EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE

Article unique
Ouverture de casinos dans les communes dotées d'un site historique du Cadre noir ou d'un haras national

L'article unique de la proposition de loi vise à permettre aux communes, en particulier Saumur et Arnac-Pompadour, d'accueillir un casino si elles sont sites historiques du Cadre noir ou des haras nationaux et ont organisé au moins dix événements hippiques annuels au cours des cinq dernières années.

Sur proposition du rapporteur, la commission a souhaité s'assurer que les communes visées par les auteurs de la proposition de loi satisfont aux critères pertinents justifiant l'ouverture d'un casino sur leur territoire d'une part, et, d'autre part permettre aux communes dotées des infrastructures équestres similaires à celles de Saumur et d'Arnac-Pompadour, de pouvoir, le cas échéant, accueillir un casino.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

1. L'ouverture d'un casino municipal est par principe prohibée mais des dérogations limitatives sont prévues par la loi et soumises à un mécanisme de double autorisation

1.1. Un principe de prohibition des jeux d'argent et de hasard qui connait des dérogations multiples

a) Depuis près de deux siècles l'État encadre de manière stricte les jeux d'argent et de hasard

Le principe général d'interdiction des jeux de hasard, issu de la loi du 21 mars 1836 portant prohibition des loteries, est actuellement repris à l'article L. 320-1 du code de la sécurité intérieure qui dispose que « les jeux d'argent et de hasard sont prohibés »18(*). La violation de cette interdiction est punie de trois ans d'emprisonnement et de 90 000 euros d'amende19(*).

Cette interdiction est justifiée par des motifs d'intérêt général que sont la prévention des « risques d'atteinte à l'ordre public et à l'ordre social, notamment en matière de protection de la santé et des mineurs »20(*). Plus spécifiquement, en limitant et en encadrant l'offre et la consommation des jeux, l'État entend notamment prévenir le jeu excessif ou pathologique, assurer l'intégrité, la fiabilité et la transparence des opérations de jeu, prévenir les activités frauduleuses ou criminelles ainsi que le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Il entend également veiller à l'équilibre économique des différentes filières du jeu21(*).

La régulation de l'ensemble des jeux d'argent et de hasard est notamment assurée par l'Autorité nationale des jeux. Toutefois, celle des casinos relève des services du ministère de l'intérieur, en particulier le service central des courses et jeux et la direction des libertés publiques et des affaires juridiques.

L'autorité nationale des jeux (ANJ)

Depuis juin 202022(*), cette autorité administrative indépendante, qui remplace l'autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL), met en oeuvre la politique de l'État en matière de régulation des jeux d'argent et de hasard. Elle régule les jeux et paris autorisés en ligne, en points de vente et dans les hippodromes, contrôle la politique du jeu responsable des casinos, s'assure que les opérateurs autorisés à exercer sur le marché français respectent leurs obligations, protège les joueurs des risques de jeu excessif, garantit une offre de jeu récréative et lutte contre l'offre illégale et les pratiques frauduleuses.

b) L'exploitation des casinos fait partie des exceptions anciennes au principe de prohibition mais son étendue a peu évolué au cours des dernières années

Depuis la loi du 15 juin 1907, l'ouverture de casinos est autorisée dans les sites thermaux. Ce texte a également défini les critères d'implantation d'un casino, les modalités et les procédures d'exploitation. La loi n° 87-306 du 5 mai 1987 modifiant certaines dispositions relatives aux casinos autorisés a permis l'installation de machines à sous.

Actuellement, les seules catégories de communes qui peuvent accueillir un casino, de manière dérogatoire, sont listées limitativement à l'article L. 321-1 du code de la sécurité intérieure. Il s'agit :

- des communes classées stations balnéaires, thermales ou climatiques antérieurement au 3 mars 2009 ;

- des communes classées stations de tourisme qui constituent la ville principalement d'une agglomération de plus de 500 000 habitants et participent pour plus de 40 % au fonctionnement d'un centre dramatique nationale ou d'une scène nationale, d'un orchestre national et d'un théâtre d'opéra présentant en saison une activité régulière d'au moins 20 représentations lyriques23(*) ;

- des villes ou stations classées de tourisme mentionnées à l'article L. 161-5 du code du tourisme ;

- des communes dans lesquelles un casino est régulièrement exploité au 3 mars 2009 ;

- des communes qui, étant en cours de classement comme station balnéaire, thermale ou climatique avant le 14 avril 2006 sont classées stations de tourisme au sens du code du tourisme avant le 3 mars 2014.

