N° 84

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 novembre 2023

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi de financement
de la sécurité sociale, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale
en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour
2024,

Par Mme Élisabeth DOINEAU,

Rapporteure générale,

Mmes Corinne IMBERT, Pascale GRUNY, M. Olivier HENNO,
Mmes Marie-Pierre RICHER et Chantal DESEYNE,

Rapporteures et Rapporteurs

Sénatrices et Sénateurs

Tome II

Examen des articles

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Mouiller, président ; Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale ; Mme Pascale Gruny, M. Jean Sol, Mme Annie Le Houerou, MM. Bernard Jomier, Olivier Henno, Xavier Iacovelli, Mmes Cathy Apourceau-Poly, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge, vice-présidents ; Mmes Viviane Malet, Annick Petrus, Corinne Imbert, Corinne Féret, Jocelyne Guidez, secrétaires ; Mmes Marie-Do Aeschlimann, Christine Bonfanti-Dossat, Corinne Bourcier, Céline Brulin, M. Laurent Burgoa, Mmes Marion Canalès, Maryse Carrère, Catherine Conconne, Patricia Demas, Chantal Deseyne, Brigitte Devésa, M. Jean-Luc Fichet, Mme Frédérique Gerbaud, M. Khalifé Khalifé, Mmes Florence Lassarade, Marie-Claude Lermytte, Monique Lubin, Brigitte Micouleau, M. Alain Milon, Mmes Laurence Muller-Bronn, Solanges Nadille, Anne-Marie Nédélec, Guylène Pantel, M. François Patriat, Mmes Émilienne Poumirol, Frédérique Puissat, Marie-Pierre Richer, Anne-Sophie Romagny, Laurence Rossignol, Silvana Silvani, Nadia Sollogoub, Anne Souyris, MM. Dominique Théophile, Jean-Marie Vanlerenberghe.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) :

1682, 1784, 1785 et T.A. 176

Sénat :

77 et 80 (2023-2024)

EXAMEN DES ARTICLES

Article liminaire

Cet article présente, pour l'exercice en cours et pour l'année à venir, l'état des prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale.

Il a été supprimé par l'Assemblée nationale, bien qu'il s'agisse d'une disposition obligatoire des LFSS.

La commission propose de rétablir cet article dans sa rédaction initiale.

I - Le dispositif proposé

Cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer dans la loi de financement de la sécurité sociale, conformément aux dispositions de la loi organique du 14 mars 2022.

Article L.O. 111-3-2 du code de la sécurité sociale

Dans son article liminaire, la loi de financement de l'année présente, pour l'exercice en cours et pour l'année à venir, l'état des prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale.

L'intégration de cet article liminaire dans la LFSS a été souhaitée par le législateur organique.

En effet, si le Parlement, au moment de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, ne peut se prononcer, pour l'essentiel, que sur les mesures ayant un effet sur les régimes obligatoires de base (Robss), les organismes ou des organismes concourant à leur financement (FSV), à l'amortissement de leur dette (Cades) ou à la mise en réserve de recettes à leur profit (FRR), c'est bien le champ plus large des administrations de sécurité sociale (Asso) qui est considéré par l'Insee dans le calcul des comptes des administrations publiques (selon les concepts de la comptabilité nationale).

Au demeurant, l'État accorde sa garantie de droit ou de fait à plusieurs organismes et régimes situés en dehors du périmètre des Robss.

C'est pourquoi, à défaut d'élargir formellement le périmètre des LFSS, comme l'avait proposé le Sénat1(*), le législateur organique a au moins souhaité que le Parlement dispose d'une vision financière globale des administrations de sécurité sociale au moment de l'examen des lois de financement, tant par la création de nouvelles annexes relatives à l'assurance chômage, aux régimes complémentaires de retraite et aux établissements de santé que par la création de cet article liminaire.

Sur le fond, les prévisions de cet article sont retracées dans le tableau ci-après.

Prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale pour les années 2023 et 2024 au sens de la comptabilité nationale

(en points de produit intérieur brut)

 

2023

2024

Recettes

26,6

26,6

Dépenses

25,9

26,0

Solde

0,7

0,6

Source : