Rapport général n° 138 (2020-2021) de MM. Michel CANEVET et Jean-Claude REQUIER , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 novembre 2020

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N° 138

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2020

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 4

AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT

COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : PRÊTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS

Rapporteurs spéciaux : MM. Michel CANEVET et Jean-Claude REQUIER

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean Bizet, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 3360 , 3398 , 3399 , 3400 , 3403 , 3404 , 3459 , 3465 , 3488 et T.A. 500

Sénat : 137 et 138 à 144 (2020-2021)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. Pour l'exercice 2021, les crédits demandés s'élèvent à 5,12 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 4,90 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) , soit respectivement une baisse de 30 % des AE et une hausse de 50 % des CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2020. Après neutralisation des crédits du nouveau programme 365, qui constitue une opération transparente pour le budget de l'État, les crédits demandés pour 2021 s'élèvent respectivement à 4,16 milliards d'euros en AE et 3,95 milliards d'euros en CP, soit une baisse de 43 % en AE et une hausse de 21 % des CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2020.

2. La hausse continue des crédits de la mission « Aide publique au développement » s'inscrit en conformité avec les conclusions du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) du 8 février 2018 qui fixent l'objectif de consacrer 0,55 % de notre revenu national brut (RNB) en 2022 à l'aide publique au développement. Cet objectif sera d'ailleurs atteint dès 2020, essentiellement à la faveur des conséquences économiques de la crise sanitaire qui entraînent une contraction du RNB, soulignant ainsi les limites du « fétichisme » de la conduite d'une politique publique à partir d'un ratio économique.

3. La forte volatilité des crédits inscrits au programme 110 s'explique par la reconstitution triennale des contributions de la France aux fonds et organisations multilatéraux , pour lesquels un nouveau cycle a été initié en 2020.

4. Le programme 209 est quant à lui marqué par un renforcement de l'aide bilatérale , conformément aux priorités définies en 2018. Ainsi, l'aide-projet gérée par l'AFD s'élève à 1 milliard d'euros en AE (+25 millions d'euros) et 732,8 millions d'euros en CP (+339 millions d'euros), la forte progression des CP reflétant la montée en charge des engagements en la matière depuis plusieurs années. De plus, l'aide-projet gérée directement par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) est fixée à 70 millions d'euros (+ 10 millions d'euros), après un premier bilan positif de sa revalorisation en 2020. Enfin, les crédits dédiés à l'aide humanitaire sont revalorisés, avec une majoration du fonds d'urgence humanitaire (FUH) de 29,6 millions d'euros, et une hausse bienvenue de l'aide alimentaire programmée dont le montant s'élèvera à 76,3 millions d'euros en 2021.

5. Le projet de loi de finances pour 2021 prévoit une opération de renforcement des fonds propres de l'AFD , portée par un nouveau programme budgétaire dédié (programme 365). Celui-ci est justifié par la forte croissance des engagements de l'AFD depuis plusieurs années, mettant ainsi son bilan « sous tension », ainsi que par une évolution de la réglementation prudentielle qui requiert la conversion de la « ressource à condition spéciale » en fonds propres « en dur » de l'AFD. Le renforcement des fonds propres constitue un jeu d'écriture, neutre pour le budget de l'État . Toutefois, le besoin de fonds propres de l'AFD serait supérieur à ceux accordés par cette opération de conversion : une majoration de crédits en ce sens se traduirait alors par une dépense maastrichtienne.

Les rapporteurs spéciaux regrettent que le besoin en fonds propre de l'AFD n'ait pas fait l'objet d'une meilleure anticipation , ce qui aurait permis de faire figurer tous ces éléments d'analyse dans les documents budgétaires transmis au Parlement. Par ailleurs, le contrat d'objectifs et de moyens (COM) 2017-2019 entre l'État et l'AFD étant échu, les rapporteurs spéciaux s'étonnent qu'à cette date, le COM 2020-2022 n'ait pas encore signé . C'est pourtant un point important permettant de formaliser les relations et priorités d'actions pour l'AFD. Ce sujet avait d'ailleurs été relevé par la cour des comptes, dans son enquête réalisée à la demande de la commission des finances du Sénat, appelant à une meilleure formalisation des relations entre l'État et l'AFD 1 ( * ) .

6. Le renforcement en fonds propres de l'AFD appelle à une consolidation de son activité, après plusieurs années d'accroissement considérable de ses engagements . Dans cette perspective, la maîtrise des frais généraux, notamment des dépenses de personnel et des dépenses immobilières, doit constituer l'une des priorités budgétaires de l'AFD.

7. La trajectoire à la hausse des crédits de la mission a permis à la France de maintenir son rang de cinquième pourvoyeur mondial d'aide publique au développement . En termes de part d'aide dans le RNB, la France n'occupe toutefois que la neuvième place. Le profil de l'aide publique au développement de la France continue de se distinguer par le recours important aux prêts , plutôt qu'aux dons, même si un rééquilibrage est en cours.

8. Les conclusions du CICID du 8 février 2018 constituent la première pierre de la redéfinition du pilotage de l'aide publique au développement . Fortement interministérielle, l'aide au développement est conduite par une multitude d'instruments budgétaires. Cet « éclatement » résulte directement des critères de comptabilisation de l'aide publique au développement définis par l'OCDE, mais il nuit à l'élaboration d'une vision exhaustive de cette politique publique, et à un pilotage guidé par une logique de résultats, plutôt que de moyens. Le projet de loi de programmation, maintes fois annoncé, devrait permettre de consacrer une architecture réformée de cette politique publique.

9. Dans l'attente d'un cadre législatif constituant la « boussole » de l'aide publique au développement, le déséquilibre entre les priorités géographiques de la France et les principaux bénéficiaires de son aide constitue une anomalie aux yeux des rapporteurs spéciaux , et interroge la stratégie mise en oeuvre à l'égard des « très grands émergents » .

10. La crise sanitaire a entraîné le redéploiement de crédits, tant au niveau bilatéral, avec l'initiative « Santé en commun » portée par l'AFD, qu'au niveau multilatéral avec l'initiative de suspension du service de la dette (ISSD) en faveur des pays les plus pauvres. Les rapporteurs spéciaux saluent la mobilisation de notre aide publique au développement dans cette crise sanitaire, ainsi que le choix de préserver un budget crucial pour le rayonnement diplomatique de la France et le financement des biens publics mondiaux . Toutefois, dans un contexte de finances publiques dégradées, la question de l'évaluation, de la transparence, et de la « redevabilité » de cette politique publique devient plus que jamais incontournable .

11. Outre la maîtrise des frais généraux de l'AFD, en particulier de ses investissements immobiliers, il convient de mener un contrôle soutenu de l'efficience des actions et politiques menées , notamment pour s'assurer dans un contexte d'accroissement des subventions, qu'ils n'y aient pas de risques de « détournement » de l'usage de ces dépenses par leurs bénéficiaires.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 48 % des réponses étaient parvenues aux rapporteurs spéciaux en ce qui concerne les crédits de la mission « Aide publique au développement » et du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ».

I. L'AUGMENTATION DES CRÉDITS DE LA MISSION SE POURSUIT EN 2021, CONFORMÉMENT AUX ENGAGEMENTS PRIS EN 2018

A. UNE HAUSSE SIGNIFICATIVE DES CRÉDITS EN 2021, GONFLÉE PAR LE RENFORCEMENT DES FONDS PROPRES DE L'AGENCE FRANÇAISE DE DÉVELOPPEMENT

1. Une politique fortement interministérielle dont le coeur pilotable est porté par la mission « Aide publique au développement »

Le Comité d'aide au développement (CAD) 2 ( * ) de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) définit l'aide publique au développement comme tous les apports de ressources qui sont fournis aux pays et territoires sur la liste des bénéficiaires d'aide publique au développement, ou à des institutions multilatérales et qui répondent aux critères cumulatifs suivants :

- ils émanent d'organismes publics , y compris les États et les collectivités locales, ou d'organismes agissant pour le compte d'organismes publics ;

- ils ont pour but essentiel de favoriser le développement économique et l'amélioration du niveau de vie des pays en développement ;

- ils sont assortis de conditions favorables .

D'un point de vue budgétaire, en France, l'aide publique au développement financée par l'État transite par les dépenses budgétaires inscrites sur le budget général ou sur le compte d'affectation spéciale relatif aux participations financières de l'État (CAS PFE), ainsi que par le prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne qui comprend la quote-part de la France au budget de l'action extérieure de l'Union européenne.

Au sein du budget général de l'État, la mission « Aide publique au développement » constitue le coeur budgétaire pilotable de cette politique publique . En 2020 et 2021, la mission devrait respectivement représenter 68 % et 65 % des crédits budgétaires comptabilisées en aide publique au développement. Trois autres missions budgétaires participent également au financement de l'aide publique au développement :

- la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour environ 13 % des dépenses budgétaires d'aide publique au développement en 2020 ;

- la mission « Action extérieure de l'État » pour environ 4 % en 2020 ;

- la mission « Immigration, asile et intégration » pour environ 8 % en 2020.

Le CAS PFE retrace, quant à lui, les dotations en capital des banques de développement ( cf. article rattaché à la mission ).

Au total, 25 programmes budgétaires différents concourent au financement de la politique d'aide publique au développement.

Si la mission « Aide publique au développement » concentre l'essentiel des crédits budgétaires, elle ne constitue, en 2019, que 44 % de l'ensemble de l'aide publique au développement de la France .

En effet, y sont ajoutés les crédits des autres missions budgétaires , la participation de la France au fonds européen de développement (FED), les prêts du Trésor , les opérations de traitement de la dette , et le fonds de solidarité pour le développement (FSD). Ce dernier est un fonds extrabudgétaire, créé en 2005 et géré par l'AFD, qui participe au financement de dépenses principalement dans les domaines de la santé, du climat, et de l'environnement. Il est alimenté par deux taxes affectées :

- la taxe de solidarité sur les billets d'avion (TSBA), pour un montant plafonné à 210 millions d'euros par an ;

- une part du produit de la taxe sur les transactions financières (TTF), pour un montant égal à 528 millions d'euros par an.

Par ailleurs, outre des subventions, l'effort de l'État en faveur de l'aide publique au développement se traduit par l'octroi de prêts .

Pour mémoire, selon les règles de l'OCDE, le décaissement d'un prêt peut être comptabilisé en aide publique au développement à hauteur des montants déboursés. Puis, dans un second temps, le remboursement en capital d'un prêt donne lieu à une contribution négative à l'effort d'aide publique au développement. Ainsi, seul l'élément-don du prêt, c'est-à-dire son niveau de concessionnalité, est comptabilisé en tant qu'aide publique au développement . Les prêts de la France sont versés selon plusieurs canaux :

- les prêts concessionnels du Trésor , pour lesquels les crédits budgétaires sont imputés sur le programme 851 « Prêts à des États étrangers » ;

- les prêts portés par l'Agence française de développement (AFD) , pour lesquels les crédits budgétaires nécessaires à leur bonification sont imputés sur le programme 110 « Aide économique et financière au développement », et sur le programme 853 « Prêts à l'Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers » ;

- les prêts mis en oeuvre par l'AFD pour le compte de l'État , tels que les prêts d'ajustement structurel ;

- les prêts dits de « refinancement » dans le cadre d'opérations de restructurations de dette. Les crédits budgétaires nécessaires sont imputés sur le programme 852 « Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France ».

2. L'exercice 2021 poursuit la trajectoire haussière de la mission, et dépasse même, à la faveur de la crise sanitaire, l'objectif de 0,55 % du RNB.

Pour l'exercice 2021, la mission « Aide publique au développement » comporte trois programmes :

- le programme 110 « Aide économique et financière au développement » , relevant de la direction générale du Trésor, au ministère de l'économie, des finances et de la relance. Il porte les crédits destinés aux fonds multilatéraux de développement, au financement des annulations de dette et à la bonification des prêts accordés par l'Agence française de développement ;

- le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » , relevant de la direction générale de la mondialisation, de la culture, de l'enseignement et du développement international, au ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE). Il comporte notamment les crédits destinés aux dons bilatéraux, les subventions aux organisations multilatérales, la coopération technique, la contribution de la France au fonds européen pour le développement (FED), ou encore les crédits dédiés à l'aide humanitaire ;

- le nouveau programme 365 « Renforcement des fonds propres de l'Agence française de développement » , permettant de doter en capital cet opérateur en 2021 ( cf. ci-après ).

Pour 2021, les crédits demandés s'élèvent à 5,12 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 4,90 milliards d'euros en crédits de paiement , soit respectivement une baisse de 30 % des AE et une hausse de 50 % des CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2020.