La France compte actuellement 203 casinos, répartis dans 196 communes situées dans 63 départements du littoral pour l'essentiel. Certaines communes accueillent plusieurs casinos : Aix-les-Bains, Antibes, Cannes, Nice, les Sables d'Olonne et le Touquet. Les casinos français représentent près de 40 % du parc européen.

Une particularité existe pour la ville de Paris puisqu'en vertu de l'article 82 de la loi du 31 juillet 1920 portant fixation du budget général, toujours en vigueur et non codifié, il est interdit d'exploiter un casino à moins de 100 kilomètres de Paris. Néanmoins, l'article 24 de la loi du 31 mars 1931 a introduit une dérogation au profit des « casinos des stations thermales légalement reconnus », au seul bénéfice de la commune d'Enghien-les-Bains.

Toutefois, les cercles de jeux24(*) sont autorisés à Paris25(*) depuis le début du XXe siècle. La capitale ne comptait, avant la loi n° 2017-257 du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain, plus que deux établissements26(*). Cette réforme a permis de manière expérimentale, à compter du 1er janvier 2018 et pour une durée de trois ans initialement, l'installation à Paris de « clubs de jeux » où sont pratiqués des jeux de cercle ou de contrepartie27(*). Cette expérimentation a déjà été prolongée à deux reprises, passant de cinq à sept ans, pour s'achever au 31 décembre 202428(*).

 
 
 

Casinos en France

Communes d'implantation

Clubs de jeux à Paris

1.2. L'ouverture d'un casino municipal nécessite une double autorisation à la fois municipale et ministérielle

a) Un préalable nécessaire : le conseil municipal doit donner son autorisation à l'implantation d'un casino dans la commune

Les communes satisfaisant aux critères légaux permettant l'implantation d'un casino « ne peuvent en bénéficier que sur l'avis conforme du conseil municipal »29(*). Outre le principe de l'installation d'un casino dans la commune, la délibération communale doit également porter sur le contrat administratif liant la société commerciale souhaitant exploiter le casino et la commune. Ce contrat doit comprendre un cahier des charges reprenant les obligations qui seront imposées au futur casinotier.

La jurisprudence administrative estime, de manière constante, qu'il s'agit d'une délégation de service public30(*). Cette qualification a notamment été retenue dans la mesure où le casino regroupe trois activités - l'hôtellerie-restauration, les spectacles dans une salle dédiée et les jeux d'argent et de hasard proposés dans un espace dédié - qui participent au développement économique de la commune concernée. Les règles relatives à la délégation de service public prévues aux articles L. 1411-1 et suivants du code général des collectivités territoriales ont donc vocation à s'appliquer31(*).

Une des particularités de cette délégation de service public, qui ne peut excéder une durée de 20 ans, réside notamment dans les différents prélèvements opérés au bénéfice des communes sur le produit brut des jeux (PBJ)32(*) des casinos qu'elles accueillent. D'une part, la commune bénéficie d'un revenu fiscal direct représentant entre 0 et 15 % du PBJ, ce taux étant négocié et fixé par le cahier des charges qui accompagne le contrat de délégation de service public33(*). D'autre part, elle perçoit un reversement de 10 % du prélèvement opéré par l'État sur le PBJ34(*).

Entre 2019 et 2021, le PBJ des casinos a diminué de 55 %, passant de 2,4 milliards d'euros en 2019 à 1,1 milliard en 2021. Le nombre annuel d'entrées dans les casinos a également baissé fortement puisqu'il était de 33 millions de 2017 à 2019 pour atteindre seulement 13 millions en 2021. Cependant, pour l'année ludique 2021-2022, une nette reprise de l'activité a engendré un PBJ dont le montant dépasse celui qu'il avait atteint avant la crise sanitaire, pour s'établir à 2,5 milliards d'euros. Le casino le plus important a versé 19 millions d'euros à sa commune d'accueil tandis que le plus petit établissement a versé 832 euros. Le prélèvement médian sur le PBJ est de 789 595 euros.

