II. UN EXAMEN QUI INTERVIENT DANS LE CONTEXTE DE RÉFORME DU SYSTÈME DE BOURSES SUR CRITÈRES SOCIAUX DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

A. LES BOURSES SUR CRITÈRES SOCIAUX : UN SYSTÈME TRÈS DÉCRIÉ, POUR LEQUEL LE SÉNAT A APPELÉ EN 2021 À UNE RÉFORME STRUCTURELLE

Dans le cadre de ses travaux menés en 2021, la mission d'information du Sénat sur la condition de la vie étudiante en France3(*), rapportée par le président de la commission, Laurent Lafon, pointait les lacunes et les failles du système de bourses sur critères sociaux de l'enseignement supérieur, parmi lesquelles : les effets de seuil liés à l'architecture en échelons, excluant toute une partie des étudiants, notamment ceux issus des classes moyennes ; le montant des bourses ne permettant pas de financer l'ensemble des aspects de la vie étudiante ; la prévalence accordée dans les critères d'éligibilité au niveau de revenus des parents ; les disparités de traitement entre les étudiants selon leur ministère de rattachement.

Face à ce constat sévère, mais faisant l'objet d'un diagnostic partagé par l'ensemble des acteurs du secteur, la mission d'information appelait à une refonte globale du système actuel, articulée autour des volets suivants : la simplification et la restructuration de l'architecture en échelons pour lisser les effets de seuil, l'étude de l'élargissement du périmètre de l'échelon 0, l'harmonisation de la gestion des bourses entre les différents départements ministériels, la réorganisation plus rigoureuse de leur socle réglementaire.

B. LE PROJET DE RÉFORME EN COURS DU GOUVERNEMENT

Le 29 mars 2023, la ministre de l'enseignement supérieur a présenté « l'acte Ier de la réforme des bourses », laquelle avait été annoncée par le Président de la République le 19 janvier 2021, lors d'un déplacement à l'Université de Paris-Saclay.

Cette première étape de la réforme, chiffrée par le ministère à 500 millions d'euros4(*), est l'aboutissement d'un premier round de concertation sur la vie étudiante, qui a rendu ses conclusions à la fin de l'année 2022.

Elle est composée des mesures « paramétriques » suivantes :

· la revalorisation de 6 % des barèmes de revenus des parents, critère principal pour se voir affecter une bourse. Cette révision du barème entraîne deux conséquences : l'entrée de 35 000 nouveaux étudiants dans le système de bourse et le basculement d'un boursier sur cinq dans l'échelon supérieur ;

· l'augmentation du montant des bourses de 37 euros par mois (soit 370 euros par an), quel que soit l'échelon. Cette revalorisation représente une augmentation de + 34 % pour le premier échelon et une augmentation à hauteur de l'inflation (+ 6,2 %) pour le dernier échelon ;

· la neutralisation des effets de seuil5(*), le ministère ayant assuré qu'aucun étudiant ne verra sa bourse diminuée d'un montant supérieur à l'augmentation des revenus de ses parents. À la rentrée 2023, il y aura bien toujours des échelons, mais dans le cadre de la deuxième partie de la réforme, le ministère s'engage à les supprimer « de façon pérenne ».

La concertation sur la deuxième étape de la réforme des bourses, qui se veut systémique, est en cours avec les organisations étudiantes représentatives. Celle-ci est centrée sur quatre thématiques : le revenu étudiant, l'emploi étudiant, la gestion du temps et la réussite. Son entrée en vigueur est prévue pour la rentrée 2024, voire 2025 selon le périmètre retenu.

Lors d'une audition qui s'est tenue début mai à l'Assemblée nationale, la ministre a précisé que ses services travaillaient à une intégration du nouveau modèle de bourses envisagé au sein du chantier dit de « solidarité à la source », qui ambitionne de simplifier et d'harmoniser le versement de l'ensemble des aides sociales.


* 3 Rapport précité.

* 4 Les 500 millions d'euros annoncés pour ce premier « paquet » correspondent à un budget en année pleine. Au total, l'enveloppe prévue pour la revalorisation du barème et l'augmentation du montant des bourses s'élève à 430 millions d'euros pour 2024 et à environ 200 millions d'euros pour 2023 correspondant aux quatre derniers mois de l'année. L'enveloppe de 2,3 milliards d'euros annuels dédiée aux bourses sur critères sociaux serait ainsi en hausse de 20 %. Le budget exact dépendra toutefois du nombre de boursiers constatés sur l'année universitaire 2023-2024. Par ailleurs, cette enveloppe bénéficiera aussi aux étudiants des autres ministères : entre 10 et 11 % des boursiers étudient en effet dans des établissements qui relèvent d'une autre tutelle ministérielle que celle du MESR.

* 5 Une hausse, même légère, des revenus parentaux peut en effet entraîner le basculement d'un étudiant à l'échelon inférieur, et donc une baisse conséquente de ses ressources.

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