Évolution des crédits de la mission « Aide publique au développement »
À périmètre courant

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

LFI 2020

PLF 2021

Évolution (en %)

LFI 2020

PLF 2021

Évolution (en %)

110 « Aide économique et financière au développement »

4 464,3

1 391,8

- 68,8%

1 136,8

1 475,0

29,7%

Action 01 - Action économique et financière multilatérale

2 836,3

219,1

- 92,3%

711,7

968,5

36,1%

Action 02 - Aide économique et financière bilatérale

1 310,4

1 172,7

- 10,5%

339,7

409,2

20,5%

Action 03 - Traitement de la dette des pays pauvres

317,7

0,0

- 100,0%

85,4

97,3

13,9%

365 « Renforcement des fonds propres de l'AFD»

-

953,0

-

-

953,0

-

209 « Solidarité à l'égard des pays en développement »

2 834,9

2 771,3

- 2,2%

2 131,5

2 476,3

16,2%

Action 02 - Coopération bilatérale

1 464,8

1 527,5

4,3%

839,0

1 227,1

46,3%

Action 05 - Coopération multilatérale

366,3

367,8

0,4%

288,6

373,2

29,3%

Action 07 - Coopération communautaire

842,4

713,7

- 15,3%

842,4

713,7

- 15,3%

Action 08 - Dépenses de personnel du programme

161,4

162,3

0,5%

161,4

162,3

0,5%

Total de la mission

7 299,2

5 116,1

- 29,9%

3 268,4

4 904,3

50,1%

Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires

Toutefois, le renforcement des fonds propres de l'AFD, porté par le nouveau programme 365, constituant une opération transparente pour le budget de l'État (cf. ci-après ), il convient de neutraliser les crédits de ce programme afin d'apprécier l'évolution de la mission à périmètre constant.

Ainsi, en neutralisant le programme 365, les crédits demandés pour 2021 s'élèvent respectivement à 4,16 milliards d'euros en AE et 3,95 milliards d'euros en CP , soit respectivement une baisse de 43 % en AE et une hausse de 21 % des CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2020.

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 3 ( * ) étant désormais caduque en raison de l'évolution du contexte macroéconomique, il n'est pas possible de comparer l'évolution de ces crédits aux plafonds prévus par cette trajectoire budgétaire pluriannuelle.

La hausse des crédits de la mission s'inscrit en conformité avec les conclusions du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) 4 ( * ) du 8 février 2018, qui a défini les priorités et les ambitions de la France en matière d'aide publique au développement.

Ces conclusions indiquent que « le gouvernement a fixé une trajectoire ascendante des financements consacrés à l'aide publique au développement en tant compte d'objectifs d'annulation de dettes. La France consacrera 0,55 % du revenu national brut (RNB) à l'aide publique au développement d'ici 2022 , première étape vers l'objectif de 0,7 % ».

Cet objectif devrait être atteint dès 2020, avec deux ans d'avance . En effet, en 2020, l'aide publique au développement de la France devrait atteindre 0,56 % du RNB, contre 0,47 % initialement prévu, et 0,69 % en 2021 .

Part de l'aide publique au développement dans le RNB de la France

(en %)

2018

2019

2020

2021

2022

Trajectoire prévue par le CICID de 2018

0,44

0,44

0,47

0,51

0,55

Exécution (constatée ou évaluée)

0,43

0,44

0,56

0,69

Non fournie

Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires

Si la hausse des crédits de la mission depuis plusieurs exercices contribue à la satisfaction des ambitions fixées en 2018, les rapporteurs spéciaux rappellent que la contraction du produit intérieur brut de la France en 2020 d'au moins 10 % , en raison des conséquences économiques de la crise sanitaire, explique aussi cette hausse exceptionnelle du ratio de l'aide publique au développement par rapport au RNB.

Ainsi, comme l'ont reconnu les services auditionnés par les rapporteurs spéciaux, la crise sanitaire met en lumière les limites du « fétichisme » de la conduite d'une politique publique à partir d'un ratio économique .

À ce titre, le budget de l'aide publique au développement britannique est particulièrement éclairant . En effet, en juillet 2020, le Royaume-Uni a annoncé une réduction de 18 % du budget dédié à l'aide publique au développement, soit une baisse de 2,9 milliards de livres, afin de maintenir un budget représentant 0,7 % du RNB britannique, tout en profitant de la contraction du RNB liée aux conséquences économiques de la crise sanitaire.

Enfin, il convient de noter deux évolutions de la maquette budgétaire prévues par le projet de loi de finances pour 2021 :

- pour la première fois, le projet de loi de finances pour 2021 intègre une évaluation des dépenses favorables à l'environnement . D'après le Gouvernement 5 ( * ) , ces dépenses s'élèvent à 1,85 milliard d'euros au sein de la mission « Aide publique au développement », en intégrant le fonds de solidarité pour le développement. Le doublement de la contribution de la France au fonds vert pour le climat pour les années 2020 à 2022 y contribue fortement. En effet, 390 millions d'euros devraient être versés à ce titre par la France en 2021 ;

- compte tenu des conséquences économiques de la crise sanitaire, le projet de loi de finances pour 2021 prévoit la création d'une nouvelle mission budgétaire dédiée au financement du plan de relance de l'économie . Au sein du programme 364 « Cohésion » de celle-ci sont prévus 50 millions d'euros dédié au soutien en faveur d'organisations pour la santé mondiale et au financement de la recherche pour l'accès universel pour un vaccin contre la Covid-19. Cette enveloppe sera répartie entre l'Organisation mondiale de la santé (OMS), à hauteur de 25 millions d'euros, et à d'autres organismes de santé internationaux (Gavi, Unitaid, etc.).

B. LE PROGRAMME 110 : DES CRÉDITS CONTRAINTS PAR LE CYCLE DE RECONSTITUTION DES FONDS MULTILATÉRAUX

1. La chute des AE s'explique par la reconstitution des contributions aux fonds multilatéraux de 2020

Le programme 110 est marqué par une forte chute des AE demandés (- 68,8 %), et une augmentation concomitante des CP (+ 29,7 %). Cette grande volatilité des crédits demandés entre la loi de finances pour 2020 et le projet de loi de finances pour 2021 s'explique essentiellement par le cycle de reconstitution des contributions de la France aux institutions internationales de développement, initié en 2020 .

Ainsi, tous les trois ans, les AE augmentent fortement, puis diminuent progressivement les deux années suivantes.

Pour mémoire, en 2020, les AE portées par le programme 110 avaient connu une augmentation significative par rapport au précédent cycle de reconstitution des contributions multilatérales, notamment en raison de l'engagement de la France d'accroître sa contribution au fonds vert pour le climat (FVC) , ce qui s'était traduit par un montant d'AE de 735 millions d'euros en 2020 au titre du programme 110.

Cycle de reconstitution de la contribution de la France aux institutions multilatérales

(en autorisations d'engagement et en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des projets de loi de finances de 2016 à 2021

Ce cycle de reconstitution est reflété par les demandes en AE et en CP pour les contributions relatives à divers fonds sectoriels, ou des fonds concessionnels des banques multilatérales de développement. S'agissant de ces derniers, par exemple, aucune AE n'est prévue en 2021 au titre de la contribution de la France à l'Association internationale de développement (AID) , ni au fonds africain de développement (FAD) , ni au fonds asiatique de développement (FAsD) . Les crédits de paiement pour ces fonds s'élèvent respectivement à 454 millions d'euros, à 146 millions d'euros, et à 11,5 millions d'euros.

À ce titre , la contribution de la France au fonds international de développement agricole pour 2021 fait office d'exception . En effet, il est prévu de lui dédier 80 millions d'euros en AE et 12 millions d'euros en CP, dans la perspective des négociations de la douzième reconstitution de ses ressources actuellement en cours.

2. Une stabilisation des moyens alloués aux prêts de l'AFD

Les crédits d'intervention d'aide bilatérale relevant de l'AFD s'élèvent en 2021 à 1 milliard d'euros environ en AE et à 319,4 millions d'euros en CP , soit respectivement une baisse de 10 % des AE et une hausse de 44 % des CP .

La contraction des AE s'explique essentiellement par la réduction de 157 millions d'euros des crédits dédiés à la bonification des prêts de l'AFD dans les États étrangers, pour s'élever à un montant de 980 millions d'euros en 2021.

Cette stabilisation de la capacité de l'AFD à accorder des prêts bonifiés à des États étrangers est justifiée par le Gouvernement, d'une part, par la persistance d'un environnement de taux bas qui réduit le besoin en crédits de bonification et, d'autre part, par « l'objectif de consolidation » 6 ( * ) de l'activité de l'AFD .

Les rapporteurs approuvent cette volonté de marquer le pas dans l'activité de prêts de l'AFD, eu égard à la très forte progression des engagements ces dernières années . Ainsi, les AE dédiées à la bonification de prêts destinés aux États étrangers ont été multipliées par 2,7 entre 2018 et 2019, pour atteindre 994,5 millions d'euros. Entre 2019 et 2020, cette enveloppe a connu une progression moins rapide, mais de l'ordre de 14 % environ .

En outre, les crédits dédiés à la bonification des prêts en Outre-mer seront en baisse de 1,3 million d'euros, pour s'établir à 4,3 millions d'euros en crédits d'engagement. En effet, depuis 2010, ces prêts sont financés par les crédits de la mission « Outre-mer ». Les crédits de paiement inscrits depuis lors correspondent uniquement à des engagements antérieurs.

Enfin, les aides budgétaires globales seront stables en 2021, en s'élevant à 60 millions d'euros . Ces aides visent à apporter un soutien budgétaire direct aux États étrangers faisant face à des chocs macroéconomiques, en privilégiant une appropriation de cette aide par les bénéficiaires. Ainsi, ces aides peuvent, à titre d'exemple, participer directement au financement d'une politique publique mise en oeuvre par l'État bénéficiaire.

3. La budgétisation d'une commission indépendante d'évaluation qui doit encore être créée par la loi

Les rapporteurs spéciaux ont constaté avec surprise que le programme 110 prévoyait pour 2021 une enveloppe de 3 millions d'euros dédiée au financement d'une commission indépendante de l'évaluation de la politique d'aide publique au développement .

La création de cette commission résulte de la proposition du député Hervé Berville , présentée dans son rapport remis en août 2018 au Premier ministre, Édouard Philippe 7 ( * ) . En s'inspirant du modèle britannique de la Commission indépendante pour l'impact de l'aide, il proposait de réunir en une seule entité les équipes dédiées à l'évaluation de l'aide publique au développement au sein de l'AFD et de ses ministères de tutelle, et suggérait de l'héberger au sein de la Cour des comptes. La création d'une telle commission, ses missions et sa composition devraient figurer dans le projet de loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales.

Sans remettre en cause le principe d'une telle entité, les rapporteurs spéciaux s'étonnent de l'estimation du budget de fonctionnement de cette commission, alors même que ni ses fonctions, ni sa composition n'ont encore été définies par le Parlement. En réponse aux rapporteurs spéciaux, la direction générale du Trésor a indiqué que le budget de 3 millions d'euros par an avait été estimé à partir de l'évaluation initiale de son coût par le député Hervé Berville, confirmée par une évaluation interne menée par la direction générale du Trésor, en prenant pour exemples d'autres structures similaires.

Pourtant, les auditions menées par les rapporteurs spéciaux ont confirmé que les contours de cette commission d'évaluation sont encore loin d'être arrêtés. Alors qu'initialement il était proposé de la rattacher administrativement à la Cour des comptes, il semblerait que cette dernière ait décliné cette option. En outre, la participation de parlementaires à ses travaux reste une option à débattre.

C. LE PROGRAMME 365 : UN RENFORCEMENT DES FONDS PROPRES DE L'AFD QUI RESTE, À CE STADE, NEUTRE POUR LE BUDGET DE L'ÉTAT

Le projet de loi de finances pour 2021 prévoit une opération de renforcement des fonds propres de l'Agence française de développement (AFD), portée par un nouveau programme budgétaire dédié (programme 365).

L'AFD, en tant que société de financement, est soumise aux mêmes obligations prudentielles que le secteur bancaire 8 ( * ) . S'agissant de l'AFD, ces obligations se traduisent par le respect de deux ratios contraignants :

- d'une part, le ratio dit « grands risques » , prévoyant que l'AFD ne puisse exposer plus du quart de ses fonds propres sur une seule contrepartie ;

- d'autre part, le ratio de solvabilité qui exige que les fonds propres de l'AFD représentent près de 14 % des actifs pondérés par le risque.

Or, à compter de 2021, plusieurs raisons justifient d'augmenter les fonds propres de l'Agence, au regard de ces ratios prudentiels.

Premièrement, les engagements de l'AFD ont connu une croissance continue depuis plusieurs années, mettant ainsi son bilan « sous tension » . Ainsi, les engagements de l'AFD ont augmenté, en moyenne, de 22 % par an entre 2005 et 2010, avant de se stabiliser autour de 7 milliards d'euros en 2010-2012 9 ( * ) . L'activité a de nouveau crû pour s'établir à 11,5 milliards d'euros en 2019 , soit une nouvelle hausse de 64 % en seulement sept ans.

Par conséquent, les besoins en fonds propres de l'AFD ont augmenté, à mesure que les prêts engagés se sont concrétisés. Dans cette perspective, le renforcement des fonds propres prévu dans le projet de loi de finances pour 2021 n'est que le reflet de la montée en charge de l'opérateur .

Deuxièmement, la nécessité de renforcer les fonds propres de l'AFD tient à une évolution de la réglementation prudentielle . En effet, l'entrée en vigueur du règlement européen dit « CRR2 » en juin dernier exclut la ressource à condition spéciale dont bénéficie l'AFD du calcul de ses fonds propres pour le calcul du ratio dits « grands risques » . La ressource à condition spéciale (RCS) désigne des prêts accordés annuellement par l'État à l'AFD, à partir du programme 853 du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ». Cette ressource permet à l'AFD d'accorder des prêts à des conditions particulièrement favorables, généralement pour une durée de 30 ans, dont 10 ans de différé en remboursement en capital, à un taux de 0,25 %.

