III. LES DÉPENSES SONT ACCRUES PAR LES MESURES NOUVELLES

A. LES DÉPENSES DES MINISTÈRES AUGMENTENT DE 1,8 MILLIARD D'EUROS, MALGRÉ DES SOUS-CONSOMMATIONS CONSTATÉES SUR LES DISPOSITIFS D'URGENCE

1. Des ouvertures de crédit plus élevées en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement : un collectif budgétaire qui dépasse la seule fin de gestion et pèsera sur l'avenir

Sur le périmètre du budget général, le projet de loi de finances rectificative prévoit des ouvertures de crédit sur 41 programmes en autorisations d'engagement (pour 14,3 milliards d'euros) et sur 38 programmes en crédits de paiement (pour 10,5 milliards d'euros), ainsi que des annulations sur 85 programmes en autorisations d'engagement (pour 8,8 milliards d'euros) et sur 83 programmes en crédits de paiement (pour 7,3 milliards d'euros).

Seuls 25 des 139 programmes du budget général ne font pas l'objet d'une modification de leurs crédits.

Au total, le montant des ouvertures de crédit est nettement supérieur à celui des annulations, les crédits ouverts augmentant de 5,4 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 3,2 milliards d'euros en crédits de paiement .

Hors remboursements et dégrèvements, les dépenses nettes augmentent de 1,8 milliard d'euros .

Les annulations de crédits de paiement portent principalement sur les crédits ouverts pour les mesures d'urgence (annulation de la majeure partie de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles, sous-consommation sur le plan d'urgence et les garanties), sur la charge de la dette, les taux d'intérêt étant, comme attendu, moins élevés que prévu, ainsi que, dans une moindre mesure, sur les crédits mis en réserve ainsi que sur certaines sous-consommations.

Ouvertures nettes de crédits sur le budget général

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir de l'état B

Un fait remarquable est que les ouvertures nettes d'autorisations de paiement dépassent les ouvertures nettes de crédits de paiement de plus de 2 milliards d'euros . Depuis le début du quinquennat, seule la troisième loi de finances rectificative du 30 juillet 2020 avait ouvert un tel excédent d'autorisations d'engagements, ce qui s'expliquait par le lancement, à la sortie de la première phase de la crise sanitaire, de projets d'investissement qui avaient vocation à se poursuivre dans le cadre du plan de relance.

Écart entre les ouvertures d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement dans les collectifs budgétaires de fin de gestion

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des lois et projets de lois de finances rectificatives

Le Gouvernement indique pourtant que le présent projet de loi de finances « porte les ouvertures et les annulations permettant de couvrir les dépenses prévues d'ici à la fin de l'année », ainsi que la mesure d'indemnité inflation 9 ( * ) .

Or la hausse nette des engagements de l'État dépasse la portée d'un simple schéma de fin de gestion et suscitera l'inscription de crédits de paiement dans les budgets à venir, alors même que les restes à payer sont déjà en forte hausse depuis le début du quinquennat, comme l'a constaté le rapporteur général en examinant l'équilibre général du budget de l'État dans le projet de loi de finances pour 2022 10 ( * ) .

Cette hausse résulte principalement de trois phénomènes :

- des ouvertures d'autorisations d'engagement dépassant de 1,2 milliard d'euros les ouvertures de crédits de paiement sur la mission « Travail et emploi », sans décomposition précisément donnée mais qui résulte en partie de la mise en place du plan de réduction des tensions de recrutement annoncé par le Premier ministre le 27 septembre dernier ;

- des ouvertures de crédits réalisées sur la mission « Plan de relance », à hauteur de 2,3 milliards d'euros en autorisations d'engagement ;

- en sens inverse, d'une annulation de crédits de 1,6 milliard d'euros portant sur le programme 107 « Administration pénitentiaire » de la mission « Justice ».

Ces ouvertures de crédit sont présentées plus en détail infra .

2. Les ouvertures de crédits nettes sont en majorité liées aux dépenses répondant à la hausse des prix de l'énergie
a) La majorité des crédits liés à l'indemnité inflation sont ouverts sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances »

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » est celle qui fait l'objet des ouvertures nettes de crédits les plus importantes, soit 3,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Il s'agit principalement du financement de la majeure partie de l'indemnité inflation, qui fait l'objet de la création d'un nouveau programme 371 « Prise en charge par l'État du financement de l'indemnité inflation », doté de 3,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

b) Une subvention de 2 milliards d'euros est versée à France Compétences sur la mission « Travail et emploi »

Sur l'ensemble de la mission « Travail et emploi », les ouvertures de crédit, nettes des annulations, sont de 3,4 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 2,1 milliards d'euros en crédits de paiement.

Sur le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi », les ouvertures de crédits sont de 3,6 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 2,5 milliards d'euros en crédits de paiement.

La décomposition de ces ouvertures de crédit importantes est donnée de manière sommaire dans le projet de loi de finances rectificative. Le seul montant chiffré correspond à une ouverture de crédits de 2 milliards d'euros, probablement en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, à titre de subvention exceptionnelle à France compétences pour compenser les pertes de recettes de l'établissement.

Il ressort de l'exposé des motifs d'un amendement présenté par le Gouvernement au projet de loi de finances pour 2022 11 ( * ) que le plan de réduction des tensions de recrutement , annoncé par le Premier ministre le 27 septembre dernier, aurait un effet sur 2021, pris en compte dans le programme 103 à hauteur de 450 millions d'euros en autorisations d'engagement et 216 millions d'euros en crédits de paiement sur le volet « salarié » et de 450 millions d'euros en autorisations d'engagement et 204 millions d'euros en crédits de paiement sur le volet « demandeurs d'emplois ».