 
 
 

Produit brut des jeux issus des casinos en 2022

D'euros prélevés sur ce PBJ au profit des collectivités territoriales

D'euros issus du PBJ ont été perçus, en moyenne, par chaque commune disposant d'un casino

Source : direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur

En outre, il est prévu une « participation/redevance spectacle » qui vise à financer l'organisation d'événements culturels ou artistiques au sein de la commune. L'objectif de cette contribution financière est de « participer, conformément à la justification initiale invoquée pour leur création et leur implantation dans les communes, à la vie culturelle et donc touristique locale »35(*). Il a été indiqué au rapporteur que le montant de cette participation est un élément important de négociation entre la commune et le casinotier dans la mesure où elle peut atteindre, dans certains cas, plusieurs millions d'euros. Néanmoins, la Cour des comptes constate depuis une vingtaine d'années que certaines communes rencontrent des difficultés pour défendre au mieux leurs intérêts économiques face aux casinotiers.

Extraits du rapport public annuel 2021 de la Cour des comptes :
« La présence d'un casino sur un territoire : une rente de situation fragilisée »

Concernant la négociation des communes avec les casinotiers sur les aspects économiques, la Cour des comptes note que « Les communes appréhendent la présence d'un casino sur leur territoire comme une rente de situation, sans risque associé et qui leur procure des ressources pérennes sans qu'elles supportent de charges. [...] Dans les relations avec les casinotiers, elles restent relativement passives dans la négociation ainsi que sur l'exécution des contrats de délégation de service, comme la Cour l'avait déjà observé en 2002, ne percevant pas, jusqu'à présent, l'intérêt d'une relation plus équilibrée au bénéfice de leur territoire. [...] Il est donc important de mieux protéger les intérêts de collectivités qui, dans nombre de cas examinés, ne disposent pas de l'expertise juridique nécessaire pour l'élaboration de clauses qui, bien que non précisées aujourd'hui dans le code général des collectivités territoriales, paraissent pourtant essentielles pour ces délégations de service public. »36(*)

b) Une seconde étape essentielle : la délivrance d'une autorisation d'exploitation par le ministère de l'intérieur

L'autorisation de la commune et la conclusion d'un contrat entre cette dernière et le casinotier sont un préalable nécessaire à la demande d'autorisation d'exploitation d'un casino qui sera présentée par la société commerciale au préfet du département d'implantation de l'établissement de jeux37(*). Une enquête administrative est alors diligentée par les services du ministère de l'intérieur.

En outre, le casinotier doit, notamment, compléter sa demande par différentes pièces dont :

- une étude d'impact économique montrant l'existence d'une demande de jeux non satisfaite et permettant de mesurer les conséquences de l'ouverture d'un établissement de jeux sur les casinos voisins existants, ainsi qu'un bilan prévisionnel d'activité sur cinq ans montrant la viabilité du projet ;

- le programme de prévention de l'abus de jeux, comprenant notamment la formation des personnels et les mesures envisagées à l'égard des joueurs38(*).

Le préfet de département sollicité rend un avis qu'il transmet à son ministre de tutelle. La commission consultative des jeux de cercles et de casinos est ensuite saisie pour rendre un avis obligatoire qui ne lie pas le ministre de l'intérieur dans sa décision d'autoriser ou non l'implantation du casino. En effet, ce dernier « conserve un large pouvoir d'appréciation au moment de prendre l'arrêté d'autorisation d'ouverture et d'exploitation d'un casino municipal. Il peut ainsi tenir compte ou non des effets concurrentiels d'un casino par rapport à d'autres structures situées dans des communes voisines39(*) ». Pour autant et sur ce dernier point en particulier, la législation actuelle ne prévoit pas de critères de distance géographique entre casinos. Par ailleurs, la décision du ministre de l'intérieur peut faire l'objet des recours administratifs usuels (gracieux ou contentieux).