Enfin, comme l'a précisé aux rapporteurs spéciaux la direction générale du trésor lors de son audition , en réponse à la crise sanitaire, l'AFD a été contrainte d'augmenter ses provisions pour risque , alourdissant son bilan.

Concrètement, l'opération de renforcement des fonds propres se traduit par une conversion de la RCS en fonds propres, qui sera effectuée en plusieurs étapes :

- d'abord, l'AFD rembourse à l'État les RCS déjà perçus, pour un montant de 953 millions d'euros ;

- ensuite, le programme 365 de la mission « Aide publique au développement » va abonder le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » (CAS PFE) pour le même montant ;

- enfin, celui-ci versera à l'AFD la dotation en capital pour 953 millions d'euros.

Lors de son audition, la direction générale du Trésor a confirmé aux rapporteurs spéciaux que cette opération était neutre pour le budget de l'État. Toutefois, elle a également indiqué qu'une hausse plus importante des fonds propres de l'AFD pourrait être nécessaire afin de couvrir ses besoins en fonds propres jusqu'en 2023 , l'enveloppe de 953 millions d'euros apparaissant trop limitée.

Or, toute majoration dépassant la simple conversion de la RCS en fonds propres serait comptabilisée comme une dépense maastrichtienne .

Les rapporteurs spéciaux regrettent que le besoin en fonds propres de l'AFD n'ait pas fait l'objet d'une meilleure anticipation, ce qui aurait permis de faire figurer tous ces éléments d'analyse dans les documents budgétaires transmis au Parlement.

D. LE PROGRAMME 209 : UNE ACCENTUATION DE L'EFFORT EN FAVEUR DE L'AIDE HUMANITAIRE

1. Un renforcement de l'action bilatérale, notamment au profit de l'aide humanitaire

Les crédits dédiés à l'action bilatérale, et portés par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) 10 ( * ) , augmentent en 2021 et atteignent 1,5 milliard d'euros en AE et 1,2 milliard d'euros en CP , soit une hausse respective de 4 % et de 46 % par rapport à 2020.

Ainsi, la hausse des crédits de paiement en la matière, entre 2020 et 2021, s'élève à 388 millions d'euros, ce qui représente 56 % de l'augmentation des crédits de paiement de l'ensemble de la mission , une fois neutralisés les crédits de paiements issus du renforcement des fonds propres de l'AFD.

Cette augmentation s'inscrit en conformité avec les priorités définies par les conclusions du CICID du 8 février 2018, qui prévoient notamment un renforcement de la composante bilatérale de l'aide publique au développement de la France. En effet, le CICID a fixé comme objectif que les deux-tiers de la hausse moyenne cumulée des AE de la mission « Aide publique au développement » d'ici à 2022 soient dédiés à l'aide bilatérale .

Le renforcement de l'action bilatérale passe par plusieurs canaux budgétaires.

Premièrement, l'aide-projet gérée par l'AFD progresse de 25 millions d'euros en AE et de 339 millions d'euros en CP pour s'établir respectivement à 1,035 milliard d'euros en AE et 732,8 millions d'euros. Une partie de cette aide-projet transite par les organisations non gouvernementales (ONG), à hauteur de 115 millions d'euros en CP, soit 11 millions d'euros de plus qu'en 2020.

L'aide-projet gérée par l'AFD marque une stabilisation en AE (+2,5 %), et une forte progression en CP (+ 86 %) qui résulte du décaissement du milliard d'euros d'AE supplémentaire alloué en 2019.

Lors de son audition par les rapporteurs spéciaux, la direction générale de la mondialisation a rappelé que l'augmentation substantielle des crédits alloués à l'AFD pour accorder des dons a requis une adaptation rapide de l'opérateur, dont le coeur de métier était initialement assez éloigné de la gestion de subventions .

Ainsi, la montée en charge de la capacité de l'AFD à accorder des dons depuis 2019 a nécessité le développement d'équipes chargées de l'instruction des projets et de leur mise en oeuvre, à partir de compétences bien différentes de celles requises pour assurer l'ingénierie financière de la gestion de prêts . En 2019, l'activité de l'AFD dédiée aux dons reste minoritaire puisqu'elle ne représente que 14 % des dépenses engagées 11 ( * ) .

Par ailleurs, si les rapporteurs spéciaux reconnaissent l'intérêt de s'appuyer sur les ONG, les acteurs au plus près du terrain, pour l'octroi des subventions, ils rappellent que les projets financés par ce canal doivent continuer de faire l'objet d'une attention étroite de l'État pour s'assurer de la bonne utilisation de ces crédits .

Deuxièmement, l'aide-projet gérée directement par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) augmente de 10 millions d'euros en 2021, pour s'élever à 70 millions d'euros . Cette enveloppe alimentera les fonds de solidarité pour les projets innovants (FSPI), qui constituent des instruments budgétaires directement pilotés par les postes diplomatiques afin de subventionner des projets locaux.

Les crédits dédiés aux FSPI avaient déjà été multipliés par 2,5 en 2020 , traduisant la volonté du Gouvernement de revaloriser le rôle des ambassades dans le soutien au développement local. Les auditions menées par les rapporteurs spéciaux ont fait état d'un premier bilan positif du renforcement de cet outil budgétaire . Ainsi, depuis 2017, les FSPI ont permis de financer 265 projets dans 61 pays, dont 33 projets adoptés en 2017, 37 projets validés en 2018, 96 projets validés en 2019 et 99 projets validés en 2020 12 ( * ) .

En outre, les FSPI présentent l'intérêt majeur d'être rapidement mobilisables, permettant d'être utilisés en phase d'amorçage de projets conséquents, qui pourront ensuite être concrétisés par l'AFD. À titre d'exemple, au Sénégal, un FSPI a permis d'amorcer le lancement du Campus universitaire franco-sénégalais avec le lancement de plusieurs formations universitaires sur place. La reprise par l'AFD de ce projet a permis sa montée en puissance grâce à un soutien financier plus important.

En tout état de cause, la revalorisation de cet outil budgétaire interroge son articulation avec les actions financées par l'AFD au niveau local .

La direction générale de la mondialisation a assuré aux rapporteurs spéciaux que « la convention cadre en vigueur entre l'État et l'AFD prévoit la coordination des agences AFD avec les services de l'État à l'étranger, notamment ceux en charge des projets FSPI , afin de garantir la cohérence des ressources investies au niveau local via les différents canaux de l'aide. Le directeur de l'AFD participe aux réunions de coordination présidées par l'ambassadeur, ce qui favorise un dialogue et un travail en étroite collaboration entre les postes et l'AFD. L'ambassadeur émet un avis sur les cadres d'intervention des projets et programmes de l'AFD (à l'exception des prêts souverains), tant au niveau de leur identification, de leur engagement que concernant leur évaluation » 13 ( * ) .

Toutefois, le prochain contrat d'objectifs et de moyens (COM) entre l'État et l'AFD devra, de l'avis des auditionnés, « clarifier certains points de procédure pour renforcer l'efficacité de notre dispositif de développement ».

Décomposition des crédits dédiés aux dons

(en millions d'euros)

PLF 2020

PLF 2021

AE

CP

AE

CP

Dons projet AFD

900,0

289,0

905,0

617,4

Don aux ONG

110,0

104,0

130,0

115,4

FSPI

60,0

60,0

70,0

70,0

Total

1 070,0

453,0

1 105,0

802,8

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

Enfin, les crédits dédiés à l'action bilatérale augmentent à la faveur du renforcement des moyens de l'aide humanitaire , conformément à l'engagement du CICID du 8 février 2018 d'allouer 500 millions d'euros aux dépenses humanitaires d'ici à 2022.

Dans cette perspective, le fonds d'urgence humanitaire (FUH) est majoré de 29,6 millions d'euros en 2021, pour atteindre un montant de 110,3 millions d'euros . Le FUH constitue un instrument budgétaire d'intervention rapide, mobilisé par le centre de crise et de soutien (CDCS) du ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE), pour répondre aux besoins urgents des populations touchées par des crises soudaines. Cette hausse des crédits permettra d'augmenter les moyens budgétaires mis en oeuvre :

- dans la zone de l'Afrique du nord et du Moyen-Orient , à hauteur de 50 millions d'euros en 2021, soit 13 millions d'euros de plus qu'en 2020 ;

- en Afrique sub-saharienne , à hauteur de 45 millions d'euros en 2021, soit 15 millions d'euros de plus.

En outre, l'aide alimentaire programmée augmentera de 16 millions d'euros, pour atteindre 76,3 millions d'euros en 2021 . Environ la moitié de cette enveloppe devrait être attribuée aux opérations du Programme alimentaire mondial, et le reste à des fonds dédiés d'autres organisations internationales et aux ONG.

Principaux pays bénéficiaires de l'aide humanitaire française en 2018

(en millions d'euros)

Pays

Montant

Part de l'aide humanitaire

République arabe syrienne

43

47 %

Équateur

13

14 %

Cisjordanie et bande de Gaza

9

10 %

Yémen

3

4%

Liban

2

2 %

Bangladesh

2

2 %

République centrafricaine

2

2 %

Indonésie

1

1 %

Burkina Faso

1

1 %

Niger

1

1 %

Source : document de politique transversale 2021

2. La hausse des contributions volontaires aux organisations multilatérales motivée par le renforcement de l'aide humanitaire

Les crédits dédiés aux contributions volontaires aux organisations internationales et aux fonds multilatéraux de développement 14 ( * ) s'élèvent en 2021 à 367,8 millions d'euros en AE et 373,2 millions d'euros en CP , soit une stabilisation des AE et une hausse de 28 % des CP.

Cette augmentation des crédits de paiement provient de la hausse des contributions volontaires aux Nations unies , qui atteignent 183,3 millions d'euros en 2021, soit 50 millions d'euros de plus qu'en 2020.

Lors de son audition par les rapporteurs spéciaux, le cabinet du ministre de l'Europe et des affaires étrangères a justifié cette hausse par le renforcement de la contribution de la France aux agences humanitaires , conformément à l'objectif fixé par le CICID en 2018. En agrégeant ces crédits à ceux dédiés à l'aide humanitaire bilatérale, la France devrait consacrer en 2021 329 millions d'euros en matière d'aide humanitaire .

Enfin, les rapporteurs spéciaux ont observé une hausse de 30 millions d'euros des autres contributions volontaires qui résulte essentiellement de la rebudgétisation de la contribution au fonds mondial de lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme (FMSTP) (50 millions d'euros). Cette contribution est habituellement assurée par le fonds de solidarité pour le développement (FSD), et ne figure donc pas dans la mission « Aide publique au développement ». Le tarissement des recettes affectées au FSD en raison de la crise sanitaire, et plus précisément de la taxe de solidarité sur les billets d'avion, a justifié ce choix de rebudgétisation .

3. La modification de l'architecture budgétaire de l'Union européenne explique la baisse faciale de la contribution française à la politique européenne de développement

Le programme 209 est marqué par une baisse de près de 15 % de la participation de la France au fonds européen de développement (FED) en 2021. Elle devrait ainsi s'élever à 713,7 millions d'euros , contre 842,4 millions d'euros en 2020.

Cette réduction s'explique par l'évolution de l'architecture budgétaire de l'Union européenne prévue pour le cadre financier pluriannuel 2021-2027 , qui est toujours en cours de négociation. Alors que le FED, instrument budgétaire européen de coopération au développement, était extrabudgétaire, il est proposé de l'intégrer au budget de l'Union européenne à partir de 2021. Il sera fondu dans un instrument global dit « de voisinage, de développement et de coopération internationale » (NDICI), qui regroupera plusieurs instruments budgétaires dédiés à l'action extérieure de l'Union européenne.

Par conséquent, à compter de 2021 et de l'entrée en vigueur supposée du prochain cadre financier pluriannuel, la participation de la France à la politique de développement européenne sera directement intégrée dans sa contribution au budget européen . Les crédits retracés au sein du programme 209 ont vocation à progressivement diminuer, et à ne porter que les engagements antérieurs à 2021.

E. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « PRÊTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS »

Le compte de concours financiers regroupe pour sa part des prêts à des États étrangers qui concourent à la politique française d'aide publique au développement, à l'exception du programme concernant la Grèce :

- le programme 851 permet de financer l'achat par des pays étrangers de matériels et services d'entreprises françaises ;

- le programme 852 permet de refinancer les dettes de certains pays envers la France ;

- le programme 853 porte le versement à l'Agence française de développement de la « ressource à condition spéciale » (RCS) qui lui permettait d'octroyer des prêts à des États étrangers à des conditions concessionnelles ;

- le programme 854 était destiné à porter la contribution de la France au plan de soutien en faveur de la Grèce, finalement confié au Fonds européen de stabilité financière (FESF).

Évolution des crédits du compte de concours financier
« Prêts à des États étrangers »

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

LFI 2020

PLF 2021

Évolution (en montant et en %)

LFI 2020

PLF 2021

Évolution (en montant et en %)

851 « Prêts en vue de développer le commerce extérieur de la France »

1 000,00

1 000,00

0,00

0,0%

367,1

461,6

94,5

26 %

852 « Prêts pour consolidation de dettes »

250,3

554,7

304,4

121,6%

250,3

554,7

304,4

121,6%

853 « Prêts à l'AFD (ressource à condition spéciale »

0

0

0,00

0,0%

424,3

258,0

-166

-36,2%

854 « Prêts aux États membres dont la monnaie est l'euro »

0

0

0,00

0,0%

0

0

0,00

0,00%

Total du compte

1 250,3

1 554,7

304,4

24,4%

1 041,7

1 274,3

232,6

22,3 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

S'agissant du programme 851, ces financements prennent deux formes distinctes :

- des prêts concessionnels , qui donnent lieu à une comptabilisation d'aide publique au développement ;

- des prêts directs , c'est-à-dire non concessionnels, qui sont sans coût pour l'État à terme.

