CHAPITRE V

DOTATIONS ET OBJECTIFS DE DÉPENSES DES BRANCHES
ET DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT
DES RÉGIMES OBLIGATOIRES

Article 43 A (nouveau)
Transmissibilité des informations relatives au renouvellement
des titres de séjour entre organismes de sécurité sociale

Cet article, inséré à l'Assemblée nationale, tend à assurer la transmissibilité entre organismes de sécurité sociale des informations collectées par eux sur le renouvellement des titres de séjour de leurs assurés étrangers.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - L'affirmation du principe de transmissibilité au niveau de la loi

Aux termes de l'article L. 114-10-2 du code de la sécurité sociale, les organismes de sécurité sociale sont tenus de vérifier lors de l'affiliation et périodiquement que les assurés étrangers satisfont aux conditions de régularité de leur situation en France . Il est également précisé que les organismes peuvent avoir accès aux fichiers des services de l'État pour obtenir les informations administratives nécessaires à cette vérification.

En complément de ces dispositions, le présent article, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative de Carole Grandjean, insérerait un nouvel alinéa au sein du même article L. 114-10-2 afin de préciser que les informations collectées au titre de la vérification de la régularité du séjour des assurés par les organismes de sécurité sociale auprès des fichiers des services de l'État sont transmissibles entre eux.

II - L'approbation de ce dispositif par la commission

La commission approuve les dispositions du présent article, la bonne circulation des informations constituant, en effet, l'un des moyens de lutter plus efficacement contre les fraudes aux prestations sociales.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification .

Article 43 B (nouveau)
Inclusion dans les indus des prestations versées à des personnes
qui ne peuvent s'immatriculer définitivement à la sécurité sociale

Cet article, inséré à l'Assemblée nationale, précise les conséquences d'une absence d'immatriculation définitive à la sécurité sociale par un assuré étranger, notamment en considérant automatiquement comme indus toutes les prestations versées à l'intéressé.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - La transformation d'un numéro d'immatriculation d'attente (NIA) en numéro définitif (NIR) et les conséquences d'une impossibilité de procéder à l'immatriculation définitive

Le présent article, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative de Carole Grandjean, propose de compléter le chapitre du code de la sécurité sociale consacré à la lutte contre la fraude par un article L. 114-12-3-1 consacré à l'immatriculation des personnes étrangères.

Ce nouvel article prévoirait expressément qu'une personne étrangère souhaitant s'inscrire à la sécurité sociale se voit attribuer un numéro d'attente (NIA) et renvoie, à ce titre, aux dispositions en vigueur en application du dernier alinéa de l'article L. 114-12-1.

Il détaille également les conséquences de l'impossibilité par une personne disposant d'un NIA de s'immatriculer définitivement à la sécurité sociale faute de pouvoir fournir les éléments d'état civil permettant de certifier son identité ou lorsque l'examen de ces pièces révèle une fraude à l'identité. Dans ce cas, les organismes concernés doivent :

- d'une part, geler le versement de toute prestation , ce qui correspond à la pratique actuelle ;

- d'autre part, classer parmi les indus toute somme qui aurait été versée pendant la période où l'intéressé disposait d'un NIA .

Toutefois un décret en Conseil d'État fixerait les modalités d'application de ce dispositif, notamment les cas dans lesquels il pourrait être dérogé au gel des prestations et au classement des prestations versées en indus .

II - L'approbation de ce dispositif par la commission

Le rapporteur général a déjà eu l'occasion d'examiner le processus d'immatriculation des assurés étrangers dans le cadre de ses récents travaux sur la fraude à l'immatriculation 229 ( * ) . Il avait alors à la fois souligné le progrès que représente le NIA en termes de maîtrise des risques et regretté la lenteur de sa mise en place dans certains organismes de sécurité sociale.

Dans ce cadre, il approuve l'équilibre dégagé par le présent article , qui précise utilement les conséquences d'une impossibilité d'obtenir un NIR, notamment dans le cas d'une fraude à l'identité. La sage atténuation de ces dispositions pour les cas de force majeure, notamment lorsque la personne est dans l'impossibilité objective de compléter son dossier avec les pièces requises (archives détruites, pays en guerre, etc.) rend ce dispositif équilibré.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification .

Article 43 C (nouveau)
Augmentation de la limite applicable aux pénalités financières
en cas de fraude aux prestations familiales ou vieillesse

Cet article, inséré à l'Assemblée nationale, élève le plafond des sanctions financières que peut prononcer un directeur d'organisme de sécurité sociale en cas de fraude aux prestations familiales ou prestations vieillesse.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Par un amendement déposé par M. Cyrille Isaac-Sibille et adopté en séance publique, l'Assemblée nationale a souhaité durcir l'arsenal des sanctions financières en cas de fraude aux prestations familiales ou aux prestations d'assurance vieillesse .

Ainsi, le du nouvel article 43 C élève à quatre fois le plafond mensuel de la sécurité sociale (PMSS) - au lieu de deux fois dans le droit actuel - la limite du montant de la pénalité prononcée par le directeur de l'organisme concerné.

Par ailleurs, le établit qu'en cas de fraude intentionnelle, cette limite portée à huit fois le PMSS, et à seize fois le PMSS en cas de fraude commise en bande organisée.

Votre commission fait sienne l'ambition exprimée par cet article additionnel de concourir plus efficacement à la lutte contre la fraude aux prestations sociales. Comme elle a eu l'occasion de le rappeler au cours de l'audition du premier président de la Cour des comptes lors de la présentation d'un rapport dédié au sujet 230 ( * ) , elle n'est pourtant pas convaincue que le durcissement des sanctions (financières, administratives ou pénales) constitue le bon outil pour y parvenir.

Concernant cet article en particulier, son opportunité paraît d'autant plus discutable qu'il ne vise que deux types de prestations (et donc deux types de fraudes correspondantes) : les fraudes aux prestations familiales (au sein desquelles figurent le RSA, la prime d'activité et les aides au logement) et les fraudes à l'assurance vieillesse (essentiellement le minimum vieillesse). Votre rapporteur général y voit trois inconvénients majeurs :

- il s'agit des deux secteurs où la dynamique récente de lutte contre la fraude engagée sous l'égide des caisses nationales (CNAF et CNAV) affiche les résultats les plus probants, démontrant ainsi l'inutilité d'une mesure de durcissement des sanctions ;

- en conséquence, le dispositif néglige le pan le plus important et le plus stratégique de la lutte contre la fraude aux prestations sociales, à savoir la fraude à l'assurance maladie ;

- enfin, en ne retenant que des prestations faisant l'objet de versements en espèces sous formes d'allocations ou de pensions, l'article perpétue l'image tronquée et inexacte d'une fraude aux prestations sociales essentiellement commise par les ayant-droits, alors qu'il est établi que les établissements de santé et les professionnels de santé y jouent largement leur part.

Pour autant, face à l'innocuité du dispositif, qui se limite à élever le plafond des sanctions financières laissées à la discrétion du directeur de caisse, votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification .

Article additionnel après l'article 43 C
Prescription sur cinq ans des fraudes aux prestations de la sécurité sociale

Cet article a pour objet de préciser dans le code de la sécurité sociale que les fraudes aux prestations de sécurité sociale se prescrivent sur cinq ans.

I - Une récupération d'indus par les organismes de sécurité sociale sur deux ans, qu'ils soient frauduleux ou non

Dans l'enquête qu'elle a remise à la commission des affaires sociales en septembre dernier sur la fraude aux prestations sociale, travaux qui ont donné lieu à un rapport du rapporteur général 231 ( * ) , la Cour des comptes souligne notamment la nécessité de renforcer financièrement la sanction des fraudes.

La Cour met notamment en lumière que les indus frauduleux ne sont qu'en partie mis en recouvrement. Elle constate notamment que les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) et les caisses d'allocations familiales (CAF), faute d'adaptation de leur système d'information, ne constatent des indus liés à des fraudes qu'avec une profondeur de deux ans , comme pour les indus non frauduleux, juridiquement prescrits au bout de deux ans.

II - La proposition de votre commission : l'affirmation claire d'une prescription sur cinq ans des fraudes aux prestations

Le présent article propose de compléter le deuxième alinéa de l'article L. 553-1 du code de la sécurité sociale, aux termes duquel une prescription de deux ans est applicable « à l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement des prestations indûment payées, sauf en cas de manoeuvre frauduleuse ou de fausse déclaration », en précisant que, dans ce dernier cas, la prescription est de cinq ans .

De ce fait, l'ensemble des organismes de sécurité sociale seront tenus d'adapter leurs systèmes d'information pour récupérer les indus frauduleux sur ce délai clairement affiché dans le code de la sécurité sociale.

La commission vous demande d'adopter un article additionnel ainsi rédigé (amendement n° 192).

Article 43 D (nouveau)
Communication aux organismes de sécurité sociale de tout changement
de situation familiale ou de résidence afin de lutter contre la fraude

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, étend la possibilité ouverte aux organismes de sécurité sociale de demander aux bénéficiaires de prestations sociales la production de toute pièce justificative sur leur changement de situation familiale ou de résidence.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Dans la continuité des articles précédents renforçant le volet du PLFSS consacré à la lutte contre la fraude aux prestations sociales, un amendement, déposé par Mme Carole Grandjean et plusieurs de ses collègues et adopté par l'Assemblée nationale, précise les modalités dans lesquelles le bénéficiaire d'une prestation doit communiquer à l'organisme de sécurité sociale, sur la demande de ce dernier, toutes les pièces justificatives de vérification de son identité.

L'amendement prévoit que la production de pièces justificatives ainsi que le contrôle exercé directement par les organismes de sécurité sociale pourront désormais concerner « tout changement dans la situation familiale ou dans le lieu de résidence affectant le rattachement au régime dont [le bénéficiaire] dépend ».

Cette disposition fait suite à l'un des constats portés par le rapport rendu par Mmes Carole Grandjean et Nathalie Goulet sur la lutte contre la fraude aux prestations sociales, selon lequel plusieurs types de fraudes restent peu maîtrisées en raison d'un contrôle insuffisamment ciblé des organismes de sécurité sociale . C'est le cas notamment de :

- la fraude à la composition familiale , qui « consiste à faire une fausse déclaration concernant le nombre de personnes réellement à la charge du foyer dans le but de diminuer le poids des prélèvements et/ou d'augmenter les prestations reçues » ;

- la fraude à l'isolement , qui consiste à « dissimuler son statut de vie maritale ou de vie en couple dans le but de toucher des prestations particulières liées à une situation de personne isolée » ;

- la fraude à la résidence , qui consiste à prétendre résider en France afin « de bénéficier des prestations sous condition de résidence, notamment l'assurance maladie, le minimum vieillesse, des prestations familiales et des aides au logement ».

À l'occasion de précédents débats relatifs à la lutte contre la fraude aux prestations sociales, votre commission avait émis quelques doutes sur l'opportunité de porter de telles précisions dans la loi, alors que l'article L. 161-1-4 du code de la sécurité sociale (CSS) laisse déjà aux organismes de sécurité sociale une assez grande marge de manoeuvre en prévoyant qu'ils « peuvent se dispenser de solliciter la production de pièces justificatives par le demandeur ou le bénéficiaire d'une prestation lorsqu'ils peuvent obtenir directement les informations ou pièces justificatives nécessaires auprès des personnes morales de droit public ou des personnes morales de droit privé gérant un service public ».

De toute évidence, l'efficacité de la lutte contre la fraude aux prestations sociales dépend moins d'un étayement des normes législatives encadrant la compétence des organismes de sécurité sociale que de leur capacité, propre à chacun d'eux sous l'égide de leur caisse nationale, à mettre en oeuvre des mesures effectives.

Pour autant, votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 43 E (nouveau)
Durée d'attribution de la carte Vitale

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, prévoit que la carte Vitale ne sera plus attribuée tout au long de la vie de son titulaire, mais seulement pendant la durée de ses droits.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - L'article 43 E propose une mesure de lutte contre la « fraude à la carte Vitale », dont ses auteurs soutiennent qu'elle est alimentée par un phénomène mal contrôlé de cartes Vitale surnuméraires

L'article L. 161-31 du code de la sécurité sociale (CSS) régit l' attribution de la carte Vitale à tout bénéficiaire de prestations d'assurance maladie et prévoit que cette dernière est « valable partout en France et tout au long de la vie de son titulaire, sous réserve que la personne bénéficie de prestations au titre d'un régime d'assurance maladie et des mises à jours concernant un changement de régime ou des conditions de prise en charge ».

Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale, sur proposition du rapporteur général de la commission des affaires sociales, vise à limiter la durée d'attribution de la carte, couvrant actuellement toute la vie du bénéficiaire, à la stricte durée de ses droits à bénéficier des prestations correspondantes .

La mesure, inspirée du rapport de Mme Carole Grandjean et de Mme Nathalie Goulet sur la lutte contre la fraude aux prestations sociales, entend endiguer le phénomène, très médiatisé, de « fraude à la carte Vitale ». Cette fraude particulière s'expliquerait par un autre phénomène, sur lequel de nombreux travaux se sont penchés sans jamais parvenir à l'élucider : la circulation d'un nombre de cartes Vitale plus élevé que celui de leurs bénéficiaires .

Les estimations sont en effet nombreuses et contradictoires. Un rapport conjoint de 2013 de l'inspection générale des finances (IGF) et de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) estimait que le nombre de bénéficiaires pris en charge par une caisse d'assurance maladie obligatoire, donc titulaires d'une carte Vitale, excédait de plus de 7 millions le nombre de personnes résidant en France 232 ( * ) . Le rapport de Mmes Grandjean et Goulet fait quant à lui état d'un nombre de cartes Vitale surnuméraires compris en 2019 entre 2 millions et 5,3 millions . La direction de la sécurité sociale estime pour sa part ce chiffre en juin 2020 à environ 150 000 .

Quel qu'en soit le niveau, cet écart pourrait, selon certains auteurs, en partie s'expliquer par la délivrance de la carte Vitale « tout au long de la vie » de son bénéficiaire, les organismes de sécurité sociale s'exposant ainsi au risque de maintenir actives des cartes Vitale dont le titulaire pourrait être décédé sans que ce décès, pour diverses raisons, n'ait été déclaré en France.

D'après le récent rapport de la Cour des comptes sur la lutte contre les fraudes aux prestations sociales, les détournements d'une carte Vitale encore en activité par un bénéficiaire n'en étant pas titulaire peut avoir quatre mobiles :

- bénéficier d'actes, de prestations ou de biens de santé malgré l'absence d'immatriculation à la sécurité sociale ;

- bénéficier d'une prise en charge plus élevée (par l'exonération du ticket modérateur, des participations forfaitaires et des franchises) ;

- bénéficier plusieurs fois, sous de multiples identités, de mêmes médicaments ou dispositifs médicaux, afin de les revendre ;

- pour le médecin ou l'auxiliaire médical fraudeur, facturer des actes au titre de l'ensemble des membres de la famille (parent et enfants) figurant sur la carte Vitale, alors qu'ils n'ont concerné que l'un d'entre eux.

II - Votre commission , bien que favorable au dispositif, souhaite lui rendre sa juste mesure au regard de la fraude qu'il peut effectivement endiguer

Votre commission a déjà eu l'occasion 233 ( * ) de rappeler que toute action ambitionnant de lutter contre la fraude aux prestations d'assurance maladie, avec la sécurisation de l'attribution de la carte Vitale pour seul vecteur , ne visait potentiellement qu'un seul type de fraude, strictement imputable aux bénéficiaires : la fraude aux prestations d'assurance maladie en obtention des droits , autrement dit par l'utilisation d'un titre (comme la carte Vitale) permettant la délivrance ou le remboursement de prestations d'assurance maladie sans en être bénéficiaire.

Or, d'après des données fournies par la CNAM, cette fraude ne représente qu'un montant très faiblement significatif de l'ensemble des fraudes aux prestations d'assurance maladie : moins de 11 millions d'euros en 2018 et moins de 5 millions d'euros en 2019 .

Votre commission s'était toutefois montrée sensible à l'argument selon lequel, la fraude globale à l'assurance maladie étant largement sous-évaluée par rapport à son montant réel, il était plus que probable que la fraude particulière à la carte Vitale soit concernée par la même minoration et que toute mesure visant à en sécuriser la stricte attribution individuelle était bienvenue .

Dans l'attente du déploiement généralisé d'une carte Vitale dématérialisée avec identification biométrique, pour le moment seulement expérimentée par certains départements, il lui semblait judicieux que la délivrance de la carte Vitale physique fasse l'objet d'un encadrement mieux défini.

Elle avait en conséquence donné un avis favorable à un amendement de notre collègue Nathalie Goulet, dont la teneur était identique à celle du présent article 43 E. Le texte sur lequel cet amendement portait n'ayant jamais été transmis à l'Assemblée nationale, le même amendement a été déposé et adopté lors de l'examen au Sénat en première lecture du projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de l'action publique (ASAP), le Gouvernement s'y étant montré défavorable à ces deux reprises.

Aussi, c'est avec surprise que votre commission accueille l'adoption par l'Assemblée nationale de cet article additionnel, avec cette fois le soutien du Gouvernement.

En cohérence avec sa position initiale, votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification .

Article 43 F (nouveau)
Condition de l'inscription à son ordre d'un professionnel de santé
afin de pouvoir bénéficier de remboursements de l'assurance maladie

Cet article, introduit à l'Assemblée nationale, oblige les caisses primaires d'assurance maladie à vérifier que les professionnels de santé, pour être remboursés, sont inscrits au tableau de l'ordre dont ils dépendent.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé : conditionner le remboursement d'un professionnel de santé à son inscription à l'ordre

Cet article, introduit à l'Assemblée nationale par le vote de l'amendement n° 939 du rapporteur général met en application la recommandation n° 39 de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales publié en septembre dernier 234 ( * ) : il fait obligation aux caisses primaires d'assurance maladie de vérifier, avant remboursement, que le professionnel qui le sollicite est bien inscrit au tableau de l'ordre dont il dépend .

II - L'avis de la commission : adoption sans modification

L'intérêt d'une telle disposition est en première analyse incertain, car l'exercice même des professions de santé visées exige l'inscription au tableau de l'ordre dont elles dépendent respectivement, qu'il s'agisse des médecins, comme en dispose l'article L. 4161-1 du code de la santé publique, ou des infirmiers - aux termes de l'article L. 4311-15 du même code.

La commission d'enquête de l'Assemblée nationale s'est toutefois inquiétée de la faible part des professionnels de santé, et en particulier des infirmiers, inscrits au tableau de leur ordre professionnel. Lors de son audition, M. Patrick Chamboredon, président du conseil national de l'Ordre des infirmiers, a en effet déploré que seuls 10 % des 120 000 infirmiers libéraux le soient « alors même que, conventionnellement, on est tenu d'être inscrit à l'Ordre pour pouvoir exercer. On ignore donc quel diplôme ces gens sont titulaires, et ils perçoivent de l'argent public sans répondre aux exigences de l'exercice de la profession d'infirmiers en France. La loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, dite OTSS, en permettant l'exercice mixte, salarié et libéral, amplifiera le problème, la moitié seulement des quelque 700 000 infirmiers hospitaliers étant inscrits au tableau de l'Ordre ».

