Rapport n° 112 (2021-2022) de Mme Colette MÉLOT , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 27 octobre 2021

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N° 112

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 27 octobre 2021

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur la proposition de loi,
adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée,
visant à
améliorer les conditions de présence parentale auprès d'un enfant
dont la
pathologie nécessite un accompagnement soutenu ,

Par Mme Colette MÉLOT,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Deroche , présidente ; Mme Élisabeth Doineau , rapporteure générale ; M. Philippe Mouiller, Mme Chantal Deseyne, MM. Alain Milon, Bernard Jomier, Mme Monique Lubin, MM. Olivier Henno, Martin Lévrier, Mmes Laurence Cohen, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge , vice-présidents ; Mmes Florence Lassarade, Frédérique Puissat, M. Jean Sol, Mmes Corinne Féret, Jocelyne Guidez , secrétaires ; Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Stéphane Artano, Mme Christine Bonfanti-Dossat, MM. Bernard Bonne, Laurent Burgoa, Jean-Noël Cardoux, Mmes Catherine Conconne, Annie Delmont-Koropoulis, Brigitte Devésa, MM. Alain Duffourg, Jean-Luc Fichet, Mmes Laurence Garnier, Frédérique Gerbaud, Pascale Gruny, M. Xavier Iacovelli, Mmes Corinne Imbert, Annick Jacquemet, Victoire Jasmin, Annie Le Houerou, M. Olivier Léonhardt, Mmes Viviane Malet, Colette Mélot, Michelle Meunier, Brigitte Micouleau, Annick Petrus, Émilienne Poumirol, Catherine Procaccia, Marie-Pierre Richer, Laurence Rossignol, M. René-Paul Savary, Mme Nadia Sollogoub, MM. Dominique Théophile, Jean-Marie Vanlerenberghe .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

3422 , 3579 et T.A. 509

Sénat :

157 (2020-2021) et 113 (2021-2022)

L'ESSENTIEL

___________

Réunie le mercredi 27 octobre 2021 sous la présidence de Mme Catherine Deroche, la commission des affaires sociales a examiné le rapport de Mme Colette Mélot sur la proposition de loi visant à améliorer les conditions de présence parentale auprès d'un enfant dont la pathologie nécessite un accompagnement soutenu.

Le congé de présence parentale et l' allocation journalière de présence parentale sont des dispositifs précieux pour soulager des situations familiales complexes et douloureuses. Ils permettent en effet aux parents d' interrompre leur activité professionnelle et de bénéficier d'une compensation de la perte de revenus associée afin d'accompagner un enfant dont la dégradation de l'état de santé, résultant d'une pathologie - telle qu'un cancer pédiatrique -, d'un handicap ou d'un accident particulièrement grave, justifie un accompagnement soutenu.

La proposition de loi déposée le 14 octobre 2020 par le député Paul Christophe vient compléter un mouvement d'adaptation de ces dispositifs aux besoins d'accompagnement des enfants et à la réalité quotidienne des parents, enclenché il y a plus de deux ans par la loi du 8 mars 2019 visant à renforcer la prise en charge des cancers pédiatriques 1 ( * ) . En ouvrant la possibilité de renouveler le congé de présence parentale et l'allocation journalière correspondante au-delà de 310 jours sur une période de référence de trois ans, son article unique apporte une évolution bienvenue qui permet de mieux tenir compte de la réalité de la pathologie ou du handicap de l'enfant et des soins qu'il requiert.

Pleinement favorable à cette mesure qui répond aux attentes des familles, la commission a adopté à l'unanimité la proposition de loi sans modification .

I. L'ALLOCATION JOURNALIÈRE DE PRÉSENCE PARENTALE : UN DISPOSITIF DE PLUS EN PLUS MOBILISÉ

A. UNE PRESTATION INDISPENSABLE POUR LES PARENTS ACCOMPAGNANT DES ENFANTS GRAVEMENT MALADES, ACCIDENTÉS OU HANDICAPÉS

1. Un dispositif amélioré à plusieurs reprises dans la période récente

Créés par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 2 ( * ) , le congé de présence parentale (CPP) et l'allocation journalière de présence parentale (AJPP) visent à permettre aux parents d' accompagner un enfant à charge atteint d'une maladie, d'un handicap ou victime d'un accident d'une particulière gravité et qui sont contraints d'interrompre leur activité professionnelle afin d'assurer une présence soutenue auprès de leur enfant et la mise en oeuvre, le cas échéant, de soins contraignants.

Aux termes de l'article L. 1225-62 du code du travail, un salarié peut ainsi bénéficier, au titre du CPP, d'un maximum de 310 jours ouvrés de congés . La durée initiale du congé correspond à la durée prévisible de traitement de l'enfant précisée par le certificat médical attestant de la particulière gravité de la maladie, du handicap ou de l'accident et du caractère indispensable d'une présence parentale soutenue et de soins contraignants. La durée maximale pendant laquelle le salarié peut bénéficier d'un CPP pour un même enfant et pour une même affection est de trois ans 3 ( * ) .

En complément de ce congé, le parent bénéficie, pour chaque jour de CPP, d'une AJPP , en application de l'article L. 544-1 du code de la sécurité sociale. Le droit à cette prestation, soumis à l'avis favorable du service du contrôle médical de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) dont relèvent l'assuré et son enfant, est ouvert pour l'enfant qui reste à charge jusqu'à l'âge de vingt ans et pour une durée égale à la durée prévisible du traitement. Par analogie avec les conditions de bénéfice du CPP, l'AJPP est versée au cours d'une période maximale de trois ans 4 ( * ) et, au sein de cette période de trois ans, le nombre maximal d'allocations journalières versées est égal à 310 5 ( * ) .