2. La proposition de loi : réduire les inégalités territoriales pour l'ouverture des casinos en assurant des retombées économiques aux communes dotées d'une activité équestre pluriséculaire

2.1. La proposition de loi entend permettre à des communes disposant d'une activité équestre pluriséculaire de compléter leur offre touristique et culturelle par l'ouverture d'un casino

La proposition de loi comprend un article unique qui vise à introduire une sixième hypothèse de dérogation au principe d'interdiction générale des jeux d'argent et de hasard qui serait fondée sur l'existence d'une infrastructure et une activité équestre au sein de la commune.

Les auteurs du texte soulignent que les dérogations actuelles ne profitent qu'à certaines zones géographiques déjà dynamiques sur le plan touristique (bords de mer et territoires urbanisés) alors que les territoires ruraux ne disposent pas des mêmes atouts. Ces derniers pourraient ainsi utilement bénéficier de l'ouverture de casinos pour accroitre leur attrait touristique et leurs ressources financières. Les auteurs font également valoir que les communes disposant d'une activité équestre importante sont déjà en lien avec l'univers du jeu et des paris, de sorte que l'ouverture d'un casino viendrait compléter une offre touristique, liée aux jeux d'argent et de hasard, déjà existante.

Le critère proposé par le texte est double en ce qu'il implique, pour la commune, de disposer sur son territoire de « sites historiques du cadre noir et des Haras nationaux », d'une part, et d'avoir organisé « au moins pendant cinq années avant le 1er janvier 2023, au moins 10 événements hippiques au rayonnement national ou international par an », d'autre part. Selon les auteurs de la proposition de loi, seules deux communes seraient concernées par cette nouvelle dérogation : Arnac-Pompadour et Saumur.

Plusieurs initiatives parlementaires sont déjà venues soutenir la création d'un casino dans ces deux communes. En effet, une proposition de loi relativement similaire a été déposée par les sénateurs du Maine-et-Loire Stéphane Piednoir et Catherine Deroche le 3 avril 201940(*). Une autre proposition de loi a été déposée le 29 novembre 2022 par plusieurs députés dont la première signataire est Laetitia Saint-Paul (Maine-et-Loire)41(*). En outre, selon cette élue, le président de la République se serait engagé à ce que Saumur puisse disposer d'un casino sur son territoire d'ici la fin de son second mandat42(*).

L'Institut français du cheval et de l'équitation (IFCE),
fruit de la fusion du Cadre noir de Saumur et des Haras nationaux

Service de l'État créé en 1665, le service des Haras est, à l'origine, conçu comme un « étalonnier de guerre » ayant pour mission de fournir aux armées et
notamment à celle de Napoléon Ier des dépôts d'étalons, véritables réservoirs de
chevaux de guerre. En 1999, le service de l'État, alors appelé service des Haras, des courses et de l'équitation, est transformé en établissement public administratif par le
décret n° 99-556 du 2 juillet 1999. Ce décret précise que les Haras nationaux jouent à
la fois le rôle d'intervenant de terrain (étalonnage, aides à l'élevage) et d'expert de
proximité
, au profit aussi bien des services de l'État que de la filière, avec pour
missions « de développer l'élevage des équidés et les activités liées au cheval en
partenariat notamment avec les organisations socio-professionnelles, les collectivités
locales et les associations
 ».43(*)

Le Cadre noir fait référence aux élèves officiers de cavalerie qui s'installent dans l'école de cavalerie créée à Saumur en 1825, qui a pour objectif de renforcer la formation des troupes à cheval. Le décret n° 72-398 du 16 mai 1972 crée l'École nationale d'équitation (ENE), la rattache au ministère des sports, et précise ses missions qui sont notamment la formation des cadres de l'équitation, l'organisation de sessions au bénéfice de la fédération française d'équitation (FFE) ainsi que le maintien et le rayonnement de l'équitation de tradition française.44(*)

L'IFCE, établissement public à caractère administratif créé par le décret n° 2010-90  du 22 janvier 2010, rassemble les Haras nationaux et du Cadre noir. Il est placé sous la double tutelle du ministère chargé des sports et du ministère chargé de l'agriculture. Son siège social est situé à Saumur mais le site administratif principal est implanté à Arnac-Pompadour. L'IFCE est l'opérateur public unique pour toute la filière équine, de l'élevage du cheval aux sports équestres de haut niveau45(*).