Au 21 octobre 2020, le site de l'ordre des infirmiers affiche en effet un chiffre de 372 928  infirmiers inscrits à l'ordre 235 ( * ) , pour une population professionnelle d'environ 700 000 personnes 236 ( * ) .

Le cas des infirmiers est plus sensible, car son ordre est plus récent. Créé en 2006 237 ( * ) , il a modifié les conditions d'exercice de la profession en imposant l'enregistrement du professionnel au fichier Adeli de l'assurance maladie et l'inscription au tableau, prononcée par le conseil départemental de l'ordre. Mais la procédure n'a été précisée par décret qu'en 2018 238 ( * ) , notamment pour permettre aux infirmiers en exercice de régulariser leur situation. Ce dernier texte précise que l'employeur doit déposer une liste des infirmiers qu'il emploie sur le portail sécurisé du conseil national de l'ordre et en informe ses employés. Le conseil départemental de l'ordre informe ensuite individuellement les professionnels concernés de leur obligation d'inscription, qui doit relever d'une démarche volontaire engagée dans les quatre mois. Passé ce délai, l'infirmier non inscrit exerce sa profession illégalement.

Priver de remboursement les professionnels de santé non inscrits au tableau de leur ordre peut sembler une incitation opportune à la régularisation de leur situation. La rédaction retenue, qui ne vise en effet que les « professionnels de santé sollicitant un remboursement » protège a priori les patients du risque que le refus de remboursement ne se reporte sur eux. La commission ne voit donc pas de raison suffisante de s'opposer à l'introduction d'une telle disposition dans le code de la sécurité sociale.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 43 F
Application de dispositifs anti-fraude

Cet article a pour objet de rendre effective l'application de deux dispositifs anti-fraude dont les décrets d'application n'ont jamais été publiés par les gouvernements successifs.

I - Des mesures votées par le Parlement mais jamais appliquées par les gouvernements successifs

Dans l'enquête qu'elle a remise à la commission des affaires sociales en septembre dernier sur la fraude aux prestations sociale, travaux qui ont donné lieu à un rapport du rapporteur général 239 ( * ) , la Cour des comptes regrette la non-application, faute de décret, de plusieurs dispositifs de lutte contre la fraude.

A. La possibilité d'estimer des indus frauduleux par échantillonnage

Un tel défaut d'application de la loi concerne les dispositions de l'article L. 162-1-14-2 du code de la sécurité sociale permettant à l'assurance maladie d'extrapoler les indus d'un professionnel de santé à partir d'un échantillon représentatif.

Faute de décret, la Cour des comptes souligne que lorsque l'assurance maladie contrôle des échantillons de factures, elle ne peut, sous réserve de certaines jurisprudences qui lui sont favorables, constater des indus qu'au titre de ces seules factures, alors même qu'elles ne représentent souvent qu'une part limitée des facturations irrégulières « en série » (comme la surcotation systématique de certains actes).

La Cour considère à juste titre qu'afin que l'assurance maladie rentre dans ses fonds, « il importe que les dispositions législatives qui prévoient depuis 2010 l'extrapolation des indus détectés sur des échantillons représentatifs de facturations au titre de certains types de frais (pharmacie, fourniture de dispositifs médicaux, transport, biologie) fassent enfin l'objet de mesures réglementaires d'application ».

B. Le déconventionnement d'urgence de professionnels de santé en cas de fraude grave

Dans la même enquête, la Cour des comptes constate également que les conventions de l'assurance maladie avec les professions de santé ne prévoient rarement les procédures à même de faciliter des déconventionnements rendus indispensables par la persistance de pratiques irrégulières de facturation. Elle plaide fortement pour que les dispositions législatives 240 ( * ) qui donnent aux CPAM, depuis 2007, la faculté de déconventionner d'urgence des professionnels de santé, doivent enfin, elles aussi, recevoir des mesures réglementaires d'application.

II - La proposition de votre commission : l'instauration d'une date d'application d'office

Le présent article propose de préciser dans la présente LFSS que les dispositifs anti-fraude énumérés précédemment et votés depuis plus de dix ans par le Parlement s'appliquent :

- dès la publication des décrets d'application qu'ils prévoient ;

- mais au plus tard le 1 er octobre 2021.

Un tel dispositif laisse donc au pouvoir réglementaire un ultime délai de neuf mois afin de mettre en place ce système et de mettre enfin un terme à la non-application de la loi.

La commission vous demande d'adopter un article additionnel ainsi rédigé (amendement n° 193).

Article additionnel après l'article 43 F
Dérogation à l'obligation de paiement sous sept jours
de l'assurance maladie en cas de fraude

Cet article a pour objet de prévoir une exception à l'obligation de paiement sous sept jours des professionnels de santé par l'assurance maladie lorsque le professionnel a été sanctionné définitivement pour fraude.

I - Un délai très court peu compatible les délais de contrôle des CPAM

Dans l'enquête qu'elle a remise à la commission des affaires sociales en septembre dernier sur la fraude aux prestations sociale, travaux qui ont donné lieu à un rapport du rapporteur général 241 ( * ) , la Cour des comptes préconise d'autoriser les caisses d'assurance maladie à déroger à la garantie de paiement sous sept jours pour les professionnels sanctionnés pour fraude.

Lors de son audition par la commission 242 ( * ) , le 8 septembre 2020, le Premier président Pierre Moscovici a ainsi souligné « qu'il est fréquent que les professionnels en question persistent dans leurs comportements » et qu'il serait dès lors utile que les CPAM « puissent conduire des contrôles a priori avant de régler les professionnels concernés, quitte à dépasser le délai de sept jours ouvrés. Il faudrait mettre en place un cadre juridique pour cela . »

II - La proposition de votre commission : une possibilité de dérogation donnée aux CPAM lorsque le professionnel a été sanctionné pour fraude moins de deux ans auparavant

Le présent article propose de permettre à l'assurance maladie de déroger à cette obligation de remboursement sous sept jours dès lors que le professionnel de santé a été sanctionné définitivement pour fraude moins de deux ans auparavant.

Ce délai pourrait alors être porté à trente jours à la seule fin de permettre de contrôler la régularité du paiement.

La commission vous demande d'adopter un article additionnel ainsi rédigé (amendement n° 194).

Article additionnel après l'article 43 F
Déconventionnement d'office des professionnels de santé
condamnés pour fraude à plusieurs reprises

Cet article a pour objet de prévoir un déconventionnement d'office des professionnels de santé condamnés pour fraude à plusieurs reprises.

Dans l'enquête qu'elle a remise à la commission des affaires sociales en septembre dernier sur la fraude aux prestations sociale, travaux qui ont donné lieu à un rapport du rapporteur général 243 ( * ) , la Cour des comptes a formulé plusieurs recommandations pour tarir les fraudes.

Parmi ces recommandations, figure le déconventionnement d'office pour une durée incompressible d'un professionnel de santé lorsqu'il a été sanctionné à deux reprises pour fraude par la voie pénale ou administrative et a épuisé toute voie de recours. La Cour a souligné que « les surfacturations répétées à l'assurance maladie doivent être effectivement interrompues » et qu'un tel déconventionnement était un moyen efficace d'y parvenir.

Le présent article propose donc de mettre en place un tel système de déconventionnement d'office dès lors qu'un professionnel a été définitivement sanctionné ou condamné pour fraude à deux reprises dans une période de moins cinq ans.

Les modalités d'application de ce dispositif, notamment la durée du déconventionnement, seraient déterminées par un décret en Conseil d'État.

La commission vous demande d'adopter un article additionnel ainsi rédigé (amendement n° 195).

Article 43
Dotation de l'assurance maladie au FMESPP (FMIS), à l'ONIAM,
de la CNSA aux ARS

Cet article fixe la dotation annuelle, pour 2021, de la sécurité sociale au FMIS et à l'Oniam, ainsi que celle de la branche autonomie au même FMIS et aux ARS.

La commission vous demande de modifier cet article.

I - Le dispositif proposé

A. Contributions de la sécurité sociale au FMIS

Le I. dispose que le montant de la participation des régimes obligatoires d'assurance maladie au financement du fonds pour la modernisation et l'investissement en santé (FMIS) 244 ( * ) , est fixé pour 2021 à 1 032 millions d'euros.

Le II. fixe le montant de la contribution de la branche autonomie au financement du FMIS pour 2021 à 100 millions d'euros.

Aux termes de la LFSS pour 2020, la dotation de l'assurance maladie au FMESPP s'élevait à 649 millions d'euros. L'article 9 du présent PLFSS la réduit à 449 millions d'euros au titre de cette année.

Ces contributions - et cette hausse de 130 % de la participation de l'assurance maladie - doivent, selon l'exposé des motifs, permettre au FMIS de mettre en oeuvre le plan d'investissement de 6 milliards d'euros pour les établissements de santé, le déploiement du numérique en santé et le secteur médico-social, annoncé lors du Ségur de la santé .

B. Contribution de la branche autonomie aux ARS

Le III. fixe le montant de la contribution de la branche autonomie au financement des ARS au titre de leurs actions concernant les prises en charge et accompagnements des personnes âgées ou handicapées. Il est fixé pour 2021 à 141,44 millions d'euros, soit à 2 millions près le montant voté pour 2020.

Cette contribution au fonds d'intervention régional se décompose ainsi :

- 45 millions d'euros au titre des groupes d'entraide mutuelle (GEM), contre 42,8 millions d'euros en 2020 245 ( * ) . Introduits en 2005, les GEM sont organisés sous forme associative et offrent des espaces de soutien mutuel à des personnes ayant des troubles de santé ou des situations de handicap similaires les rendant vulnérables. En 2018, plus de 74 000 personnes ont fréquenté les 505 GEM existants 246 ( * ) ;

- 96 millions d'euros pour le développement de méthodes d'action pour l'intégration des services d'aide et de soin dans le champ de l'autonomie (MAIA), soit le montant qui leur sont consacré chaque année depuis au moins trois ans. En 2018, 352 dispositifs MAIA étaient financés par la CNSA 247 ( * ) .

C. Participation des régimes obligatoires d'assurance maladie au financement de l'Oniam

Le IV. dispose que le montant de la dotation des régimes obligatoires d'assurance maladie pour le financement de l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam) est fixé pour 2021 à 130 millions d'euros.

L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux,
des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam)

L'Oniam est un établissement public à caractère administratif de l'État créé par la loi du 4 mars 2002 248 ( * ) et placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé. Il est chargé d'organiser des dispositifs de règlement amiable, mais aussi à gérer les différents contentieux en matière d'indemnisation des victimes de dommages imputables à :

- des accidents médicaux, affections iatrogènes ou infections nosocomiales ;

- des accidents survenus dans le cadre de la recherche biomédicale ;

- des accidents dus à des dommages résultant de mesures sanitaires d'urgence ;

- des accidents dus à la prise de benfluorex (Mediator) ou de valproate de sodium (Dépakine) ;

- des contaminations d'origine sanguine par le VIH, le virus de l'hépatite C, celui de l'hépatite B, le virus T-lymphotropique humain ou encore des contaminations par la maladie de Creutzfeldt-Jakob par la voie de traitement par l'hormone de croissance extractive.

Seule l'indemnisation des accidents médicaux, des contaminations par le VIH, le VHC, le VHB et le HTLV sont financées par l'assurance maladie. Les autres produits de l'office sont constitués par la dotation sur budget de l'État pour les dépenses relevant de son périmètre et par les produits issus des ressources propres, évalués pour l'année 2020 à 35 millions d'euros.

En 2020, les charges d'indemnisation dont le financement est assuré par l'assurance maladie s'est élevé à 149 millions d'euros. La subvention de l'assurance maladie, fixée à 150 millions d'euros, les a donc couvertes.

Pour 2021, le montant des charges représentant les dépenses d'indemnisation dont le financement est assuré par la dotation de l'assurance maladie est estimé à 191 millions d'euros. Y contribuent la hausse de l'activité tant amiable (+ 7 % de 2015 à 2019) que contentieuse (+ 25 % de 2015 à 2018 et + 15 % en 2019), les mesures de revalorisation renchérissant le coût moyen d'un dossier amiable, le renchérissement des condamnations prononcées par les juges, ou encore celui des frais d'avocat.

L'annexe 8 justifie toutefois la fixation de la dotation pour 2021 à 130 millions d'euros par le ralentissement attendu en 2020 des dépenses d'indemnisation compte tenu de la crise sanitaire et son impact favorable sur la trésorerie escomptée en fin d'année. Elle fait encore valoir que le montant de la dotation allouée par l'assurance maladie a varié sensiblement d'une année sur l'autre, en fonction de l'importance du fonds de roulement et notamment des réserves de l'Oniam, comme l'indique le tableau ci-dessous.

Contributions (en M€)

2015

2016

2017

2018

2019

2020 (révisé)

2021

CNAM

83

88

107

125

155

150

130

Résultat cumulé

54

31

18

62

44

90

47

Source : Annexe 8 du PLFSS

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - L'avis de la commission : adoption de l'article purgé des contributions de la sécurité sociale aux investissements du plan de relance

La commission approuve les montants de participation de l'assurance maladie à l'Oniam et de la CNSA aux ARS.

En revanche, par cohérence avec les observations émises sur l'article 26 249 ( * ) , la commission ne saurait accepter que les mesures du plan de relance décidé par le Gouvernement au terme du Ségur de la santé soient financées par les moyens propres de l'assurance maladie. Il sera loisible au Gouvernement de proposer une dotation ajustée des différentes branches de la sécurité sociale hors plan de relance.

La commission vous demande par conséquent de supprimer, par l'amendement n° 196, les I et II de cet article, et d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 44
Objectifs de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès

Cet article fixe les objectifs de dépenses de la branche maladie à 218,4 milliards d'euros pour 2021 pour l'ensemble des régimes obligatoires de base et à 216,9 milliards d'euros pour le régime général. Ces montants ont été réévalués à l'Assemblée nationale à, respectivement, 219,1 et 217,6 milliards d'euros.

La commission vous demande de l'adopter sans modification.

I - Un périmètre impacté en 2021 par la création de la branche autonomie

Conformément à l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, cet article fixe l'objectif de dépense de la branche maladie pour 2021 à :

- 218,4 milliards d'euros pour les régimes obligatoires de base ;

- 216,9 milliards d'euros pour le régime général.

L'évolution par rapport à l'objectif pour 2020 rectifié par le PLFSS et la trajectoire du solde de la branche sont retracées dans le tableau suivant.

Objectifs de dépenses et solde de la branche maladie

en milliards d'euros

Rappel 2019

Objectif 2020 initial (LFSS 2020)

Objectif 2020 rectifié (PLFSS 2021)

Objectif 2021

Régimes obligatoires
de base

216,6

224,1

236,1

218,4

Régime général

218,1

222,6

234,6

216,9

Solde branche maladie

- 1,5

- 3,3

- 29,8

- 19,0

En 2020 , les effets de la crise sanitaire se traduisent par un « effet ciseau » avec une contraction des recettes (- 4,8 % par rapport à 2019 d'après les prévisions du PLFSS) due au recul de la masse salariale et une explosion des dépenses , sensiblement réajustées par le PLFSS 250 ( * ) et principalement portées par celles entrant dans le champ de l'Ondam 251 ( * ) .

Pour 2021 , la baisse apparente des dépenses de la branche par rapport aux objectifs votés en LFSS pour 2020 (de - 2,5 % pour les dépenses des régimes obligatoires de base et de - 2,6% pour celles du régime général) s'explique notamment par un changement de périmètre lié à la création de la nouvelle branche « autonomie » qui sera en charge des dépenses de prestations dont elle assurait auparavant le financement : l'article 50 du PLFSS fixe l'objectif de dépense de cette nouvelle branche pour 2021 à 31,2 milliards d'euros. D'après l'annexe B au PLFSS, l'impact sur la branche maladie s'établit à hauteur de - 25,9 milliards d'euros 252 ( * ) .

À périmètre constant (hors création de la branche autonomie), l'évolution des dépenses du régime général serait la suivante.

Évolution des dépenses de la branche maladie (régime général) à périmètre constant (hors création de la branche autonomie)

2019

2020

2021

Dépenses (en milliards d'euros)

216,6

234,6

242,8

Évolution (en %)

-

8,3

3,5

Source : Direction de la sécurité sociale

Un autre changement de périmètre (0,3 milliard d'euros) est lié au transfert à la branche maladie du financement de l'allocation supplémentaire d'invalidité 253 ( * ) , compensée par l'affectation d'une fraction de TVA.

Comme pour l'Ondam ( cf. article 45 suivant), les estimations du PLFSS se fondent par ailleurs sur une hypothèse d'un net ralentissement de l'impact de la crise sanitaire sur les dépenses de soins en 2021 par rapport à 2020, hypothèse qui apparaît aujourd'hui hautement incertaine.

L'objectif de dépenses de la branche maladie est à distinguer
de l'Ondam fixé à l'article 45
:

- les deux reposent sur des concepts de nature distincte : l'Ondam retient une approche économique, inter-régimes et inter-branches, alors que les dépenses des régimes relèvent d'une approche comptable ;

- leurs champs ne se recoupent pas intégralement : l'Ondam intègre les prestations de soins de la branche AT-MP (pour incapacité temporaire) mais ne prend pas en compte certaines prestations d'assurance maladie. C'est notamment le cas des prestations en espèces de maternité et paternité (indemnités journalières) ou des prestations invalidité-décès, ainsi que de certaines dépenses de prévention.

D'après le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2020, les prestations « hors Ondam » connaitraient une croissance dynamique en 2020 (+ 3,6 %), portées par des mesures des précédentes LFSS (harmonisation des modalités d'indemnisation du congé maternité pour les travailleuses indépendantes, montée en charge des dépenses du fonds addictions...) mais aussi par un relèvement de 25 % de la dotation CNSA afin de couvrir des coûts supplémentaires des Ehpad liés à la crise sanitaire. Ces prestations « hors Ondam » suivraient en revanche une décélération en 2021 (- 0,8 %).

II - Des objectifs de dépenses réévalués par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement rehaussant les objectifs de dépenses de la branche pour 2021, à hauteur de 680 millions d'euros , afin de prendre en compte l' impact de l'avancement au 1 er décembre 2020 de la deuxième tranche de revalorisation salariale prévue initialement en mars 2021 dans le cadre du Ségur de la santé.

Compte tenu de la réévaluation des objectifs pour 2020, intégrant un abondement exceptionnel de l'Ondam 2020 de 2,4 milliards d'euros lié à la crise sanitaire, l'évolution est retracée ci-après. A périmètre constant (hors création de la branche autonomie), l'évolution des dépenses du régime général serait ramenée à 2,8% en 2021.

Objectifs rectifié de dépenses de la branche maladie en 2021

en milliards d'euros

Objectif 2020 rectifié AN

Objectif 2021 rectifié AN

Régimes obligatoires de base

238,5

219,1

Régime général

237,0

217,6

III - La position de la commission : une adoption conforme

La crise sanitaire de la covid-19, par son ampleur exceptionnelle, a lourdement impacté le solde de la branche maladie par rapport aux projections initiales de la LFSS pour 2020 : alors que cette dernière anticipait un solde déficitaire en 2020 de - 3,3 milliards d'euros avant l'atteinte d'un solde excédentaire en 2023, le déficit de la branche s'établirait, après rectification des objectifs par l'Assemblée nationale 254 ( * ) , à - 32,2 milliards d'euros en 2020 et - 19,7 milliards d'euros en 2021 , portant respectivement 74 % et 78 % du déficit total du régime général.