L'impact du congé de présence parentale sur les droits à la retraite

En application de l'article L. 381-1 du code de la sécurité sociale, la personne bénéficiaire de l'AJPP est affiliée à l'assurance vieillesse du régime général, via l'assurance vieillesse des parents au foyer . Aux termes de l'article R. 381-3-1 du même code, la cotisation due au titre des personnes bénéficiaires de l'AJPP est égale au taux cumulé de la cotisation employeur et salarié dans le régime général de sécurité sociale, pour la couverture du risque vieillesse. Cette cotisation est assise sur une assiette forfaitaire égale, par jour, à 1/22 e de la valeur de 169 fois le salaire minimum de croissance.

S'agissant des fonctionnaires, si les lois statutaires des trois fonctions publiques prévoient que le fonctionnaire « n'acquiert pas de droits à la retraite » pendant son congé parental, les jours de CPP sont, depuis la réforme des retraites de 2003, comptabilisés comme des jours de service effectif pour le calcul des droits à la retraite des fonctionnaires dans la limite de trois ans par enfant né ou adopté à partir du 1 er janvier 2004, en application de l'article L. 9 du code des pensions civiles et militaires.

Ces dispositifs ont été modifiés à deux reprises au cours de la période récente afin d'en renforcer la flexibilité et de mieux répondre aux besoins d'accompagnement de l'enfant :

l' article 5 de la loi du 8 mars 2019 précitée 6 ( * ) , issue d'une initiative de l'ancienne députée Nathalie Elimas, a assoupli les conditions de bénéfice du CPP et de l'AJPP :

- alors que la poursuite du CPP était conditionnée au réexamen tous les six mois de la durée prévisible de traitement par le médecin, a été ouverte la possibilité pour ce dernier de fixer une échéance de réexamen de cette durée comprise entre six mois et un an. Lorsque la durée prévisible excède un an, elle fait l'objet d'un nouvel examen à cette échéance ;

- les conditions permettant de renouveler le CPP et de rouvrir les droits à l'AJPP au-delà de la période initiale des trois ans ont été étendues : outre les cas de rechute ou de récidive de la pathologie de l'enfant, le salarié peut également bénéficier à nouveau du CPP et de l'AJPP, pour une nouvelle période maximale de trois ans, « lorsque la gravité de la pathologie de l'enfant [...] nécessite toujours une présence soutenue et des soins contraignants », ce qui permet de tenir compte des situations de perpétuation de la gravité de l'état de l'enfant requérant toujours un accompagnement soutenu au-delà de la période initiale de trois ans ;

- la durée du CPP est désormais prise en compte dans son intégralité, et non plus pour moitié seulement, dans la détermination des droits que le salarié tient de son ancienneté dans l'entreprise 7 ( * ) ;

l' article 69 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 8 ( * ) a ouvert la possibilité pour le salarié, avec l'accord de son employeur, de fractionner le CPP ou de le transformer en période d'activité à temps partiel . En conséquence, le montant de l'AJPP peut être modulé en cas de fractionnement du CPP ou de maintien en activité à temps partiel.

Comme le rappelle un rapport de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) de juin 2019 9 ( * ) , l'AJPP peut être cumulée avec l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH), mais pas avec les compléments de l'AEEH . En cas de droit potentiel de l'enfant à l'AEEH, il devient alors éligible à un « accès à la prestation complémentaire du handicap (PCH) “hormis les aides humaines” ». Constatant l'impossibilité de déterminer le nombre d'enfants cumulant l'AEEH de base et la PCH, l'IGAS a vu dans l'inscription, par la loi du 8 mars 2019, d'une obligation d'information des familles sur leurs droits le signe « d'un manque d'intégration de l'AJPP dans le système de compensation pour les enfants ».

2. Un recours croissant à l'allocation journalière de présence parentale

Le recours à l'AJPP est dynamique sur une période longue, avec une augmentation du nombre de bénéficiaires supérieure à 70 % sur la période 2013-2020. Un peu moins de 10 000 familles ont ainsi bénéficié en 2020 de l'AJPP, pour un coût total de 97 millions d'euros , tous régimes confondus.

Évolution du nombre de familles bénéficiaires de l'AJPP
et du coût du dispositif depuis 2013

Source : Direction de la sécurité sociale

Le montant de l'AJPP est fixé en 2021, après CRDS, à 52,13 euros pour une personne seule et à 43,87 euros pour une personne en couple 10 ( * ) . L'allocation ne peut être versée que sur les 22 jours ouvrés du mois 11 ( * ) , lesquels peuvent être partagés entre les deux membres du couple. Le montant mensuel moyen d'AJPP perçu par les bénéficiaires est ainsi estimé, par la direction de la sécurité sociale, à 846 euros en 2020. Alors que le montant de l'AJPP était jusqu'ici revalorisé en fonction de l'inflation, un amendement du Gouvernement 12 ( * ) au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 prévoit désormais que l'allocation sera revalorisée, au 1 er janvier de chaque année, en référence au salaire minimum de croissance rapporté à une valeur journalière et net des prélèvements obligatoires.

Selon la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), la durée moyenne de versement de l'AJPP s'établirait à huit mois . Lorsque la maladie, le handicap ou l'accident de l'enfant entraîne directement des dépenses mensuelles supérieures ou égales à 27,19 % de la base mensuelle de calcul des allocations familiales - soit environ 113 euros -, un complément forfaitaire mensuel pour frais du même montant est attribué au bénéficiaire de l'AJPP.