S'agissant des autres ouvertures de crédits, soit 725 millions d'euros en autorisations d'engagement et 120 millions d'euros seulement en crédits de paiement, elles porteraient sur une révision à la hausse au titre des compensations d'exonérations de cotisations sociales.

c) La mission « Plan de relance » fait l'objet d'abondements uniquement en autorisations d'engagement

Les mouvements de crédits ont été importants sur la mission « Plan de relance » au cours de la première loi de finances rectificative du 19 juillet dernier et du présent projet de loi de finances rectificative, surtout en autorisations d'engagement. Elles ont surtout accru le périmètre du programme 364 « Cohésion », en particulier parce que cette mission avait été sollicitée au printemps pour alimenter, à hauteur de plus de 4 milliards d'euros, le dispositif de financement de chômage partiel relevant de la mission « Plan d'urgence face à la crise sanitaire ».

Ouvertures et annulations d'autorisations d'engagement sur la mission
« Plan de relance »

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances

Le présent projet de loi de finances rectificative demande l'ouverture de 2,3 milliards d'euros en autorisations d'engagement uniquement, dont 524 millions d'euros sur le programme 362 « Écologie », 257 millions d'euros sur le programme 363 « Compétitivité » et 1 489,0 millions d'euros sur le programme 364 « Cohésion ».

Les dispositifs faisant l'objet d'ouvertures de crédit sur le programme 362 sont les suivants 12 ( * ) :

- soutien aux autorités organisatrices de la mobilité en matière de transports collectifs en site propre : 0,4 milliard d'euros ;

- fonds de réhabilitation des friches  : 0,4 milliard d'euros ;

- mesures de transition agricole et de soutien au secteur de la pêche, notamment en matière d'agroéquipements, d'investissements forestiers, ou de bien-être animal : 0,3 milliard d'euros ;

- développement d'infrastructures cyclables sécurisées dans le cadre du plan vélo : 0,2 milliard d'euros.

Ces ouvertures sont partiellement compensées par une perspective de moindre recours à certains dispositifs de soutien à la demande en véhicules propres, compte tenu de la baisse du marché automobile, d'un financement par le programme d'investissements d'avenir de projets du fonds de modernisation de la filière automobile, ainsi que de diverses sous-consommations prévues ou déjà constatées , dont le détail n'est pas donné par le projet de loi de finances rectificative.

Ces ouvertures correspondent souvent à des annonces déjà faites.

Le Premier ministre avait ainsi annoncé un abondement du fonds « friches », destiné à soutenir la réhabilitation des friches dans les collectivités, à hauteur de 350 millions d'euros. Il en est de même des aides pour la conversion des agroéquipements et les investissements de transition en matière agricole (180 millions d'euros) et du renforcement du soutien à la filière forêt et bois (100 millions d'euros).

Les abondements du volet « agricole » de la mission « Plan de relance »

S'agissant du volet concernant le renouvellement et le développement des agro-équipements , une première partie concerne une aide à l'investissement pour le remplacement de matériels anciens et peu performants et l'acquisition de matériels performants en matière environnementale, par exemple tout matériel permettant la réduction d'usage des produits phytopharmaceutiques ou de fertilisants, y compris des capteurs et logiciels, ou matériels de substitution et de travail du sol telles que bineuses mécaniques. L'enveloppe initiale de 135 millions d'euros en autorisations d'engagement, avec 71 millions d'euros de crédits de paiement en 2021, bénéficie d'un abondement de 80 millions d'euros.

La deuxième partie de ce volet concerne une aide à l'investissement dans le matériel permettant de faire face aux aléas climatiques . 100 millions d'euros en autorisations d'engagement étaient prévus en 2021 et 32,5 millions d'euros en crédits de paiement. Il s'agit d'une part, d'une aide individuelle pour l'acquisition de dispositifs de protection contre le gel, la grêle ou la sécheresse (70 millions d'euros initialement), en particulier dans les filières arboricoles et viticoles où le coût important du capital constitué par l'outil de production rend les offres assurantielles particulièrement onéreuses. D'autre part, une partie de l'enveloppe finance des projets collectifs de gestion de l'eau, en complément de financements du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), des agences de l'eau et des régions (30 millions d'euros initialement). À la suite de l'épisode de gel tardif du printemps 2021, le Premier ministre a annoncé le doublement des crédits de cette enveloppe, soit 100 millions d'euros supplémentaires.

100 millions d'euros sont également redéployés afin d'abonder les différents dispositifs de soutien à la filière forêt et bois . Ils s'ajoutent donc aux 200 millions d'euros déjà consacrés à la relance de la filière : 150 millions d'euros jusqu'à présent pour le renouvellement forestier en amont - soit le reboisement de 45 000 hectares, environ 50 millions d'arbres, capables de capter 150 000 tonnes de CO 2 chaque année - et 50 millions d'euros pour la modernisation des industries de transformation du bois en aval. Cette enveloppe inclut également les 10 millions d'euros supplémentaires votés par le Sénat lors de l'examen du premier projet de loi de finances rectificative pour 2021, à destination des travaux préalables à la reforestation.