L'annexe B au PLFSS actualisée après les débats à l'Assemblée nationale retrace les prévisions suivantes.

Évolution prévisionnelle des objectifs et du solde de la branche maladie (régime général)

en milliards d'euros

2018

2019

2020 p

2021 p

2022 p

2023 p

2024 p

Dépenses

211,5

216,6

237,0

217,6

219,5

224,4

229,2

Solde

- 0,7

- 1,5

- 32,2

- 19,7

- 18,2

- 17,6

- 17,4

Source : Annexe B au PLFSS adopté par l'Assemblée nationale et Direction de la sécurité sociale

Cette situation, qui s'appuie pour 2021 sur des hypothèses plutôt optimistes quant à l'impact de la crise sanitaire sur la trajectoire des dépenses, fait peser une inquiétude forte sur la soutenabilité de la branche maladie au moment même où l'on perçoit nettement les limites du sous-investissement chronique dans notre système de santé.

Au-delà des réformes structurelles quant à l'organisation et au financement du système de santé que cela appelle, la commission réaffirme dans ce projet de loi de financement sa position quant à la rebudgétisation du financement des agences sanitaires comme Santé publique France dont l'abondement en 2020 pour lutter face à l'épidémie pèse sur l'assurance maladie alors que ces missions relèvent du domaine régalien.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 45
Ondam et sous-Ondam

Cet article fixe initialement l'objectif national de dépenses d'assurance maladie à 224,6 milliards d'euros pour 2021, contre un montant rectifié de 215,7 milliards d'euros pour 2020, et précise sa déclinaison en sous-objectifs. La progression, évaluée à 3,5 % à périmètre constant, prend en compte des mesures exceptionnelles attachées à la crise sanitaire et au Ségur de la santé. Ces montants et taux ont été réévalués lors de l'examen du texte par l'Assemblée nationale.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - Un niveau d'Ondam inédit dans un contexte d'incertitudes fortes

Les dispositions de cet article font partie de celles devant obligatoirement figurer en loi de financement de la sécurité sociale, en application de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale :

« D. - Dans sa partie comprenant les dispositions relatives aux dépenses pour l'année à venir, la loi de financement de la sécurité sociale :

(...) 3° Fixe l'objectif national de dépenses d'assurance maladie de l'ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que ses sous-objectifs. »

Les étapes de construction de l'Ondam

La construction de cet objectif de dépenses pour l'année suivante comporte plusieurs étapes :

- l'estimation des dépenses pour l'année en cours ( n ) corrigé des changements de périmètre ;

- la projection « tendancielle » ou spontanée des dépenses pour l'année suivante ( n+1 ), hors mesure nouvelle, qui intègre la progression estimée des volumes, les provisions pour dépenses nouvelles (comme les revalorisations de tarifs ou mesures catégorielles) et les effets reports des mesures antérieures ;

- la définition des mesures de régulation (économies) et mesures nouvelles permettant de passer de l'évolution tendancielle à l'objectif proposé.

A. Un périmètre impacté par la création de la branche « autonomie »

• La mise en oeuvre, par le présent PLFSS, de la création de la branche « autonomie » par la loi du 7 août 2020 255 ( * ) se traduit par une évolution du périmètre des dépenses retracées dans l'Ondam .

Jusqu'alors, le financement des dépenses de soins des établissements et services médico-sociaux formant l'objectif global de dépenses (OGD), géré par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) procédait de plusieurs sources : d'une part, les dépenses inscrites au titre des deux sous-objectifs de l'Ondam consacrés au secteur médico-social (« contribution de l'assurance maladie aux dépenses des établissements et services pour personnes âgées » et « contribution de l'assurance maladie aux dépenses des établissements et services pour personnes handicapées ») ; d'autre part des prélèvements spécifiques sur les ressources propres de la CNSA.

Pour 2021, les deux sous-objectifs de l'Ondam consacrés au secteur médico-social regroupent l'ensemble des dépenses formées par l'OGD, soit un élargissement des dépenses retracées de 1 365 millions d'euros .

Cette évolution se traduit en outre par un changement d'intitulé des sous-objectifs : il ne s'agit plus d'une « contribution » de l'assurance maladie mais des « dépenses » relatives aux établissements et services pour personnes âgées d'une part et pour personnes handicapées d'autre part.

Comme l'a reconnu le ministre des solidarités et de la santé lors de son audition par la commission, cette présentation ne pourrait être que provisoire : l'annexe 7 la présente comme susceptible d'évoluer en PLFSS pour 2022 « pour tirer toutes les conséquences de la création de cette nouvelle branche de la sécurité sociale et des mesures qui pourraient être proposées dans un futur projet de loi relatif au grand âge et à l'autonomie » , ce qui montre, comme le souligne le rapporteur pour cette nouvelle branche, le caractère encore largement inachevé de cette réforme à ce stade 256 ( * ) .

• D'autres mesures de transferts, retracées dans le tableau suivant, impactent plus marginalement le périmètre de l'Ondam ou de ses sous-objectifs pour 2021 .

Mesures de transferts dans le champ de l'Ondam en 2021

en millions d'euros

Transferts de l'État vers l'Ondam

38,8

Financement des centres de lutte contre tuberculose au sein du FIR

(y compris transfert de financement d'un conseil départemental dans le cadre de la recentralisation de compétences sanitaires)

Transferts entre sous-objectifs de l'Ondam

Réforme de la garde ambulancière

FIR soins de ville

32

Financement par le fonds innovation de l'expérimentation des nouveaux modes de rémunération

soins de ville autres prises en charge

10 Financement de l'Agence du numérique en santé

établissements de santé autres prises en charge

4,5

Régionalisation de la gestion de l'approvisionnement en préservatifs gratuits

autres prises en charge FIR

0,3

« Tarif global » dans certains Ehpad

soins de ville établissements pour personnes âgées

100

Source : Commission des affaires sociales, à partir de l'annexe 7 au PLFSS

Impact des mesures de transferts par sous-objectifs

Soins de ville

- 78 millions d'euros

Établissements de santé

- 5 millions d'euros

Médico-social

+ 1 465 millions d'euros

FIR

+ 7 millions d'euros

Autres prises en charge

+ 14 millions d'euros

Source : Commission des affaires sociales, à partir de l'annexe 7 au PLFSS

B. Un Ondam intégrant des mesures exceptionnelles liées à la covid-19 et au Ségur de la santé, pour partie soumises à un degré d'incertitude élevé

• Corrigé des changements de périmètre par rapport à l'Ondam rectifié pour 2020, l'évolution de l'Ondam pour 2021 est retracée dans le tableau suivant.

Ondam 2021 : répartition en sous-objectifs et évolution

(en milliards d'euros)

Ondam voté 2020

Ondam 2020*

Base 2021

Ondam 2021

Évol.

(%)

Tendanciel (hors Covid et Ségur) (%)

Surcoûts Covid

Impact Ségur

Soins de ville

93,6

93,5

98,9

5,8

5,2

3,2

0,3

Établissements de santé

84,4

87,7

92,3

5,2

3,6

0,3

5,2

Établissements et services médico-sociaux

21,7

25,0

25,9

3,7

4,1

0,0

1,4

pour personnes âgées

10,0

12,6

13,4

6,4

4,9

0,0

1,4

pour personnes handicapées

11,7

12,3

12,4

0,9

3,2

0,0

0,0

Fonds d'intervention régional

3,5

3,8

3,8

1,3

2,4

0,0

0,1

Autres prises en charge

2,4

7,2

3,8

- 47,9

5,6

0,8

0,4

Ondam total

205,6

217,1

224,6

3,5

4,4

4,3

7,4

* Ondam rectifié et c orrigé des changements de périmètre entre 2020 et 2021.

Sources : LFSS pour 2020, annexe 7 au PLFSS et direction de la sécurité sociale

Ainsi, comme le montre le graphique ci-dessous, l'écart de l'ONDAM 2021 par rapport à l'ONDAM 2019 est substantiel, atteignant 12 % , portée par les effets du Ségur de la santé et la prise en charge des coûts liés à l'épidémie de covid-19.

Évolution de l'Ondam

(en milliards d'euros)

* Ondam rectifié et c orrigé des changements de périmètre entre 2020 et 2021.

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après les chiffres LFSS pour 2020, annexe 7 au PLFSS et direction de la sécurité sociale

• Dans la présentation de l'Ondam pour 2021 détaillée en annexe 7 au PLFSS, le Gouvernement « isole » deux catégories de dépenses exceptionnelles dont la ventilation par sous-objectif est présentée ci-dessus et le détail retracé dans l'encadré suivant :

- d'une part, les surcoûts liés à la crise sanitaire de la covid-19 , évalués à 4,3 milliards d'euros : ceux-ci résultent d'hypothèses purement théoriques compte tenu des incertitudes fortes pesant sur la disponibilité d'un vaccin au cours de l'année 2021 ou les perspectives de la politique de tests. Comme le notait la commission des comptes de la sécurité sociale « en cohérence avec le scénario macroéconomique qui ne prévoit pas de reconfinement » 257 ( * ) , ils n'intègrent pas, en outre, d'hypothèse de « deuxième vague » dont les effets sur le système de soins se prolongeraient jusqu'en 2021. L'actualité rend déjà ces hypothèses caduques ;

- d'autre part, l'impact du Ségur de la Santé , évalué à 7,4 milliards d'euros . En dehors du volet salarial, certaines mesures n'ont pas un caractère exceptionnel mais traduisent des engagements antérieurs issus de négociations conventionnelles ou de Ma Santé 2022, par exemple concernant le développement de la télésanté ou de l'accès aux soins non programmés par l'exercice coordonné, notamment via le soutien aux CPTS.

Détail des impacts prévisionnels de la covid-19
et du Ségur de la Santé sur l'Ondam 2021

Surcoût liés la crise sanitaire de la Covid-19 :

4,3 milliards d'euros

- Tests de biologie médicale

2 milliards d'euros

dont 85 % sur les soins de ville
et 15 % sur l'Ondam hospitalier

- Vaccins (acquisition et campagne de vaccination)

1,5 milliard d'euros

- Masques (achat et dispensation pour les personnes testées positives au virus)

0,7 milliard d'euros

- Contribution au financement de Santé publique France pour ses missions Covid (renforts en ressources humaines, gestion des stocks et amélioration des systèmes informatiques)

0,1 milliard d'euros

Impact du Ségur de la Santé :

7,4 milliards d'euros

- Ressources humaines (revalorisations des carrières, revalorisation des indemnités de stage et émoluments d'internats, recrutements...)

5,8 milliards d'euros

- Investissement

1,2 milliard d'euros

dont projets hospitaliers prioritaires

500 millions d'euros

rattrapage numérique en santé

453 millions d'euros

mesures d'accompagnement des réformes de financement de l'hôpital

100 millions d'euros

accompagnement transition écologique et recherche

100 millions d'euros

mesures sur l'agilité des capacités d'hospitalisation

50 millions d'euros

hôtels hospitaliers

10 millions d'euros

- Fédérer les acteurs de la santé dans les territoires

0,4 milliard d'euros

dont développer l'accès aux soins non programmés

150 millions d'euros

lutte contre les inégalités de santé

76 millions d'euros

développement de la télémédecine

95 millions d'euros

soutien psychologique à la population

40 millions d'euros

Source : Commission des affaires sociales, à partir de l'annexe 7 au PLFSS

Sans tenir compte des impacts de la covid-19 et du Ségur en 2020 comme en 2021, l'évolution globale de l'Ondam est évaluée à 2,5 %.

L'annexe B du PLFSS retrace par ailleurs ce que serait la progression de l'Ondam hors dépenses exceptionnelles liées à la crise sanitaire en 2020 comme en 2021 : dans ce cas de figure, la progression est de 6 % pour 2021 , traduisant les mesures de revalorisation et d'investissement du Ségur de la santé et serait encore de 3,1 % en 2022 avant de revenir en 2024 au rythme de progression de 2,3 % qui avait été retenu en annexe à la LFSS pour 2020 pour les années 2021 à 2023.

Taux prévisionnel d'évolution de l'Ondam jusqu'en 2024 (en %)

2020

2021

2022

2023

2024

Ondam

7,6

3,5

1,1

2,4

2,3

Ondam hors covid

3,2

6,0

3,1

2,4

2,3

Source : Annexe B au PLFSS

Au-delà des perspectives concernant le taux d'évolution annuel de l'Ondam pour les prochains exercices, il convient de noter l'évolution des montants de l'Ondam pour la même période.

Ainsi, comme le montre le graphique ci-après, si les taux 2023 et 2024 sont identiques à la trajectoire retenue dans la LFSS pour 2020, le niveau de l'Ondam prévu en 2024 sera nettement supérieur à celui qui était initialement envisagé par la trajectoire 2020 . Cela résulte de l'écart important sur les exercices 2020 à 2021, hors covid. Relevant rapidement et substantiellement l'Ondam, les dépenses nouvelles issues du Ségur de la santé conduisent à une augmentation en valeur tendanciellement plus importante, à taux inchangé à horizon 2024.

Trajectoire d'évolution de l'ONDAM

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après les données du PLFSS (annexe B et annexe 7)
Note : Les montants 2020 et 2021 se voient appliquer les taux d'évolution présents dans les LFSS 2020 et PLFSS 2021. Les effets de changement de périmètre ne sont cependant pas intégrés.

C. Les autres éléments entrant dans la construction de l'Ondam pour 2021 ne connaissent pas d'infléchissement notable par rapport aux années précédentes

• Les évolutions tendancielles pour 2021, évaluées hors impact de la covid-19 et du Ségur, marquent globalement une légère décélération par rapport aux estimations à l'appui du PLFSS pour 2020, avec des variations selon les sous-objectifs.

Estimation de l'évolution tendancielle ou spontanée des dépenses
dans les PLFSS pour 2020 et pour 2021 (en %)

Tendanciel 2020

Tendanciel 2021

(hors Ségur et Covid)

Soins de ville

5,6

5,3

Établissements de santé

3,6

3,6

Médico-social

4,4

4,1

FIR

1,0

2,4

Autres prises en charge

5,2

5,6

Ondam total

4,6

4,4

Source : Comité alerte Ondam, avis n° 2020-3 du 15 octobre 2020

Ces évaluations demeurent toujours si peu étayées . D'après les informations disponibles, elles intègrent la poursuite de la mise en oeuvre de réformes (100 % santé) ou accords conventionnels (infirmiers et masseurs-kinésithérapeutes, déploiement des CPTS, financement des assistants médicaux...), ainsi que l'intégration d'innovations : c'est le cas de l'entrée progressive d'actes de biologie du RIHN (référentiel des actes innovants hors nomenclature) dans la nomenclature de droit commun (à hauteur de 0,1 million d'euros), sujet sur lequel la commission des affaires sociales attire l'attention depuis plusieurs années 258 ( * ) ; c'est également le cas de la progression de 0,8 milliards d'euros des dépenses de la liste en sus, tirée notamment par la dynamique des traitements anticancéreux.

• De même, les mesures d'économies sur la tendance, renommées « mesures de régulation », s'inscrivent dans la continuité des précédents PLFSS et présentent des similitudes fortes dans la distribution des efforts. Comme le déplore chaque année la commission des affaires sociales, ces mesures ne sont pas argumentées et ne font pas l'objet d'un suivi dans le temps, ne permettant pas d'en faire une analyse détaillée.

On peut ainsi s'interroger sur le caractère réaliste de l'engagement fixé en matière de régulation des soins de biologie médicale alors que la crise sanitaire a conduit à suspendre l'accord passé avec les biologistes.

En outre, le fait d'inclure dans ce champ la contribution exceptionnelle des organismes complémentaires d'assurance maladie (OCAM) introduite par le PLFSS, sans lien avec la pertinence des prises en charge, introduit, une fois encore, un regrettable mélange des genres .

D'un montant de 4 milliards d'euros , ces mesures de régulation se répartissent à plus de 70 % sur l'Ondam soins de ville (2,9 milliards d'euros), contre 68 % en 2020, et pour le reste sur l'Ondam hospitalier (1,1 milliard d'euros) d'après les indications de la direction de la sécurité sociale.

Mesures de régulation attendues en 2020 et 2021

(en millions d'euros)

Thématiques

2020

2021

Structuration de l'offre de soins

1 045

805

Structurer des parcours de soins efficients (chirurgie ambulatoire, alternatives à l'hospitalisation, réduction des hospitalisations évitables, etc.)

215

265

Améliorer la performance interne des établissements de santé et médico-sociaux

830

540

Actions sur les tarifs des médicaments

920

640

Actions sur les tarifs des dispositifs médicaux

200

150

Pertinence et qualité des actes et des prescriptions

1 235

975

Pertinence et adaptation tarifaire de la biologie

205

140

Pertinence et adaptation tarifaire de la radiologie

60

40

Pertinence et adaptation tarifaire sur les autres actes

255

115

Maîtrise médicalisée et structure de prescription (actes, certificats médicaux, antibiotiques...)

595

570

Promotion des génériques et biosimilaires

120

110

Pertinence et efficience des prescriptions d'arrêts de travail et de transports

265

310

Transport

120

125

Indemnité journalières

145

185

Contrôle et lutte contre la fraude

90

80

Gestion dynamique du panier de soins remboursé

205

35

Effet de la hausse tendancielle des volumes (dont remises sur les produits de santé)

225

500

Contribution exceptionnelle des OCAM

-

500

TOTAL

4 185

3 995

Source : Annexe 7 aux PLFSS pour 2020 et 2021

Tableau corrigé de changements de présentation des thématiques pour permettre la comparaison

II - Un objectif réévalué lors de l'examen par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement majorant de 0,8 milliard d'euros l'Ondam pour 2021 (à hauteur de 0,6 milliard d'euros sur l'Ondam hospitalier et 0,2 milliard sur l'Ondam médico-social) afin de prendre en compte l'impact de l'avancement au 1 er décembre 2020 de la deuxième tranche de revalorisation salariale prévue initialement en mars 2021 dans le cadre du Ségur de la santé.

En outre, la base de référence pour 2020 a été modifiée par l'Assemblée nationale à l'article 8 : l'amendement adopté porte l'Ondam pour 2020 de 215,7 à 218,1 milliards d'euros , non seulement pour tenir compte de l'impact sur 2020 de l'avancement de la revalorisation salariale, mais également pour augmenter les moyens des établissements de santé afin de compenser les surcoûts présents et à venir liés à la reprise épidémique et ceux des agences régionales de santé dans le cadre du FIR.

L'Ondam rectifié pour 2021 et son évolution par rapport à l'Ondam 2020 ainsi rectifié par l'Assemblée nationale sont retracés ci-après.

Ondam pour 2021 rectifié

(en milliards d'euros)

Ondam 2021

Ondam 2021 rectifié

Evol. 2020/2021* (en %)

Evol. 2020/2021 hors covid et Ségur (en %)

Soins de ville

98,9

98,9

5,8

2,1

Établissements de santé

92,3

92,9

3,4

2,4

Établissements et services médico-sociaux personnes âgées

13,4

13,6

7,0

4,9

Établissements et services médico-sociaux personnes handicapées

12,4

12,4

0,9

3,1

Fonds d'intervention régional

3,8

3,8

- 2,3

2,4

Autres prises en charge

3,8

3,8

- 47,8

5,6

Ondam total

224,6

225,4

2,7

2,5

Sources : PLFSS et direction de la sécurité sociale

*Évolution par rapport à l'objectif 2020 rectifié dans le PLFSS, à périmètre constant.

III - La position de la commission : une adoption conforme

• Le PLFSS traduit un engagement inédit en faveur du système de santé, dont la crise sanitaire a révélé tout à la fois la capacité extraordinaire de résilience comme les fragilités consécutives à un sous-investissement chronique : comme le note le comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie 259 ( * ) , « depuis 2019, hors mesures exceptionnelles pour faire face à la pandémie, l'Ondam progresserait ainsi en deux ans de 4,3 % par an en moyenne, soit deux fois plus vite que sur les cinq dernières années. »

Pour 2021, l'investissement est essentiellement ciblé sur l'hôpital , dans le prolongement du plan « Investir pour l'hôpital » du 20 novembre 2019, du Ségur de la santé de juillet 2020 et du protocole d'accord sur l'évolution pluriannuelle minimale des ressources des établissements de santé signé par les fédérations hospitalières le 6 février 2020 260 ( * ) ; ce dernier se traduit par une progression des recettes des établissements de 2,4 % dans la campagne tarifaire, intégrée dans la construction de l'Ondam 2021 à hauteur de 2 milliards d'euros d'après les indications transmises à la rapporteure.

Cette « bouffée d'oxygène » est nécessaire et attendue mais elle ne règlera que partiellement la crise d'attractivité que connaît l'hôpital et les retards d'investissement qui pèsent sur son fonctionnement . Surtout, c'est la soutenabilité de leur financement qui aujourd'hui interpelle .

De surcroît, l'accompagnement des acteurs de la médecine de ville est le corollaire indispensable d'une transformation structurelle du système de santé, axée sur la prévention et la coordination des parcours de santé. Or, de ce point de vue, les traductions dans l'Ondam 2021 du Ségur de la santé qui reprennent des engagements précédents de Ma Santé 2022 sont encore timides et laissent, pour les acteurs concernés, des interrogations en suspens.

• Le contexte sanitaire dans lequel est examiné le PLFSS, alors que le pays connaît un nouveau confinement et que les services hospitaliers sont sous tension extrême fait peser, selon les mots du comité d'alerte de l'Ondam, des « inconnues majeures sur la prévision des dépenses exceptionnelles » . À ces incertitudes conjoncturelles viennent s'ajouter en 2021 une lisibilité imparfaite liée aux impacts des revalorisations salariales actées lors du Ségur de la santé ou à la réflexion inaboutie sur le périmètre des dépenses relevant de l'autonomie ou de l'assurance maladie .

Dans ces conditions, les réflexions soulevées par Catherine Deroche et René-Paul Savary sur les limites de l'Ondam en tant qu'outil de régulation et surtout de pilotage stratégique de la dépense de santé 261 ( * ) apparaissent plus que jamais d'actualité. La commission sera attentive aux conclusions de la mission confiée par le Gouvernement au Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie sur l'avenir de l'Ondam.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 45 bis (nouveau)
Suspension en 2021 de la procédure d'alerte conduisant à la mise en place
de mesures de redressement en cas de risque de dépassement de l'Ondam

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, adapte en 2021 la procédure d'alerte en cas de risque de dépassement de l'Ondam en suspendant pour les caisses l'obligation de proposer des mesures de redressement.

La commission vous demande d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Une adaptation à titre exceptionnel de la procédure d'alerte en cas de dépassement de l'Ondam en 2021

Cet article, issu d'un amendement du Gouvernement, vise à suspendre pour 2021 l'application de la procédure d'alerte en cas de « risque sérieux » de dépassement de l'Ondam de plus de 0,5 % prévue par l'article L. 114-4-1 du code de la sécurité sociale, conduisant alors l'Uncam et l'Unocam à proposer des mesures de redressement .

La notification au Parlement, au Gouvernement et aux caisses nationales d'assurance maladie par le comité d'alerte est quant à elle maintenue.

Une disposition similaire avait été décidée pour l'année 2010 dans un autre contexte épidémique 262 ( * ) .

En 2020, bien que les conditions d'exécution de l'Ondam aient été bouleversées et malgré l'absence de LFSS rectificative révisant cet objectif en cours d'exercice, le comité d'alerte , sans mandat législatif, n'a pas engagé la procédure de redressement , en prenant en considération les circonstances inédites liées à la pandémie de covid-19.

Dans son avis du 30 mai 2020, ce comité avait indiqué prendre acte « d'une lettre du ministre des solidarités et de la santé et du ministre de l'action et des comptes publics à son intention, en date du 20 mai 2020 (...) [l'informant] que le Gouvernement tirera les conséquences de cette situation exceptionnelle en proposant au Parlement dans la prochaine loi de financement de la sécurité sociale une rectification à la hausse de l'Ondam pour 2020 permettant d'intégrer les dépenses supplémentaires dues à la crise ».

Il avait appelé, à défaut du vote d'un projet de loi de financement rectificatif, à ce qu'un « cadrage financier actualisé des dépenses d'assurance maladie » soit communiqué au Parlement permettant de « mettre à jour les références en la matière dans l'attente de la prochaine loi de financement » . Il a considéré, proprio motu , que cela avait été le cas avec la présentation par la commission des comptes de la sécurité sociale, le 16 juin, d'une estimation révisée de l'Ondam, même s'il faut attendre ce PLFSS pour que le Parlement soit officiellement saisi d'une rectification de l'Ondam, ajustée encore au cours des débats à l'Assemblée nationale.

Pour 2021, le comité s'estime en revanche lié par les dispositions de l'article L. 114-4-1 du code de la sécurité sociale.

II - La position de la commission : une dérogation qui doit être circonscrite aux surcoûts induits par la crise sanitaire de la covid-19

La rapporteure entend combien les circonstances sanitaires exceptionnelles rendent les hypothèses de construction de l'Ondam pour 2021 hautement incertaines, comme relevé à l'article 45.

Cet article confirme la portée fragile du vote de l'Ondam pour 2021. Il conforte également la commission dans la nécessité d'un contrôle étroit qui doit rester assuré par le Parlement : l'activation de la procédure d'alerte de l'Ondam devrait donner lieu à l'examen d'un projet de loi de financement rectificatif dès que l'ampleur de l'impact sur l'Ondam 2021 du rebond épidémique pourra être documenté.

Sous réserve de ces observations, la rapporteure estime par ailleurs opportun, à l'instar de la mesure votée en LFSS pour 2010 lors de la pandémie grippale, de circonscrire la mesure dérogatoire prévue en la limitant aux surcoûts induits par les dépenses exceptionnelles liées à l'épidémie de covid-19 . Sur sa proposition, la commission a adopté un amendement n° 197 en ce sens.

La commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 46
Dotation au FIVA, au Fcaata et transferts de la branche AT-MP
à la branche maladie et à la branche vieillesse du régime général

Cet article fixe les montants, pour l'année 2021, des contributions de la branche AT-MP du régime général au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA), au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata), à la branche maladie du régime général au titre de la sous-déclaration des AT-MP ainsi qu'à la branche vieillesse du régime général au titre du dispositif de départ en retraite anticipée pour incapacité permanente d'origine professionnelle et du compte professionnel de prévention.

En outre, cet article propose le report à 2021 de la transmission au Parlement et au Gouvernement, prévue pour 2020, du rapport évaluant tous les trois ans le coût réel pour la branche maladie de la sous-déclaration des AT-MP.

La commission vous demande d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - La fixation pour 2021 des transferts et dotations à la charge de la branche AT-MP

A. Les dotations aux fonds amiante

Les I et II de l'article 46 fixent les montants des dotations aux fonds destinés à l'indemnisation et à la prise en charge des victimes de l'amiante.

1. Une dotation visant à réduire le fonds de roulement du FIVA

Le I fixe la dotation de la branche AT-MP du régime général au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) à 220 millions d'euros pour 2021, soit un montant inférieur de 40 millions d'euros à celui consenti en LFSS pour 2020, alors que la dotation de l'État serait maintenue à 8 millions d'euros 263 ( * ) . À ces dotations s'ajoutent les recettes issues de l'activité du contentieux subrogatoire du FIVA 264 ( * ) .

Créé par la LFSS pour 2001 265 ( * ) , le FIVA a pour mission d'assurer la réparation intégrale du préjudice supporté par les personnes ayant obtenu la reconnaissance d'une maladie professionnelle causée par l'amiante ou qui ont été directement exposées à l'amiante.

Les demandes d'indemnisation ont légèrement progressé en 2019 : le FIVA a enregistré 19 725 nouvelles demandes d'indemnisation (+ 6,6 %) comprenant 3  724 nouveaux dossiers de victimes (- 0,3 %), soit un des plus hauts niveaux d'activité depuis 2009. Les charges d'indemnisation se sont élevées à 300 millions d'euros.

En revanche, l'année 2020 est marquée par les conséquences de la crise sanitaire sur l'activité du FIVA , qui a chuté d'environ un tiers : la diminution des dépenses d'indemnisation qui en découle viendrait diminuer les charges du FIVA de 50 millions d'euros, tandis que les recettes issues des contentieux baisseraient de 10 millions d'euros environ.

À l'inverse, l'année 2021 verrait un retour à un rythme d'indemnisation plus soutenu avec des dépenses de 320 millions d'euros, soit un volume comparable à la situation d'avant crise augmenté d'un rattrapage partiel 266 ( * ) .

Selon les informations fournies par la direction de la sécurité sociale (DSS), la révision à la baisse de la dotation vise notamment à ramener le fonds de roulement du FIVA à un niveau prudentiel de 54 millions d'euros , correspondant à deux mois de dépenses d'indemnisation et considéré comme suffisant par le fonds. Ce fonds de roulement dépasserait 120 millions d'euros en 2020.

2. La dotation d'équilibre versée au Fcaata

Le II fixe la dotation de la branche AT-MP du régime général au Fonds de cessation anticipée des victimes de l'amiante (Fcaata) à 468 millions d'euros pour 2021, après 414 millions d'euros en LFSS pour 2020 mais 532 millions d'euros en LFSS pour 2019.

Créé par la LFSS pour 1999 267 ( * ) , le Fcaata verse l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata) qui permet à certains salariés exposés à l'amiante de bénéficier d'une retraite anticipée.

La dotation est calibrée afin de dégager un excédent de 16 millions d'euros et ainsi d' aboutir à un équilibre du résultat cumulé du fonds , après le résultat déficitaire de 62 millions d'euros qui serait enregistré en 2020.

Les charges du Fcaata continueraient en effet à baisser en 2021 pour s'établir à 452 millions d'euros (contre 476 millions d'euros prévus en 2020 et 517 millions d'euros constatés en 2019).

Ainsi, la décrue du poids des fonds amiante dans les charges de la branche AT-MP se poursuit , en cohérence avec la baisse tendancielle du nombre des travailleurs y ayant été exposés au cours de leur carrière. Les transferts de la branche en faveur de ces fonds devraient diminuer de 6,6 % en 2020 et de 8,7 % en 2021.

Au total, le recul de l'impact des charges liées aux fonds amiante serait de près de 200 millions d'euros, soit près de 22 %, sur la période 2018-2021.

B. Le report de l'évaluation du coût de la sous-déclaration des AT-MP et le versement à la branche maladie du régime général

L'assurance maladie supporte des dépenses liées à des accidents ou à des affections dont l'origine est professionnelle mais qui n'ont pas été déclarés comme tels. En compensation des sommes indûment mises à sa charge du fait de cette sous-déclaration, la branche maladie du régime général bénéficie chaque année depuis 1997, conformément à l'article L. 176-1 du code de la sécurité sociale, d'un versement de la branche AT-MP.

En application de l'article L. 176-2 du même code, une commission présidée par un magistrat à la Cour des comptes est chargée d'évaluer, tous les trois ans, le coût réel de la sous-déclaration des AT-MP dans un rapport remis au Parlement et au Gouvernement. La commission AT-MP de la CNAM rend un avis sur ce rapport, qui est également transmis au Parlement et au Gouvernement avant le 1 er juillet de l'année considérée. Le dernier rapport de la commission d'évaluation, rendu en juin 2017, situait ainsi le coût de cette sous-déclaration dans une fourchette comprise entre 815 et 1 530 millions d'euros 268 ( * ) .

Une nouvelle commission aurait donc dû se réunir au printemps 2020 pour réévaluer le coût de cette sous-déclaration, mais, d'après l'exposé des motifs, ses travaux n'ont pas pu être menés jusqu'à leur terme en raison de la crise sanitaire due à l'épidémie de covid-19.

Le III de l'article 46 déroge par conséquent à l'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale en reportant au 1 er juillet 2021 au plus tard la transmission du rapport de la commission ad hoc . Il est précisé que le rapport suivant sera remis avant le 1 er juillet 2024.

Selon l'évaluation préalable de l'article 46, « une remise du rapport au début de l'automne n'apparaissait pas compatible avec le calendrier d'élaboration du PLFSS, qui fixe en particulier, sur la base des travaux de la commission, le montant du versement de la branche AT-MP à la branche maladie pour l'année à venir ».

En conséquence, le montant du versement à l'assurance maladie correspondant à cette sous-déclaration est maintenu, pour la septième année consécutive, à un milliard d'euros .

Source : Commission des affaires sociales

C. Les versements à la branche vieillesse du régime général

Depuis le 1 er juillet 2011, les assurés justifiant d'un taux d'incapacité permanente au moins égal à 10 % reconnu au titre d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail « ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle » peuvent bénéficier d'un départ en retraite anticipée à 60 ans en application de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites 269 ( * ) . L'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale prévoit que la branche AT-MP finance chaque année les dépenses supplémentaires générées par ce dispositif.

La même contribution intègre en outre le financement des dépenses supplémentaires engendrées par le compte professionnel de prévention (C2P) 270 ( * ) .

Pour 2021, le IV de l'article 46 prévoit un versement au titre de ces deux dispositifs à la branche vieillesse du régime général de 176 millions d'euros , après 157,4 millions d'euros en 2020 (+ 11,8 %).

Selon les informations communiquées par la DSS, les dépenses supplémentaires engendrées pour la branche AT-MP par ces dispositifs se décomposent comme suit :

- 65 millions d'euros au titre du dispositif de retraite anticipée pour incapacité permanente , en diminution de 12,6 % par rapport à 2020 (74,4 millions d'euros) ;

- 111 millions d'euros au titre du C2P , en hausse de 33,7 % par rapport à 2019 (83 millions d'euros).

Le même IV prévoit un montant total des dépenses au titre des deux dispositifs pour la branche AT-MP du régime des salariés agricoles à 10,6 millions d'euros pour 2021, contre 11,4 millions d'euros en 2020.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de la commission : minorer le montant du versement à la branche maladie

Au total, selon le dernier rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale 271 ( * ) , les transferts nets à la charge de la branche AT-MP baisseraient moins fortement en 2020 qu'en 2019 (- 2,0 % après - 5,4 % en 2019). Cette baisse serait notamment due au nouveau recul des transferts liés aux départs anticipés en retraite au titre de l'amiante.

Une nouvelle fois, la commission des affaires sociales s'interroge sur la pertinence du maintien à un milliard d'euros, pour la septième année consécutive, de la contribution de la branche AT-MP à l'assurance maladie au titre de la sous-déclaration des AT-MP. Alors que ces deux branches déploient depuis plusieurs années de nombreux efforts dans l'amélioration du repérage de l'origine professionnelle de certaines pathologies, le caractère inchangé de ce transfert, fût-il justifié cette année par l'impossibilité de réunir la commission ad hoc en raison de la crise sanitaire, laisse entendre qu'aucun progrès n'a été réalisé sur cette question.

Dans ces conditions, le maintien de cette dotation à un niveau aussi élevé s'apparente de plus en plus à un détournement des excédents cumulés de la branche AT-MP au profit du rééquilibrage de la branche maladie. Il interroge d'autant plus cette année que la branche enregistre un déficit pour la première fois depuis 2012. Il convient de rappeler que le montant de ce versement n'a jamais diminué depuis sa création en 1997, malgré une sinistralité en baisse tendancielle.

Dans le cadre de la commission de 2017, l'Union des entreprises de proximité (U2P) s'est prononcée en faveur d'une réduction et, à terme, d'une suppression de ce transfert qui met en péril l'effet incitatif à la prévention de la cotisation AT-MP.

A l'initiative du rapporteur, la commission des affaires sociales a donc adopté un amendement tendant à réduire le versement pour 2021 à l'assurance maladie à hauteur du déficit de la branche en 2020 (amendement n° 198).

La commission vous demande d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

Article 46 bis (nouveau)
Mesures de simplification des modalités déclaratives
des accidents du travail

Cet article inséré par l'Assemblée nationale vise à simplifier la procédure de prescription d'un arrêt de travail à la suite d'un AT-MP ainsi que les modalités de déclaration par l'employeur des accidents du travail bénins.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - Une double simplification des modalités déclaratives des AT-MP

Introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur Paul Christophe, l'article 46 bis propose deux mesures de simplification des modalités déclaratives applicables aux AT-MP.

A. La simplification de la procédure de prescription d'un arrêt de travail en cas d'AT-MP

Aux termes de l'article L. 441-6 du code de la sécurité sociale, le praticien prescrivant un arrêt de travail à la suite d'un accident du travail établit, en double exemplaire, un certificat initial spécifique indiquant l'état de la victime et les conséquences de l'accident ou les suites éventuelles, en particulier la durée probable de l'incapacité de travail, si les conséquences ne sont pas exactement connues. Il adresse directement l'un de ces certificats à la caisse primaire et remet le second à la victime.

Ainsi, le formulaire servant de support aux certificats AT-MP comporte à la fois la partie descriptive des lésions, de la maladie ou des séquelles, et la prescription des durées d'arrêt de travail ou de soins.

Le a) du 3° du II272 ( * ) vise à transférer , indépendamment du certificat médical initial AT-MP, la prescription initiale d'arrêt de travail en cas d'accident dans le formulaire général d'avis d'arrêt de travail , qui serait désormais commun à la maladie et aux AT-MP.

La mesure impliquant une refonte du certificat médical initial AT-MP ainsi que de l'avis d'arrêt de travail, elle entrerait en vigueur le 1 er novembre 2021 ( III ).

Le 1° du II actualise par ailleurs les dispositions relatives à la forme générale des avis d'arrêts de travail en remplaçant, à l'article L. 321-2 du code de la sécurité sociale, la « lettre d'avis d'interruption de travail dont le modèle est fixé par arrêté ministériel » par la mention de l'avis d'arrêt de travail établi au moyen du formulaire homologué.

B. La simplification des modalités de délivrance et de tenue du registre des accidents du travail bénins

En application de l'article L. 441-4 du code de la sécurité sociale, l'employeur peut remplacer, avec l'autorisation préalable de la Carsat, la déclaration des accidents du travail dits « bénins » - ceux n'entraînant ni arrêt de travail, ni soins médicaux - par une simple inscription sur un registre ouvert à cet effet . L'employeur est tenu d'en informer l'instance représentative du personnel compétente en matière de santé et sécurité au travail, laquelle a accès au registre, de même que les agents de contrôle des caisses et les autorités compétentes de l'État.