En 2020, les familles monoparentales ont représenté un peu plus de 23 % des bénéficiaires de l'AJPP au titre du régime général. Il est à noter que le nombre d'AJPP versées pour un même enfant au titre du mois civil à l'un ou aux deux membres du couple ne peut être supérieur à 22 13 ( * ) , si bien que, dans l'hypothèse où les deux parents interrompraient simultanément leur activité professionnelle pendant un mois complet, ils ne percevraient, tous les deux réunis, que 22 AJPP alors qu'ils cumuleraient un total d'au moins 44 jours de suspension de leur rémunération.

B. UN DISPOSITIF ENCORE PERFECTIBLE DANS SA GESTION

Les associations auditionnées ont alerté la rapporteure sur les problèmes posés par la lenteur du traitement d'un certain nombre de demandes par les caisses d'allocations familiales (CAF). Selon une enquête conduite au début de l'année 2021 par la fédération « Grandir sans cancer », seulement 17,3 % des familles (sur 277 répondants) indiquent avoir reçu l'AJPP dans un délai inférieur à un mois. La grande majorité des familles (61 %) obtient l'allocation dans un délai compris entre un et trois mois et une part non négligeable de parents déclare avoir obtenu l'AJPP dans un délai supérieur à trois mois (21,7 %).

Comme l'a rappelé M. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles, lors de l'examen de la proposition de loi par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale le 18 novembre 2020, le délai réglementaire de traitement par l'administration des demandes d'AJPP est, en application de l'article R. 544-3 du code de la sécurité sociale, de trois mois et se décompose en deux « sous-délais » : un premier délai de deux mois à l'expiration duquel le silence du service du contrôle médical vaut accord, auquel s'ajoute un second délai d'un mois supplémentaire au terme duquel le silence gardé par la CAF ou la caisse de mutualité sociale agricole vaut accord pour le versement de l'allocation. Toutefois, le secrétaire d'État a rappelé que « fort heureusement, ces délais sont généralement bien moindres et la pratique montre que les [CAF], bien conscientes que les refus du contrôle médical sur ces dossiers sont rarissimes, procèdent la plupart du temps à des avances » 14 ( * ) .

Une autre lourdeur procédurale réside dans l' absence, à ce jour, de transmission et traitement dématérialisés de l'attestation que le salarié doit faire viser par son employeur pour certifier le nombre de jours de CPP pris sur le mois et que le salarié doit ensuite transmettre, par courrier, à sa caisse. Cette démarche doit être réitérée chaque mois et se heurte parfois à la méconnaissance de la procédure au sein des services des ressources humaines et de gestion de la paie d'un certain nombre d'entreprises. Le secrétaire d'État a néanmoins confirmé la suppression prochaine des attestations mensuelles sur support papier , avec le déploiement du dispositif de ressources mutualisées (DRM) qui doit permettre, au travers des déclarations sociales nominatives mensuelles des entreprises, la transmission dématérialisée aux CAF des informations nécessaires au versement de l'AJPP. Cette dématérialisation de la procédure devrait, selon la direction de la sécurité sociale, intervenir avant la fin de l'année 2022.

Par ailleurs, les associations ont également mis en avant la nécessité d' améliorer l'information des familles sur les aides financières disponibles.

Selon une enquête de la fédération « Grandir sans cancer », près des deux tiers des familles répondantes estiment que cette information est insuffisante.

Parmi les canaux d'information les plus mobilisés, les familles identifient prioritairement l'assistant social (57,1 %), leurs propres moyens d'information (45,8 %) et la CAF (32,6 %). Le médecin hospitalier et les associations arrivent, respectivement, en 4 e position (20,1 %) et 5 e position (13,6 %).

Depuis la loi du 8 mars 2019 visant à renforcer la prise en charge des cancers pédiatriques, les CAF ont désormais l'obligation 15 ( * ) d'informer le demandeur ou le bénéficiaire de l'AJPP des conditions d'attribution et des modalités de demande de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) et de la prestation de compensation du handicap (PCH). Pour mémoire, l'AJPP est cumulable avec l'AEEH sans complément. La CNAF a effectué plusieurs actions de communication sur les dispositifs d'accompagnement des parents au travers de différents supports, dont la revue Vies de famille envoyée aux allocataires, le site Internet www.caf.fr et des supports locaux - affiches, flyers , encarts locaux, etc.

En complément, les familles peuvent être orientées vers ces dispositifs par les travailleurs sociaux , notamment au sein des établissements hospitaliers ou médicosociaux. À cet égard, la rapporteure juge indispensable de renforcer la coordination entre l'équipe soignante et l'assistant social de l'établissement , avec une proposition systématique d'entretien de la famille avec l'assistant social au moment de ou peu après l'annonce du diagnostic de la pathologie.

II. LA NÉCESSITÉ DE MIEUX FAIRE CORRESPONDRE LA PRESTATION AUX BESOINS DES FAMILLES

A. LE RELÈVEMENT BIENVENU DU PLAFOND D'ALLOCATIONS JOURNALIÈRES DE PRÉSENCE PARENTALE PAR LA PROPOSITION DE LOI

1. Des modalités de renouvellement du plafond d'AJPP et de CPP actuellement mal calibrées

Alors que la proposition de loi de Nathalie Elimas envisageait de supprimer le plafond de 310 jours et de ne plus conditionner l'accès à l'AJPP et au CPP qu'au certificat médical précisant la durée prévisible du traitement, cette mesure avait été écartée par l'Assemblée nationale en première lecture face au souhait du groupe LREM d'une évaluation de l'AJPP. En lieu et place de cette proposition, le Gouvernement avait introduit un amendement visant à faciliter le renouvellement du CPP et la réouverture des droits à l'AJPP une fois expirée la période initiale de trois ans 16 ( * ) .