Pour 2021, il est prévu de stabiliser les AE qui devraient se traduire par une montée en charge progressive des prêts directs, au détriment des prêts concessionnels . Les CP tiennent compte des besoins de financement sur la base des estimations de tirages au titre des protocoles de prêts déjà signés. Les principaux décaissements attendus pour 2021 concernent le secteur des transports, tels que le prêt destiné à la mise en oeuvre de la ligne à grande vitesse Tanger-Casablanca au Maroc, et le domaine de la sécurité civile, notamment avec la fourniture de navires de sécurité et de sûreté maritime en Ukraine.

Concernant le programme 852, l'augmentation de l'évaluation de crédits pour 2021 intègre la prévision du traitement de la dette du Soudan , qui pourrait intervenir l'année prochaine.

En effet, la direction générale du Trésor a indiqué aux rapporteurs spéciaux que le retrait du pays de la liste des États-Unis des États soutenant le terrorisme, ainsi que la mise en oeuvre d'un programme de réformes supervisé par le Fonds monétaire international (FMI) permettraient éventuellement de faire bénéficier le pays de l'initiative Pays Pauvres Très Endettés (PPTE).

Cette initiative, lancée en 1996 vise à réduire le poids de la dette extérieure de certains États très endettés grâce à la coordination internationale des créanciers bilatéraux et des institutions multilatérales.

Enfin, les programmes 853 et 854 sont gérés en extinction.

En effet, le programme 853 ne comporte plus de nouvelles AE depuis 2019, car les crédits de bonification des prêts sont désormais portés par le programme 110.

S'agissant du programme 854, aucun décaissement de prêt n'y est inscrit depuis 2012 étant donné que les Fonds européen de stabilité financière et le Mécanisme européen de stabilité financière se sont substitués aux prêts bilatéraux des États membres de l'Union européenne. Toutefois, en 2021, la Grèce devrait effectuer un premier remboursement à la France à hauteur de 447,1 millions d'euros.

II. L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT DE LA FRANCE : UNE POLITIQUE PUBLIQUE EN COURS DE RÉÉQUILIBRAGE

A. LA TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE HAUSSIÈRE A PERMIS À LA FRANCE DE MAINTENIR SON RANG PARMI LES PRINCIPAUX DONATEURS

1. La France se maintient comme cinquième pourvoyeur mondial d'aide publique au développement

Depuis 2015, l'aide publique au développement de la France est en augmentation constante, et dépasse pour la première fois le montant de 10 milliards d'euros en 2017. Elle devrait atteindre 10,9 milliards d'euros en 2019 .

Évolution de l'aide publique au développement de la France

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir du document de politique transversale

Cette augmentation continue depuis plusieurs exercices constitue un « rattrapage » bienvenu, dans la mesure où elle a permis à la France de maintenir son rang parmi les principaux contributions du CAD de l'OCDE. En 2019, la France reste le cinquième pourvoyeur mondial d'aide publique au développement en volume . Elle se place après les États-Unis (30,9 milliards d'euros), l'Allemagne (21,3 milliards d'euros), le Royaume-Uni (17,3 milliards d'euros) et le Japon (13,9 milliards d'euros).

Toutefois, la part de l'aide publique au développement dans le revenu national brut (RNB) de la France reste inférieure à celle des pays de l'Europe du nord.

Contributeurs dont la part de l'aide publique au développement dans le RNB
est la plus élevée en 2019

(en % de RNB)

Source : commission des finances du Sénat, à partir du document de politique transversale

2. Elle continue de se distinguer par une prépondérance des prêts, au détriment des dons, malgré un rééquilibrage progressif

Depuis le début des années 2010, la composition de l'aide publique au développement des principaux donateurs du CAD a légèrement évolué. En effet, avec la fin progressive des grands plans de réaménagement de dette, en particulier dans le cadre de l'initiative pour les pays pauvres très endettés (PPTE), la part des annulations de dette a chuté à 1 % de l'aide publique totale des donateurs du CAD.

À l'exception de cette évolution commune à l'ensemble des donateurs, l'aide publique au développement de la France continue à se distinguer au sein du CAD par l'importance du recours aux prêts par rapport au versement de dons.

En effet, la part des prêts dans l'aide publique bilatérale de la France est passée de 9 % en 2009 à 26 % en 2018 15 ( * ) . La part des prêts est toutefois résiduelle dans l'aide multilatérale (1 %).

Par conséquent, la part de prêts dans l'aide publique au développement total de la France s'est élevée à 19 % en 2018 , contre 7 % en moyenne chez les donateurs du CAD de l'OCDE.

Lors de son audition par les rapporteurs spéciaux, la direction générale du trésor a reconnu que le recours aux prêts constituait une singularité du modèle français, cet outil budgétaire ayant été privilégié ces dernières années en raison de son moindre coût pour les finances publiques .

Toutefois, les rapporteurs spéciaux relèvent qu'un rééquilibrage du profil de l'aide publique au développement de la France a été initié depuis 2018. Ainsi, en 2019, la part des prêts devrait reculer et atteindre 14 % de l'aide publique au développement de la France 16 ( * ) .

B. LE CICID DE FÉVRIER 2018 A APPORTÉ UN CADRAGE NÉCESSAIRE, QUI TARDE TOUTEFOIS À ÊTRE TRADUIT DANS UNE LOI DE PROGRAMMATION RENOUVELÉE

1. Le CICID de février 2018 a fixé les priorités de l'aide publique au développement de la France

Fortement interministérielle, l'aide au développement menée par la France apparaît très éclatée. Si la dispersion des instruments budgétaires, résulte directement des critères de comptabilisation de l'aide publique au développement définis par l'OCDE, les rapporteurs spéciaux constatent qu'elle nuit à l'élaboration d'une vision exhaustive de cette politique publique, ce qui rend l'appréciation de son pilotage d'autant plus difficile .

Ce constat a été relayé par le cabinet du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, lors de son audition par les rapporteurs spéciaux, qui a fait état d'un pilotage longtemps guidé par des objectifs de moyens, plutôt que de résultats .

Dans cette perspective, les rapporteurs spéciaux considèrent que les conclusions du CICID du 8 février 2018 constituent un tournant, dans la mesure où elles définissent le « cap » de l'aide publique au développement pour les prochaines années.

Outre la trajectoire budgétaire visant à atteindre le ratio de 0,55 % du RNB en 2022, le CICID de 2018 a mis l'accent sur plusieurs éléments fondamentaux de l'aide publique au développement, dont notamment :

- la définition de cinq priorités politiques sur lesquelles l'aide publique au développement de la France doit être concentrée, à savoir la santé, l'éducation, l'égalité entre les femmes et les hommes, le climat, et répondre aux situations de fragilité et de crise ;

- le renforcement de la composante « dons » de notre aide publique au développement ;

- l'accroissement de la part de l'aide bilatérale ;

- l'accroissement de l'aide humanitaire , avec l'objectif d'atteindre un montant de 500 millions d'euros en 2022 ;

- un accroissement de la part de l'aide publique au développement transitant par les ONG et les collectivités territoriales ;

- la définition de priorités géographiques en définissant 19 pays prioritaires 17 ( * ) , dont 18 en Afrique.

Les rapporteurs saluent l'effort de clarification des priorités de l'aide publique au développement de la France qui, au regard de son intervention dans de nombreux pays du monde, a pu faire l'objet de critiques quant à une dispersion trop importante de ses moyens, entraînant un risque de « saupoudrage » régulièrement dénoncé.

2. Le projet de loi de programmation : l'Arlésienne ?

Depuis 2018 est prévu un projet de loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales , qui devrait remplacer la dernière loi d'orientation de 2014 18 ( * ) . Outre la programmation budgétaire esquissée par le CICID de 2018, le projet de loi a vocation à redéfinir l'architecture du pilotage de la politique de développement, et notamment l'articulation entre les ministères de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE), de l'économie, des finances et de la relance, ainsi que l'AFD qui constitue l'opérateur pivot de l'État.

Plusieurs fois annoncé, l'examen de ce projet de loi au Parlement n'a eu de cesse d'être repoussé depuis lors.

Toutefois, lors de son audition , il a été indiqué aux rapporteurs spéciaux que le texte devait être présenté dans les prochains jours en Conseil des ministres . Initialement prévue le 18 mars dernier, sa présentation en Conseil des ministres avait été reportée en raison de la crise sanitaire. Les conséquences de celle-ci ont nécessité un ajustement de la trajectoire budgétaire, et le projet de loi a fait l'objet d'une nouvelle saisine du Conseil économique, social et environnemental (CESE) et du Conseil d'État.

3. Une stratégie dans les « très grands émergents » qui interroge au regard des priorités affichées

L'examen à venir du projet de loi de programmation s'inscrit dans un contexte de fortes attentes quant à la définition d'un pilotage stratégique et politique de l'aide publique au développement, notamment au regard des priorités géographiques de celle-ci.

En effet, si le CICID du 8 février 2018 a défini clairement la liste des 19 pays prioritaires de l'aide publique au développement de la France, en 2018, seuls cinq d'entre eux figurent parmi les vingt premiers bénéficiaires .

Principaux bénéficiaires de l'aide publique au développement totale de la France en 2018

(en millions d'euros)

Rang

Pays

Montant

1

Inde

414

2

Colombie

385

3

Turquie

346

4

Cameroun

317

5

Côte d'Ivoire

294

6

Éthiopie

256

7

Indonésie

253

8

Bangladesh

221

9

Sénégal

220

10

Nigéria

218

11

Maroc

166

12

Kenya

156

13

Burkina Faso

144

14

Syrie

130

15

Géorgie

129

16

Mali

124

17

Tchad

124

18

Cuba

117

19

RDC

116

20

Tanzanie

113

NB : les montants présentés additionnent l'aide publique bilatérale et l'aide publique multilatérale imputée. Il s'agit de l'aide publique totale, soit celle comptabilisée pour les dons et les prêts.

Source : document de politique transversale annexé au projet de loi de finances pour 2021, à partir des données de l'OCDE

S'agissant de la Turquie, les informations transmises aux rapporteurs spéciaux indiquent, qu'en 2019, la Turquie se place à la 23 ème place parmi les bénéficiaires de l'aide bilatérale de la France , pour un montant de 66 million d'euros, soit une perte de treize places par rapport à 2018 . Cette diminution résulte principalement par la baisse de la contribution de la France à la « Facilité de l'Union européenne  en faveur des réfugiés en Turquie ». En revanche, les données relatives à l'aide multilatérale ne sont pas encore connues pour l'année 2019 .

Ce déséquilibre entre les priorités géographiques de la France et les principaux bénéficiaires de son aide publique au développement résulte, en partie, de l'appétence de la France pour les prêts , au détriment des dons, l'encourageant à investir dans des pays à revenus intermédiaires plutôt que dans les pays les moins avancés (PMA) qui ne peuvent souscrire de prêts. Ainsi, la part des PMA dans l'aide publique totale - bilatérale et multilatérale - représentait seulement 26 % en 2018. Depuis 2014, la part de l'aide à destination des pays à revenu intermédiaire représente plus de la moitié de l'aide totale (52 % en moyenne entre 2014 et 2018) 19 ( * ) .

Par conséquent, les rapporteurs spéciaux s'interrogent sur la stratégie de l'aide publique au développement de la France à destination des « très grands émergents » 20 ( * ) (TGE), pour lesquels l'accès à l'aide publique internationale n'apparaît plus comme une nécessité.

Les auditions menées par les rapporteurs spéciaux ont toutefois mis en lumière le fait que la comptabilisation de certains flux financiers à destination de ces pays en tant qu'aide publique au développement pouvait être questionnée . Par exemple, la moitié de l'aide bilatérale adressée à la Chine correspond aux frais d'écolage des étudiants chinois en France (67 millions d'euros sur les 121 millions d'euros au total) 21 ( * ) .

De plus, l'intervention dans ces pays ne doit en principe faire l'objet d'aucun coût financier pour l'État , conformément au CICID du 13 juillet 2013. Ce principe a été intégré dans la loi de 2014 22 ( * ) qui prévoit que « le partenariat avec les « très grands émergents », qui mobilisera les acteurs français dans leur diversité, est essentiel pour renforcer le dialogue et préparer ensemble les négociations internationales sur les enjeux partagés. Il se fera sans coût financier pour l'État (hors expertise technique) ».

Pourtant, les données transmises aux rapporteurs spéciaux font état d'un effort financier de l'État à destination des TGE s'élevant à 44 millions d'euros en 2019 23 ( * ) , dont 19,1 millions d'euros pour des crédits d'assistance technique, donc permis par les dispositions de la loi de 2014, mais également :

- 14 millions d'euros résultant d'un prêt concessionnel ;

- 11 millions d'euros de dons, dont la moitié destinée à la lutte contre la déforestation en Amazonie.

