TITRE II
RÉNOVER L'EXERCICE DU DROIT DE PÉTITION

Article 4
Modernisation des modalités d'exercice du droit de pétition

L'article 4 de la proposition de résolution tend à rénover les modalités d'exercice du droit de pétition .

Tout en approuvant une démarche s'inspirant de l'expérimentation mise en oeuvre au Sénat depuis janvier 2020, la commission a toutefois clarifié les compétences entre le Bureau du Sénat , habilité à déterminer les règles de recevabilité, de caducité et de publicité des pétitions, et la Conférence des Présidents , seule juge de l'opportunité des suites à leur donner.

La commission a adopté cet article ainsi modifié .

L'article 4 de la proposition de résolution réforme l'exercice du droit de pétition en s'inspirant des nouvelles modalités mises en oeuvre depuis janvier 2020 à titre expérimental.

1. La procédure de pétition actuellement prévue par le Règlement est tombée en désuétude

1.1. Le Règlement confie aux commissions permanentes le soin de juger des suites à donner aux pétitions, dont la recevabilité est particulièrement large

Le droit de pétition trouve son fondement à l'article 4 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, qui dispose que « les règlements de ces deux assemblées fixeront les conditions dans lesquelles des pétitions écrites pourront leur être présentées ».

Le régime actuel fixé par le Règlement du Sénat prévoit à son article 87 que les pétitions sont adressées au Président du Sénat directement ou par l'intermédiaire d'un sénateur ; et qu'un rassemblement formé sur la voie publique ne peut transmettre de pétition.

Outre des conditions de forme (adresse et signature du pétitionnaire) prévues au même article, l'Instruction Générale du Bureau (IGB) du Sénat (chapitre XVIII) exclut les pétitions concernant les décisions de justice ou administratives ainsi que les sollicitations personnelles . Aucun seuil de signatures n'est toutefois prévu .

Les pétitions jugées recevables sont inscrites à un rôle général rendu public dans l'ordre de leur arrivée et renvoyées à la commission compétente qui décide des suites à lui donner (article 88). Elle peut :

- soit renvoyer la pétition à un ministre, une autre commission ou demander au Président du Sénat de la transmettre au Défenseur des droits ;

- soit la soumettre au Sénat , pour un débat portant sur le rapport de la commission qui comprend « le texte intégral de la pétition et expose les motifs des conclusions prises à son sujet », étant précisé que tout sénateur peut également demander le rapport en séance publique d'une pétition, dans les quinze jours suivant la date de son inscription au rôle ou de la décision de la commission, si la Conférence des Présidents fait droit à cette demande (articles 89 et 89 bis) ;

- ou, enfin, classer purement et simplement la pétition.

Sa décision est, le cas échéant, communiquée au pétitionnaire. L es pétitions sur lesquelles la commission n'a pas statué sont frappées de caducité à l'ouverture de la session ordinaire qui suit celle au cours de laquelle elles ont été déposées.

1.2. L'exercice du droit de pétition tel que prévu par le Règlement est tombé en désuétude

Malgré ces conditions de recevabilité très larges, le nombre de ces pétitions reste faible et a tendance à diminuer : on compte cinquante-deux pétitions depuis 2008 et aucune depuis 2018. Vingt pétitions comptaient par ailleurs moins de dix signataires.

Le rapporteur ne fait que reprendre ici le constat de la mission d'information sénatoriale sur la démocratie représentative, participative et paritaire , qui proposait, sur le rapport de Philippe Bonnecarrère, de « revivifier le droit de pétition auprès des assemblées parlementaires » 41 ( * ) .

L'Assemblée nationale, qui a réformé son régime de pétitions en 2019 42 ( * ) prévoit à l'article 148 de son Règlement leur mise en ligne à partir de 100 000 signataires et leur renvoi à la commission compétente qui désigne un rapporteur et peut, sur la proposition de ce dernier, soit la classer, soit l'examiner et publier un rapport « reproduisant le texte de la commission de la pétition ainsi que le compte rendu de ses débats », en associant, le cas échéant, les premiers signataires. En outre, sur proposition de la commission ou d'un président de groupe, un débat relatif à une pétition peut être inscrit à l'ordre du jour par la Conférence des Présidents si elle compte 500 000 signataires domiciliés dans trente départements ou collectivités d'outre-mer.

2. La proposition de résolution : une modernisation souhaitable des conditions d'exercice du droit de pétition, s'appuyant sur une expérimentation antérieure, dont il convient de préciser la mise en oeuvre

S'inspirant de l'expérimentation mise en oeuvre depuis janvier 2020 par le Sénat , l'article 4 de la proposition de résolution maintiendrait la possibilité pour toute personne d'adresser une pétition, au Sénat - et non plus au Président du Sénat, sur une plateforme dédiée ou, à défaut, par courrier électronique ou papier (article 87).

Le Bureau du Sénat aurait pour mission de déterminer le « champ » des pétitions, les conditions de leur publication et les règles d'authentification des auteurs des pétitions et des signataires ainsi que les modalités de signature. La Conférence des Présidents pourrait, elle aussi, fixer des « critères de recevabilité » destinés à éviter « toute interférence avec les travaux législatifs et de contrôle du Sénat ainsi que toute redondance avec une pétition sur laquelle elle s'est déjà prononcée ».

Seules les pétitions ayant atteint un certain seuil de signature seraient obligatoirement « évoquée [s] » en Conférence des Présidents, seule habilitée à décider des suites à lui donner , dont la liste serait définie par le Bureau (article 88).

Enfin, afin qu'une pétition n'ayant pas atteint le seuil défini par le Bureau puisse tout de même être évoquée en Conférence des Présidents , l'article 4 de la proposition de résolution propose qu'elle puisse décider de s'en saisir, dans des conditions définies par le Bureau. L'exemple de la pétition déposée sur le site internet du Sénat demandant la désolidarisation des revenus du conjoint pour le paiement de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), prise en compte par le Sénat avant d'avoir atteint le seuil de 100 000 signatures défini à titre expérimental, montre que cette souplesse est utile 43 ( * ) . La Conférence des Présidents a en effet décidé, le 10 février 2021, d'inscrire une proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale sur ce sujet à l'ordre du jour du Sénat, lors d'une semaine sénatoriale de contrôle.

Les articles 89 et 89 bis du Règlement seraient en outre abrogés.

La commission a approuvé le choix retenu par le groupe de travail d'exclure toute automaticité liée à un seuil de signatures pour préserver en dernier ressort le pouvoir d'appréciation des instances du Sénat, même si certaines divergences demeurent parmi les groupes politiques d'opposition.

Par l'adoption de l' amendement COM-32 , elle a toutefois clarifié les compétences entre le Bureau du Sénat , habilité à déterminer les règles de recevabilité , de caducité et de publicité des pétitions , et la Conférence des Présidents , seule juge de l'opportunité des suites à leur donner.

La commission a adopté l'article 4 ainsi modifié .


* 41 Décider en 2017 : le temps d'une démocratie « coopérative », rapport d'information n° 556 (2016-2017) de M. Philippe Bonnecarrère, fait au nom de la mission d'information sur la Démocratie représentative, participative, paritaire, p. 91, déposé le 17 mai 2017 et accessible à l'adresse suivante : https://www.senat.fr/notice-rapport/2016/r16-556-1-notice.html

* 42 Résolution n° 281(2018-2019) modifiant le Règlement de l'Assemblée nationale adopté le 4 juin 2019.

* 43 Le dossier législatif de la proposition de loi portant diverses mesures de justice sociale n° 74 (2020-2021), modifiée par le Sénat le 9 mars 2021, est disponible à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl19-319.html

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