Toutefois, à l'issue de cette période de trois ans, la plupart des enfants sont généralement soit guéris, soit, malheureusement, décédés, ce qui rend sans effet la possibilité existante de renouvellement. Ces dispositions ne répondent donc pas aux besoins des quelque 600 foyers 17 ( * ) (soit 6 % des bénéficiaires) qui, au cours de la période de trois ans, épuisent leur « crédit » de 310 jours d'AJPP. Dans le cas de cancers pédiatriques, les chiffres les plus pessimistes évaluent à 30 % la part des parents bénéficiaires de l'AJPP qui auraient besoin d'une prolongation du nombre de jours d'allocation.

2. L'objectif de la proposition de loi : des conditions de renouvellement plus adaptées aux besoins des parents

Tenant compte des limites de ce fonctionnement, la proposition de loi vise à permettre de renouveler une fois, au sein de la période des trois ans, le crédit maximal de 310 jours lorsque celui-ci a déjà été atteint . Le renouvellement serait conditionné, comme pour la première attribution du CPP et de l'AJPP, à un nouveau certificat médical établi par le médecin qui suit l'enfant, et attestant le caractère indispensable, au regard de la pathologie ou du besoin d'accompagnement de l'enfant, de la poursuite des soins contraignants et d'une présence soutenue.

Ce certificat serait confirmé par l'accord explicite du service du contrôle médical de la CPAM , et non plus par un avis favorable. Cette restriction , qui vise à éviter l'automaticité du renouvellement en cas de silence gardé par le service du contrôle médical 18 ( * ) , devra s'accompagner d'un ajustement réglementaire permettant de s'assurer que la réponse de ce service 19 ( * ) soit fournie dans des délais suffisamment brefs pour garantir l'effectivité de ce renouvellement.

La mesure ouvre ainsi des droits à un CPP et à l'AJPP pour une période maximale de 620 jours. Dans l'hypothèse où l'ensemble des foyers qui saturent le plafond de 310 jours utiliseraient immédiatement et complètement cette possibilité de renouvellement, son coût annuel s'élèverait à 6,2 millions d'euros 20 ( * ) . Il est toutefois vraisemblable que seule une fraction des parents bénéficiaires épuise ce crédit renouvelé de 310 jours. En revanche, des familles qui demandent et bénéficient actuellement de l'AEEH et d'un de ses compléments lorsqu'ils ont épuisé leurs droits à l'AJPP et qui remplissent les conditions d'éligibilité aux deux prestations pourraient désormais opter pour l'AJPP, ce qui serait de nature à augmenter le coût de la réforme. Au total, le surcoût induit par la proposition de loi serait compris entre 5 et 8 millions d'euros.

Le Gouvernement a levé le gage de la proposition de loi en commission à l'Assemblée nationale, où aucune modification, si ce n'est d'ordre légistique 21 ( * ) , n'a été apportée en première lecture.

B. MALGRÉ DES AMÉLIORATIONS SOUHAITABLES, UN TEXTE VOTÉ CONFORME PAR LA COMMISSION EN VUE D'UNE ADOPTION RAPIDE

1. Une nécessaire extension aux agents publics

Dans l'état actuel du texte, le renouvellement du droit au CPP et à l'AJPP ne s'appliquerait pas aux agents publics . En effet, pour le renouvellement du CPP, la proposition de loi modifie uniquement le code du travail, lequel ne s'applique qu'aux salariés du secteur privé, alors même que chacune des lois relatives aux trois fonctions publiques prévoit le bénéfice du CPP 22 ( * ) et aurait donc également mérité d'être modifiée en ce sens .

Par ailleurs, l'article L. 544-1 du code de la sécurité sociale, qui institue l'AJPP, prévoit que les dispositions qui s'y rapportent « sont également applicables aux agents publics bénéficiant du congé de présence parentale prévu par les règles qui les régissent ». Les bénéfices du CPP et de l'AJPP étant indissociables 23 ( * ) , en l'absence de possibilité de renouvellement du CPP pour les agents publics, le risque juridique existe donc que les agents publics qui le souhaitent ne puissent être éligibles au renouvellement de leurs droits à l'AJPP au cours de la période initiale de trois ans .

2. Un vote sans modification pour une adoption rapide, susceptible d'être complétée par le biais d'un amendement gouvernemental au projet de loi de financement de la sécurité sociale

Malgré ces réserves, la commission a voté la proposition de loi sans modification . Depuis son adoption en novembre 2020 par l'Assemblée nationale, nombre de foyers, déjà fragilisés par la crise sanitaire, ont épuisé leur crédit de 310 jours sans pouvoir le renouveler. Plus l'adoption de la loi sera retardée, plus les foyers se trouvant dans cette situation seront nombreux. La première nécessité est donc celle d'une adoption rapide du dispositif , via un vote conforme du Sénat, afin que les familles qui arrivent en fin de droits dans les jours qui suivent la promulgation de la loi puissent renouveler aussi sereinement que possible leur accès au CPP et à l'AJPP.

La commission appelle néanmoins le Gouvernement à intervenir dans les meilleurs délais après l'adoption de la proposition de loi afin de garantir l'extension du dispositif aux agents publics. Cette extension pourrait prendre la forme d'un amendement du Gouvernement au PLFSS pour 2022.