Enfin, 15 millions d'euros supplémentaires sont alloués au sein du volet « filières animales » , au soutien et à l'accueil des animaux abandonnés, conformément aux annonces du Président de la République du 4 octobre dernier. Ces crédits, initialement de 14 millions d'euros, financent l es mesures d'accompagnement des refuges et associations de protection des animaux de compagnie et près de 90 % des fonds ont déjà été engagés (modernisation de refuges, travaux d'équipements, campagnes de stérilisation de chats ou chiens errants).

Source : commission des finances

Sur le programme 363 « Compétitivité » , les besoins liés à l'extension des dispositifs « Territoires d'industrie » sont abondés de 0,3 milliard d'euros, en tenant compte de sous-consommations non explicitées.

S'agissant enfin du programme 364 « Cohésion » , trois dispositifs doivent bénéficier d'abondements : le plan « 1 jeune, 1 solution », avec notamment la prolongation de la prime à l'embauche jusqu'à mi-2022, le plan Avenir montagne et les « manufactures de proximité ».

Le Gouvernement indique que ces ouvertures tiennent compte des prévisions de sous-consommation de la part État du dispositif d'activité partielle de longue durée (APLD). Cette précision appelle deux observations .

D'une part, s'agissant des dispositifs d'activité partielle de droit commun (APDC) et d'activité partielle de longue durée (APLD), seuls 250 millions d'euros ont été consommés sur un total de 4,2 milliards d'euros et l'amélioration de la situation économique ne laisse pas présager une consommation de crédits importante : les crédits ouverts en loi de finances rectificative du 19 juillet dernier ne seront que très partiellement consommés. Si la sous-consommation massive qui est prévisible est reportée sur les trois dispositifs précités bénéficiant d'un abondement sur le même programme 364, les crédits réellement apportés en leur faveur seraient beaucoup plus élevés que ce qui est inscrit explicitement dans le projet de loi de finances rectificative.

D'autre part, les crédits relatifs à l'activité partielle sont ouverts et consommés en montant égal en autorisations d'engagement et en crédits de paiement . Or le projet de loi de finances rectificative n'ouvre des crédits qu'en autorisations d'engagement : on peut donc s'étonner qu'il ne procède pas en parallèle à des annulations de crédits sur les crédits de paiement d'activité partielle qui, en tout état de cause, ne pourront pas être consommés puisqu'ils ne seront pas assortis d'autorisations d'engagement.

D'une manière générale, le niveau de sous-consommation des crédits risque d'être relativement élevé sur les trois programmes de la mission « Plan de relance ».

Au 11 novembre 2021, les crédits de paiement sont consommés à hauteur de 41,9 % pour le programme 362 « Écologie », de 52,3 % pour le programme 363 « Compétitivité » et de 65,9 % pour le programme 364 « Cohésion ».

Il semble que le Gouvernement constitue ainsi une réserve de budgétisation , via le report à 2022 des crédits non consommés, sans que leur utilisation apparaisse dans l'information budgétaire.

Par ailleurs, le projet de loi de finances rectificative indique que les ouvertures d'autorisations d'engagement ainsi demandées sur la mission « Plan de relance » sont compensées, au niveau de l'enveloppe de 100 milliards d'euros du plan de relance, par des sous-consommations attendues sur certains dispositifs qui, tout en étant rattachés au plan de relance, ne font pas partie de cette mission, à savoir :

- une sous-consommation attendue de 1,3 milliard d'euros du dispositif d'activité partielle de longue durée pour la part financée par l'Unédic ;

- une sous-consommation de 70 millions d'euros au titre de la garantie des financements export ;

- une moindre compensation de pertes de recettes aux collectivités locales par rapport à ce qui était estimé, à hauteur de 900 millions d'euros.

d) Les prévisions de remboursements et dégrèvements font l'objet d'un ajustement en fin d'année

La mission « Remboursements et dégrèvements » bénéficie d'une ouverture de crédits de 1,4 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, soit 1,1 % des crédits ouverts en loi de finances initiale. Ce mouvement, qui correspond à la révision des prévisions de recettes fiscales, est habituel dans le collectif budgétaire de fin d'année, s'agissant de crédits de nature évaluative.

e) Des crédits sont ouverts pour la majoration du chèque énergie sur la mission « Écologie, mobilité et développement durables »

La mission « Écologie, mobilité et développement durables » fait l'objet d'ouvertures de crédits, nettes des annulations, d'un montant de 627,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 526,3 millions d'euros en crédits de paiement.

Les ouvertures de crédit portent en premier lieu sur la revalorisation exceptionnelle de 100 euros du chèque énergie , annoncée en septembre 2021, pour un coût de 533,9 millions d'euros , mais aussi sur diverses mesures :

- une compensation exceptionnelle des pertes de recettes de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), à hauteur de 100 millions d'euros ;

- des aménagements sur les terminaux du tunnel sous la Manche, pour 22 millions d'euros ;

- le versement d'une subvention de 45 millions d'euros à l'entreprise Brittany Ferries.

Des annulations de crédit concernent la réserve de précaution ainsi que le décalage de certaines dépenses dans le domaine de la politique de l'énergie et du changement climatique, avec en outre l'annulation du solde des autorisations d'engagement qui avaient été provisionnées pour le renouvellement du bail de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). En revanche, les crédits relatifs aux aides aux véhicules et relevant de cette mission devraient être entièrement consommés.

f) Les effets des crises agricoles sur les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales »

La mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » (AAFAR) fait l'objet d'ouvertures de crédits, nettes des annulations, d'un montant de 486,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 486,1 millions d'euros en crédits de paiement.