Les auditions menées par les rapporteurs spéciaux ont rappelé que le mandat d'intervention de l'AFD dans ces pays vise à soutenir la croissance verte, et le développement durable de ces pays , dans ses composantes économique, sociale et environnementale, et à créer des liens économiques entre la France et ces États. En tant que société de financement, il convient de noter que l'activité de l'AFD dans ces pays contribue évidemment à la diversification des risques de son portefeuille.

Dans cette perspective, les engagements de l'AFD ont rapidement augmenté ces dernières années, et ont atteint 2,01 milliards d'euros en 2019 , soit un doublement depuis 2015 , et une hausse de 30 % par rapport à 2018. Le rebond des autorisations de financement entre 2018 et 2019 résulte d'une hausse de l'activité de l'AFD au Brésil, qui s'est établie à 396 millions d'euros, contre 19 millions d'euros en 2018.

Les rapporteurs spéciaux reconnaissent que l'intervention dans les TGE permet d'entretenir des liens économiques et diplomatiques avec la société civile et participe de la stratégie d'influence de la France. Toutefois, ces interventions doivent s'inscrire en parfaite adéquation avec les priorités diplomatiques de la France, au risque de nuire à la cohérence de l'action extérieure de notre pays.

À ce titre, les rapporteurs spéciaux saluent la réflexion en cours au sein du Gouvernement sur les conditions de mobilisation de l'aide publique au développement destinée à la Turquie . En effet, le secrétaire d'État chargée des affaires européennes, Clément Beaune, a annoncé une révision à venir de la « politique française et européenne de prêts à la Turquie, parmi d'autres instruments de réponse, dans les prochains mois » 24 ( * ) .

C. LA CRISE SANITAIRE N'A PAS REMIS EN CAUSE LES ORIENTATIONS À LONG TERME DE L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT

1. La crise sanitaire a appelé à des réponses immédiates en matière d'aide publique au développement

Les conséquences économiques, sociales, et sanitaires de la crise de la covid-19 ont fragilisé des pays déjà en difficulté, appelant une mobilisation spécifique en matière d'aide publique au développement.

Au plan bilatéral , des crédits ont été redéployés pour répondre à l'urgence sanitaire. Ainsi, la direction générale de la mondialisation a indiqué aux rapporteurs spéciaux que le Centre de crise et de soutien (CDCS) du MEAE a mobilisé une partie de ses crédits pour financer des projets mis en oeuvre au niveau local par des ONG, notamment dans les pays du Levant, au Sahel, en Libye, en République démocratique du Congo, en Birmanie et au Venezuela.

S'agissant de l'AFD, elle a octroyé le 16 mars 2020 un financement de 1,5 million d'euros à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) pour améliorer la veille sanitaire et assurer une prise en charge adéquate dans cinq pays d'Afrique francophone.

De plus, le conseil d'administration de l'AFD a approuvé en avril l'initiative « santé en commun », dotée de 150 millions d'euros en subventions et 1 milliard d'euros en prêts , financée via les crédits des programmes 209 et 110, dont 70 millions de don-projet. Fin octobre, 963 millions d'euros avaient déjà été engagés 25 ( * ) . En complément de cette initiative, l'AFD a engagé des projets dits « Covid élargis » répondant quant à eux à la crise économique et sanitaire essentiellement hors continent africain, pour un montant de 1,6 milliard d'euros.

Enfin, un soutien additionnel de 2 millions d'euros a été alloué à l'Institut Pasteur , sur les projets FSPI qui n'ont pu être mis en oeuvre du fait de la crise sanitaire, afin de financer des projets de lutte contre la pandémie en Afrique.

Au niveau multilatéral, les fonds multilatéraux ont réorienté une partie de leurs financements vers la lutte contre l'épidémie . À titre d'exemple, le fonds mondial de lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme (FMSTP) a encouragé ses récipiendaires à redéployer 5 % de leurs subventions vers la réponse à la crise sanitaire.

Enfin, les ministres des finances du G20 et les pays membres du Club de Paris, se sont accordés en avril dernier sur la mise en oeuvre de l'Initiative de suspension du service de la dette (ISSD) en faveur des pays les plus pauvres.

Comme l'a indiqué la direction générale du Trésor aux rapporteurs spéciaux, cette initiative constitue une mesure de liquidité pour les pays bénéficiaires, essentiellement des pays appartenant à la catégorie des pays les moins avancés (PMA). Il ne s'agit pas d'une annulation de dette, mais d'un rééchelonnement des paiements qui étaient prévus entre mai et la fin de l'année 2020. À ce stade, la valeur des créances reste inchangée . Par conséquent, cette initiative devrait entraîner une perte de recettes en 2020 pour la France, qui sera compensée par un surcroît de recettes à partir de 2022.

La mise en oeuvre de l'ISSD se traduit, pour 2021, par une baisse des crédits du programme 209 dédiés aux contrats de désendettement et de développement (C2D) . Cet instrument budgétaire permet de convertir la dette des pays bénéficiaires en subventions. En effet, aux termes de ces contrats, lorsque le pays rembourse sa créance à la France, la somme correspondante au remboursement lui est reversée sous forme de dons, permettant ainsi de favoriser conjointement le désendettement de ces pays, et le soutien à des politiques de développement.

D'après la direction générale de la mondialisation, l'ISSD s'est traduite par la suspension des remboursements au titre du C2D en Guinée Conakry , au Cameroun , en République démocratique du Congo , et en Côte d'Ivoire . Faute de remboursement, ces créances ne peuvent donner lieu au versement de crédits au titre des C2D. Ainsi, pour 2021, les crédits sont réduits de 40 %, pour s'établir à 24 millions d'euros.

Les rapporteurs spéciaux constatent que les réponses à la crise sanitaire ont permis de faire preuve de réactivité, sans modifier les priorités de long terme de l'aide publique au développement de la France .

2. La poursuite de la trajectoire budgétaire à la hausse, malgré des finances publiques dégradées, renforce l'exigence de « redevabilité »

L'objectif d'une montée en charge de l'aide publique au développement fixé en 2018 reste inchangé par la crise sanitaire. Si les rapporteurs spéciaux saluent la préservation d'un budget crucial pour le rayonnement diplomatique de la France et le financement des biens publics mondiaux, ils rappellent toutefois que, dans un contexte de finances publiques dégradées, la question de l'évaluation, de la transparence, et de la « redevabilité » de cette politique publique devient de plus en plus importante .

Une refonte de la culture de l'évaluation de l'aide publique au développement apparaît d'autant plus nécessaire qu'actuellement les moyens consacrés en ce sens sont répartis entre la direction générale de la mondialisation du MEAE, la direction générale du Trésor du ministère de l'économie, des finances et de la relance, et l'AFD . Chacun de ces « pôles » d'évaluation traite des projets financés par leur programme budgétaire respectif.

Outre un éclatement fonctionnel, la conduite actuelle de l'évaluation laisse apparaître des lacunes . Ainsi, au sein du MEAE, certains projets, tels que les FSPI, sont évalués par les agents qui suivent leur mise en oeuvre. Au sein de la direction générale du Trésor, « compte tenu des moyens humains et financiers dont elle dispose, l'unité d'évaluation des activités de développement (UEAD) n'est pas en mesure de piloter l'évaluation exhaustive de toutes les activités de développement relevant des programmes 110 et 851 » 26 ( * ) .

Les rapporteurs spéciaux considèrent que des gains d'efficience devraient pouvoir être réalisés afin de garantir une meilleure couverture des projets réalisés . Le projet de loi d'orientation à venir devrait comporter des dispositions en ce sens, notamment avec la proposition de créer une commission indépendante d'évaluation, dont les contours restent à définir ( cf. supra ).

III. L'AGENCE FRANÇAISE DE DÉVELOPPEMENT : UN OPÉRATEUR EN PLEINE MUTATION, DONT LA CROISSANCE DOIT ÊTRE MAITRISÉE

A. LA HAUSSE SANS PRÉCÉDENT DES ENGAGEMENTS DE L'AFD A PU JUSTIFIER L'ADAPTATION DE SES MOYENS

L'Agence française de développement (AFD) constitue l'opérateur pivot en charge de la mise en oeuvre de la politique d'aide publique au développement. Bénéficiant d'un double statut d'établissement public et de société de financement, elle est placée sous la tutelle du ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE), du ministère de l'économie, des finances et de la relance, et du ministère des outre-mer. Elle intervient dans 110 pays différents , via plusieurs instruments :

- elle octroie des prêts à long terme à un État, organisme public ou privé et des lignes de crédit à des institutions financières ;

- elle accorde des s ubventions et finance des ONG ;

- elle assure la mise en oeuvre des aides budgétaires globales de la France ;

- elle participe aux opérations d'annulations bilatérales de dettes , dans le cadre de l'initiative en faveur des pays pauvres très endettées (PPTE) et des contrats de désendettement et de développement ;

- elle octroie des garanties ;

- elle accorde des prêts à des acteurs du secteur privé via sa filiale Proparco .

L'AFD bénéficie de crédits budgétaires de différents programmes. Le projet de loi de finances propose de lui allouer les crédits suivants :

Crédits budgétaires alloués à l'AFD dans le PLF 2021

(en millions d'euros)

AE

CP

Programme 110

1 122,60

380,38

Rémunération de l'AFD

7,00

7,00

Bonifications sur prêts aux États étrangers

980,00

230,00

Bonifications sur prêts Outremer antérieurs à 2010

0,00

4,34

Fonds français pour l'environnement mondial (FFEM)

0,00

25,06

Aides budgétaires globales

60,00

60,00

Initiative DRM AFD

5,00

5,00

Fonds d'expertise technique et d'échange d'expérience (FEXTE)

30,00

11,50

Programme de renforcement des capacités commerciales (PRCC) sur part DG Trésor

0,00

4,50

Initiatives en faveur de la recherche et l'innovation

37,50

5,80

Bonifications des prêts à des institutions et fonds multilatéraux

3,10

26,80

Compensation des annulations de dettes (Club de Paris, Dakar I et II)

0,00

0,38

Programme 123 (mission « Outre-mer »)

Bonifications sur prêts Outremer à partir de 2010

36,35

14,82

Programme 209

Dons-projets

905,00

617,40

Dons ONG

130,00

115,41

Programme 365

Renforcement des fonds propres de l'AFD

953,00

953,00

Programme 853

RCS (emprunts)

0,00

258,00

Source : projet de loi de finances pour 2021

En 2020, les engagements de l'AFD devraient atteindre un montant de 13,4 milliards d'euros , légèrement en recul par rapport à 2019 (14,1 milliards d'euros) 27 ( * ) . La stabilisation des engagements de l'AFD implique une transition dans le pilotage de l'opérateur, passant d'une activité concentrée sur les engagements à la concrétisation des signatures de prêts et décaissements des crédits.

La croissance des engagements de l'AFD s'est nécessairement traduite par une augmentation de ses moyens afin de pouvoir absorber le volume d'activité croissant. Ainsi, les effectifs du groupe sont passés de 2 441 à 2658 agents entre 2018 et 2019, soit une hausse de 8,9 % du nombre d'ETPT 28 ( * ) .

La rémunération de l'AFD au titre des prestations réalisées pour le compte de l'État a également doublé entre 2018 et 2019 , pour atteindre 105 millions d'euros. Les modalités de rémunération de l'AFD font l'objet d'une convention qui définit une grille de rémunération des différentes prestations. Les rapporteurs spéciaux relèvent que cet accroissement soudain de la rémunération est cohérent avec la multiplication par 4,5 du montant des AE confiés à l'AFD en 2019 au titre des dons .

B. TOUTEFOIS, LE BESOIN EN FONDS PROPRES APPELLE À MAÎTRISER SA CROISSANCE

Eu égard à cette croissance rapide au cours des derniers exercices, les rapporteurs spéciaux considèrent que le besoin de renforcer les fonds propres de l'AFD traduit la nécessité de maîtriser son activité , pour mieux la consolider.

Cette « consolidation » passe notamment par la maîtrise des frais généraux de l'AFD.

Cet objectif semble partagé par les ministères de tutelle qui l'ont évoqué lors des auditions, et est reflété par l'un des indicateurs de performance de la mission « Aide publique au développement » , intitulé « coefficient d'exploitation du Groupe ». Cet indicateur rapporte le montant des frais généraux (dépenses de personnel, dépenses de fonctionnement, et autres frais administratifs) au produit net bancaire du groupe AFD. Alors que le contrat d'objectifs et de moyens (COM) 2017-2019 définissait un coefficient de 70 % , le projet de loi de finances pour 2021 prévoit une cible de 60 % , reflétant l'ambition d'une maîtrise accrue de ces frais.

À ce titre, le COM 2017-2019 étant échu, les rapporteurs spéciaux s'étonnent qu'à cette date, le COM 2018-2020 n'ait pas encore été signé. Il s'agit pourtant d'un point important permettant de formaliser les relations et priorités d'actions pour l'AFD . Ce sujet avait d'ailleurs été relevé par la cour des comptes, dans son enquête réalisée à la demande de la commission des finances du Sénat, appelant à une meilleure formalisation des relations entre l'État et l'AFD 29 ( * ) .

L'objectif de maîtriser les dépenses de personnel est partagé par le directeur général de l'AFD, Rémy Rioux, qui a été auditionné par les rapporteurs spéciaux . Comme l'avait souligné la Cour des comptes dans son rapport public annuel de 2019, « le besoin inhérent aux objectifs de croissance de l'Agence rend indispensable l'engagement sans tarder de la refonte du statut du personnel, qui date de 1959 et n'a plus été actualisé depuis 1997 » 30 ( * ) . Des négociations sont actuellement en cours, et devraient aboutir en 2021.