3. Des enjeux d'équité qui demeurent

La commission reste attachée à la possibilité pour les deux parents d'accompagner leur enfant malade, handicapé ou victime d'un accident. En effet, malgré la possibilité de partage des jours de congé, afin de préserver la santé financière du foyer, le parent dont l'emploi est le plus rémunérateur a tendance à se maintenir en activité, laissant l'autre parent - bien souvent la mère - interrompre son activité afin de se consacrer à l'accompagnement de l'enfant. La situation familiale peut s'en trouver durablement affectée, entre la dégradation de l'employabilité du parent accompagnant et le sentiment de culpabilité de l'autre parent n'ayant pu participer à l'accompagnement autant qu'il l'aurait souhaité. La même question se pose dans le cadre du recours à l'allocation journalière du proche aidant.

Enfin, les conséquences concrètes de mise en oeuvre de cette proposition de loi devront être attentivement suivies. Selon la commission, la question de la suppression du plafonnement de l'AJPP reste ouverte dès lors que la prise en charge de certaines pathologies, comme les leucémies ou les tumeurs cérébrales, peuvent justifier un accompagnement parental dépassant les 620 jours.

EXAMEN EN COMMISSION

___________

Réunie le mercredi 27 octobre 2021, sous la présidence de Mme Catherine Deroche, présidente, la commission examine le rapport de Mme Colette Mélot, rapporteure, sur le projet de loi n° 157 (2020-2021) visant à améliorer les conditions de présence parentale auprès d'un enfant dont la pathologie nécessite un accompagnement soutenu.

Mme Catherine Deroche , présidente . - Nous passons à présent à l'examen du rapport de Colette Mélot sur la proposition de loi visant à améliorer les conditions de présence parentale auprès d'un enfant dont la pathologie nécessite un accompagnement soutenu.

Mme Colette Mélot , rapporteure . - Adoptée par l'Assemblée nationale il y a presque un an, cette proposition de loi suscite beaucoup d'attentes de la part des associations, qui espèrent une entrée en vigueur rapide de ses dispositions.

Avant d'aborder l'examen de ce texte, il me revient de vous proposer un périmètre pour l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution. Je considère que ce périmètre comprend des dispositions relatives aux conditions de bénéfice du congé de présence parentale (CPP) et de l'allocation journalière de présence parentale (AJPP). En revanche, ne me semblent pas présenter de lien, même indirect, avec le texte déposé les amendements relatifs à la politique nationale de prévention et de prise en charge des maladies graves chez les enfants ou à l'éducation thérapeutique et à l'accompagnement d'enfants atteints de maladies graves ou chroniques en milieu scolaire.

Créés par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, le CPP et l'AJPP constituent des dispositifs précieux pour soulager des situations familiales complexes et douloureuses. Ils permettent en effet aux parents d'interrompre leur activité professionnelle et de bénéficier d'une compensation de la perte de revenus associée afin d'accompagner un enfant dont la dégradation de l'état de santé justifie un accompagnement soutenu. Il peut s'agir d'une pathologie, telle qu'un cancer pédiatrique, d'un handicap ou d'un accident particulièrement grave.

À l'heure actuelle, le bénéfice du CPP et de l'AJPP semble restreint moins par des considérations médicales que par des considérations de régulation budgétaire. Le CPP est ainsi limité à 310 jours ouvrés de congés pouvant être mobilisés sur une période initiale de trois ans. En conséquence, le nombre d'AJPP pouvant être versé aux parents pendant cette période de référence est également limité à 310. Le CPP et les AJPP sont, bien entendu, conditionnés à la fourniture d'un certificat médical attestant de la gravité de la maladie, du handicap ou de l'accident de l'enfant et précisant la durée prévisible de traitement.

Face à un plafonnement qui semble quelque peu déconnecté de la situation médicale de l'enfant, des ajustements ont été apportés à ces dispositifs dans la période récente, afin d'en renforcer la flexibilité.

La loi du 8 mars 2019 visant à renforcer la prise en charge des cancers pédiatriques par la recherche, le soutien aux aidants familiaux, la formation des professionnels et le droit à l'oubli a ainsi assoupli les conditions de réexamen de la durée prévisible de traitement de l'enfant, afin de simplifier la vie des parents. Elle a surtout complété les motifs justifiant, après la première période de trois ans, le renouvellement du CPP et de l'AJPP ; au-delà des cas de rechute ou de récidive, ce renouvellement est de droit en cas de perpétuation de la gravité de l'état de santé.

En outre, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 a ouvert la possibilité pour le salarié, avec l'accord de son employeur, de fractionner le CPP ou de le transformer en période d'activité à temps partiel, afin de mieux concilier l'accompagnement de l'enfant et le maintien d'une activité professionnelle. Notre commission est particulièrement attachée à cette souplesse en ce qu'elle contribue, au moins dans une certaine mesure, au maintien de l'employabilité du parent.

Le recours au CPP et à l'AJPP est dynamique : le nombre de bénéficiaires a augmenté de 70 % sur la période 2013-2020. En 2020, un peu moins de 10 000 familles ont ainsi bénéficié de l'AJPP, pour un coût total de 97 millions d'euros, tous régimes confondus. Le montant mensuel moyen d'AJPP perçu par les bénéficiaires est ainsi estimé à 846 euros en 2020. Quant à la durée moyenne de versement de l'AJPP, elle s'établirait à huit mois. Sur ces bénéficiaires, un peu plus de 23 % sont des familles monoparentales pour lesquelles l'arrêt d'une activité professionnelle peut avoir des conséquences financières particulièrement préjudiciables.