Les agriculteurs et viticulteurs ont été atteints en début d'année par plusieurs crises qui justifient une ouverture de crédits de 500 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l'aquaculture ».

Des annulations portent, à hauteur de 13,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 13,9 millions d'euros en crédits de paiement, sur les autres programmes de la mission, dont 2,5 millions d'euros sur le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » et les crédits restants sur le programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture »

En ce qui concerne les ouvertures de crédits , elles sont principalement destinées à financer les mesures de soutien aux agriculteurs face à l'épisode de gel tardif du printemps dernier et l'épisode de grippe aviaire . D'après les réponses communiquées aux rapporteurs spéciaux de la mission AAFAR, « après identification d'éventuelles marges de manoeuvre de redéploiement au sein du programme, de sous-consommations futures, la loi de finances rectificative de fin d'année complète le montage financier pour les différents dispositifs de crise, dont ceux liés au gel ».

Plusieurs dispositifs sont concernés :

- l'aide aux agriculteurs et viticulteurs victimes d'un épisode de gel tardif qui constitue la deuxième tranche de l'aide de 1 milliard d'euros annoncée le 17 avril dernier par le Premier ministre 13 ( * ) . Elle financera les avances qui seront versées dans le cadre du Fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA) et les indemnisations versées après instruction des dossiers ;

- l' aide aux bovins allaitants , annoncée le 8 mars dernier par le Premier ministre et le ministre de l'agriculture et de l'alimentation 14 ( * ) . La crise sanitaire a en effet réduit les débouchés de la filière agro-alimentaire, notamment ceux de la restauration, ainsi que des exportations ;

- la France est soumise depuis le mois de novembre 2020 à un nouvel épisode d'influenza aviaire hautement pathogène . Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, Julien Denormandie, a annoncé le 11 mai dernier une aide aux éleveurs de l'ordre de 90 millions d'euros à titre d'indemnisation pour les pertes d'exploitation 15 ( * ) , dont 40 millions d'euros seraient destinés aux éleveurs, 30 millions d'euros à la filière en amont, 500 000 euros pour les élevages de poules pondeuses et 9 millions d'euros aux éleveurs de gibier, ainsi que 10 millions d'euros d'avances de trésorerie remboursables aux entreprises en aval de la filière 16 ( * ) ;

- FranceAgriMer est également chargé d'accorder une aide aux planteurs de betteraves impactés par le virus de la jaunisse en 2020 17 ( * ) ;

- sont enfin concernés un complément d'aide au stockage viticole et l'indemnisation des calamités agricoles reconnues au titre de 2020.

Il faut également noter que 30 millions d'euros correspondent au renforcement exceptionnel de la subvention de l'État au profit de l'Office National des forêts (ONF). En 2021, la situation d'endettement de l'Office devrait encore se dégrader. En effet, la programmation budgétaire fait apparaître un accroissement du besoin de financement de 111 millions d'euros, pour atteindre 509 millions d'euros, avec un résultat net de - 64 millions d'euros. Celui-ci résulte notamment de la construction du nouveau siège de l'Office (24,8 millions d'euros), et d'un décalage des paiements de 2020 sur 2021. Pour le reste, la situation financière de l'Office continue de se dégrader du fait de la baisse constatée au cours des dernières années du chiffre d'affaires, principalement en raison de la vente de bois, fortement impactée par la crise économique en cours (faillites d'entreprises clientes, fermeture du marché nord-américain, baisse des prix du chêne et forte augmentation des taux d'invendus...), mais aussi par l'ampleur inédite et durable de la crise des dépérissements liée au réchauffement du climat et au déficit hydrique.

La subvention exceptionnelle de 30 millions d'euros devrait permettre de réduire de moitié le résultat net déficitaire de 64,2 millions d'euros prévu au dernier budget rectificatif. Elle constitue un des engagements financiers de l'État dans le cadre du nouveau contrat État -ONF 2021-2025, adopté par le conseil d'administration du 2 juillet 2021 et qui vise à opérer le redressement financier de l'établissement. Dans le cadre de ce nouveau contrat, l'État renforce son engagement financier en faveur de l'ONF, en mobilisant 60 millions d'euros supplémentaires sur trois années : 30 millions d'euros en 2021, 20 millions d'euros en 2022 et 10 millions d'euros en 2023, qui sont versés en complément de la subvention d'équilibre de 12,4 millions d'euros et des 140 millions d'euros de versement compensateur annuel, dont le montant est maintenu.

Enfin, le plafond d'emplois du ministère de l'agriculture et de l'alimentation est augmenté de 216 équivalents temps plein travaillés (ETPT) , au titre des renforts nécessaires au traitement des indemnisations des dommages liés au gel et des dossiers « relance » (110 ETPT) ainsi qu'aux contrôles rendus nécessaires par le Brexit (106 ETPT, sur le programme 206).

g) Les effets de la crise continuent à peser sur les opérateurs des missions « Culture » et « Médias, livre et industries culturelles »

Les crédits de la mission « Culture » sont renforcés de 271,0 millions d'euros en autorisations d'engagement et 264,9 millions d'euros en crédits de paiement.