2.2. L'implantation d'un casino est une source potentielle de revenus importante pour le territoire et le soutien de la filière équestre locale

Les auteurs de la proposition de loi soulignent que l'exploitation d'un casino permet de « développer une économie locale » puisque de manière très immédiate, cela créé des emplois au sein de l'établissement de jeux, et que les clients du casino sont également susceptibles de faire vivre les autres opérateurs économiques locaux (hôtels, restaurants, commerces, etc.). Les casinos sont effectivement à l'origine d'importants passages dans les communes d'implantation puisque l'Agence nationale des jeux indique dans son rapport annuel 2022, qu'avant la crise sanitaire, entre 2017 et 2019, les casinos ont comptabilisé 33 millions d'entrées annuelles46(*).

Les auditions des maires des communes de Saumur et Arnac-Pompadour menées par le rapporteur ont mis en exergue de manière concrète les retombées de l'implantation d'un casino dans leur territoire. Saumur espère, par exemple, voir arriver entre 1,5 à 1,6 million de touristes par an d'ici 2026 (contre 1,3 million actuellement). Cette commune table également sur la création de 100 emplois directs ou indirects et des recettes fiscales annuelles de l'ordre de 1 à 1,5 million d'euros.

En outre, tant Saumur qu'Arnac-Pompadour ont mis en avant l'importance de l'arrivée d'un casino dans leur commune dans le but de financer l'activité équestre présente sur leur territoire ou à proximité. C'est le cas de l'hippodrome de Verrie, exploité pour les activités hippiques de Saumur, qui nécessite des investissements importants que l'État n'entend pas réaliser. Le maire d'Arnac-Pompadour estime lui aussi que les revenus dégagés par l'arrivée d'un casino permettraient d'assurer la « sauvegarde de l'attraction touristique équestre » compte tenu du désengagement financier de l'État dans ce domaine.

3. La position de la commission : renforcer l'opérationnalité du dispositif en ciblant mieux les communes susceptibles d'en bénéficier

3.1. La pertinence de permettre aux communes disposant d'une activité équestre pluriséculaire d'accueillir un casino dans leur territoire

Tout en partageant l'intention des auteurs de la proposition de loi de permettre aux communes de Saumur et d'Arnac-Pompadour de pouvoir accueillir un casino sur leur territoire, l'amendement adopté par la commission à l'initiative de son rapporteur vise à assurer l'opérationnalité du dispositif et à étendre, de manière très restreinte, le champ d'application de la proposition de loi.

En premier lieu, la commission a estimé que la rédaction initiale de la proposition de loi ne serait pas pleinement opérationnelle. Celle-ci prévoit en effet une condition cumulative tenant à l'existence du site historique du Cadre noir et d'un haras national sur le territoire d'une même commune. Or, cette condition n'est, dans les faits, remplie ni par Saumur ni par Arnac-Pompadour puisque la première accueille uniquement le site historique du Cadre noir et la seconde, un haras national.

La commission a donc choisi d'étendre le champ de la proposition de loi aux communes qui accueillent le site historique du Cadre noir ou un haras national. Cette extension est toutefois limitée dans la mesure où les Haras nationaux - marque déposée par l'IFCE à l'Institut national de la propriété intellectuelle - sont au nombre de 13 selon les informations publiées par l'IFCE étant précisé que cet établissement est toujours propriétaire de trois d'entre eux, les dix autres haras ayant été acquis par des collectivités territoriales47(*). À cet égard, l'IFCE précise que « la marque  haras national  surtout reconnue localement, continue à être utilisée par l'IFCE quand il est encore propriétaire du site ou par les repreneurs de ces sites emblématiques grâce à un protocole d'utilisation »48(*).

En second lieu, si ces deux communes organisent annuellement de nombreux événements équestres, les événements dits « hippiques » (notion relative aux seules courses hippiques) ont lieu dans les hippodromes se trouvant sur le territoire de communes voisines49(*). La commission a donc retenu le terme « équestre » qui renvoie à l'ensemble des activités relatives au monde du cheval et de l'équitation. Les auditions des maires des communes ciblées par la proposition de loi ont par ailleurs confirmé avoir accueilli, dans leur municipalité, plus d'une dizaine d'événements équestres au cours des cinq dernières années.

