II. UNE PROPOSITION DE LOI QUI ENTEND SAISIR L'OPPORTUNITÉ DE LA CRISE POUR MODERNISER LA RESTAURATION ÉTUDIANTE EN CRÉANT UN DISPOSITIF UNIVERSEL AU BÉNÉFICE DE TOUS LES ÉTUDIANTS

A. UN CONSTAT : UNE CRISE RÉVÉLATRICE DES LACUNES DE LA RESTAURATION ÉTUDIANTE

1. Une précarité alimentaire exacerbée

La crise sanitaire a fortement fragilisé la situation financière des étudiants, au premier rang desquels ceux indépendants financièrement de leur famille et exerçant une activité rémunérée en parallèle de leurs études.

D'après l'enquête 2020 de l'OVE sur les conditions de vie des étudiants 5 ( * ) , un tiers des étudiants a ainsi déclaré avoir rencontré, pendant le premier confinement, des difficultés financières. Chez ces étudiants, ce sont principalement les dépenses d'ordre alimentaire qui ont posé problème puisqu'elles ont été citées par 56 % d'entre eux. En outre, un quart des étudiants dont les difficultés financières se sont aggravées pendant le confinement ont déclaré ne pas toujours avoir pu manger à leur faim pour des raisons financières, ce qui n'a été le cas que de seulement 6 % de l'ensemble des étudiants.

La hausse de la fréquentation des épiceries sociales et solidaires dans les campus et l'affluence constatée lors des distributions de colis alimentaires organisées par les acteurs associatifs témoignent de l'aggravation du phénomène de précarité étudiante qui préexistait à la crise.

Celle-ci a en outre accentué les inégalités au sein d'une population étudiante très hétérogène, affectant tout particulièrement les étudiants ne bénéficiant pas d'un soutien financier familial et exerçant une activité rémunérée pour subvenir à leurs besoins.

2. Les « trous dans la raquette » du système de restauration universitaire

De l'avis des auteurs de la proposition de loi, le système traditionnel de restauration étudiante centré sur les restaurants universitaires souffre de plusieurs « failles » , dont certaines ont été mises en lumière par le contexte de crise :

- il exclut les étudiants effectuant leurs études sur des sites « oubliés » ne disposant pas de structure de restauration universitaire , les obligeant à se débrouiller par eux-mêmes pour se nourrir ;

- il pâtit de délais d'attente qui découragent les étudiants et de plages d'ouverture journalière (seulement le midi), hebdomadaire (seulement en semaine) et annuelle (seulement 8 mois sur 12) souvent inadaptées à leurs besoins ;

- il ne correspond plus aux nouvelles habitudes des étudiants qui ont tendance à délaisser la restauration collective, dont l'offre n'est pas suffisamment diversifiée ni toujours de qualité, au profit d'alternatives plus flexibles ;

- il repose sur un modèle économique structurellement déséquilibré , qui a été fortement fragilisé par les conséquences de la crise sanitaire ( cf . supra ).

3. Le repas en restaurant universitaire à un euro : une mesure louable, mais qui ne solutionne pas les problèmes de fond

Pour les auteurs de la proposition de la loi, le repas à un euro, d'abord prévu pour les étudiants boursiers, puis étendu à tous les étudiants, part d' « une bonne intention » , dans un contexte de crise exceptionnel qui obligeait à prendre des mesures d'urgence.

Cependant, ce dispositif révèle avec encore plus d'acuité la problématique de l'accès puisque en sont de facto exclus les étudiants éloignés des structures de restauration universitaire. Ceux-ci continuent de s'acquitter de leurs dépenses alimentaires sans pouvoir bénéficier d'un tarif social. Il y a donc une inégalité entre étudiants dans l'accès à la mesure.

En outre, le ticket de restaurant universitaire à un euro ne constitue pas un modèle économique viable sur le long terme, sachant qu'un repas en restaurant universitaire coûte près de huit fois ce tarif.

Enfin, cette mesure a été conçue pour être temporaire et répondre à une situation de crise sans précédent. À ce jour, le ministère n'est pas en mesure d'indiquer jusqu'à quand elle sera en vigueur et si le périmètre des bénéficiaires est susceptible d'évoluer. Dès lors, il convient d'envisager des solutions pérennes pour améliorer le fonctionnement de la restauration étudiante.


* 5 Enquêtes conditions de vie des étudiants 2020, Observatoire de la vie étudiante (OVE).

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