S'agissant des dépenses immobilières , les données transmises par l'AFD aux rapporteurs spéciaux font état de dépenses de fonctionnement s'élevant à 15,9 millions d'euros , et de dépenses d'investissement de 0,9 million d'euros en 2019 , soit un total de 16,8 millions d'euros 31 ( * ) .

Le parc immobilier du siège du groupe AFD devrait connaître prochainement des évolutions significatives, avec la cession de leurs sept sites parisiens et leur regroupement au sein d'un site unique . L'éclatement des sites accueillant le personnel, la croissance rapide des effectifs, et les enjeux de sécurisation des bâtiments ont justifié la mise en oeuvre de ce projet, qui a fait l'objet d'une validation par la direction de l'immobilier de l'État . Le coût budgétaire net de l'opération, après la cession des immeubles détenus actuellement par l'AFD, s'élève à 560 millions d'euros , pour lequel l'AFD s'endettera en propre. Par conséquent, l'État ne devrait pas verser de dotation budgétaire pour la conduite de ce projet .

Les rapporteurs spéciaux s'interrogent toutefois sur la nécessité d'acquérir des locaux en plein coeur de Paris (gare d'Austerlitz), compte tenu de l'inflation des prix immobiliers à Paris. Ils appellent le conseil d'administration à bien mesurer le poids de l'investissement projeté dans les charges de fonctionnement de l'AFD, à tenir compte des besoins effectifs de locaux pour l'AFD, en respectant strictement les normes en vigueur pour les services de l'État, telles que le ratio de 12m² par agent, et à identifier rapidement, en cas de projet collectif, es partenaires éventuels d'un tel investissement immobilier.

En tout état de cause, la rationalisation des implantations immobilières du groupe doit également passer par les antennes locales de l'AFD , notamment en encourageant les mutualisations avec les postes diplomatiques et consulaires. À ce titre, le directeur général de l'AFD, Rémy Rioux, a indiqué aux rapporteurs spéciaux que la stratégie immobilière du réseau ferait l'objet d'une présentation au Conseil d'administration au début de l'année prochaine.

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

ARTICLE 53

Souscription à l'augmentation de capital de la Banque africaine
de développement (BAfD)

Le présent article autorise le ministre chargé de l'économie à souscrire à l'augmentation générale de capital de la Banque africaine de développement (BAfD) qui a été approuvée par le Conseil des gouverneurs de celle-ci en 2019. Cette souscription se traduit par l'acquisition de 301 546 nouvelles parts, dont 18 093 appelées (6 % des parts) et 283 453 sujettes à appel.

Par conséquent, cette augmentation de capital porte les parts de la France appelées à 36 109, et les parts appelables à 511 109, soit respectivement un doublement des parts appelées, et une hausse de 124 % des parts appelables.

Pour la France, s'agissant du capital appelé, cette souscription à l'augmentation de capital se traduit par des versements annuels, réalisés entre 2021 et 2028, d'un montant de 28,1 millions d'euros, soit un total de 224,9 millions d'euros. Ce montant transitera par le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».

Si les rapporteurs spéciaux estiment que cette souscription de la France à l'augmentation de capital de la BAfD est nécessaire afin de conserver son influence en tant qu'actionnaire de cette institution financière, et pour renforcer son effort en faveur du continent africain, ils soulignent que cette augmentation de capital devra faire l'objet d'une vigilance particulière, pour s'assurer de la bonne utilisation des moyens supplémentaires accordés à la BAfD.

Les rapporteurs spéciaux proposent d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LA FRANCE ACTIONNAIRE DE LA BANQUE AFRICAINE DE DÉVELOPPEMENT

Aux côtés des actions bilatérales, l'aide multilatérale participe à la politique d'aide publique au développement de la France, et a représenté 39 % de celle-ci en 2019.

L'aide publique multilatérale se traduit notamment par la participation financière à des entités du groupe de la Banque mondiale, ainsi que des banques régionales de développement , à l'image de la Banque africaine de développement (BAfD), la Banque interaméricaine de développement (BID), la Banque asiatique de développement, la Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD), la Banque européenne d'investissement (BEI), la Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures (BAII), la Banque de développement du Conseil de l'Europe (BDCE), la Banque de développement des États de l'Afrique centrale (BDEAC), et enfin la Banque ouest-africaine de développement (BOAD).

À la suite de la crise financière de 2007-2008, les pays du G20 ont souhaité mener une revue du capital des banque multilatérales de développement dans l'objectif de mobiliser de nouvelles ressources. Cette revue a conclu en 2010 à la nécessité de mener plusieurs plans de recapitalisations, dont les premières tranches ont été honorées en 2011.

S'agissant de la Banque africaine de développement (BAfD), la France en est actionnaire depuis l'ouverture du capital à des pays non africains, à hauteur de 3,8 % . Elle constitue le cinquième actionnaire non régional derrière les États-Unis, le Japon, l'Allemagne et le Canada.

La Banque africaine de développement

Créée en 1964 et basée à Abidjan (Côte d'Ivoire), la Banque africaine de développement (BAfD) a pour vocation de mobiliser les ressources financières destinées à appuyer le développement économique et le progrès social durables de l'Afrique, ainsi qu'à soutenir son intégration économique. À cette fin, la Banque lève des fonds, à coût faible du fait de sa notation AAA auprès des principales agences de notation, pour financer des initiatives de développement, comme des routes, des hôpitaux et des écoles, des projets agricoles et des réseaux d'électricité. Les prêts pour des projets sont à destination soit des États, soit des entreprises privées (ou entreprises publiques ne bénéficiant pas de la garantie de l'État) : les projets pour le secteur privé représentent ainsi environ 40% des projets (hors appuis budgétaires et opérations de garantie).

La Banque est dirigée par un Conseil d'administration composé de vingt membres, dont treize sont élus par les gouverneurs représentant les pays membres régionaux, c'est-à-dire les pays africains (soit 60% des droits de vote) et sept par les gouverneurs représentant les pays membres non-régionaux (40% des droits de vote). Cette répartition des voix donnant la majorité aux pays membres régionaux, bénéficiaires de projets de la Banque, représente un cas atypique parmi les Banques multilatérales de développement.

La France est 5e actionnaire non régional avec 3,8% des voix, elle représente au conseil la circonscription Belgique-Espagne-France. La Directrice générale du Trésor est la gouverneure pour la France à la Banque africaine de développement.

Source : direction générale du Trésor

Par ailleurs, la France contribue au financement du fonds africain de développement (FAD) , qui constitue le guichet concessionnel de la BAfD. Il fournit des ressources aux pays africains à faibles revenus pour financer des projets et il assure auprès d'eux une assistance technique. Les négociations pour la quinzième reconstitution du fonds se sont conclues fin 2019, au cours de laquelle la France a annoncé une contribution de 537 millions de dollars entièrement en dons . À ce titre, après un premier décaissement en 2020 des crédits à hauteur 460 millions d'euros, le projet de loi de finances pour 2021 prévoit que la France verse en 2021 146 millions d'euros en crédits de paiement .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à autoriser le ministre chargé de l'économie à souscrire à l'augmentation générale de capital de la Banque africaine de développement qui a été approuvée par le Conseil des gouverneurs de celle-ci en 2019 32 ( * ) . Cette souscription se traduit par l'acquisition de 301 546 nouvelles parts, dont 18 093 appelées (6 % des parts) et 283 453 sujettes à appel.

Par conséquent, cette augmentation de capital porte les parts de la France appelées à 36 109, et les parts appelables à 511 109, soit respectivement un doublement des parts appelées, et une hausse de 124 % des parts appelables .

III. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été adopté par l'Assemblée nationale en première lecture sans modification .

IV. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES

Le conseil des gouverneurs de la BAfD a approuvé une nouvelle augmentation de capital en 2019, dans l'objectif d'augmenter de 125 % le capital autorisé de la banque afin de le porter à environ 210 milliards de dollars d'ici à 2030.

Concrètement, cette augmentation de capital devrait permettre à la BAfD de passer d'un volume annuel de prêts d'environ 7 milliards d'euros , à 8 milliards d'euros en 2025 , puis à 10 milliards d'euros en 2030 .

Pour la France, s'agissant du capital appelé , cette souscription à l'augmentation de capital se traduit par des versements annuels, réalisés entre 2021 et 2028, d'un montant de 28,1 millions d'euros, soit un total de 224,9 millions d'euros . Ce montant transitera par le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».

Seul le capital appelé a une incidence sur les finances publiques de l'État. En revanche, la commission souligne que le capital appelable de la France augmenterait d'environ 3,5 milliards d'euros , portant ainsi l'engagement total de la France au titre du capital sujet à appel de la BAfD à 6,3 milliards d'euros .

Une telle hausse de capital apparaît nécessaire, d'une part, pour renforcer l'action de la BAfD en Afrique et, d'autre part, afin de faire face au volume croissant de prêts actuellement engagé . En effet, 75 % de l'augmentation de capital permet uniquement d'assurer la soutenabilité du volume annuel de prêts de 7 milliards d'euros.

Les rapporteurs spéciaux estiment que la souscription de la France à cette augmentation de capital est justifiée par la nécessité, pour la France, de maintenir son rang au sein des principaux actionnaires de la BAfD , afin de conserver un partenariat privilégié avec l'un des principaux acteurs de l'aide publique au développement africain. En effet, comme le rappelle l'évaluation préalable du présent article, étant donné qu'il s'agit d'une augmentation générale de capital, les parts relatives dans l'actionnariat n'ont pas vocation à être modifiées.

En outre, les rapporteurs spéciaux rappellent que la souscription de la France à l'augmentation de capital de la BAfD s'inscrit en conformité avec les priorités fixées par le Comité interministériel de la coopération international et du développement du 8 février 2018 , qui prévoit de renforcer l'aide publique au développement de la France à destination du continent africain.

Néanmoins, une telle augmentation du capital de la BAfD ne saurait constituer un « chèque en blanc » pour l'institution financière. À l'image des exigences accrues envers l'AFD dans le cadre du renforcement de ses fonds propres prévu par le projet de loi de finances pour 2021, les rapporteurs spéciaux estiment que l'activité de la BAfD devra faire l'objet d'un suivi privilégié et d'une évaluation critique par l'ensemble de ses actionnaires . Ainsi, il conviendra d'être particulièrement vigilant sur la mise en oeuvre des réformes annoncées par la BAfD en contrepartie de l'augmentation de ses moyens , en particulier en matière de renforcement des procédures et audits internes, et de la surveillance de sa soutenabilité financière.

Décision de la commission : la commission des finances vous propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 10 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a examiné le rapport de MM. Michel Canevet et Jean-Claude Requier, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Aide publique au développement » (et article 53) et le compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ».

M. Claude Raynal , président . - Nous accueillons Hugues Saury et Rachid Témal, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères sur le budget de l'aide publique au développement. S'ils le souhaitent, nous leur donnerons la parole à l'issue de la présentation.

M. Michel Canevet , rapporteur spécial . - L'aide publique au développement (APD) constitue une politique interministérielle, pour laquelle la mission « Aide publique au développement » représente environ les deux tiers des crédits budgétaires. On retrouve notamment une partie de l'APD dans les missions « Action extérieure de l'État », « Recherche et enseignement supérieur », « Immigration, asile, intégration ».

En 2021, les autorisations d'engagement de la mission s'élèveront à 5,1 milliards d'euros, soit une baisse de 30 %. Les crédits de paiement s'établiront à 4,9 milliards d'euros, soit une hausse de 50 %, sachant que le périmètre a évolué avec le nouveau programme 365 visant à renforcer les fonds propres de l'Agence française de développement (AFD) pour un montant de 953 millions d'euros.

Par ailleurs, le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » porte les crédits liés aux dotations en capital des banques de développement à l'étranger.

Le compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers » comprend les prêts du Trésor ou encore les opérations de traitements de dettes de certains pays. Enfin, il convient de relever que le Fonds de solidarité pour le développement (FSD) est alimenté par la taxe que nous avions instituée sur les billets d'avion, pour un montant de 210 millions d'euros, et par une part de la taxe sur les transactions financières pour un montant de 528 millions d'euros.

Pour ce qui concerne les crédits budgétaires, il y a trois programmes au sein de la mission « Aide publique au développement ». Le programme 110 est piloté par la direction générale du Trésor, au sein du ministère de l'économie, des finances et de la relance. Le programme 209 «  Solidarité à l'égard des pays en voie de développement » est piloté par la direction générale de la mondialisation, de la culture, de l'enseignement et du développement international au ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Et je viens d'évoquer le programme 365.

Les orientations mises en oeuvre nous ont semblé conformes à celles qu'avait définies le comité interministériel de coopération internationale et de développement (CICID) du 8 février 2018. Ce CICID a défini une liste de pays prioritaires, ainsi que les priorités politiques de l'aide publique au développement, telles que, par exemple, le renforcement de notre aide en matière de protection de l'environnement. Il avait enfin été décidé de réorienter la politique vers une plus grande part de dons et de subventions, car la France se distingue depuis longtemps par une politique de l'aide publique au développement qui s'appuie essentiellement sur des prêts.