Quelques enjeux de gestion ne doivent pas être sous-estimés. Un grand nombre de critiques formulées par les associations portent sur les délais de traitement des demandes d'AJPP par les organismes débiteurs, les caisses d'allocations familiales (CAF). En théorie, la sécurité sociale dispose d'un délai maximal de trois mois pour verser l'allocation, au-delà duquel le silence de l'administration vaut acceptation. Ce délai inclut l'examen du certificat médical par le service du contrôle médical de l'assurance maladie.

Je tiens à rappeler qu'il s'agit d'un délai théorique et qu'une attente de trois mois peut avoir des conséquences psychologiques et matérielles difficilement supportables pour des familles déjà fortement déstabilisées par l'annonce du diagnostic. Il faudra donc veiller à ce que les CAF soient pleinement réactives lorsqu'elles sont saisies d'une demande, quitte à verser des avances sans attendre le feu vert du service du contrôle médical des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM).

En outre, le Gouvernement s'est engagé à fluidifier le pointage mensuel par les CAF des jours de CPP effectivement pris pendant le mois, en supprimant les attestations mensuelles sur papier signées de l'employeur, pour privilégier une transmission dématérialisée via les déclarations sociales nominatives de l'entreprise. Cette dématérialisation devrait intervenir d'ici la fin de l'année 2022.

J'en viens au contenu de la proposition de loi. Son article unique ouvre la possibilité de renouveler le CPP et le crédit d'AJPP au-delà de 310 jours sur la période de référence initiale de trois ans. Cette évolution est pleinement justifiée par le souci de mieux tenir compte de la réalité de la pathologie ou du handicap de l'enfant et des soins qu'il requiert.

La possibilité de renouvellement après la période initiale de trois ans, que nous avons inscrite dans la loi du 8 mars précitée, présente un intérêt limité. N'oublions pas que, au bout de trois ans, la plupart des enfants sont soit guéris, soit décédés. Les dispositions actuelles ne répondent donc pas aux besoins des quelque 600 foyers - soit 6 % des bénéficiaires - qui, au cours de la période de trois ans, épuisent leur crédit de 310 jours d'AJPP. Dans le cas de cancers pédiatriques, les chiffres les plus pessimistes évaluent à 30 % la part des parents bénéficiaires de l'AJPP qui auraient besoin d'une prolongation du nombre de jours d'allocation.

Le renouvellement des droits au CPP et à l'AJPP permet ainsi aux parents concernés de mobiliser, si la santé de leur enfant le requiert, un crédit maximal de 620 jours sur la période de référence de trois ans. Au total, le coût de la mesure serait compris entre 5 et 8 millions d'euros.

L'extension aux agents publics du bénéfice de ces nouvelles dispositions ne figure pas dans le texte - elle est pourtant essentielle au regard du principe d'égalité ! En ce que cette extension induit une dépense supplémentaire, seul un amendement gouvernemental peut la proposer.

Pour réparer cet oubli, je suggère une solution qui ne compromettra pas l'adoption rapide du texte, dans un contexte d'encombrement de l'ordre du jour parlementaire. Le texte a en effet été adopté il y a déjà près d'un an par l'Assemblée nationale. Beaucoup de foyers déjà fragilisés par la crise sanitaire ont déjà épuisé leur crédit de 310 jours sans pouvoir le renouveler. Et plus l'adoption de la loi sera retardée, plus les foyers souffrant d'une situation pareille seront nombreux.

Dans un premier temps, je propose que le Sénat adopte ce texte de façon conforme, de sorte que les familles arrivant en fin de droits dans les jours suivant la promulgation de la loi puissent renouveler aussi sereinement que possible leur CPP et leur AJPP. Dans un second temps, le Gouvernement devrait rapidement proposer l'extension du dispositif aux agents publics par voie d'amendement au PLFSS.

Mes échanges tant avec le rapporteur de l'Assemblée nationale qu'avec le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles me font penser qu'il s'agit de la solution la plus efficace, dans l'intérêt des familles concernées. Une commission mixte paritaire sur ce texte pourrait en différer l'adoption définitive à la mi-décembre, dans le meilleur des cas.

Compte tenu de ces observations, je vous propose d'adopter ce texte sans modification. Parce qu'il répond aux attentes des familles, nous devons garantir son entrée en vigueur dans les plus brefs délais.

Mme Laurence Rossignol . - Comment les maladies psychologiques des enfants sont-elles identifiées dans la liste annexée ? La phobie scolaire et l'anorexie, entre autres, ouvrent-elles droit à l'AJPP ?

M. Jean-Luc Fichet . - Je suppose que cette proposition de loi recevra l'avis unanime des membres de la commission. Les familles n'utilisent en moyenne que 173 jours de CPP sur le plafond de 310 jours. On pourrait penser que c'est suffisant. Pourtant, 6 % des familles ont besoin d'un crédit beaucoup plus important. Porter ainsi le plafond à 620 jours est une excellente chose, encore faut-il que les familles puissent bénéficier de ces congés sans rupture. Au demeurant, il conviendrait que les délais d'instruction des dossiers soient les plus courts possible.

Notre groupe approuve l'adoption conforme de ce texte à laquelle nous appelle la rapporteure.

M. Bernard Jomier . - Le Gouvernement a présenté un amendement au PLFSS à l'Assemblée nationale visant à majorer de façon significative l'AJPP
- il est question de le porter au niveau du SMIC mensuel -, et l'allocation journalière du proche aidant (AJPA). Cet amendement est-il en ligne avec la présente proposition de loi ?