Les a) et b) du 2° du II tendent à supprimer le mécanisme d'autorisation préalable pour donner cette possibilité à l'employeur dès lors qu'il remplit des conditions fixées par décret. Selon l'exposé sommaire de l'amendement, l'autorisation préalable sera remplacée par une déclaration de l'employeur attestant du respect des conditions.

En outre, le c) et d) du 2° du II remplacent à l'article L. 441-4, par coordination avec la réforme des instances représentatives du personnel de 2017, la mention du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) par celles du comité social et économique (CSE) et des délégués du personnel. Le d) précise par ailleurs la définition des personnes chargées du contrôle du registre des accidents du travail bénins , en donnant notamment accès au registre aux ingénieurs conseils et contrôleurs de sécurité dûment habilités auprès des Carsat.

Cette mesure serait transposée à l'identique dans le régime des salariés agricoles ( 1° et 2° du I ).

II - La position de la commission : une simplification bienvenue en vue de la dématérialisation obligatoire des arrêts de travail

La simplification de la procédure de prescription des arrêts de travail en cas d'AT-MP s'inscrit dans la lignée de la simplification prévue pour les certificats médicaux de prolongation par un décret du 20 août 2019 273 ( * ) : depuis le 1 er septembre 2020, les prolongations d'arrêt de travail suite à un accident du travail ou à une maladie professionnelle s'effectuent dans le cadre d'un formulaire commun avec les arrêts de travail liés à une maladie d'origine non professionnelle.

Cette mesure devrait permettre de réduire le délai de traitement de ces arrêts de travail. Elle pourrait également générer, selon l'exposé sommaire de l'amendement, une économie pour la branche AT-MP du régime général estimée à une dizaine de millions d'euros par an , liée tant à l'automatisation du traitement par les caisses qu'à l'amélioration du contrôle des arrêts de travail et au recouvrement des indus susceptibles d'être détectés dans ce cadre.

Cette mesure doit également être considérée en lien avec la dématérialisation des arrêts de travail AT-MP. Il est rappelé que la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé 274 ( * ) prévoit de rendre obligatoire, au plus tard au 31 décembre 2021, la prescription dématérialisée des arrêts de travail , qu'ils soient liés à une maladie d'origine non professionnelle ou à un AT-MP.

Cet objectif figure parmi les préconisations de la dernière commission sur la sous-déclaration des AT-MP 275 ( * ) , qui estimait en 2017 que seuls 13 % des certificats médicaux AT-MP étaient envoyés aux caisses par voie électronique.

Quant à la simplification du régime applicable aux « accidents bénins », elle permet de supprimer une obligation qui apparaît lourde pour les entreprises comme pour les caisses au regard de l'enjeu. Aucune information contenue actuellement dans le registre des AT bénins, notamment à destination du CSE, ne serait perdue du fait de la suppression de l'autorisation préalable de la Carsat.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 47
Objectifs de dépenses de la branche AT-MP

Cet article fixe les objectifs de dépenses pour 2021 de la branche AT-MP de l'ensemble des régimes obligatoires de base et du régime général en particulier.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

A. Une dégradation passagère du solde de la branche en 2020

Après sept années d'excédents, le solde de la branche AT-MP s'effondre en 2020 sous l'effet de la crise sanitaire. La branche serait ainsi déficitaire pour la première fois depuis 2012 à - 0,2 milliard d'euros (après 1,1 milliard d'euros d'excédent en 2019).

Pour mémoire, la LFSS pour 2020 prévoyait pour cette année un excédent de 1,4 milliard d `euros.

Cette chute s'explique notamment par la forte diminution des produits (- 7,5 %). En particulier, les cotisations sociales perçues par la CNAM-AT diminueraient de 9,3 % sous l'effet de la baisse de la masse salariale (- 7,9 %) et de l'augmentation des charges de non-recouvrement 276 ( * ) .

Quant aux dépenses, elles ont été peu affectées par la crise liée à l'épidémie de covid-19. Si la baisse d'activité résultant du confinement a entraîné une diminution du nombre de déclarations d'accidents du travail durant cette période, celle-ci a été compensée par de nouvelles dépenses, dont le versement d'une subvention « Prévention Covid » aux TPE-PME, à hauteur de 50 millions d'euros 277 ( * ) .

Le solde de la branche devrait toutefois repartir à la hausse dès 2021 pour se rétablir à 0,6 milliard d'euros, sans qu'aucune mesure soit prévue pour modifier les ressources de la branche.

Soldes des branches AT-MP des régimes obligatoires de base de 2012 à 2020 (M€)

Source : DSS et PLFSS pour 2021

* Pour mémoire, la LFSS pour 2018 a supprimé le FCAT et le FCATA, dorénavant combinés dans les comptes des branches AT respectivement du régime général et du régime agricole.

Soldes nets de la branche AT-MP du régime général depuis 2013 (M€)

Source : Réponses du ministère des solidarités et de la santé au questionnaire de la commission des affaires sociales du Sénat

La dette de la branche ayant été entièrement résorbée en 2016, l'excédent cumulé aurait dû culminer en 2020 à 4,7 milliards d'euros, selon les prévisions du précédent PLFSS. Il devrait finalement diminuer à 3,4 milliards d'euros du fait du déficit enregistré cette année. Cet excédent cumulé devrait toutefois se porter à 3,9 milliards d'euros fin 2021 .

Excédents cumulés de la branche AT-MP (Md€)

Source : Direction de la sécurité sociale

Le dispositif de reconnaissance en maladie professionnelle de la covid-19

Dans le cadre de l'épidémie de covid-19, le Gouvernement a mis en place un dispositif qui s'inscrit dans le cadre des régimes AT-MP de droit commun pour faciliter la reconnaissance et l'indemnisation des pathologies liées à une contamination par le SARS-CoV2.

Concernant les personnels soignants , les tableaux de maladies professionnelles créés au régime général (n° 100) et au régime agricole (n° 60) permettent d'indemniser les personnels des établissements concernés ayant développé une affection respiratoire aiguë liée à la covid-19, dès lors qu'elle a nécessité une oxygénothérapie ou a entraîné le décès. La création de ces tableaux permet une indemnisation automatique : en effet, les personnels soignants n'auront pas d'autre preuve à apporter que l'exercice des activités concernées et l'effectivité de la contamination. Cette présomption d'imputabilité est également ouverte aux fonctionnaires, qui se voient appliquer les tableaux de maladie professionnelle du régime général, ainsi qu'aux professionnels libéraux, comme le prévoit la 3 e loi de finances rectificative pour 2020 278 ( * ) .

Pour les travailleurs non-soignants , en particulier ceux qui ont exercé une activité impliquant du contact avec le public pendant la période de confinement, une voie complémentaire aménagée de reconnaissance des maladies professionnelles est mise en oeuvre pour simplifier et fluidifier leurs démarches au régime général et au régime agricole. À cet effet, un comité unique de reconnaissance dédié à la covid-19 a été créé par le décret du 14 septembre 2020 279 ( * ) , en lieu et place des comités régionaux en principe compétents, afin d'assurer l'homogénéité du traitement des demandes.

Ce comité sera également mobilisé pour les personnes, soignantes ou non, atteintes d'affections autres que respiratoires liées à une contamination au SARS-CoV2 , dès lors que le taux d'incapacité permanente, tel qu'évalué au moment de leur demande, sera au moins égal à 25 %. Des recommandations formulées par un groupe d'experts scientifiques lui seront adressées afin de définir les critères d'appréciation du lien de causalité entre exposition professionnelle et apparition de la maladie, en tenant compte notamment du contact avec le public ou les collègues dans le cadre d'activités exercées pendant le confinement.

La reconnaissance en maladie professionnelle permettra aux personnels et travailleurs concernés de bénéficier d'une indemnisation selon les règles AT-MP du régime de sécurité sociale dont elles relèvent, couvrant à la fois les frais de santé, l'incapacité temporaire et, le cas échéant, l'incapacité permanente ou le décès (via l'indemnisation des ayants droit).

Compte tenu des montants moyens de la réparation AT-MP du régime général, le coût du dispositif de reconnaissance automatique est estimé entre 10 et 15 millions d'euros par an au régime général. Ces dépenses ne seront pas imputées au compte employeur ; il n'en sera donc pas tenu compte dans le calcul de la fraction de leur taux de cotisation AT-MP liée à la sinistralité propre des employeurs.

Quant au coût de l'indemnisation des professionnels de santé libéraux, qui sera supporté par le budget de l'État, il est estimé à 5 millions d'euros par an ; les crédits correspondants ont été ouverts dans la 3 e loi de finances rectificative au titre de 2020.

B. Un ralentissement des dépenses en 2019

En 2019, les dépenses ont été légèrement plus élevées que l'objectif initial voté en LFSS. Néanmoins, les charges de la branche AT-MP du régime général ont progressé beaucoup moins vite que les recettes (+ 1,6 % contre + 4,0 %), accentuant l'excédent de la branche. Les dépenses ont été notamment contenues par la sous-revalorisation à 0,3 % des prestations par la LFSS pour 2019, tandis que les cotisations sociales ont été dynamiques, portées par les rémunérations des salariés du secteur privé. Les charges liées au non-recouvrement ont nettement diminué, augmentant d'autant les produits nets de la branche 280 ( * ) .

Les dépenses dans le champ de l'ONDAM ont cependant été très dynamiques (+ 6,5 % tous régimes confondus), portées par les dépenses d'indemnités journalières qui en constituent la plus large part et ont progressé de 9 %. En effet, la montée en charge de la reconnaissance anticipée des AT-MP instaurée par la LFSS pour 2018 281 ( * ) a pleinement joué en 2019.

Quant aux dépenses hors-ONDAM, elles sont reparties légèrement à la hausse (+ 0,9 %). Les rentes servies au titre d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle à l'origine d'une incapacité partielle permanente supérieure ou égale à 10 % restent le principal poste de dépenses de la branche.

Ainsi, les dépenses de la branche AT-MP se sont établies à 13,6 milliards d'euros (tous régimes confondus) en 2019, en hausse de 1,5 % après avoir augmenté de 1,7 % en 2018. Pour le seul régime général, elles ont augmenté de 1,6 % contre 2,7 % en 2018, s'établissant à 12,2 milliards d'euros.

C. Les objectifs pour 2021

L'article 47 fixe les objectifs de dépenses de la branche AT-MP en 2021 à :

14,1 milliards d'euros pour l'ensemble des régimes obligatoires de base , en hausse de 1,4 % par rapport à l'objectif rectifié de dépenses pour 2020 282 ( * ) et de 3,7 % par rapport aux dépenses constatées en 2019 283 ( * ) ;

12,7 milliards d'euros pour le seul régime général , en progression de 2,4 % par rapport à l'objectif rectifié de dépenses pour 2020 284 ( * ) et de 4,1 % par rapport aux dépenses constatées en 2019 285 ( * ) .

Selon les informations transmises par le Gouvernement, les mesures découlant du Ségur de la santé auront un effet favorable sur ses recettes de cotisations et contributions sociales qui contribuera à améliorer son solde 286 ( * ) .

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de la commission : des mesures attendues pour mieux ajuster les recettes aux besoins de financement de la branche

Malgré un accident passager en 2020, le calibrage des recettes de la branche AT-MP reste déconnecté à long terme de ses besoins de financement . Le taux d'adéquation des recettes aux dépenses pour la branche serait en hausse de six points en 2021, pour s'établir à 104 %. Il atteindrait 108 % en 2022, 111 % en 2023 et 113 % en 2024 en l'absence de mesure nouvelle.

Il paraît possible, dans ces conditions, d'envisager d'augmenter les dépenses de prévention - notamment à travers des aides et des incitations financières à destination des entreprises -, et de poursuivre dès que possible l'ajustement à la baisse des cotisations, en cohérence avec la tendance à la baisse de la sinistralité.

Évolution du taux d'adéquation des recettes aux dépenses de la branche AT-MP

Source : Rapport d'évaluation des politiques de sécurité sociale de la branche AT-MP annexé au PLFSS pour 2021

Sous ces réserves, la commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 47 bis (nouveau)
Régime de la pension de réversion au bénéfice du conjoint
auteur de violences conjugales sur le titulaire de la pension

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, vise à prévoir la possibilité pour le juge de ne pas prononcer la peine de privation de la pension de réversion pour les auteurs de violences conjugales.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - La sécurisation juridique d'une mesure visant à lutter contre les violences conjugales

A. Les dispositions de la loi Pradié du 28 décembre 2019 en matière de pension de réversion

Une disposition introduite à l'initiative du Sénat dans la loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille prive du bénéfice de la pension de réversion le conjoint survivant ayant commis un crime ou un délit à l'encontre de son conjoint 287 ( * ) . Cette mesure vise les pensions de réversion de base versées par le régime général (salariés, commerçants et artisans) 288 ( * ) , les régimes des fonctionnaires civils et militaires 289 ( * ) et la mutualité sociale agricole (MSA) 290 ( * ) . Elle s'applique de la même manière à la pension de veuve ou de veuf ouverte au conjoint survivant invalide 291 ( * ) .

Les crimes et délits visés sont prévus soit à la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du code pénal (atteintes volontaires à la vie), soit aux paragraphes 1 et 2 des sections 1 et 3 du chapitre II du même titre II (atteintes volontaires à l'intégrité de la personne et agressions sexuelles).

B. Une réécriture visant à assurer la constitutionnalité du dispositif

Introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur Cyrille Isaac-Sibille, l'article 47 bis vise à aménager le dispositif introduit par la loi « Pradié » dans le but d'en garantir la constitutionnalité .

En effet, selon l'exposé sommaire de l'amendement, ce dispositif qui prive automatiquement la personne condamnée de sa pension comporte un risque de contrariété au principe d'individualisation des peines , fondé sur l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui impose de permettre au juge d'adapter la sanction d'un condamné ainsi que ses modalités d'exécution afin de tenir compte des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur.

Les 1° et 2° du III prévoient ainsi, à l'article L. 342-1-1 et dans un nouvel article L. 161-22-3 du code de la sécurité sociale, que « le prononcé de la peine complémentaire », à savoir la privation de la pension de réversion au titre de tous les régimes d'assurance vieillesse de base et complémentaires légaux ou rendus légalement obligatoires, ou de la pension de veuf ou de veuve, « est obligatoire. Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer cette peine, en considération des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur . »

En conséquence, seraient abrogés l'article L. 353-1-1 du code de la sécurité sociale ( 3° du III ) ainsi que l'article L. 38-1 du code des pensions civiles et militaires de retraite ( I ).

Le même aménagement est apporté concernant les assurés des régimes agricoles aux articles L. 742-41-1 et L. 732-62 du code rural et de la pêche maritime ( 1° et 2° du II ).

II - La position favorable de la commission

La loi du 28 décembre 2019 a permis de concrétiser des avancées importantes en matière de lutte contre les violences conjugales. La commission est, sur le fond, favorable à cet article qui permet de renforcer et de rendre pleinement opérante une disposition introduite par le Sénat à l'initiative de la commission des lois.

En dépit de l'importance de cet ajustement en vue de prévenir une censure de ce dispositif, la commission observe qu'il n'a qu'un impact indirect et très limité sur les dépenses sociales des années à venir et que le lien de cet article avec le texte n'est pas fermement établi . Il reviendra au Conseil constitutionnel de vérifier la conformité de l'article avec les dispositions de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 47 ter (nouveau)
Faculté d'utiliser la biométrie pour vérifier l'existence
d'un titulaire de pension de retraite domicilié hors de France

Cet article vise à permettre le recours à la biométrie pour la satisfaction des preuves d'existence que doit apporter un pensionné résidant à l'étranger ou dans certaines collectivités ultramarines.

La commission vous demande de modifier cet article.

I - Le dispositif proposé : une codification du contrôle de l'existence et l'ouverture à la mobilisation de la biométrie

Cet article additionnel a été adopté à l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Cyrille Isaac-Sibille, rapporteur de la branche vieillesse, et M. Alexandre Holroyd.

Il procède à la codification dans le code de la sécurité sociale des dispositions de l'article 83 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 et ouvre une nouvelle faculté de recours à la biométrie pour permettre la preuve d'existence du bénéficiaire .

Le I crée un nouveau paragraphe 6 au sein du chapitre du code de la sécurité sociale consacré aux prestations, à sa sous-section relative à l'assurance vieillesse . Celui-ci est dénommé « Contrôle de l'existence ». Quatre articles sont ainsi créés au sein de ce paragraphe.

L'article L. 161-24 créé reprend les dispositions du I de l'article 83 de la LFSS pour 2013. Il prévoit ainsi une obligation , pour le bénéficiaire d'une pension vieillesse d'un régime de retraite obligatoire résidant dans certaines collectivités ultramarines ou à l'étranger, de prouver son existence à l'organisme gestionnaire de sa pension. La rédaction de la LFSS pour 2013 prévoyait ce même certificat adressé « une fois par an au plus ».

Contrairement à la rédaction de la LFSS pour 2013 qui visait les personnes « résidant hors de France », l'article vise ainsi les résidents des territoires autres que ceux mentionnés à l'article L. 111-2 - soit la France hexagonale, les départements de la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et La Réunion, et les collectivités de Saint-Barthélemy et Saint-Martin - et Mayotte.

Les résidents des collectivités ultramarines non visées sont aujourd'hui déjà concernés par ce dispositif, sous le régime d'une circulaire de la Cnav. Sont ainsi concernés les résidents de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Wallis-et-Futuna, ainsi que les personnes résidant à l'étranger .

L'article L. 161-24-1 créé ouvre la possibilité d'apporter la preuve d'existence au moyen de dispositifs permettant l'usage de données biométriques .

L'utilisation de tels dispositifs doit se faire dans les conditions prévues par la loi de 1978 dite « informatique et libertés » et un décret en Conseil d'État pris après avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) doit préciser tant les moyens pouvant être utilisés que « les garanties apportées aux personnes dans l'utilisation de ces dispositifs et l'exercice de leurs droits » mais aussi les conditions d'utilisation par les personnes des outils permettant la démarche permise.

L'article L. 161-24-2 créé prévoit la suspension du versement de la pension dans le cas où, la preuve de l'existence n'a pas été fournie à l'issue d'un délai après la notification du contrôle, ce délai devant être fixé par décret.

La précédente rédaction formulait un délai minimal d'un mois après la date butoir fixée pour la remise du justificatif pour procéder à la suspension du versement.

L'article L.161-24-3 créé attribue au GIP Union retraite , groupement constitué des organismes et services de retraite obligatoires, la mutualisation de la gestion de la preuve d'existence mais aussi des modalités de son contrôle . Un décret est prévu afin de préciser les conditions de cette mutualisation.

La rédaction de la LFSS pour 2013 permettait déjà une mutualisation par les régimes obligatoires de « la gestion des certificats d'existence », renvoyant les conditions à un décret. Le contrôle n'était alors pas mentionné et aucun organisme n'était désigné pour assurer la mission de mutualisation.

En conséquence, le II procède à l'abrogation au sein de la loi de financement pour 2013 des dispositions ici codifiées.

II - La position de la commission : un soutien au dispositif proposé

A. Une intention partagée

Dans l'exposé sommaire de son amendement, le député Holroyd évoque une facilité offerte aux citoyens français résidant à l'étranger dans leurs démarches . Le député considère en effet qu'il existe aujourd'hui pour certains assurés des difficultés notables dans la production de leur certificat d'existence. L'usage de la biométrie dispensera selon lui des envois annuels de certificats pour nombre de bénéficiaires résidant à l'étranger.