Répartition des ouvertures de crédits

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires. Seul les programmes faisant l'objet d'ouvertures de crédits sont représentés

Ces ouvertures de crédits visent en large partie (84 % d'entre elles) à compenser les pertes de billetterie des opérateurs des programmes 131 « Création », 175 « Patrimoines » et 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » en raison du prolongement des mesures de restriction administrative liées à la crise sanitaire en 2021. 234 millions d'euros, en autorisations d'engagement et crédits de paiement, sont ainsi dégagés à cette fin.

La direction générale des patrimoines et de l'architecture indique que les crédits dédiés aux opérateurs du programme 175 « Patrimoines » ne devraient être ouverts qu'en 2022. Il y a lieu de s'interroger dans ces conditions sur l'opportunité d'un tel montage budgétaire, le projet de loi de finances pour 2022 ne reflétant donc qu'imparfaitement les besoins de financement des opérateurs.

Des annulations de crédit d'un montant limité portent par ailleurs sur la réserve de précaution du programme 224 « Soutien aux politiques du ministère de la culture ».

De même, des crédits de 27,9 millions d'euros, en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, sont ouverts sur la mission « Médias, livre et industries culturelles », pour financer des mesures en faveur du secteur du cinéma annoncées à Deauville le 23 septembre dernier, mais aussi des surcoûts et des travaux du site Richelieu de la bibliothèque nationale de France.

h) Les autres missions font l'objet d'ouvertures nettes de crédit moins élevées

Sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » , 42,9 millions en autorisations d'engagement et surtout 201,9 millions d'euros en crédits de paiement sont ouverts sur le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » pour couvrir, selon le projet de loi de finances rectificative, des dépenses non intégrées à la loi de finances initiale pour 2021, notamment au titre du fonds de stabilisation des départements (FSD) et d'un concours exceptionnel pour l'achat de masques.

Sur la mission « Aide publique au développement » , 176,28 millions d'euros en autorisations d'engagement et 193,99 millions d'euros en crédits de paiement sont ouverts. En particulier, 176,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 186,5 millions d'euros en crédits de paiement doivent financer des engagements en matière de santé, notamment l'initiative Act-A qui tend à accélérer l'accès aux outils de lutte contre la covid-19, et d'aide humanitaire en Afghanistan. Ces crédits compensent également des perspectives de baisse du produit de taxe sur les billets d'avion, affectée au fonds de solidarité pour le développement (FSD). En sens inverse, 95,4 millions d'euros d'autorisations d'engagement sont annulés en raison de moindres consommations sur les crédits alloués aux bonifications des prêts des États étrangers.

La mission « Défense » fait l'objet d'ouvertures de crédits à hauteur de 329,0 millions d'euros, en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, afin de financer les surcoûts liés aux opérations extérieures et missions intérieures (OPEX et MISSINT) ainsi que les activités opérationnelles des forces armées. Cette ouverture de crédits est partiellement compensée par des annulations de 179,0 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement portant sur les crédits mis en réserve.

La mission « Cohésion des territoires » connaît principalement une ouverture de crédits de 92,0 millions d'euros en faveur de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH). Selon les éléments apportés au rapporteur général, cet abondement exceptionnel tend à accompagner la forte dynamique constatée depuis le début de l'année sur les aides apportées par l'ANAH, notamment pour la rénovation globale dans le cadre du programme « Habiter Mieux Sérénité », ainsi que pour l'adaptation des logements aux situations de vieillissement et de handicap. Il ne concerne donc pas le dispositif MaPrimeRénov' qui fait l'objet de financements dédiés via le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » de la mission « Écologie, mobilité et développement durables » et le programme 362 « Écologie » de la mission « Plan de relance ».

La mission « Gestion des finances publiques » fait l'objet, sur le programme 302 « Facilitation et sécurisation des échanges » d'une ouverture de crédits de 83 millions d'euros en autorisations d'engagement et 88 millions d'euros en crédits de paiement afin de financer des montants notifiés par la Commission européenne au titre de droits de douane non collectés par la France sur certaines importations, ainsi que des aides aux buralistes, des besoins pour la passation des marchés des garde-côtes des douanes et la prise en charge de la numérisation des droits de francisation. L'aide aux buralistes, en particulier, était attendue : un protocole de soutien signé avec l'État tient compte du chiffre d'affaires de l'année précédente, qui a chuté en 2020 pour les débits de tabac.

Sur la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » , 18,2 millions d'euros sont ouverts, en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, pour financer la dette viagère et les remboursements de prestations de sécurité sociale au profit des invalides.

Enfin, sur la mission « Économie » , 46 millions d'euros en autorisations d'engagement et 49 millions d'euros en crédits de paiement, doivent compenser à La Poste, au titre de 2021, la réforme du transport postal de la presse, mais aussi compenser des pertes de recettes au titre de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et le financement d'événements internationaux.

3. Les annulations de crédit portent sur le plan d'urgence ainsi que sur des crédits mis en réserve ou des sous-consommations de dispositifs
a) Une partie des crédits non utilisés sur la mission « Plan d'urgence face à la crise sanitaire » sont annulés

La mission « Plan d'urgence face à la crise sanitaire » fait l'objet d'annulations nettes à hauteur de 2,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Ces mouvements complètent les mouvements complexes déjà réalisés sur les différents programmes de cette mission par des reports de crédits non consommés en 2020, puis par le décret d'avance du 19 mai 2021 et par la première loi de finances rectificative du 19 juillet dernier.

Ils permettent de préserver, sur chacun des programmes, un volant de crédits disponibles important .