Mme Florence Lassarade . - Le taux de répartition des jours de congé entre les deux parents a-t-il été évalué ? Comment les professions indépendantes et les auto-entrepreneurs pourraient-ils bénéficier de ces avantages ?

M. Daniel Chasseing . - Cette proposition de loi est attendue par 30 % des familles, dont la situation est souvent d'une particulière gravité. Nous devrions tous consentir à son adoption conforme.

M. René-Paul Savary . - Avouez qu'on a le pistolet sur la tempe. Alors que la proposition de loi a été adoptée par l'Assemblée nationale il y a un an, on nous demande de la voter dans la précipitation. Résultat : le Sénat se trouve obligé de procéder à un vote conforme.

Étendre le bénéfice du dispositif aux fonctionnaires paraît une bonne chose, mais le Gouvernement n'a même pas proposé un amendement en ce sens devant l'Assemblée nationale. Pourquoi le proposerait-il ici ? Le Gouvernement n'a aucune volonté ! À mon sens, le présent texte, vu son objet, aurait dû constituer une disposition du PLFSS ; son dispositif aurait pu être anticipé et faire l'objet d'une étude d'impact préalable, plutôt que d'être adopté dans la précipitation. Une fois de plus, le Sénat est maltraité !

Qu'en sera-t-il des droits à la retraite pour les salariés concernés ? Comment les trimestres, donc le montant des retraites, sera-t-il calculé ?

Mme Cathy Apourceau-Poly . - Cette proposition de loi fait l'unanimité ; elle nous concerne tous, vu les situations que nous connaissons dans nos départements respectifs. Toutefois, aucune de ses dispositions ne porte sur les cotisations sociales et les droits à la retraite. Il faudra bien que l'on précise les choses de ce point de vue-là ! Du reste, je souscris aux propos de notre collègue Fichet : la consommation des crédits de CPP ne devrait être affectée d'aucune rupture.

Mme Annie Delmont-Koropoulis . - Aider ces personnes qui se trouvent dans le désespoir le plus total est essentiel. Mais celles-ci, la plupart du temps, ne sont pas bien informées. Ne pourrait-on pas envisager que des assistantes sociales, dans les hôpitaux, puissent les orienter et leur proposer le dispositif ?

Mme Colette Mélot , rapporteure . - Les maladies reconnues doivent être d'une particulière gravité, laquelle est confirmée par le certificat médical, et doivent justifier des soins contraignants. Le certificat est soumis au contrôle médical de la CPAM. Par exemple, les maladies psychiatriques peuvent nécessiter des soins contraignants et ainsi justifier l'AJPP.

Je partage vos observations, monsieur Fichet. Il est urgent d'adopter cette proposition de loi dans les plus brefs délais !

Jusqu'à présent, le montant de l'AJPP n'était revalorisé qu'en fonction de l'inflation. L'amendement du Gouvernement au PLFSS pour 2022 visant à le revaloriser en référence au SMIC mensuel est bienvenu.

Il semble que l'extension du dispositif aux agents publics ait été oubliée lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale. Il est impensable de dire aux fonctionnaires qu'ils n'y ont pas droit. Le Gouvernement déposera donc un amendement au PLFSS pour 2022 visant à garantir le bénéfice des nouvelles dispositions aux fonctionnaires.

La question des droits à la retraite ne figure pas dans la proposition de loi. La loi du 8 mars 2019 s'était cantonnée à garantir le maintien de l'intégralité des droits à l'ancienneté pendant le CPP.

M. René-Paul Savary . - Le Sénat ne peut pas proposer l'extension du dispositif aux fonctionnaires en raison de l'article 40 de la Constitution. L'Assemblée nationale a une liberté bien plus grande !

Mme Catherine Deroche , présidente . - Concernant les fonctionnaires, les jours de congé de présence parentale sont assimilés à des jours de travail et ouvrent donc bien droit à retraite.

M. René-Paul Savary . - Le calcul des droits à la retraite pour les salariés du privé pourrait être affecté. Les trimestres non cotisés ont une répercussion sur le montant des droits...

Mme Catherine Deroche , présidente . - L'État impose beaucoup de choses aux entreprises privées qu'il ne s'applique pas à lui-même. Ce n'est pas la première fois que l'on se retrouve dans cette situation. Nous avons été contraints à de multiples reprises de procéder à une adoption conforme. Ce fut le cas de la proposition de loi relative aux cancers pédiatriques - nous étions pourtant très réservés sur certaines de ses dispositions - et de la proposition de loi relative à l'expertise des comités de protection des personnes. J'ajoute que nous examinerons en décembre une proposition de loi visant à l'accompagnement des enfants atteints de pathologie chronique ou de cancer. Bref, on ne fait que des sauts de puce, et encore, rien ne garantit que les textes d'application soient pris.

Ce serait l'honneur d'un gouvernement, quel qu'il soit, de proposer un texte global. Les situations sont tellement difficiles pour les familles. Mettre un peu d'humanité ne ferait pas de mal.

M. René-Paul Savary . - Le Sénat a nettement moins de marges de manoeuvre que l'Assemblée nationale au regard de l'article 40 de la Constitution. Avant, nous proposions des amendements susceptibles d'entraîner des recettes pour compenser ceux qui visaient à créer des dépenses supplémentaires. Même cela on ne peut plus le faire ! Quel changement y a-t-il eu dans la gestion de l'article 40 ?

