université Paris Dauphine

• Syndicat CGT des coursiers à vélo de la Gironde

Arthur Hay , secrétaire général

• Collectif des livreurs autonomes de Paris (CLAP)

Jean-Daniel Zamor , président et cofondateur

Edouard Bernasse , secrétaire général et cofondateur

Jérôme Pimot , porte-parole et cofondateur

• Fédération nationale des autoentrepreneurs et microentrepreneurs (FNAE)

Grégoire Leclercq , président

• Direction générale du travail (DGT)

David Errard , chef du bureau des relations individuelles du travail

• Confédération générale du travail (CGT)

Fabrice Angei , membre du bureau confédéral

Hélène Viart , conseillère confédérale

Ludovic Rioux , membre du collectif livreurs à vélo

• Confédération Force ouvrière (FO)

Béatrice Clicq , secrétaire confédérale en charge de l'égalité et du développement durable

• Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC)

Jean-Marc Cicuto , membre du Conseil confédéral en charge des questions liées au numérique

Nassim Chibani , conseiller technique

• Solidaires (SUD)

Laurent Degousée , co-délégué de la fédération SUD Commerce

CONTRIBUTIONS ÉCRITES

• Mouvement des entreprises de France (MEDEF)

• Confédération des petites et moyennes entreprises ( CPME)

• Union des entreprises de proximité (U2P)

• Société Uber


* 1 Loi n° 50-205 du 11 février 1950 relative aux conventions collectives et aux procédures de règlement des conflits collectifs de travail.

* 2 Art. L. 3242-1 du code du travail.

* 3 Art. L 1251-32.

* 4 Art. L. 3123-27.

* 5 Art. L. 3132-27

* 6 Art. L. 3121-18.

* 7 Art. L. 3121-20.

* 8 Alinéa 6.

* 9 Alinéa 7.

* 10 Alinéa 8.

* 11 Loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016, art. 59.

* 12 Cass. soc. 13 nov. 1996, 94-13.187 (« Société Générale ») : « le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ».

* 13 L'entreprise Take Eat Easy a déposé son bilan en juillet 2016.

* 14 25 % de ces chauffeurs opèrent via une société de transport avec laquelle ils sont liés soit par un contrat de travail soit par un contrat de service.

* 15 Uber a lancé son activité de VTC en France en décembre 2011. Deliveroo a été fondée en 2013.

* 16 Cf . https://www.marianne.net/economie/coronavirus-comment-la-grande-distribution-recrute-des-auto-entrepreneurs

* 17 « Quelles résistances collectives face au capitalisme de plateforme ? », in Les Nouveaux Travailleurs des applis , sous la direction de S. Abdelnour et D. Méda, Puf, 2019.

* 18 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

* 19 Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités.

* 20 Loi n° 2015-1785 du 2 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 21 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

* 22 Cette partie contient notamment des dispositions relatives aux journalistes ou aux voyageurs, représentants et placiers (VRP).

* 23 Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités.

* 24 Art. L. 7342-6-1 du code du travail.

* 25 Art. L. 7342-9 du code du travail.

* 26 Conseil constitutionnel, décision n° 2019-794 DC du 20 décembre 2019.

* 27 L'article L. 3121-18 du code du travail fixe à 10 heures la durée quotidienne maximale de travail effectif par salarié.

* 28 La durée maximale hebdomadaire de travail est de 48 heures (art. L. 3121-20 du code du travail).

* 29 La plupart des algorithmes ne sont pas numériques : ainsi, une recette de cuisine peut être considérée comme un algorithme...

* 30 Loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique.

* 31 Article L. 311-3-1 du code des relations entre le public et l'administration.

* 32 Article L. 312-1-3 du code des relations entre le public et l'administration.

* 33 Article L. 111-7 du code de la consommation.

* 34 « Travailleurs des plateformes : liberté oui, protection aussi », avril 2019.

* 35 L'assurance volontaire ne permet pas de bénéficier d'indemnités journalières en cas d'arrêt de travail consécutif à un accident du travail mais peut percevoir un capital ou une rente en cas d'incapacité permanente.

* 36 L'assurance volontaire de la branche AT-MP couvre déjà les maladies professionnelles, tout comme les accidents de trajet.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page