Pour la première fois, dans ce budget 2021, les dépenses liées à l'environnement ont été évaluées : elles sont estimées à 1,9 milliard d'euros. La mission budgétaire « Plan de relance » comporte, pour un montant de 50 millions d'euros, des crédits consacrés à la santé et au financement de la recherche d'un vaccin contre la Covid.

Le programme 110 concerne des fonds multilatéraux alimentés par prévisions triennales. Tous les trois ans, une autorisation d'engagement assez significative nous est demandée, qui se traduit ensuite par des crédits de paiement répartis sur les trois années suivantes.

On observe une stabilisation des crédits alloués de l'AFD pour bonifier les prêts à des États étrangers, avec 1 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 320 millions d'euros en crédits de paiement. Les taux bas font qu'il y a moins de bonifications de prêts.

Nous apprécions qu'on ne poursuive pas une politique de prêts tous azimuts, mais qu'on se concentre sur quelques actions fortes, notamment par des dons et subventions.

Nous avons noté une provision de 3 millions d'euros, qui a été réservée pour le fonctionnement d'une commission indépendante, liée au rapport Berville qui, en 2018, avait défini un certain nombre de propositions d'orientations pour la politique de développement, et qui devrait normalement trouver sa traduction dans un projet de loi à venir.

Et, dans le programme 365, 953 millions d'euros sont affectés au capital de l'AFD, car l'AFD, comme les autres établissements bancaires, doit avoir un ratio de solvabilité qui exige que ses fonds propres représentent près de 14 % des actifs pondérés par le risque. La réglementation prudentielle la conduit donc à renforcer ses fonds propres en fonction des engagements qu'elle a déjà réalisés. De plus, une évolution de la réglementation prudentielle exclut la ressource à condition spéciale dont bénéficie l'AFD du calcul de ses fonds propres pour le ratio dit « grands risques », ce qui nécessite d'augmenter ses fonds propres. Cette enveloppe de 953 millions d'euros sera-t-elle suffisante ? Nous n'en sommes pas sûrs.

Le programme 209 bénéficie d'une hausse en crédits de paiement de 388 millions d'euros par rapport à 2020, permettant, en partie, l'aide humanitaire. L'aide aux projets gérée par l'AFD augmente également de 339 millions d'euros. Et le ministère a aussi augmenté l'enveloppe qu'il destine au réseau consulaire : le Fonds de solidarité pour les projets innovants permettra, dès 2021, à hauteur de 70 millions d'euros, de financer des projets identifiés par les ambassadeurs. Le financement de ces projets ne devra toutefois pas dépasser un million d'euros tous les deux ans. Il s'agit donc de projets de taille modeste, mais cela donne au réseau consulaire une certaine réactivité pour financer des actions concrètes de développement.

M. Jean-Claude Requier , rapporteur spécial . - J'en viens désormais à l'appréciation de la politique d'aide publique au développement de la France mise en oeuvre depuis plusieurs années.

Comme l'a indiqué Michel Canevet, les crédits de la mission proposés pour 2021 poursuivent leur trajectoire haussière, conformément aux engagements pris en 2018 par le Président de la République. En réalité, l'aide publique au développement de la France a amorcé son augmentation en 2015, et elle a dépassé le montant de 10 milliards d'euros en 2017. En 2019, elle devrait atteindre 10,9 milliards d'euros.

Cette augmentation a permis à la France de maintenir son rang, à défaut d'améliorer son classement, parmi les principaux contributeurs de l'OCDE. Ainsi, en 2019, la France reste le cinquième pourvoyeur d'aide publique au développement en volume, après les États-Unis, l'Allemagne, le Royaume-Uni et le Japon. Toutefois, en termes de ratio d'aide publique au développement dans le revenu national brut (RNB), la France n'occupe que la neuvième place, alors que les pays de l'Europe du Nord, et notamment la Suède, sont largement en tête.

Comme je l'avais déjà souligné l'année dernière, le profil de l'aide publique au développement de la France continue de se caractériser par un recours important aux prêts, au regard du montant des dons, par opposition aux autres pays de l'OCDE. Cette spécialité française a été privilégiée au cours de la dernière décennie en raison de son moindre coût pour les finances publiques. Toutefois, les auditions ont rappelé qu'un rééquilibrage avait été initié, et la part des prêts devrait reculer en 2019 pour se limiter à 14 % de notre aide publique au développement.

Le pilotage de cette politique publique a fait l'objet de critiques nourries depuis quelques années, y compris devant notre commission. En effet, fortement interministérielle, la politique d'aide publique au développement paraît éclatée en raison des multiples instruments budgétaires et de l'intervention de plusieurs acteurs publics, tels que le ministère des affaires étrangères, le ministère de l'économie, et l'Agence française de développement.

Les auditions menées nous ont confortés dans l'idée que la recherche d'un meilleur pilotage était désormais une priorité des ministères en charge de ce budget.

Dans cette perspective, les conclusions du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) de février 2018 ont permis de fixer les priorités politiques et géographiques de notre aide publique au développement. Ce cadrage était nécessaire, et il doit désormais être confirmé par une loi de programmation qui devra redéfinir l'architecture du pilotage de la politique de développement. Annoncé à plusieurs reprises, le projet de loi devrait être examiné par le Parlement d'ici quelques semaines - mais nous le qualifions, dans le rapport, d'Arlésienne...

Il nous reviendra de définir les dispositions législatives permettant d'encadrer de façon efficace le fonctionnement de cette politique publique, qui constitue un instrument incontournable de l'action extérieure de l'État et du rayonnement de la France. L'examen de ce projet de loi nous permettra également de nous interroger sur les priorités géographiques de notre aide publique au développement.

En effet, force est de constater qu'il existe un réel déséquilibre entre les dix-neuf pays désignés comme prioritaires par la France, dont dix-huit sont situés sur le continent africain - le dix-neuvième étant Haïti - et les principaux bénéficiaires de notre aide publique au développement. L'une des raisons de cette anomalie réside en partie dans l'appétence de la France pour les prêts, au détriment des dons, l'encourageant à investir dans des pays à revenus intermédiaires, qui pourront rembourser.

Plus généralement, ce constat nous conduit à nous interroger sur la stratégie mise en oeuvre à l'égard des très grands émergents, pour lesquels l'aide publique internationale n'apparaît plus comme une nécessité - comme la Turquie, ou la Chine. Il faut reconnaître que les critères de l'OCDE nous amènent à qualifier d'aide publique au développement des financements qui relèvent davantage de partenariats économiques... En tout état de cause, les interventions dans ces pays doivent s'inscrire en parfaite adéquation avec les priorités diplomatiques de la France, au risque de nuire à la cohérence de celle-ci.

La crise sanitaire a justifié le redéploiement de crédits, tant au niveau bilatéral, avec l'initiative « Santé en commun », qu'au niveau multilatéral, avec l'initiative de suspension du service de la dette. Face à l'urgence, l'accent a été mis sur les enjeux de santé en 2020, mais la crise n'a pas remis en cause les priorités de long terme de l'aide publique au développement, telles que le soutien au climat, à l'éducation, à la lutte contre les fragilités et les vulnérabilités de certains pays. Si la préservation d'un budget ambitieux pour l'aide publique au développement peut être saluée, la dégradation des finances publiques renforce néanmoins nos exigences en matière de transparence et d'évaluation de l'efficacité de cette politique publique. Ainsi, des dispositions permettant une évaluation indépendante devraient figurer dans le projet de loi à venir.

M. Michel Canevet , rapporteur spécial . - Les engagements de l'AFD devraient représenter 13,4 milliards d'euros d'engagement en 2020, contre 14,1 milliards d'euros en 2019. Elle compte 2 658 agents, avec 85 représentations dans le monde, dont sept sites parisiens et un centre de formation à Marseille. Elle intervient dans 110 pays.

Sa rémunération, de 105 millions d'euros, est déterminée selon une grille de prestations conventionnée qui nous a semblé cohérente avec l'évolution de l'activité - l'enveloppe de dons a été multipliée par 4,5 en 2019. Elle est aussi cohérente avec le respect de l'objectif, fixé dans le contrat d'objectifs et de moyens 2017-2019, de coefficient d'exploitation du groupe mesurant la part des frais généraux dans le produit net bancaire. Nous regrettons néanmoins que le contrat d'objectifs et de moyens 2020-2022 n'ait pas encore été signé entre l'État et l'AFD. L'AFD a un projet d'investissement immobilier, d'un coût non négligeable puisqu'il atteint 560 millions d'euros nets, pour regrouper ses services à Paris.

M. Vincent Delahaye . - Ils peuvent s'installer en banlieue !

M. Michel Canevet , rapporteur spécial . - Il nous semble nécessaire que l'AFD ait une bonne maîtrise de ses dépenses immobilières, et en particulier que le conseil d'administration, où siègent deux de nos collègues, examine attentivement la politique immobilière du groupe, pour s'assurer qu'on ne soit pas dans la démesure, mais dans la réalité des besoins. Le projet de loi de programmation prévoit la transformation de l'établissement public « Expertise France », qui a été créé en 2015, en société dont le capital serait détenu, au 1 er juillet 2021, par l'AFD. Enfin, sachez que l'AFD organise jeudi prochain un forum international réunissant 450 banques de développement à Paris, pour réfléchir sur le verdissement des politiques financières et de développement.

M. Jean-Claude Requier , rapporteur spécial . - J'en viens à l'examen de l'article 53 rattaché à la mission, qui autorise le ministre chargé de l'économie à souscrire à l'augmentation générale de capital de la Banque africaine de développement approuvée par le Conseil des gouverneurs de 2019. Cette augmentation de capital devrait permettre à la Banque africaine de développement de passer d'un volume annuel de prêts d'environ 7 milliards d'euros à 8 milliards d'euros en 2025, puis 10 milliards d'euros en 2030. Pour la France, qui est actionnaire à hauteur de 3,8 % du capital, cette souscription à l'augmentation de capital se traduirait par des versements annuels, entre 2021 et 2028, d'un montant de 28,1 millions d'euros. Elle présente deux intérêts majeurs. D'une part, elle permet à la France de maintenir son rang parmi les principaux actionnaires non africains de la Banque. D'autre part, elle est conforme aux priorités fixées par le CICID de 2018, qui prévoit de renforcer l'aide publique au développement destinée à l'Afrique. Toutefois, cette augmentation de capital n'est pas un chèque en blanc. À l'image des exigences accrues envers l'AFD, l'activité de la Banque africaine de développement devra faire l'objet d'un suivi particulier, et d'une évaluation critique de son action. Aussi recommandons-nous à la commission l'adoption sans modification de l'article rattaché à la mission « Aide publique au développement ».

M. Rachid Temal , rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées . - J'apporte à nos deux rapporteurs spéciaux une mauvaise nouvelle : le projet de loi de programmation qui devait être présenté aujourd'hui en conseil des ministres n'a pas été mis à l'ordre du jour. Pourtant, le ministre s'était engagé pour le mois de novembre. Il y a manifestement un décalage...

Vous avez parlé du fonds de solidarité pour le développement (FSD), qui a deux sources de financement. D'une part, la taxe sur les billets d'avion, qui est cette année en chute libre... En janvier, le manque à gagner sera de 120 millions d'euros. Une compensation est prévue pour cette année, mais il y a un risque aussi pour l'an prochain. D'autre part, la taxe sur les transactions financières, qui devrait rendre 1,7 milliard d'euros, a été pensée pour financer l'aide publique au développement, mais un plafonnement fait que seuls 520 millions d'euros y sont consacrés. Pourquoi ne pas déplafonner, ou au moins partager son produit en deux moitiés ?

M. Hugues Saury , rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées . - L'essentiel a été dit. La commission des affaires étrangères est globalement satisfaite de l'augmentation du budget de l'AFD, mais s'interroge sur son fonctionnement. Elle s'intéresse aux instances qui peuvent être mises en place pour mieux piloter sa stratégie et mieux contrôler son action. Cette année, plusieurs conseils ont été créés, mais l'espoir d'un projet de loi de programmation semble déçu. Nous sommes en tous cas favorables à ces crédits.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Merci pour ce rapport spécial présenté à deux voix, avec des avis partagés. Vous avez souligné les efforts que la France conduit en matière d'aide au développement, conformément aux objectifs annoncés au début du quinquennat. L'enquête réalisée par la Cour des comptes à la demande de notre commission montrait qu'il était difficile, pour le ministère des affaires étrangères, d'assurer la tutelle de l'AFD, dont l'autonomie fait parfois l'objet de critiques.

Par ailleurs, les crédits de l'AFD augmentent de façon continue et depuis plusieurs exercices.

Comment les relations entre cet opérateur et nos postes diplomatiques et consulaires s'organisent-elles ? Ne pensez-vous qu'il serait plus efficace pour notre pays d'augmenter ses contributions à des agences humanitaires des Nations unies, comme le Haut-Commissariat pour les réfugiés, plutôt que d'accroître notre aide humanitaire bilatérale ?

M. Patrice Joly . - Où en est la loi de programmation qui avait été annoncée l'année dernière ? La perspective d'attendre 0,55 % du PIB est atteinte - mais est-ce compte tenu de la recapitalisation de l'AFD ? La Cour des comptes se préoccupe de la lisibilité de nos interventions. Quelle est l'articulation entre les financements bilatéraux et multilatéraux ? Ces derniers ne diminuent-ils pas la lisibilité sur les actions de la France ? La crise sanitaire a-t-elle été l'occasion d'améliorations ? Il y a aussi la question de l'articulation des actions menées par l'AFD avec celles du ministère des affaires étrangères. La Cour des comptes a montré que la politique de rémunération était très généreuse. Les volumes financiers concernés sont importants : y a-t-il une perspective de création d'emplois ? Est-il question d'introduire un peu de mesure dans ces rémunérations ?