Néanmoins, la commission a souhaité maintenir un lien étroit entre la commune, les activités hippiques, équestres et les paris sportifs, en retenant comme critère d'implantation la présence dans la commune du siège d'une société de courses hippiques (association à but non lucratif en charge d'organiser les courses dans un hippodrome).

3.2. Une initiative qui doit permettre de réfléchir à une remise à plat de l'ensemble des critères gouvernant à l'ouverture de casinos

Les informations recueillies par le rapporteur ont mis exergue les difficultés actuelles de financement des activités et infrastructures équestres des communes de Saumur et d'Arnac-Pompadour. La commission a donc fait le choix de répondre à cette situation particulière en leur permettant de pouvoir accueillir prochainement un casino tout en veillant à assurer une égalité de traitement avec les communes disposant d'infrastructures similaires sans déséquilibrer la filière des casinos sur l'ensemble du territoire. Elle a également été sensible aux enjeux de santé publique et d'ordre public qui gouvernent la régulation des jeux d'argent et de hasard auxquels appartiennent les casinos.

Néanmoins, il ressort des auditions des syndicats de casinos, de l'association nationale des élus des territoires touristiques et des services du ministère de l'intérieur, menées par le rapporteur, qu'il apparait nécessaire d'envisager aujourd'hui une réflexion plus globale sur les critères permettant l'installation d'un casino dans une commune. À cet égard, la fin de l'expérimentation relative aux clubs de jeux parisiens au 31 décembre 2024, doit permettre d'engager une réflexion afin d'opérer une clarification et une remise à plat générale des règles gouvernant l'installation des casinos en France, dans le cadre d'un véhicule législatif adapté.

La commission a adopté l'article unique ainsi modifié.

*

* *

La commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.


* 18 Texte issu de l'ordonnance n° 2019-1015 du 2 octobre 2019 réformant la régulation des jeux d'argent et de hasard.

* 19 Les articles L. 324-3 et L. 324-4 du CSI incriminent le fait d'émettre ou de distribuer des supports de jeux d'argent et de hasard prohibés ou de concourir à cette émission ou à cette distribution ainsi que la mise à disposition de tiers, l'installation et l'exploitation de ces appareils sur la voie publique et ses dépendances, dans des lieux publics ou ouverts au public et dans les dépendances, mêmes privées, de ces lieux publics ainsi que l'exploitation de ces appareils ou leur mise à disposition de tiers par une personne privée, physique ou morale, dans des lieux privés.

* 20 Article L. 320-2 du CSI.

* 21 Article L. 320-3 du CSI.

* 22 Créée par le 15° de l'article 12 de l'ordonnance du 2 octobre 2019 réformant la régulation des jeux d'argent et de hasard.

* 23 Dérogation introduite par l'article 57 de la loi n° 88-13 du 5 janvier 1988 d'amélioration de la décentralisation, dit « amendement Chaban-Delmas », qui ciblait la ville de Bordeaux.

* 24 A l'inverse d'un casino, qui est une société commerciale, un cercle de jeux est une association sans but lucratif et se distingue aussi des casinos en ce que l'accès à l'établissement se fait après le paiement d'une cotisation d'adhésion à l'association, que la contrepartie de certains jeux est assurée par des joueurs ne prenant pas part au jeu (ils sont appelés « banquiers »), qu'il n'y a pas de jeux de contrepartie ou de machines à sous et que la commune d'accueil n'est pas liée par une délégation de service public à cet établissement.

* 25 Articles 47 et 49 de la loi de finances du 30 juin 1923 et décret n° 47-798 du 5 mai 1947.

* 26 Le Club anglais, créé en 1918, et le Cercle Clichy-Montmartre, créé en 1947.

* 27 Voir les IV, V et VIII de l'article 34 de la loi n° 2017-257 du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain.

* 28 Articles 219 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 et 148 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

* 29 Article L. 321-2 du code de la sécurité intérieure.