Cette nouvelle faculté ouverte par le présent article de recours à la biométrie a été récemment évoquée dans les travaux de votre commission, à l'occasion de l'audition du président et du directeur de la Cnav le 14 octobre 2020. Ce dernier y voyait un moyen pertinent et efficace de lutte contre la fraude aux prestations . La commission soutient les efforts des caisses de sécurité sociale pour mieux évaluer la fraude et lutter contre cette dernière . À cette fin, celles-ci doivent disposer de moyens appropriés .

B. Une vigilance quant à l'utilisation de données biométriques

La commission des affaires sociales est soucieuse des garanties apportées à la protection des données personnelles.

Aussi, alors que cet article ouvre une nouvelle faculté d'utilisation d'outils biométriques, elle constate ici la précaution prise avec la nécessaire conformité aux dispositions de la loi de 1978 , d'une part, et l'avis de la CNIL sur le décret en Conseil d'État qui précisera ces dispositions, d'autre part.

C. Des ajustements proposés du dispositif

La commission a souhaité proposer différentes modifications à la rédaction de cet article additionnel et a adopté un amendement à cette fin.

D'une part, la formulation retenue pour l'article L. 161-24 créé, à savoir que le bénéficiaire « adresse une preuve de son existence » ne correspond pas à la pratique réelle de la fourniture qui est faite aujourd'hui de la preuve d'existence. En effet, pour certains pays européens - c'est le cas de l'Allemagne, du Benelux, de l'Italie et de l'Espagne -, la Cnav a mis en place des échanges automatiques de données d'état-civil qu'elle partage avec les autres régimes. Il n'y a dans ce cas pas de démarche volontaire du bénéficiaire qui satisfait cependant bien aux exigences de preuve de son existence. La commission propose donc de prévoir que le bénéficiaire « justifie de son existence » auprès de l'organisme concerné.

D'autre part, concernant l'application de cette obligation outre-mer , les résidents de Polynésie française et de Saint-Pierre-et-Miquelon ne sont pas concernés par cette obligation, ces collectivités procédant à des échanges automatiques avec l'INSEE. Ce circuit déclaratif n'a donc vocation à s'appliquer outre-mer qu'à la Nouvelle-Calédonie et aux îles Wallis et Futuna ; la commission propose une modification en ce sens.

En outre, le délai prévu pour la suspension du versement de la pension, codifiée à l'article L. 161-24-2 pose un problème opérationnel . En effet, le contrôle de l'existence n'est pas « notifié », au bénéficiaire , le prévoir reviendrait ici à alourdir la procédure substantiellement. Surtout, fixer un délai par rapport à cette notification paraît trop contraignant : il serait soit trop court pour être cohérent avec les adaptations parfois réalisées en fonction de la situation du pays de résidence, soit trop long pour être pertinent . La gestion actuelle pourrait être préservée par une rédaction plus souple renvoyant la fixation du délai à un décret, sans lien nécessaire avec une « notification de contrôle ». La règle actuelle de gestion est d'un délai de trois mois. La commission propose donc de modifier la rédaction de l'article.

Enfin, concernant la mutualisation attribuée au GIP Union retraite peut être discutée. Aux termes de l'article L. 161-17-1, le groupement est bien responsable du pilotage des projets de coordination, de simplification et de mutualisation visant à l'amélioration des relations entre les régimes et leurs usagers. Cependant, si le GIP a eu la charge de la construction de l'outil informatique actuellement en service, c'est bien la Cnav qui assure aujourd'hui le contrôle . Sans remettre en question les missions de « pilotage stratégique » du GIP, il semble pertinent de laisser la gestion opérationnelle assurée selon le schéma actuel. La commission propose ainsi de formuler l'article L. 161-24-3 sous la forme d'une possibilité de mutualisation, dans des conditions définies par les régimes sous la forme d'une convention .

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié par l'amendement n° 199 adopté.

Article 47 quater (nouveau)
Affiliation automatique des bénéficiaires d'un congé de proche aidant
non indemnisés à l'assurance vieillesse des parents au foyer

Cet article, introduit à l'Assemblée nationale, affilie automatiquement à l'assurance vieillesse des parents au foyer du régime général les bénéficiaires d'un congé de proche aidant non indemnisés.

La commission vous demande d'adopter cet article modifié par l'amendement qu'elle a adopté.

I - Le dispositif proposé

Cet article, issu de l'amendement n° 2664 du groupe La République en marche, apporte une simplification et deux clarifications des règles relatives, pour l'essentiel, à l'affiliation des bénéficiaires d'un congé de proche aidant à l'assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF).

A. Une simplification utile : la suppression de la demande d'affiliation pour les personnes ayant déjà touché l'AJPA

L'article L. 381-1 dispose aujourd'hui que l'affiliation à l'AVPF est automatique pour les bénéficiaires de l'allocation journalière de proche aidant (AJPA) - versée aux bénéficiaires d'un congé de proche aidant. Cette affiliation est également automatique pour les bénéficiaires d'un congé de proche aidant, pour les périodes pour lesquelles ils ne touchent pas l'AJPA, mais elle est alors soumise à la production de justificatifs. C'est sans doute une formalité de trop pour les personnes continuant à bénéficier d'un congé de proche aidant, renouvelable dans la limite d'un an, mais ayant épuisé la durée de versement de l'AJPA, fixée, elle, à 66 jours.

L'article précise donc l'article L. 381-1 pour dispenser les bénéficiaires du congé de proche aidant de fournir des justificatifs pour être affiliés à l'AVPF lorsqu'ils ont bénéficié d'une AJPA dans les deux années écoulées ( a) du ).

B. Deux précisions relatives aux catégories de bénéficiaires de l'affiliation automatique à l'AVPF et aux conditions d'accès à l'AJPA

L'article réécrit en outre le cinquième alinéa de l'article L. 381-1 pour appliquer le même régime aux non-salariés qui interrompent leur activité professionnelle pour s'occuper d'un proche présentant un handicap ou une perte d'autonomie d'une particulière gravité. Ceux-ci sont déjà affiliés obligatoirement à l'AVPF pour une durée de trois mois renouvelable dans la limite d'une année. Le b) du toilette l'alinéa en renvoyant plus simplement à la liste de l'article L. 3142-6 du code du travail les cas de figure justifiant une telle interruption de l'activité professionnelle, harmonisant ainsi la rédaction des critères. Il renvoie en outre la mention de la limite d'affiliation d'un an à un nouvel alinéa couvrant le cas des salariés et des non-salariés.

Enfin, L. 168-8 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa disposant que le bénéfice de l'allocation journalière de proche aidant est soumis au respect des conditions de régularité de séjour et de stabilité de résidence en France, telles que prévues aux articles L. 512-1 et L. 512-2 du même code ( ). Cette obligation pèse déjà, aux termes des articles du code du travail relatifs au congé de proche aidant, sur la personne aidée ; étendre aux bénéficiaires de l'AJPA l'application des articles L. 512-1 et L. 512-2, qui visent les allocations familiales du livre V, n'est sans doute pas superfétatoire, même si le cas de figure qu'il s'agit de couvrir semble une hypothèse d'école.

II - La position de la commission : adoption sans modification

La commission vous demande d'adopter cet article modifié par l'amendement de coordination rédactionnelle n° 200.

Article additionnel après l'article 47 quater
Mesures de redressement des comptes de la branche vieillesse

Cet article vise à prévoir des mesures de report de l'âge d'ouverture des droits et d'allongement de la durée d'assurance nécessaire pour une retraite au taux plein.

I - Une dégradation brutale du solde de la branche vieillesse du fait de la crise

A. Un déficit largement majoré sur les prochains exercices

Malgré un léger rebond anticipé en 2021, le solde des régimes de base et du FSV devrait poursuivre sa dégradation avec un déficit prévu à 11,6 milliards d'euros en 2024.

Les déficits prévus à l'horizon 2022-2024 sont tous supérieurs aux niveaux déjà très préoccupants anticipés avant la crise et pour lesquels le Gouvernement souhaitait engager une trajectoire de retour à l'équilibre.

Évolution du solde de la branche vieillesse du régime général

en milliards d'euros

Source : Commission des affaires sociales, d'après données du PLFSS 2021

Évolution du solde de la branche vieillesse (RO+FSV)

en milliards d'euros

Source : Commission des affaires sociales, d'après données du PLFSS 2021

B. Un effet conjoncturel appelé à cesser rapidement

Dans sa note d'étape d'octobre 2020, le Conseil d'orientation des retraites (COR) estime que l'impact de la crise économique sur les retraites devrait cesser d'ici à 2024, le conseil estimant que l'écart de production sera alors résorbé.

Ainsi, après 2024, le déficit du système de retraite ne serait plus que son déficit structurel.

II - Un déficit structurel non résolu

A. Un déficit structurel déjà annoncé

Le rapport du COR de novembre 2019, rédigé avant la crise sanitaire et la crise économique, prévoyait selon les conventions et les scénarios de croissance de - 7,9 à - 26,9 milliards d'euros pour le solde du système de retraite à l'horizon 2030 .

Source : Perspectives des retraites en France à l'horizon 2030 - Rapport du COR, novembre 2019

B. Aucune mesure paramétrique arbitrée en 2020

Alors que « la conférence de financement » mise en place dans le cadre de la réforme des retraites n'a pu arriver au terme de ses travaux, aucune mesure d'ordre paramétrique n'avait été décidée avant la crise pour revenir à l'équilibre .

Force est de constater pourtant que celles-ci sont toujours plus nécessaires. La plongée des déficits rend en effet ce retour à l'équilibre à la fois plus compliqué mais plus impératif pour ce qui représente 266,7 milliards d'euros de dépenses en 2020 pour l'ensemble des régimes de base et du FSV.

III - De nécessaires mesures d'âge

La commission estime qu'il est nécessaire, en responsabilité, de travailler dès cette année au rétablissement de l'équilibre financier et d'amorcer des mesures paramétriques de redressement des comptes du système de retraite .

Soucieuse de préserver le rôle fondamental des partenaires sociaux dans le pilotage du système de retraite français, la commission propose au I de réunir une conférence de financement chargée de formuler des propositions autour des différents paramètres de calcul des pensions . Cette conférence est définie sur le modèle de la conférence réunie par le Gouvernement et prévue à l'article 57 du projet de loi instituant un système universel de retraite.

Si la conférence de financement aboutissait, ce qui est le souhait de la commission, il appartiendrait au Gouvernement de traduire ces propositions dans un projet de loi de réforme des retraites ou au sein de la prochaine loi de financement de la sécurité sociale, ajustant le cas échéant le dispositif proposé dans cet article .

En cas d'échec de cette conférence, les dispositions des II et III s'appliqueraient et participeraient à ce redressement des comptes.

Afin de ne pas porter atteinte au niveau des pensions , la commission retient les deux leviers d'action que sont l'âge d'ouverture des droits - ou âge légal - et la durée d'assurance pour l'accès au taux plein.

Le présent article prévoit ainsi un relèvement progressif de l'âge d'ouverture des droits de deux ans pour le porter à 63 ans au 1 er janvier 2025 pour les générations nées après le 1 er janvier 1965 (1° du II).

Parallèlement, la durée d'assurance nécessaire pour accéder à une pension au taux plein serait également augmentée. Le présent article prévoit ainsi une « accélération » du dispositif de la loi Touraine de 2014, visant à atteindre les 172 trimestres dès la génération 1965 (2° du II).

Le relèvement de l'âge minimum légal ne concerne pas l'âge d'annulation de la décote qui demeure fixé à 67 ans ( 3° du II ).

Le scénario retenu par votre commission entend favoriser le maintien des pensions à leur niveau actuel.

Par cohérence, la commission prévoit la convergence progressive des régimes spéciaux sur ces paramètres , dans des conditions définies par décret ( III ).

Compte tenu de la crise économique en cours , la commission estime préjudiciable à la reprise de faire entrer ces mesures dès le 1 er janvier 2021. Aussi, l'entrée progressive en vigueur de ces mesures est prévue selon un calendrier adapté, à partir du 1 er janvier 2022 .

Le décalage de la mesure est rendu nécessaire par la crise sanitaire et la crise économique, modifie cette trajectoire que la commission attend cependant comparable.

Votre commission réaffirme ainsi solennellement son attachement à un pilotage équilibré et responsable du système des retraites qui en garantisse sa pérennité et la confiance des jeunes générations dans le système par répartition.

Votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet par l'amendement n° 201.

Article 48
Objectifs de dépenses de la branche vieillesse

Cet article fixe les objectifs de dépense de la branche vieillesse pour 2020.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé : des dépenses maintenues mais un solde dégradé

A. Une trajectoire 2020 considérablement heurtée

Les dépenses du régime général poursuivraient en 2020 une progression comparable à celle de 2019, à hauteur de 2,5 % .

Alors que les prestations progresseraient de 2,9 % sous l'effet des mesures de revalorisations différenciées, les transferts diminueraient fortement de 8,3 %. Cette baisse brutale des transferts résulte de la chute de la masse salariale qui est l'un des principaux paramètres de la compensation.

Si les cotisations s'effondreraient de 10,8 %, les recettes de la Cnav montreraient une baisse contenue à 2,3 %.

Les recettes ont en effet été favorisées par le versement exceptionnel du reliquat de la soulte IEG par le FRR et la hausse des transferts du fonds de solidarité vieillesse au titre du chômage.

B. Deux mesures du PLFSS 2021 à impact sur les dépenses de la branche vieillesse

1. Les revalorisations du Ségur

Comme l'indique l'annexe 4 du PLFSS, les revalorisations inscrites dans ce PLFSS, traductions du Ségur de la santé, auront un impact positif sur le solde de la branche en 2021.

La hausse des salaires bruts des personnels non médicaux bénéficiant de ces revalorisations produira une augmentation des assiettes de plusieurs recettes affectées à la branche vieillesse , notamment de la taxe sur les salaires et des cotisations sociales.

La CNAV verrait ainsi ses recettes augmenter de 800 millions d'euros supplémentaires en 2021 , après une première hausse de 100 millions d'euros en 2020. Du côté de la fonction publique hospitalière, la CNRACL verrait ses produits de cotisations augmenter dans les mêmes proportions , de 800 millions d'euros supplémentaires en 2021 après 100 millions d'euros dès 2020.

2. La réforme du congé paternité

La mesure d'allongement du congé paternité aurait un léger impact négatif sur le solde de la branche.

En effet, elle conduirait à réduire légèrement l'assiette des cotisations sociales en remplaçant une partie des salaires par des indemnités journalières.

Ainsi, la CNAV verrait ses produits de cotisations diminuer de 45 millions d'euros en 2021 .

C. Des objectifs de dépenses en progression mesurée

1. Des dépenses en progression modérée sur 2021

Le présent article fixe les objectifs de dépenses de la branche vieillesse pour 2021 :

- à 251,9 milliards d'euros pour les régimes obligatoire de base, au 1° ;

- à 144,7 milliards d'euros pour le régime général de la sécurité sociale, au 2° .

La progression des dépenses serait ainsi pour l'ensemble des régimes de base de 2 % entre 2020 et 2021.

Les dépenses du régime général progresseraient elles de 3,0 %.

Après deux années de sous-revalorisations des pensions de retraite, le Gouvernement prévoit cette année une revalorisation selon les modalités de droit commun, c'est-à-dire sur l'inflation . Le taux sera connu en novembre ; une revalorisation de 0,4 % est attendue.

Pour le régime général, les dépenses seraient aussi tirées par une forte hausse des transferts du fait du dynamisme de la compensation démographique sous l'effet de la reprise économique.

Dans le même temps, les recettes du régime général sont attendues en hausse de 3,1 % l'an prochain. Les recettes de la branche vieillesse étant principalement des cotisations assises sur les revenus d'activité, la reprise économique sera déterminante.

Cet article a été adopté sans modification par l'Assemblée nationale.

2. Une trajectoire de dépenses cependant dynamique

Si les dépenses de la branche vieillesse sont prévues avec une progression contenue sur l'exercice 2021, les prévisions de dépenses pour les exercices à venir montrent une croissance soutenue jusqu'en 2024.

Les dépenses progresseraient ainsi de 2,3 % par an en moyenne pour les régimes de base et 2,9 % par an pour le seul régime général.

D. Des soldes durablement dégradés

Conséquence du dynamisme des dépenses et de la baisse des recettes, le solde de la branche apparaît nettement dégradé par rapport à la trajectoire d'avant crise et ce tant pour le régime général que pour l'ensemble des régimes de base.

Ainsi, pour 2021, le solde de la branche vieillesse devrait être :

- de - 7,3 milliards d'euros pour le régime général , quand - 3,9 milliards d'euros étaient anticipés lors du PLFSS 2020 pour ce même exercice ;

- de - 6,6 milliards d'euros pour l'ensemble des régimes de base, quand - 4,4 milliards d'euros étaient anticipés l'an dernier.

Solde de l'ensemble des régimes obligatoires de base
de la branche vieillesse

en milliards d'euros

Source : Commission des affaires sociales, d'après données du PLFSS 2021

Solde de la branche vieillesse du régime général

en milliards d'euros

Source : Commission des affaires sociales, d'après données du PLFSS 2021

II - La position de la commission : l'adoption de cet article malgré des réserves

La commission constate les prévisions de dépenses pour la branche vieillesse pour l'exercice 2021.

En outre, elle souligne si aucune mesure relative aux dépenses n'est présentée dans ce projet de loi de financement par le Gouvernement, la modération de la progression des dépenses de l'assurance vieillesse demeurera cependant sur 2021, du seul fait de revalorisations basses résultant d'une faible inflation attendue.

La commission regrette qu'aucun signal ne soit envoyé par le Gouvernement concernant la dégradation soudaine mais durable du solde de la branche vieillesse. À ce titre, elle vous propose d'adopter un amendement portant article additionnel visant à adopter des mesures permettant de rétablir l'équilibre financier de la branche.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 49
Objectifs de dépenses de la branche famille

Cet article fixe les objectifs de dépenses de la branche famille à 49,3 milliards d'euros pour 2021.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

Conformément à l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, le présent article fixe l'objectif de dépenses de la branche famille à 49,3 milliards d'euros pour 2021.

Après deux années marquées par un retour à l'équilibre de la branche (soldes de 0,5 Md€ en 2018 et de 1,5 Md€ en 2019), les comptes de la branche famille devraient se dégrader en 2020 et afficher un déficit de 3,3 milliards d'euros , du fait de la crise sanitaire.

En 2020, les recettes (74 Md€) diminueraient de 8,4 % par rapport à 2019 du fait de la contraction de l'activité économique , qui a pour effet de diminuer les produits des cotisations (- 7,2 %) et de la CSG (- 5,2 %). En outre, sans lien avec la crise, les impôts, taxes et contributions affectées à la branche diminueraient de 15,8 % principalement du fait d'une réaffectation d'une part de la taxe sur les salaires à la branche vieillesse.

Les dépenses (50,4 Md€) augmenteraient quant à elles de 1 %. Les prestations légales seraient quasiment stables (0,4 %) sous l'effet, d'une part, de la revalorisation exceptionnelle de l'allocation de rentrée scolaire intervenue en août 2020. D'autre part, les dépenses d'accueil du jeune enfant diminueraient de - 6,1 % en raison de la baisse du recours à la garde d'enfants pendant le confinement. Les dépenses d'action sociale progresseraient de 3,3 %, la CNAF ayant maintenu ses financements aux établissements d'accueil du jeune enfant pendant la crise.