La crise a conduit à suspendre la charge de la dette de certains pays en développement. Le Président de la République avait annoncé qu'il fallait largement annuler la dette des pays les plus pauvres. Quelles sont les perspectives sur ce point ? L'extrême pauvreté augmente dans les pays en développement, ce qu'on n'avait pas connu au cours des vingt dernières années. Les crédits consacrés aux mesures des secteurs sociaux et sanitaires sont-ils suffisants au regard de cette crise ?

M. Marc Laménie . -La France consacre 10,9 milliards d'euros en 2019 à l'aide publique au développement. Cela concerne différents ministères, certainement. Comment les crédits sont-ils répartis ? De quels moyens humains l'AFD dispose-t-elle ? Comment sont-ils organisés ?

M. Albéric de Montgolfier . - Je partage les interrogations des rapporteurs spéciaux sur la pertinence d'une aide au développement pour les très grands émergents. Le sujet revient chaque année. La Chine est bénéficiaire de l'aide au développement, ce qui prête à sourire ! Sur les 121 millions d'euros d'aide publique bilatérale en cause, 67 millions d'euros correspondent aux frais d'écolage des étudiants chinois. Ne s'agit-il pas d'une forme d'affichage ou de gonflement des chiffres ? C'est mêler à l'aide publique au développement des choses qui n'ont rien à y faire... Je vois aussi que la moitié d'une enveloppe de 11 millions d'euros est consacrée à la lutte contre la déforestation en Amazonie. Que peut-on faire en la matière avec 5 ou 6 millions d'euros ? Je sais que les petits ruisseaux font les grandes rivières, mais, en l'espèce, je soupçonne plutôt de l'affichage.

M. Vincent Delahaye . - Ce budget augmente de façon très conséquente. Jusqu'où cela ira-t-il ? Quand cela s'arrêtera-t-il ? Surtout, à quel moment allons-nous évaluer avant de continuer à augmenter ? Voilà plusieurs années qu'on appelle à davantage d'évaluations. On ne voit toujours rien venir. Je partage aussi les interrogations d'Albéric de Montgolfier sur les très grands émergents. Nous avons dépassé l'objectif de 0,55 % du RNB, alors que nous devions simplement l'atteindre. Où s'arrête-t-on ?

Je partage totalement, aussi, les réticences exprimées sur le projet immobilier. Nous ne sommes pas dans une période où l'on peut faire des projets immobiliers à 560 millions d'euros. La recapitalisation nécessaire de l'AFD coûtera 953 millions d'euros. Ces 953 millions d'euros prennent-ils en compte les 560 millions d'euros du projet immobilier ? Il y aura peut-être de l'emprunt, certes... Toujours est-il que les frais de fonctionnement et les frais généraux de l'AFD continuent à augmenter de façon substantielle. Je suis effaré par cette gestion, et très surpris qu'on puisse gérer l'argent public de cette façon. Je voterai contre ce budget, contre son augmentation démentielle et décidée sans évaluation préalable.

M. Jean-Claude Requier , rapporteur spécial . - Vous nous interrogez sur les relations entre l'AFD et les postes consulaires et diplomatiques. Il y a des contacts permanents entre les antennes locales de l'AFD et les consulats ou les ambassades. Comme nous l'a dit l'ambassadeur au Tchad, les rapports, cela dépend des hommes et des femmes qui sont en poste !... Le Fonds de solidarité des projets innovants, géré par les ambassades, est passé de 60 à 70 millions d'euros cette année. Il s'agit d'une enveloppe directement à la main des ambassadeurs : on donne de l'argent aux ambassades pour qu'elles puissent intervenir sur de petits projets, dans un rôle d'amorçage. Ainsi, du campus franco-sénégalais, projet initié par ce Fonds avant que l'AFD ne prenne le relais après quelque mois : bon exemple de coopération entre l'AFD et les ambassades. En ce qui concerne la gouvernance, le projet de loi, qui semble quelque peu enlisé, mettra en place un conseil de coopération locale, qui sera piloté par l'ambassadeur.

Serait-il plus efficace d'augmenter nos contributions aux agences des Nations unies, comme le Haut-Commissariat pour les réfugiés, plutôt que d'augmenter l'aide humanitaire bilatérale ? Les deux leviers sont complémentaires. La présence de la France au sein des agences humanitaires de l'ONU permet d'orienter leur mobilisation et les financements. Pour répondre à des situations de crise ponctuelle, à l'inverse, l'aide humanitaire bilatérale est beaucoup plus souple et elle permet de répondre plus rapidement à des situations d'urgence, sur la base de remontées et de signalements des postes diplomatiques.

M. Michel Canevet , rapporteur spécial . - Patrice Joly et les rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères ont évoqué la loi de programmation qui devait être présentée au conseil des ministres aujourd'hui. Le projet de loi clarifiera le pilotage de l'aide publique au développement, mais aussi de la participation des collectivités territoriales à cette politique. Il devrait préciser le rôle de l'AFD et régler la question de l'intégration d'Expertise France. Il prévoit l'institution d'une commission d'évaluation indépendante, dont les contours restent à fixer, grâce à laquelle nous disposerons de tous les éléments d'information nécessaires pour procéder à une évaluation : pour l'heure, nous n'avons pas suffisamment d'éléments pour évaluer réellement la pertinence de notre politique d'aide au développement.

Vous avez évoqué la recapitalisation de l'AFD. Le renforcement des fonds propres passera par la conversion d'une ressource à condition spéciale dont bénéficie déjà l'AFD en fonds propres. L'AFD remboursera les montants associés à cette ressource - 953 millions d'euros - puis l'État recapitalisera à hauteur du même montant. L'enveloppe de 953 millions d'euros n'est pas destinée à payer l'investissement immobilier de l'AFD, mais à consolider les capitaux propres, sans imputation maastrichtienne effective, donc. Cela ne sera sans doute pas suffisant, et il faudra encore recapitaliser à l'avenir.

Patrice Joly a aussi évoqué la politique de rémunération, sujet qui a été évoqué aussi lors de l'examen de la mission précédente « Action extérieure de l'État ». Il y a une vraie différence entre les niveaux de rémunération en France, en administration centrale par exemple, et dans les réseaux.

Pour ce qui concerne la dette des pays en voie de développement, aucune annulation n'est aujourd'hui prévue, mais un rééchelonnement des paiements est envisagé, avec une suppression des paiements en 2021.

Les crédits aux secteurs sociaux et sanitaires seront-ils suffisants ? En tout cas, les enveloppes en dons et subventions sont réorientées pour accompagner la crise sanitaire, ce qui devrait permettre de répondre à un certain nombre de besoins. Dans le cadre du plan de relance, 50 millions d'euros sont consacrés, justement, aux questions sanitaires.

Marc Laménie a évoqué les moyens humains. Ils sont considérables pour l'AFD, qui dispose actuellement de 2 658 agents, sachant que ses effectifs ont beaucoup progressé ces dernières années. La direction générale de la mondialisation, de la culture, de l'enseignement et du développement international, au ministère, ne compte que 390 agents.

Albéric de Montgolfier a évoqué les très grands émergents, qui posent de vraies questions. Il nous semble important de veiller à la cohérence entre l'action diplomatique et l'action de développement. Le projet de loi prévoit justement une réunion périodique autour de l'ambassadeur pour y veiller : il ne faut pas que l'AFD intervienne sans que les ambassades soient au courant...

À l'occasion de l'examen de ce projet de loi de programmation pluriannuelle, nous devrons afficher des priorités d'action. Ce sera l'occasion de préciser, pour les années à venir, les pays et le type d'actions que nous souhaitons privilégier.

Vous avez évoqué la lutte contre la déforestation : je lisais ce matin que Jacques Rocher, président de la fondation Yves Rocher, se plaignait qu'il n'y ait pas assez d'actions contre la déforestation ! Certes, avec 11 millions d'euros, l'action de la France reste mineure. Nous avons aussi des besoins en la matière en Guyane.

Si l'on atteint l'objectif de 0,55 % du RNB dès cette année, c'est à cause du contexte, qui a fait baisser notre produit intérieur brut ! Les Britanniques, eux, ont diminué le montant de leur contribution pour qu'elle ne dépasse pas le ratio de 0,7 % qu'ils appliquent. Nous, nous avons décidé de maintenir, et même d'accroître, le montant de notre aide.

Sur les frais de fonctionnement et les frais généraux de l'AFD, il y a un travail à mener. Les membres du conseil d'administration de l'AFD doivent faire preuve d'une vigilance extrême, indépendamment de nos opérations de contrôle, pour que la gestion budgétaire de l'AFD reste aussi rigoureuse que possible.

M. Jean-Claude Requier , rapporteur spécial . - Pendant longtemps, les rapporteurs spéciaux du budget de l'AFD siégeaient au conseil d'administration de l'AFD. Pour qu'ils ne soient plus juges et parties, nous n'y siégeons plus.

M. Claude Raynal , président . - Je me rappelle y avoir siégé moi-même... Vous émettez donc tous les deux un avis favorable sur la mission, l'article qui lui est rattaché et le compte de concours financiers.

La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Aide publique au développement », ainsi que de l'article 53 rattaché.

La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2020, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat d'adopter sans modification les crédits de la mission, les crédits du compte de concours financiers ainsi que l'article 53.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Ministère de l'Europe et des affaires étrangères (direction générale de la mondialisation, de la culture, de l'enseignement et du développement international)

- M. Philippe LACOSTE, directeur du développement durable ;

- M. Pascal ROOS, délégué adjoint auprès de la délégation des Programmes et des Opérateurs.

Cabinet du ministre de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE)

- M. Emmanuel PUISAIS-JAUVIN, directeur-adjoint de cabinet ;

- M. Baptiste PRUDHOMME, conseiller politique et parlementaire.

Ministère de l'économie, des finances et de la relance (direction générale du Trésor)

- M. Christophe BORIES, sous-directeur des affaires financières et multilatérales et du développement ;

- Mme Virginie GALLERAND, cheffe du bureau Multifin 5 ;

- M. Paul TEBOUL, chef du bureau Multifin 2.

Agence française de développement

- M. Rémy RIOUX, directeur général.


* 1 Cour des comptes, « Le pilotage stratégique par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères des opérateurs de l'action extérieure de l'État », communication à la commission des finances du Sénat, février 2020.

* 2 Créé en 1961, le CAD est l'organe de l'OCDE chargé des questions de coopération avec les pays en développement. Il rassemble 22 pays donateurs et la Commission européenne.

* 3 Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

* 4 Créé par le décret n° 98-66 du 4 février 1998, le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement réunit, sous la présidence du Premier ministre, les ministres impliqués dans la politique française d'aide publique au développement et en définit les grandes orientations.

* 5 Document de politique transversale « Politique française en faveur du développement », annexé au projet de loi de finances pour 2021, p. 22.

* 6 Projet annuel de performances.

* 7 Rapport par Hervé Berville, parlementaire en mission auprès de Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, et Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances, « La modernisation de la politique partenariale de développement et de solidarité », août 2018.

* 8 Règlement (UE) 2019/876 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019.

* 9 Document de politique transversale « Politique française en faveur du développement », annexé au projet de loi de finances pour 2021, p. 102.

* 10 Action 02 du programme 209 « Coopération bilatérale ».

* 11 Document de politique transversale 2021, p. 103. En 2019, les engagements de l'AFD en matière de dons se sont élevés à 1 392 millions d'euros sur 10 123 millions d'euros au total.

* 12 D'après les chiffres transmis par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères.

* 13 Réponse écrite au questionnaire des rapporteurs spéciaux.

* 14 Action 05 du programme 209 « Coopération multilatérale ».

* 15 Réponse au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux.

* 16 D'après le document de politique transversale.

* 17 Bénin, Burkina Faso, Burundi, Djibouti, Éthiopie, Gambie, Guinée, Haïti, Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Sénégal, Tchad et Togo.

* 18 Loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014 d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale.

* 19 Réponse au questionnaire budgétaire.

* 20 La liste des très grands émergents a été définie par lettre des ministres de tutelle de l'AFD le 28 juillet 2014 et comprend l'Afrique du sud, le Brésil, la Chine, l'Inde, l'Indonésie, le Mexique, et la Turquie.

* 21 Données transmises par la direction générale de la mondialisation.

* 22 Préambule de l'annexe de la loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014 d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale.

* 23 Données transmises par l'AFD aux rapporteurs spéciaux.

* 24 Compte rendu de la séance publique en date du 28 octobre 2020.

* 25 D'après les données transmises par l'AFD.

* 26 Réponse au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux.

* 27 Réponse au questionnaire budgétaire.

* 28 Emplois temps pleins moyens, d'après les données transmises en réponse au questionnaire budgétaire.

* 29 Cour des comptes, « Le pilotage stratégique par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères des opérateurs de l'action extérieure de l'État », communication à la commission des finances du Sénat, février 2020.

* 30 Rapport public annuel de la Cour des comptes, Le groupe Agence française de développement : mutations et nouvelle ambition », p.16.

* 31 Ces dépenses sont uniquement celles du siège.

* 32 Résolution B/BG/EXTRA/2019/03.

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