Ouvertures et annulations de crédits sur les programmes 356, 357, 358 et 360

(en milliards d'euros)

Programme 356
« Prise en charge du chômage partiel et financement des aides d'urgence aux employeurs et aux actifs précaires à la suite de la crise sanitaire »

Programme 357
« Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire »

Programme 358 « Renforcement exceptionnel des participations financières de l'État dans le cadre de la crise sanitaire »

Programme 360 « Compensation à la sécurité sociale des allègements de prélèvements pour les entreprises les plus touchées par la crise sanitaire »

Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires et des données Chorus au 11 novembre 2021

La seule ouverture de crédits a lieu sur le programme 360 « Compensation à la sécurité sociale des allègements de prélèvements pour les entreprises les plus touchées par la crise sanitaire », à hauteur de 500 millions d'euros, afin de financer le dispositif de réduction des cotisations et contributions sociales mis en place en 2021 pour les travailleurs indépendants . Pour mémoire, la première loi de finances rectificative du 19 juillet dernier a prévu une réduction forfaitaire de 250 euros par mois pour les travailleurs indépendants.

Les annulations portent sur les autres programmes, en raison du moindre recours à l'activité partielle (programme 357) et de la reprise d'activité qui réduit fortement les besoins au titre du fonds de solidarité (programme 357).

Les crédits restants après ces annulations atteindraient encore 10,6 milliards d'euros .

En particulier, le programme 358 , créé pour permettre la prise de participations de l'État dans des entreprises touchées par la crise sanitaire, serait encore doté de 3,4 milliards d'euros, ce qui ne peut s'expliquer que par un projet d'investissement important d'ici à la fin de l'année.

Les crédits restants sur la prise en charge du chômage partiel (1,4 milliard d'euros) et le fonds de solidarité (3,6 milliards d'euros) seront probablement reportés sur 2022 et consommés très partiellement pour verser des reliquats de droits aux bénéficiaires ( cf. infra ).

b) La dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles est en majeure partie annulée sur la mission « Crédits non répartis »

Sur la mission « Crédits non répartis » , le programme 551 « Dépenses accidentelles et imprévisibles » fait l'objet d'une annulation de crédits à hauteur de 1,5 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, ce qui correspond aux crédits exceptionnels ouverts sur ce programme par la première loi de finances rectificative du 19 juillet dernier.

Le programme conserve les crédits ouverts en loi de finances initiale, soit 424 millions d'euros en autorisations d'engagement et 124 millions d'euros en crédits de paiement.

Les crédits du programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques » sont annulés à hauteur de 101,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, ce qui correspond à près de la moitié de l'enveloppe initiale. Cette provision est couramment ajustée en collectif budgétaire de fin d'année en fonction des besoins résultants des négociations salariales en cours d'année.

c) La charge de la dette, sur la mission « Engagements financiers de l'État » est revue à la baisse, ainsi que les prévisions d'appels en garantie de l'État

La mission « Engagements financiers de l'État » fait l'objet d'annulations nettes à hauteur de 1,2 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Un montant de 438 millions d'euros de crédits est annulé sur le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État, comme c'est souvent le cas en loi de finances rectificative de fin d'année, du fait d'une estimation initiale de taux d'intérêt plus élevée que celle qui s'est vérifiée .

Cette annulation réduit la révision à la hausse de 1,9 milliard d'euros à laquelle avait procédé la loi de finances rectificative du 19 juillet dernier sur ce programme, prenant en compte une révision à la hausse de la prévision d'inflation, qui accroît la provision pour charge d'indexation des obligations assimilables du Trésor (OAT) indexées. Les prévisions de charge de la dette en loi de finances initiale, qui étaient construites sur une hypothèse de 0,6 % en moyenne pour l'inflation en France et 0,8 % pour la zone euro, avaient été respectivement rehaussées à 1,4 % et 1,6 % en loi de finances rectificative.

D'autre part, l'annulation de 741,1 millions d'euros de crédits dont fait l'objet le programme 114 « Appels en garantie » était à attendre .

La prévision au titre des appels en garantie de l'État sur les prêts garantis par l'État (PGE) était extrêmement conservatrices (1,27 milliard d'euros). Par la suite, le taux de sinistralité a été nettement révisé à la baisse (autour de 3,7 %) et il n'y a pas eu de défaillances massives des entreprises ayant eu recours à un PGE. Au contraire, les dernières données de la Banque de France sont plutôt rassurantes : d'après une analyse des bilans annuels de plus de 244 000 entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 750 000 euros, 14 %, dont 3 % ayant eu recours à un PGE, sont jugées « sensibles », puisqu'elles ont connu à la fois une hausse de leur endettement financier brut et une baisse de leur trésorerie. La moitié dispose cependant d'une cotation élevée auprès de la Banque de France, les 7 % restantes étant plutôt des petites entreprises, dans le secteur de l'hôtellerie. Le rythme mensuel de décaissement des crédits au titre des appels en garantie est d'environ 20 millions d'euros, soit bien moins que la prévision initiale (plus de 100 millions d'euros).