Soldes de la branche famille pour les années 2011 à 2021

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales

L'exercice 2021 serait marqué par un excédent de 1,1 milliard d'euros. A la faveur de la reprise de l'activité économique, les recettes de la branche progresseraient de 7 % pour atteindre 50,4 milliards d'euros en 2021. Les dépenses de la branche diminueraient de 2 % en 2021, le présent article fixant l'objectif de dépenses de la branche famille à 49,3 milliards d'euros.

Évolution des prévisions des dépenses et des recettes
de la branche famille pour 2021

(en milliards d'euros)

Dépenses

Recettes

Solde

LFSS 2020

50,3

51

0,7

CCSS septembre 2020

50,4

51,2

0,9

PLFSS 2021

49,3

50,4

1,1

La commission des comptes de la sécurité sociale prévoyant un solde hors mesures nouvelles à 0,9 milliard d'euros, les mesures du PLFSS 2021 concernant la branche famille auraient un effet de + 0,2 Md€ sur le solde. Cet effet est dû à l'allongement du congé paternité (- 0,2 Md€ en 2021) et à la hausse du produit des cotisations (+ 0,4 Md€) attendue en raison des revalorisations prévues par le Ségur de la santé.

Impact des mesures prévues par le PLFSS 2021
sur le solde de la branche famille (en milliards d'euros)

Solde tendanciel

0,9

Congé paternité

-0,2

Effet des revalorisations du Ségur de la santé

+0,4

Solde PLFSS 2021

1,1

Source : PLFSS 2021, annexe 4

Par ailleurs, le financement de l'allocation d'éducation pour l'enfant handicapé (Aeeh) sera transféré à la nouvelle branche autonomie sans impact sur le solde de la branche famille, les moindres dépenses résultant de ce transfert étant neutralisées par une baisse, à due proportion, du produit de taxes affectées à la branche.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de la commission : adoption conforme

La rapporteure prend acte de la dégradation significative des comptes de la branche en 2020, rendue nécessaire par les mesures à prendre pour faire face à la crise sanitaire. Elle salue en effet les décisions prises par le Gouvernement et par la branche famille pour soutenir les familles en difficultés, notamment par le biais de la revalorisation de l'allocation de rentrée scolaire en août dernier, et les acteurs de la petite enfance, aidés par les CAF grâce au déploiement d'aides exceptionnelles.

Le retour à l'équilibre de la branche pour 2021 malgré l'inscription en base de 500 millions d'euros de dépenses nouvelles en année pleine apparait comme une perspective favorable, bien qu'incertaine au regard de la situation sanitaire actuelle et des conséquences que celle-ci aura dans les mois à venir sur le plan économique et social.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 49 bis (nouveau)
Habilitation à légiférer par ordonnances
pour adapter le droit de la sécurité sociale applicable à Mayotte

Cet article, inséré à l'Assemblée nationale, propose d'habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances afin d'adapter le droit de la sécurité sociale applicable à Mayotte en matière de prestations familiales, d'assurance maladie et afin de mettre en oeuvre la nouvelle branche autonomie.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé

Le présent article, issu d'un amendement du Gouvernement adopté à l'Assemblée nationale, propose d'habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances afin d'adapter le droit de la sécurité sociale applicable à Mayotte.

• L'habilitation prévue pour un délai de douze mois permettrait au gouvernement de prendre les mesures suivantes, en vertu du I du présent article :

- étendre à Mayotte l'application de l'allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie, de l'allocation journalière de proche aidant, du congé de paternité et d'accueil de l'enfant, de l'allocation journalière de présence parentale et du complément de mode de garde ( ) ;

- valider rétroactivement des périodes d'assurance vieillesse pour les ressortissants du régime de retraite de base obligatoire de sécurité sociale applicable aux résidents à Mayotte ( ) ;

- modifier la composition et la gouvernance de la caisse de sécurité sociale de Mayotte ( ) ;

- rapprocher la législation applicable à Mayotte de celle des autres départements en matière d'assurance maladie ( ) ;

- mettre en oeuvre dans ce territoire la branche autonomie de la sécurité sociale ( ) ;

- adapter les conditions d'ouverture de droit aux prestations familiales servies à Mayotte ( ).

• Le II précise qu'afin de prendre en compte les caractéristiques locales, ces modifications de la législation applicable à Mayotte pourront s'effectuer de manière progressive ( ) et avec un contenu adapté ( ). En outre, le rapprochement de la législation pourra s'effectuer en modifiant la législation applicable à Mayotte ( ) ou en adaptant certaines dispositions du code de la sécurité sociale pour les rendre directement applicable à ce territoire ( ).

• Le III précise enfin qu'un projet de loi de ratification sera déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de chaque ordonnance.

II - La position de la commission : adoption conforme

Le département de Mayotte fait l'objet de règles dérogatoires en matière de droit de la sécurité sociale, en vertu notamment de l'ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l'extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte et de l'ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte.

Depuis lors, des mesures de convergence ont été progressivement prises afin de rapprocher la législation applicable à Mayotte de celles des autres départements , en particulier depuis que Mayotte a acquis le statut de département le 31 mars 2011. Elles ont en effet été engagées sur la base de l'ordonnance n° 2011-1923 du 22 décembre 2011 relative à l'évolution de la sécurité sociale à Mayotte dans le cadre de la départementalisation, telles que l'alignement du montant des allocations familiales à horizon 2026. Elles ont été poursuivies sur le fondement de la loi du 28 février 2017 relative à l'égalité réelle outre-mer 292 ( * ) . La LFSS pour 2020 293 ( * ) a également prévu le rapprochement du droit commun des règles applicables à Mayotte s'agissant de l'allocation de rentrée scolaire et de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé.

Les mesures proposées poursuivent donc ce mouvement d'adaptation progressive du droit de la sécurité sociale à Mayotte . Elles permettront, d'une part, de rapprocher des autres départements les règles encadrant l'attribution des prestations sociales à Mayotte et d'y étendre le bénéfice de certaines allocations, ce qui semble justifié au regard du statut de département de ce territoire acquis en 2011. Elles permettront en outre d'appliquer de manière adaptée à ce territoire les réformes en cours de de mise en oeuvre, telles que la création de la branche autonomie.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 50
Objectifs de dépenses de la branche autonomie

Cet article, dans sa rédaction initiale, fixe les objectifs de dépenses de la branche autonomie à 31,2 milliards d'euros pour 2021.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé : une branche autonomie encore dans les langes

A. Une branche au périmètre encore imprécis

1. Un périmètre non encore stabilisé

Le législateur a, par la loi du 7 août 2020 294 ( * ) , modifié le premier chapitre du code de la sécurité sociale pour affirmer solennellement que « la Nation affirme son attachement au caractère universel et solidaire de la prise en charge du soutien à l'autonomie, assurée par la sécurité sociale », et estimé en conséquence opportun de créer une nouvelle branche de sécurité sociale chargée de la gestion du risque de perte d'autonomie, dont la gestion a été confiée à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

La clarté des débats parlementaires relatifs au premier exercice de la branche autonomie devra cependant s'accommoder du caractère inachevé de la branche, dont le chantier ne pouvait certes prendre fin en trois mois. L'annexe 10 du PLFSS avance que « le périmètre retenu en 2021 pourra être amené à évoluer dès 2022. Le périmètre de la branche n'est pas pour autant figé dans le temps : il pourra évoluer [...] à l'issue de travaux d'expertise complémentaires ». Le dossier de presse inquiétait davantage en indiquant, à propos du périmètre de la branche, qu'« il s'agit d'un périmètre provisoire qui a vocation à évoluer en fonction des concertations à venir ». Or celles-ci, qui prennent la forme du « Laroque de l'autonomie », ont été lancées officiellement par la ministre déléguée chargée de l'autonomie, Mme Brigitte Bourguignon, le 17 septembre 2020.

2. Un périmètre à ce stade minimal

Le rapport de préfiguration de l'architecture de la nouvelle branche autonomie, remis le 15 septembre 2020 au Premier ministre par M. Laurent Vachey 295 ( * ) , souligne que le périmètre de la branche autonomie ne doit pas se limiter à l'actuelle CNSA, « non seulement parce que le sens de la création d'une 5 ème branche n'apparaîtrait plus, mais surtout parce que la dispersion actuelle de dispositifs qui se sont développés de façon indépendante nécessite cet effort de recomposition ». Le rapport ajoute cependant que « la branche autonomie doit aussi ne pas empiéter sur les politiques de droit commun, qui doivent être inclusives et donc prendre en compte les besoins spécifiques des personnes âgées et des personnes situation de handicap : la frontière n'est pas toujours évidente à tracer ».

Au terme de son analyse, Laurent Vachey préconise de loger dans la branche autonomie, outre les dépenses actuelles de la CNSA, pas moins d'une douzaine d'autres dispositifs représentant un total d'environ 42 milliards d'euros. Le transfert aurait pu se faire dès 2021 pour une partie significative d'entre eux, ne nécessitant pas de changements de modes de gestion - tels l'allocation supplémentaire d'invalidité ou les unités de soins de longue durée -, ou en 2022 pour ceux nécessitant un changement d'organisation plus complexe. Ces transferts d'enveloppes, précise encore le rapport, ne génèrent pas de coûts budgétaires.

Récapitulatif du périmètre de la branche proposé par le rapport Vachey

Source : Rapport de M. Laurent Vachey, septembre 2020

Le choix du Gouvernement est finalement timide , qui n'élargit le périmètre des dépenses au-delà de celles que gère déjà la CNSA qu'à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé , ressortissant aujourd'hui à la branche famille, dont le montant s'élevait en 2019 à 1,1 milliard d'euros.

B. Un besoin de pilotage consolidé

1. Les dépenses soumises au Parlement : vue générale

La comparaison dans le temps des périmètres de dépense entrant dans le champ de l'autonomie n'est guère commode, à plus forte raison en période exceptionnelle. Se superposent en effet, sous les enveloppes de mesures liées à la crise du coronavirus ou issues du Ségur de la santé :

- un premier indicateur de dépense constitué par les sous-objectifs de l'Ondam délégués à la CNSA pour financer les établissements et services médico-sociaux (ESMS). En 2020, dernière année d'abondement de la caisse par l'assurance maladie puisque le présent PLFSS la dote de ressources entièrement propres, cette enveloppe représente 20,9 milliards d'euros ;

- un deuxième agrégat, l'objectif global de dépense (OGD), qui ajoute aux crédits d'assurance maladie une partie des ressources propres de la caisse contribuant aussi au financement des ESMS. L'OGD ne représente encore que 85 % des dépenses de la CNSA ;

- la CNSA finance en outre par ses ressources propres des prestations - sous forme de concours au financement par les départements des dépenses d'APA et de PCH -, et diverses autres dépenses d'intervention, ainsi que le retrace le tableau ci-dessous, issu des comptes de la CNSA.

Dans le présent PLFSS pour 2021, la vue du Parlement se dégage en franchissant non pas un mais trois paliers puisqu'il vote pour la première fois sur un périmètre excédant le premier agrégat, celui de l'Ondam médico-social, pour les englober tous, ainsi que les dépenses de financement de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH).

2. Des dépenses structurellement dynamiques

En 2019, les dépenses de la CNSA ont représenté un montant de 25,9 milliards d'euros , dont 22,3 milliards au titre de l'objectif global de dépense pour les établissements et services médico-sociaux et 3 milliards d'euros de prestations. Le dynamisme de l'OGD, en hausse de 2,6 %, expliquant 2,2 points de l'augmentation des charges de la CNSA, s'explique par la mise en oeuvre de la feuille de route personnes âgées et l'accélération de la montée en charge de la réforme tarifaire des Ehpad. Les concours aux départements sont, eux, en légère baisse en raison de régularisation de trop-versés. L'accroissement des recettes en provenance de l'assurance maladie a permis de couvrir ces charges et de maintenir les comptes de la CNSA en excédent de 100 millions d'euros.

Évolution des dépenses entrant dans le périmètre la branche autonomie

Source : Annexe 10.

En 2020, l'objectif global de dépenses s'est accru de 11 %, en raison de la poursuite de la réforme tarifaire et, surtout, de la crise sanitaire, portant les dépenses de la CNSA à 28,4 milliards d'euros , en dépit de la baisse de 6 % des concours aux départements. Mais, même en retirant les mesures exceptionnelles de l'OGD, la dépense a augmenté à un rythme soutenu pour atteindre 26,9 milliards d'euros. Les ressources propres de la caisse ont diminué de 8 % sous l'effet de la chute de l'activité mais la révision de la dotation Ondam, de plus de 10 %, a permis de parer à la couverture de ces charges nouvelles, conduisant toutefois la CNSA à afficher un déficit d'environ 600 millions d'euros.

Les surcoûts liés à la crise sanitaire en 2020

Les sous-objectifs de l'Ondam personnes âgées et personnes handicapées ont été réévalués d'environ 1,5 milliard d'euros pour répondre aux besoins. Les aides se décomposent ainsi :

- 750 M€ pour le versement de la prime exceptionnelle « Covid » (de 1 500 € pour le personnel des 40 départements les plus exposés à l'épidémie et de 1 000 € dans les autres) à hauteur de 506 M€ dans le secteur des personnes âgées et 244 M€ dans celui des personnes handicapées ;

- 675 M€ afin de compenser les surcoûts exceptionnels des Ehpad (231 M€ en juin, puis 200 M€ début octobre) et les pertes de recettes découlant du ralentissement des nouvelles admissions ;

- 105 M€ pour compenser les surcoûts exceptionnels des établissements et services du secteur des personnes handicapées (20 M€ au titre de surcoûts immédiats, et 85 M€ pour développer des solutions de recours) ;

L'annexe 10 précise que la première étape de revalorisation des rémunérations des professionnels des établissements de santé et des Ehpad s'est en outre traduite par une augmentation de l'OGD PA de 275 M€. Cette mesure consiste à revaloriser l'ensemble des personnels de ces établissements de 90 euros nets (80 euros dans le secteur privé lucratif) dès le 1 er septembre 2020.

3. Une hausse des dépenses tirée en 2021 par les mesures issues du Ségur

En 2021, les dépenses de la branche s'établissent à 31,2 milliards d'euros . La diminution des dépenses totales de la CNSA - elles passent de 28,4 à 27,9 milliards d'euros -, du fait de la disparition des mesures exceptionnelles liées à la crise sanitaire, est plus que compensée par les revalorisations salariales et les aides à l'investissement décidées dans le cadre du Ségur de la santé, dont l'impact sur les dépenses est estimé à 2,1 milliards en 2021 296 ( * ) , ainsi que par l'inclusion de 1,2 milliard d'euros d'AEEH dans le périmètre des dépenses de la branche. De plus, les dépenses de prestations augmenteraient de nouveau pour s'établir à 3 milliards d'euros.

Les mesures du Ségur forment les trois quarts des mesures nouvelles pour 2021 ; la poursuite de la convergence tarifaire, toujours dans le secteur des personnes âgées, représente 13 % des mesures nouvelles.

Parmi les 10 % restants, dans le champ du handicap, figurent les 100 millions d'euros consacrés à l'accélération du déploiement de solutions d'accueil et d'accompagnement adaptées - les communautés 360 -, la poursuite de la stratégie nationale autisme et du plan de prévention des départs en Belgique, et le financement de l'extension de la PCH aux besoins attachés à la parentalité. Annoncée à l'occasion de la dernière conférence nationale du handicap de février dernier, elle entrera en vigueur en 2021 et sera financée par la CNSA à partir de 2022 au moyen d'un transfert de recettes depuis la branche famille.

Évolution des dépenses de la branche autonomie (en milliards d'euros)

2019

2020
(p)

2021 (texte
initial)

CNSA - Établissements et services médicosociaux, ou OGD (hors Ségur)

22,3

23,3

24,2

dont Ondam (hors mesures de crise sanitaire)

20,9

21,6

-

dont établissements et services pour personnes âgées

11,7

dont établissements et services pour personnes handicapées

12,4

CNSA - prestations

3

2,8

3

CNSA - autres

0,5

0,8

0,7

TOTAL CNSA (hors Ségur et mesures exceptionnelles)

25,8

26,9

27,9

Mesures exceptionnelles liées à la crise sanitaire

-

1,5

-

TOTAL CNSA (hors Ségur)

25,8

28,4

27,9

Ségur de la santé

0,3

2,1

AEEH

1,1

1,1

1,2

Périmètre de la branche autonomie

26,9

29,8

31,2

Source : Commission des affaires sociales, DSS

4. Des perspectives pluriannuelles déjà dégradées

La nouvelle structure de ressources de la CNSA a été décrite aux articles 16 et 18 : la CNSA devient affectataire de 16,6 milliards d'euros supplémentaires de CSG assise sur les revenus d'activité, de 6,5 milliards de CSG assise sur les revenus de remplacement et de 2,6 milliards de CSG assise sur les revenus du capital, pour la plupart affectées jusqu'alors à la branche maladie.

La branche autonomie est lancée à l'équilibre en 2021, mais il faut observer que le financement par des recettes consolidées de CSG des mesures de revalorisation salariale dans les Ehpad décidées dans le cadre du Ségur de la santé n'y suffit pas : la couverture des dépenses par les ressources de la caisse n'est complète que grâce aux crédits de relance communautaire destinés à financer le plan d'investissement .

Il est en outre regrettable que les moyens ne soient pas donnés à la branche autonomie de se maintenir à l'équilibre au-delà de 2021 : l'annexe B du PLFSS prévoit un résultat déficitaire de la branche en 2022 et 2023, puis un résultat excédentaire en 2024, date à laquelle deviendra effectif le transfert de 0,15 point de CSG supplémentaire revenant aujourd'hui à la Cades, conformément aux dispositions de la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l'autonomie.

Perspectives pluriannuelles des comptes de la branche autonomie

(en milliards d'euros)

2021

2022

2023

2024

Recettes

31,2

32,1

33,1

36,4

Dépenses

31,2

32,3

33,2

34,1

Solde

0

- 0,3

- 0,2

2,3

Source : Annexe B du PLFSS pour 2021

II - Les modifications apportées à l'Assemblée nationale

Le Gouvernement a déposé à l'Assemblée nationale un amendement n° 2755 majorant de 420 millions d'euros l'objectif de dépense, pour le fixer donc à 31,6 milliards d'euros, afin de tenir compte :

- de  l'impact de l'amendement n° 2714 adopté à l'article 8, qui avance au 1 er décembre 2020 la deuxième tranche de revalorisation salariale, prévue initialement en mars 2021 dans le cadre du Ségur de la santé, ce qui représente un montant de 150 millions d'euros ;

- de la majoration de 120 millions d'euros, par l'amendement n° 2719 adopté à l'article 16, des concours versés par la CNSA aux départements au titre de l'APA et de la PCH ;

- du soutien à l'attractivité des métiers du domicile par l'amendement n° 2522 créant un article 25 A chargeant la CNSA de distribuer à cette fin aux départements une aide de 150 millions d'euros.