* 30 Le Conseil d'État estime que la convention passée entre la commune et le casino a le caractère de délégation de service public même si l'activité de jeux ne revêt pas, en soi, le caractère d'un service public (CE, 25 mars 1966, n° 46504, Ville de Royan ; CE, 19 mars 2012, Partouche, n° 341562).

* 31 C'est également ce que rappelle l'article 3 de l'arrêté du 14 mai 2007 relatif à la réglementation des jeux dans les casinos, NOR : INTD0754510A.

* 32 Le produit brut des jeux se définit comme la différence entre le montant des mises initiales des joueurs et les gains versés par le casino sur leurs différents jeux. Ce montant représente à la fois ce qui reste aux opérateurs après redistribution des gains et la somme que les joueurs ont effectivement dépensé, c'est-à-dire perdue. En d'autres termes, il s'agit du chiffre d'affaires du casino.

* 33 Article L. 2333-54 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

* 34 Article L. 2333-55 du CGCT.

* 35 Jean-Baptiste Vila, Le droit de la régulation des jeux d'argent, LGDJ, août 2020, p. 171.

* 36 Rapport disponible à l'adresse suivante : https://www.ccomptes.fr/fr/documents/55053.

* 37 En effet l'article L. 321-2 du CSI dispose que « Les autorisations sont accordées par le ministre de l'intérieur, après enquête, et en considération d'un cahier des charges établi par le conseil municipal et approuvé par le ministre de l'intérieur. »

* 38 Article 6 de l'arrêté du 14 mai 2007 cité supra.

* 39 Jean-Baptiste Vila, op. cit., p. 181.

* 40 Proposition de loi n° 430 (2018-2019) visant à étendre le périmètre d'implantation des casinos aux communes comportant un élément de patrimoine singulier, déposée par Stéphane Piednoir et Catherine Deroche au Sénat le 3 avril 2019.

* 41 Proposition de loi n° 552 (XVIème lég.) visant à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos, déposée par Laetitia Saint-Paul à l'Assemblée nationale le 29 novembre 2022.

* 42 « Saumur aura son casino pendant ce quinquennat, l'engagement d'Emmanuel Macron », Ouest France, article publié le 23 décembre 2022, disponible à l'adresse suivante : https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/saumur-49400/saumur-aura-son-casino-pendant-ce-quinquennat-l-engagement-d-emmanuel-macron-5813440c-821e-11ed-b3eb-6d22061597a4.

* 43 Extrait du rapport d'information n° 64 fait au nom de la commission des finances du Sénat sur l'établissement public « les Haras nationaux », par Joël Bourdin, 9 novembre 2006, p. 9, disponible à l'adresse suivante : https://www.senat.fr/rap/r06-064/r06-0641.pdf.

* 44 Site Internet de l'IFCE consultable à cette adresse : https://equipedia.ifce.fr/economie-et-filiere/organisation/organismes-et-filiere-francaise/ifce.

* 45 Idem.

* 46 Analyse du marché des jeux d'argent pour l'année 2021, agence nationale des jeux, p. 15, disponible à l'adresse suivante :
https://anj.fr/sites/default/files/2022-04/ANJ_Rapport_e%CC%81co_2021.pdf.

* 47 Haras national de Saint Lô, haras national de Lamballe, haras national du Pin, haras national d'Hennebont, haras national du Lion d'Angers, haras national de la Roche-sur-Yon, haras national de Pompadour, haras national de Villeneuve-sur-Lot, haras national d'Aurillac, haras national de Pau-Gelos, haras national d'Uzès, haras national de Rosières aux Salines et haras national de Cluny - liste établie selon le site Internet de l'IFCE consulté le 8 mai 2023 à l'adresse suivante : https://www.ifce.fr/haras-nationaux/nos-sites/.

* 48 Site Internet de l'IFCE consultable à cette adresse : https://equipedia.ifce.fr/economie-et-filiere/organisation/organismes-et-filiere-francaise/ifce.

* 49 L'hippodrome de Verrie pour la commune de Saumur et l'hippodrome de Saint-Sornin-Lalops pour la commune d'Arnac-Pompadour.