Mme Catherine Deroche , présidente . - Il n'y a pas eu de changement. Nous avons parfois gagé des pertes de recettes par une augmentation de recettes, mais ce n'est pas possible pour une augmentation des dépenses. Reste que l'article 40 bloque certaines propositions : c'est ainsi que des amendements prévoient des demandes de rapport, au moins pour évoquer le sujet.

Mme Corinne Imbert . - L'AJPP est-elle cumulable avec la prestation de compensation du handicap (PCH) pour les enfants ? Une évaluation de l'impact financier de l'extension du dispositif aux agents du secteur public a-t-elle été réalisée ?

Mme Colette Mélot , rapporteure . - L'AJPP est bien cumulable avec l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH). Nous vérifierons si elle peut être cumulée avec la PCH.

Le suivi des familles par les assistantes sociales est une nécessité. L'information en matière de CPP et d'AJPP est insuffisante, si bien que les familles ne pensent même pas à demander à en bénéficier. Nous devons donc faire le nécessaire pour consolider l'information. C'est d'ailleurs à l'hôpital qu'elle devrait être assurée : prévoir un rendez-vous systématique entre les familles et les assistantes sociales semble être une bonne idée.

Encore une fois, ce texte mérite d'être adopté. Il permettrait de renforcer l'aide des familles en proie à ces situations douloureuses.

EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE

Article unique

L'article unique constituant l'ensemble de la proposition de loi est adopté sans modification.

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS, ALINÉA 3,
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)

___________

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 24 ( * ) .

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie 25 ( * ) . Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte 26 ( * ) . Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial 27 ( * ) .

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des affaires sociales a arrêté , lors de sa réunion du 27 octobre 2021, le périmètre indicatif de la proposition de loi (n° 157, 2020-2021) visant à améliorer les conditions de présence parentale auprès d'un enfant dont la pathologie nécessite un accompagnement soutenu .

Elle a considéré que ce périmètre incluait des dispositions relatives aux conditions de bénéfice du congé de présence parentale et de l'allocation journalière de présence parentale.

En revanche, la commission a estimé que ne présentaient pas de lien, même indirect, avec le texte déposé , des amendements relatifs :

- à la politique de nationale de prévention et de prise en charge des maladies graves chez les enfants ;

- à l'éducation thérapeutique et à l'accompagnement d'enfants atteints de maladies graves ou chroniques en milieu scolaire.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

___________

Fédération Grandir sans cancer

Stéphanie Ville , présidente

Fabrice Subirada , trésorier

Union nationale des associations de parents d'enfants atteints de cancer ou de leucémie (Unapecle)

Catherine Vergely , secrétaire générale

Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF)

Mariette Daval , responsable du pôle insertion et cadre de vie

Patricia Chantin , responsable des relations avec le Parlement

Direction de la sécurité sociale (DSS)

Denis Le Bayon , sous-directeur de l'accès aux soins, des prestations familiales et des accidents de travail

Alissa Meunier , chargée de mission au bureau des prestations familiales à la direction de la sécurité sociale

LA LOI EN CONSTRUCTION

___________

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl20-157.html


* 1 Loi n° 2019-180 du 8 mars 2019 visant à renforcer la prise en charge des cancers pédiatriques par la recherche, le soutien aux aidants familiaux, la formation des professionnels et le droit à l'oubli.

* 2 Loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001.

* 3 Article D. 1225-16 du code du travail.

* 4 Article D. 544-1 du code de la sécurité sociale.

* 5 Article L. 544-3 du code de la sécurité sociale.

* 6 Loi n° 2019-180 du 8 mars 2019 visant à renforcer la prise en charge des cancers pédiatriques par la recherche, le soutien aux aidants familiaux, la formation des professionnels et le droit à l'oubli.

* 7 Article L. 1225-65 du code du travail.

* 8 Loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

* 9 Daniel Lenoir et Hervé Droal, Améliorer et simplifier la compensation du handicap pour les enfants - Clarifier l'articulation entre l'AEEH et la PCH , rapport de l'inspection générale des affaires sociales n° 2018-126R de juin 2019.

* 10 Soit, respectivement, 12,63 % et 10,63 % de la base mensuelle de calcul des allocations familiales (BMAF = 414,81 euros) (article D. 544-6 du code de la sécurité sociale).

* 11 Article D. 544-8 du code de la sécurité sociale.

* 12 Adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, cet amendement a inséré un article 32 sexies dans le PLFSS pour 2022 qui modifie l'article L. 544-6 du code de la sécurité sociale relatif aux conditions de fixation du montant de l'AJPP.

* 13 Article D. 544-4 du code de la sécurité sociale.

* 14 Compte rendu de la réunion de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale du 18 novembre 2020.

* 15 Article L. 544-10 du code de la sécurité sociale.

* 16 Cf supra.

* 17 Selon les données fournies par la direction de la sécurité sociale.

* 18 Article R. 544-3 du code de la sécurité sociale (cf supra ).

* 19 En général inexistante au moment de la première demande de droit, selon la CNAM, en raison de la charge de travail de ces services.

* 20 Chiffres fournis par la direction de la Sécurité sociale.

* 21 Remplacement, dans l'article L. 544-1 du code de la sécurité sociale, de la référence « L. 122-28-9 » par la référence « L. 1225-62 » pour désigner l'article du code du travail se rapportant au CPP.

* 22 Article 40 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ; article 60 sexies de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; article 41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

* 23 En vertu de l'article L. 544-1 du code de la sécurité sociale, la personne bénéficie de l'AJPP pour chaque jour de CPP.

* 24 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 25 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 26 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 27 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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