En conséquence, le tableau des perspectives de la branche ferait apparaître un déficit dès l'an prochain :

Perspectives pluriannuelles des comptes de la branche famille
après examen à l'Assemblée nationale

(en milliards d'euros)

2021

2022

2023

2024

Recettes

31,3

32,2

33,2

36,6

Dépenses

31,6

32,7

33,6

34,5

Solde

- 0,3

- 0,5

- 0,3

2,1

Source : Annexe B du PLFSS pour 2021 dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale en première lecture.

III - La position de la commission : adoption conforme

La commission se réjouit que la vue du Parlement sur les dépenses de soutien à l'autonomie soit ainsi dégagée à l'ensemble des dépenses de la CNSA, augmentées de celles de l'AEEH.

Elle regrette cependant que les conséquences de la création d'une nouvelle branche n'aient pas été pleinement tirées, qui auraient dû conduire à doter la CNSA d'un rôle de pilotage plus étendu. Elle regrette également que les améliorations opérationnelles de la prise en charge du grand âge soient une fois de plus renvoyées à l'examen d'une hypothétique future loi grand âge et autonomie, dont le financement est rien moins qu'assuré.

En dépit de ces réserves, la commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 51
Prévisions des charges des organismes
concourant au financement des régimes obligatoires (FSV)

Cet article vise à fixer la prévision des charges du fonds de solidarité vieillesse.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé : des dépenses stabilisées

A. Une situation 2020 dégradée par la crise sanitaire

La tendance baissière que connaissaient les dépenses du fonds a été freinée par les conséquences de l'épidémie. Les dépenses pour 2020 seraient ainsi supérieures de 4,8 % à l'exercice 2019.

Les prises en charges de cotisations augmenteraient fortement en 2020 :

- l'augmentation sensible des effectifs de chômeurs (8,8 %) conduit à une hausse du transfert des prises en charge des cotisations de 9 %, soit 1 milliard de plus qu'en 2019 ;

- la mise en place d'un transfert exceptionnel vers le régime général au titre des périodes d'activité partielle dans les régimes alignés représente un coût supplémentaire de 200 millions d'euros .

En outre, les prises en charge de cotisations maladie , invalidité et AT-MP montreraient également un fort dynamisme, à hauteur de 11 % . Cela résulte notamment de la création de nouvelles indemnités journalières durant l'épidémie.

Du côté des prestations, la fin de la contribution au minimum contributif conduit à une baisse d'1 milliard d'euros des dépenses. La dernière revalorisation exceptionnelle du minimum vieillesse fait cependant progresser les dépenses de 350 millions d'euros.

Une prise en charge des droits à la retraite de base au titre de l'activité partielle

Le recours massif à l'activité partielle durant la crise sanitaire a mis en lumière une faiblesse potentielle dans la constitution de droits à la retraite pour les salariés. En effet, l'activité partielle, non soumise à cotisations, ne générait aucun droit à la retraite de base.

Pour les rémunérations les plus faibles, il existait ainsi un risque de ne pas totaliser une rémunération supérieure à 600 heures-smic sur l'année, nécessaire pour valider 4 trimestres d'assurance retraite en 2020.

La loi du 17 juin 2020 portant diverses dispositions urgentes relatives à la crise sanitaire a prévu la validation de droits à la retraite dans les régimes alignés au titre des périodes d'activité partielle du 1 er mars au 31 décembre 2020 . Les périodes d'activité partielles sont ainsi p rises en compte pour le calcul de la durée d'assurance nécessaire pour le taux plein ; il s'agit ici de trimestres validés et non cotisés.

Sur le modèle des autres validations de droits à la retraite pour les actifs au titre du chômage indemnisé ou de la maladie par exemple, le FSV prend en charge les cotisations pour l'acquisition de ces droits, se traduisant par un transfert vers la CNAV.

Le montant de ce transfert est, comme pour les autres périodes assimilées, calculé en fonction du taux de cotisation de droit commun, d'une assiette égale au Smic et d'une estimation du nombre d'heures d'activité partielle effectuées en 2020 . N'est cependant retenue qu'une fraction de ce produit représentative du pourcentage des assurés pour lesquels cet octroi de droits aboutirait à augmenter le nombre de trimestres validés dans l'année.

Pour 2020, le Gouvernement indique que les hypothèses retenues pour calibrer le montant du transfert du FSV au titre de l'activité partielle reposent sur des projections, à ce stade encore incertaines , du recours à l'activité partielle (hypothèse de 2,5 milliards d'heures dans l'année, réparties entre 8 millions de salariés ) et de la part des personnes pour lesquelles le maximum de 4 trimestres est déjà validé durant l'année (hypothèse de la CNAV de 94,5 %).

Ainsi, sur 2020, 440 000 salariés bénéficieraient de la mesure, et le transfert correspondant s'élèverait à 245 millions d'euros. Ce transfert sera ajusté en fonction des données constatées.

B. Une baisse des dépenses prévues pour 2021

Le présent article fixe la prévision des charges du fonds de solidarité vieillesse pour 2021 à 19,2 milliards d'euros, soit 500 millions d'euros de moins que sur le montant rectifié pour 2020, ou 2,6 %.

Cette baisse résulterait notamment du moindre coût pour le fonds de la prise en charge du chômage sur 2021 , le Gouvernement tablant sur une reprise économique l'an prochain.

Ainsi, si les prises en charge de prestations au titre du minimum vieillesse qui progresseraient encore à hauteur d'1,8 % , les autres prises en charges connaîtraient une diminution du fait du rétablissement de la situation économique : les prises en charge de cotisations sont ainsi attendues en baisse de 3,8 % .

La trajectoire de dépenses du FSV est stable pour les années suivantes, avec une prévision à 19,3 milliards d'euros en 2024.

Il convient de noter une évolution du côté des recettes du fonds, modifiées cette année, modifiées en 2021 du fait de la création de la nouvelle branche autonomie . Une partie de sa fraction de CSG sur les revenus du capital, à hauteur de 2,6 milliards d'euros, serait affectée à la nouvelle branche tandis que sa fraction de CSG sur les revenus du remplacement augmenterait à due concurrence. Ce changement n'a pas d'impact sur le solde.

C. Un solde à la trajectoire dégradée du fait de la crise sanitaire

Comme pour la branche vieillesse, la contraction de l'activité économique a conduit à une baisse brutale des ressources du fonds qui, conjuguée à l'augmentation des dépenses, a produit une dégradation importante du solde.

Si les recettes du fonds et donc son solde devraient se rétablir progressivement au cours des prochaines années, les prévisions jusqu'en 2024 montrent des déficits bien supérieurs aux prévisions de 2020.

Solde de l'ensemble des régimes obligatoires de base
de la branche vieillesse

en milliards d'euros

Source : Commission des affaires sociales, d'après données du PLFSS 2021

II - Les modifications apportées à l'Assemblée nationale : une pérennisation de la prise en compte de l'activité partielle

Cet article a été adopté sans modification par l'Assemblée nationale.

Cependant, les dispositions relatives à la validation des périodes d'activité partielle au titre des droits à la retraite de base devraient être pérennisées par l'article 6 bis introduit par un amendement du Gouvernement. Celles-ci auront un impact sur les dépenses futures du fonds.

III - La position de la commission : l'adoption de cet article

La commission constate les dépenses prévues en baisse pour 2021 après une hausse sensible sur 2020, à 19,7 milliards d'euros, soit 800 millions d'euros d'écart à la prévision.

Alors que la CADES doit reprendre progressivement les 9,9 milliards d'euros de déficits cumulés du FSV, la recherche d'un équilibre financier durable doit être poursuivie.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 52 (nouveau)
Rapport sur la capacité d'accueil dans le secteur médico-social

Cet article prévoit que le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la capacité d'accueil des enfants et adultes handicapés dans le secteur médico-social.

La commission vous demande de supprimer cet article.

I - Le dispositif proposé

Cet article, issu de l'amendement n° 2300 cosigné par une trentaine de députés du groupe La République en marche, dispose que dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la capacité d'accueil dans le secteur médico-social, afin d'accueillir des enfants et des adultes souffrant de handicap. Ce rapport se voit confier la charge de :

• présenter la capacité d'accueil de ces structures pour tous les âges de la vie ;

• dresser une cartographie des établissements existants sur le territoire ;

• identifier le nombre de jeunes adultes maintenus en structures pour enfants et adolescents en situation de handicap au titre du dispositif prévu à l'article L. 242-4 du code de l'action sociale et des familles ;

• présenter les établissements pour adultes construits sur un modèle inclusif ou d'habitat diffus ;

• présenter l'impact en création ou en transformations de places dans les programmations prévues dans les schémas d'organisation sociale et médico-sociale et les programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie.

II - La position de la commission : suppression de l'article

La CNSA, chargée de la gestion du risque autonomie couvert par une nouvelle branche de sécurité sociale, s'est vu confier par l'article 16 du présent texte, qui rationalise ses missions, celle d'assurer « la collecte et la valorisation des données relatives aux besoins et à l'offre de services et de prestations », mission dont la convention d'objectifs et de gestion qui la lie à l'État pourra éventuellement préciser les contours.

En toute hypothèse, il ne devrait pas être nécessaire de requérir la remise d'un rapport dans six mois pour obtenir de telles informations.

En conséquence, la commission vous demande de supprimer cet article.

Article additionnel après l'article 52
Expérimentation d'un conventionnement
entre les différentes autorités tarifaires des structures cofinancées
afin d'organiser des délégations de compétences

Cet article autorise les autorités de tarification compétentes à établir par convention une délégation de compétence d'autorisation et de tarification des établissements et services pour personnes âgées au profit de l'une d'entre elles.

Cet article dispose qu'à titre expérimental, pour une durée de cinq ans, les autorités compétentes en matière de tarification des établissements et services destinés aux personnes âgées peuvent, par convention, organiser au profit de l'une d'entre elles la délégation de la compétence de fixation et de révision des tarifs attribués à ces établissements.

Faute d'être saisi de la réforme du grand âge et de l'autonomie promise depuis maintenant deux ans par le Gouvernement, le Parlement est fondé à proposer toute amélioration opérationnelle de la prise en charge des personnes âgées et handicapées. En l'espèce, il s'agit ici de proposer un assouplissement des règles de gouvernance du secteur, dans la lignée des pistes de réflexions les plus récemment versées au débat public.

Le rapport remis le 14 septembre dernier au Premier ministre par M. Laurent Vachey 297 ( * ) estime ainsi que dans un esprit « de simplification, il serait légitime d'ouvrir la possibilité de délégations de compétences en matière d'autorisation et de tarification des ARS vers les départements volontaires ». Cette préconisation converge avec celles des travaux du Sénat les plus récents.

Le rapport de la mission d'information présidée et rapportée par nos collègues Arnaud Bazin et Cécile Cukierman 298 ( * ) estimait ainsi en septembre que « l'enchevêtrement des compétences [...] entre l'État (via les ARS) et les départements est en effet source de blocages, de perte d'efficience et d'opacité pour les usagers [, constat qui] s'applique tout particulièrement à la gestion des Ehpad ». Ce diagnostic et celui des présidents Gérard Larcher, Philippe Bas et Jean-Marie Bockel en juillet 299 ( * ) convergent vers l'idée de confier aux départements, ne serait-ce qu'à titre expérimental, le pilotage des Ehpad.

La commission vous demande d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé (amendement n° 203).


* 229 Rapport d'information Sénat n° 545 (2018-2019).

* 230 « La lutte contre les fraudes aux prestations sociales : des progrès trop lents, un changement d'échelle indispensable », communication à la commission des affaires sociales du Sénat, septembre 2020.

* 231 Rapport d'information Sénat n° 699 (2019-2020).

* 232 IGF et IGAS, « Les coûts de l'assurance maladie », septembre 2013.

* 233 Lors de l'examen de la proposition de loi déposée par notre collègue Philippe Mouiller sur l'instauration d'une carte Vitale biométrique (n° 517, 2018-2019).

* 234 Rapport de la commission d'enquête relatif à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales, publié le 8 septembre 2020.

* 235 https://www.ordre-infirmiers.fr/la-profession-infirmiere/annuaire.html

* 236 En 2018, d'après la Drees : http://www.data.drees.sante.gouv.fr/TableViewer/tableView.aspx?ReportId=3704

* 237 Loi n° 2006-1668 portant création d'un ordre national des infirmiers.

* 238 Décret n° 2018-596 du 10 juillet 2018, codifié aux articles D. 4311-52-2 et suivants du code de la santé publique.

* 239 Rapport d'information Sénat n° 699 (2019-2020).

* 240 Il s'agit de l'article L. 162-15-1 du code de la sécurité sociale.

* 241 Rapport d'information Sénat n° 699 (2019-2020).

* 242 Compte rendu des commissions du Sénat, 8 septembre 2020.

* 243 Rapport d'information Sénat n° 699 (2019-2020).

* 244 Voir le commentaire de l'article 26 du présent projet de loi.

* 245 Décision n°2020-04 du 4 juin 2020 fixant pour 2020 le montant des contributions aux budgets des agences régionales de santé pour le financement des groupes d'entraide mutuelle, de la méthode d'action pour l'intégration des services d'aide et de soins dans le champ de l'autonomie mentionnés au I de l'article L. 14-10-5 du code de l'action sociale et des familles, et des crédits destinés au financement du forfait pour l'habitat inclusif.

* 246 Annexe 10 au PLFSS.

* 247 Annexe 10 du PLFSS.

* 248 Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

* 249 Voir le commentaire de l'article 26.

* 250 Cf. article 7 du PLFSS.

* 251 Cf. article 8 du PLFSS rectifiant l'Ondam 2020 à hauteur initialement de 10,1 milliards d'euros.

* 252 Ce montant correspondant à l'évaluation de l'objectif global de dépenses (OGD) pour 2021 qui aurait figuré en charges de la CNAM en l'absence de création de la branche autonomie. Il résulte de l'addition de :

- 22,8 milliards d'euros d'Ondam médico-social tendanciel, avant mesures nouvelles (d'après les évaluations issues des travaux de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2020), auparavant financés par la CNAM ;

- 1,4 milliard d'euros de financement CNSA sur ses recettes propres ;

- 1,7 milliard d'euros de dépenses nouvelles au titre du Ségur de la Santé.

* 253 Cf. article 37 du PLFSS.

* 254 Contre - 29,8 milliards d'euros en 2020 et - 19,0 milliards d'euros en 2021 dans la version initiale du PLFSS. Ce niveau est dans tous les cas supérieur au déficit agrégé du régime général de la sécurité sociale et du FSV observé en 2010 après la crise financière (28 milliards d'euros).

* 255 Loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l'autonomie.

* 256 Cf. article 50 du PLFSS fixant l'objectif de dépenses de la branche « autonomie ».

* 257 « Les comptes de la sécurité sociale », septembre 2020.

* 258 Cf. notamment le rapport d'information n° 569 (2017-2018) de Catherine Deroche, Yves Daudigny et Véronique Guillotin, « Médicaments innovants : consolider le modèle français d'accès précoce », Sénat, 13 juin 2018.

* 259 Avis n° 2020-3 du 15 octobre 2020.

* 260 En application de l'article 32 de la LFSS pour 2020.

* 261 « Pilotage de la dépense de santé : redonner du sens à l'Ondam », rapport d'information n° 40 (2019-2020) de Catherine Deroche et René-Paul Savary, au nom de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale et de la commission des affaires sociales, 9 octobre 2019.

* 262 Cf. article 34 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 indiquant qu'en 2010, le surcoût induit par les dépenses exceptionnelles liées à la pandémie grippale n'est pas pris en compte par le comité d'alerte pour l'évaluation d'un risque de dépassement de l'Ondam.

* 263 Cf. projet annuel de performance de la mission « Santé », annexé au projet de loi de finances pour 2021.

* 264 Ces recettes ont dépassé les 30 millions d'euros au cours des sept dernières années, atteignant 36,6 millions d'euros en 2019. En 2020, une baisse sensible est attendue compte tenu du contexte général ; elles devraient néanmoins atteindre 20 millions d'euros au moins. En 2021, un retour à la normale est attendu (source : FIVA).

* 265 Loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001 - Article 53.

* 266 Cf. rapport de la commission des comptes de la Sécurité sociale : Résultats 2019, prévisions 2020 et 2021 (septembre 2020).

* 267 Loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 - Article 41.

* 268 Estimation du coût réel pour la branche maladie, de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles. Rapport au Parlement et au Gouvernement par la commission instituée par l'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale, 30 juin 2017.

* 269 Art. L. 351-1-4 du code de la sécurité sociale.

* 270 Art. L. 4163-1 du code du travail.

* 271 Rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, « Résultats 2019 et prévisions 2020 et 2021 », septembre 2020.

* 272 Le b) du 3° du II corrige pour sa part une faute d'orthographe à l'article L. 441-6 du code de la sécurité sociale.

* 273 Décret n° 2019-854 du 20 août 2019 portant diverses mesures de simplification dans les domaines de la santé et des affaires sociales.

* 274 Loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé - Article 55.

* 275 Estimation du coût réel pour la branche maladie, de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles. Rapport au Parlement et au Gouvernement par la commission instituée par l'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale, 30 juin 2017.

* 276 Source : questionnaire parlementaire.

* 277 Les réponses au questionnaire parlementaire transmis au ministère des solidarités et de la santé mentionnent également des dotations exceptionnelles à destination du secteur hospitalier, dont la CNAM n'a toutefois pas connaissance.

* 278 Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 - Article 73.

* 279 Décret n° 2020-1131 du 14 septembre 2020 relatif à la reconnaissance en maladies professionnelles des pathologies liées à une infection au SARS-CoV2.

* 280 Cf. rapport d'évaluation des politiques de sécurité sociale de la branche AT-MP annexé au PLFSS pour 2021.

* 281 Cette disposition, prise en application d'une jurisprudence de la Cour de cassation, permet l'indemnisation des victimes de maladies professionnelles à compter de la date de la première constatation médicale de leur maladie, et non plus à compter de la date du certificat médical établissant le lien possible entre leur maladie et leur activité professionnelle (loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 - article 44).

* 282 Fixé à 13,9 milliards d'euros à l'article 7 du PLFSS.

* 283 Établies à 13,6 milliards d'euros à l'article 1 er du PLFSS.

* 284 Fixé à 12,4 milliards d'euros à l'article 7 du PLFSS.

* 285 Établies à 12,2 milliards d'euros à l'article 1 er du PLFSS.

* 286 Cf. annexe B du PLFSS pour 2021.

* 287 Loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille - Article 9.

* 288 Art. L. 353-1-1 du code de la sécurité sociale.

* 289 Art. L. 38-1 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

* 290 Art. L. 732-41-1 du code rural et de la pêche maritime.

* 291 Art. L. 342-1-1 du code de la sécurité sociale.

* 292 Loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.

* 293 Art. 75 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

* 294 Article L. 111-2-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi du 7 août 2020 précitée.

* 295 « La branche autonomie : périmètre, gouvernance et financement », septembre 2020.

* 296 Sur le détail des mesures d'investissement, voir le commentaire des articles 26 et 43.

* 297 « La branche autonomie : périmètre, gouvernance et financement », septembre 2020.

* 298 Rapport de la mission d'information « Quel rôle, quelle place, quelles compétences des départements dans les régions fusionnées, aujourd'hui et demain ? », publié le 15 septembre 2020.

* 299 « Pour le plein exercice des libertés locales : 50 propositions du Sénat pour une nouvelle génération de la décentralisation », le 2 juillet 2020.

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