La prévision était également très prudente pour les appels en garantie de l'État au titre du Fonds paneuropéen de garantie mis en place par la Banque européenne d'investissement (BEI). D'une part, le taux de sinistralité a été fixé dès l'origine a un niveau très élevé (près de 33 % en brut et 20 % en net, soit respectivement 1,6 milliard d'euros et 940 millions d'euros pour la France au titre de sa contribution), ce qui conduit à une prévision élevée et plus que prudente par rapport au taux de sinistralité prévu pour d'autres garanties, comme les PGE par exemple, et, d'autre part, le Fonds s'est mis en place un peu plus tard que prévu, décalant de fait le risque d'appels en garantie. Enfin, il faut rappeler que la France est le troisième bénéficiaire, pour ses PME, de ce Fonds.

d) Les projets de la mission « Transformation et fonction publiques » sont encore une fois sous-exécutés

Cette mission fait l'objet encore une fois d'annulations de crédits importantes par rapport à sa taille , à hauteur de 22,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et 171,7 millions d'euros en crédits de paiement, soit respectivement 7,0 % et 24,8 % des crédits ouverts en loi de finances initiale, ce qui constitue la plus forte annulation de crédits de paiement en proportion sur le budget général (hors crédits non répartis et plan d'urgence).

L'annulation de 147,4 millions d'euros sur le programme 348 « Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants » est désormais « traditionnelle » en loi de finances rectificative de fin d'année. Elle s'explique par plusieurs raisons : l'une est citée par le Gouvernement, à savoir l'impact de la crise sanitaire sur le calendrier des travaux immobiliers, avec également des difficultés d'approvisionnement et de main d'oeuvre ; l'autre est que la signature même des marchés publics a pris du retard sur près de la moitié des cités administratives.

En revanche, l'annulation de crédits sur le programme 349 « Fonds pour la transformation de l'action publique », d'un montant de 1,3 million d'euros seulement en crédits de paiement, soit moins de 1 % des crédits ouverts, est bien moindre que les années précédentes (où la moitié environ des crédits étaient annulés), ce qui traduit une programmation plus sincère des crédits du fonds.

e) Les projets de l'administration pénitentiaire font l'objet d'une importante annulation d'autorisations d'engagement sur la mission « Justice »

L a mission « Justice » concentre à elle seule près de 20 % des annulations d'autorisations d'engagement prévues par le présent projet de loi de finances rectificative, voire la moitié si l'on ne compte que les crédits des ministères (hors crédits évaluatifs, crédits non répartis et plan d'urgence). En effet, 1,7 milliard d'euros d'autorisations d'engagement sont annulées sur l'ensemble de la mission . Les crédits de paiement sont modifiés à la marge, avec l'annulation de 159 millions d'euros.

La quasi-totalité de ces annulations repose sur le programme 107 « Administration pénitentiaire » , pour 1,6 milliard d'euros , dont 5,5 millions d'euros de dépenses de personnel.

D'après les informations transmises au rapporteur général, les annulations d'autorisations d'engagement, hors dépenses de personnel, pour l'administration pénitentiaire résultent de :

- l'annulation au titre de la réserve de précaution, à hauteur de 113 millions d'euros ;

- le décalage en 2022 du besoin d'autorisations d'engagement lié au renouvellement des marchés de gestion déléguée, pour un montant de 1,5 milliard d'euros environ ;

- des économies attendues d'une gestion dite « optimisée » des achats publics, correspondant à 18,4 millions d'euros .

Ainsi, le décalage de 2021 à 2022 du renouvellement des marchés de gestion déléguée des établissements pénitentiaires concentre l'essentiel des annulations . Pour mémoire, la gestion des établissements pénitentiaires peut être opérée en gestion déléguée, en gestion publique, ou via un partenariat public-privé (PPP). S'agissant de la gestion déléguée, plusieurs générations de marchés de gestion déléguée (MGD) se sont succédé depuis 1989. La première tranche de la génération actuelle a été notifiée en septembre 2015 (MGD 2015) pour une durée de six ans . Les MGD 2015 ont été scindés en trois marchés (A, B, C) selon leurs caractéristiques et les établissements pénitentiaires concernés.

D'après les informations transmises au rapporteur général, le délai supplémentaire pour le renouvellement de ces marchés est nécessaire afin de mieux évaluer les coûts de ceux-ci et permet d'intégrer les nouveaux établissements pénitentiaires qui devraient prochainement être opérationnels . Ce décalage est rendu possible par une clause de prorogation contenue dans les marchés afférents. Il se traduit par une budgétisation par le projet de loi de finances pour 2022 des autorisations d'engagement initialement prévues par la loi de finances initiale pour 2021 . Par conséquent, en 2022, une enveloppe de 1,7 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 217 millions d'euros en crédits de paiement est prévue pour les MGD 2015.

Cette budgétisation figure bien dans le projet annuel de performances de la mission « Justice » annexé au projet de loi de finances pour 2022, qui précise qu'« en 2022, les contrats MGD 2015 seront renouvelés et auront un périmètre élargi aux établissements et structures mises en service entre 2022 et 2024 (...). À noter que le renouvellement de ces marchés, initialement prévu fin 2021, justifiant l'inscription des AE en LFI 2021, a été reporté au premier semestre 2022 » 18 ( * ) .

D'autres programmes de la mission « Justice » sont concernés par des annulations de crédits, notamment en raison des ajustements à la baisse des dépenses immobilières :

- 57,8 millions d'euros en autorisations d'engagement et 76,7 millions d'euros en crédits de paiement sont annulés sur le programme « Justice judiciaire » , à la suite de la réduction des dépenses immobilières et des efforts de pilotage sur les frais de justice . Il reviendra au ministère de la justice de poursuivre cet effort de maîtrise des frais de justice en 2022 ;

- 2,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement de dépenses de personnel sont annulés sur le programme « Protection judiciaire de la jeunesse » , ainsi que 19,8 millions d'euros en autorisations d'engagement et 21,4 millions d'euros en crédits de paiement hors titre 2 en raison des « marges identifiées en gestion sur les dépenses d'investissement immobilier liés en particulier à la crise sanitaire et par les économies attendues d'une gestion optimisée des achats publics » 19 ( * ) . Le décalage dans le temps des investissements immobiliers sur ce programme se traduit notamment par le report de l'ouverture de nouveaux centres éducatifs fermés (CEF) ;

- 0,4 million d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement de dépenses de personnel pour le programme dédié au Conseil supérieur de la magistrature , ainsi que l'annulation de la réserve de précaution pour les crédits hors titre 2.

Enfin, la mission « Justice » est également marquée par une ouverture, plus marginale de crédits à hauteur de 24 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement . Le Gouvernement justifie cette ouverture par des dépenses de personnel au bénéfice des programmes suivants :

- le programme « Justice judiciaire » , à hauteur de 18,5 millions d'euros pour financer des renforts en juridictions dans le cadre de la justice de proximité ;

- le programme « Conduite et pilotage de la politique de justice » , à hauteur de 5,8 millions d'euros, en raison du « dynamisme inattendu de la masse salariale », lié notamment au recrutement anticipé dès 2020 de renforts au titre de la justice de proximité. Le rapporteur général regrette que cette tension sur les dépenses de personnel n'ait pas fait l'objet d'une meilleure anticipation de la part du ministère de la justice .

f) Les autres missions font l'objet d'annulations principalement sur des crédits mis en réserve ou sous-consommés

Sur la mission « Outre-mer » , des annulations de 179,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 165,2 millions d'euros en crédits de paiement portent principalement sur des crédits mis en réserve et sur une moindre dépense concernant les compensations d'exonérations de charges sociales patronales, ainsi que les dispositifs de formation dues aux confinements locaux.

Les autres missions font l'objet d'annulations nettes de crédits d'un montant moins élevé, portant dans la plupart des cas sur la réserve de précaution.

S'agissant de la mission « Recherche et enseignement supérieur » , l'annulation sur les crédits mis en réserve dans certains programmes est partiellement compensée par, notamment :

- des ouvertures de crédits de 31,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et 32,3 millions d'euros en crédits de paiement sur le programme 231 « Vie étudiante » qui s'ajoutent aux crédits mis en réserve (105 millions d'euros) pour financer les bourses sur critères sociaux revalorisée à la rentrée 2021 et la mise en oeuvre de l'indemnité inflation de 100 euros versée en décembre aux étudiants boursiers ;

- un financement complémentaire de 39,5 millions d'euros pour compenser aux universités la mise en place de mesures de soutien aux étudiants du fait de la crise sanitaire.

S'agissant de la mission « Enseignement scolaire » , des annulations de 75 millions d'euros de crédits, en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, portent sur des crédits mis en réserve et sur de moindres consommations liées notamment à l'impact de la crise sanitaire sur l'activité des établissements. 8,1 millions d'euros sont toutefois ouverts pour l'enseignement agricole :

- 2,0 millions d'euros pour renforcer les équipes d'assistants d'éducation particulièrement impactées par le contexte de la crise sanitaire et la mise en oeuvre des campagnes de vaccination ;

- 6,1 millions d'euros pour l'aide aux établissements en difficultés financières. La situation financière des établissements publics a été fragilisée par la crise sanitaire, du fait notamment de la perte de recettes des centres d'exploitations agricoles (EA) et ateliers technologiques, du surcoût pour les centres de formation professionnelle de promotion agricole (CFPPA) du fait de l'absence de prise en charge du chômage partiel des agents contractuels de droit public sur le budget des établissements et des coûts engagés par les établissements pour assurer la continuité pédagogique.

D'après les informations transmises au rapporteur spécial, 33 établissements sur 173 étaient en situation de crise financière en 2020, soit 3 de moins qu'en 2019. Les établissements ayant une situation globalement saine (deux dernières catégories) représentent 98 établissements.


* 9 Introduction de l'exposé général des motifs du projet de loi de finances rectificative déposé le 3 novembre 2021.

* 10 Voir le tome 1 du rapport de Jean-François Husson, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances du Sénat sur le projet de loi de finances pour 2022.

* 11 Amendement II-2205 , déposé par le Gouvernement le 30 octobre 2021 sur l'article 20 (état B) et adopté le 4 novembre 2021.

* 12 Exposé général des motifs du projet de loi de finances rectificative.

* 13 Mesures de soutien aux agriculteurs sinistrés par les épisodes de gel , communiqué du Gouvernement, 17 avril 2021.

* 14 60 millions d'euros pour la filière bovine , communiqué de presse, 8 mars 2021.

* 15 Le programme 206 porte les indemnisations pour les coûts sanitaires tandis que le programme 149 porte les indemnisations des conséquences économiques des mesures sanitaires.

* 16 Grippe aviaire : près de 90 millions d'euros débloqués pour indemniser les pertes économiques , Le Monde, 12 mai 2021.

* 17 FranceAgriMer, Jaunisse de la betterave sucrière : une aide pour les producteurs , 9 mars 2021.

* 18 Projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2022, p. 140.

* 19 Projet de loi de finances rectificative pour 2021.

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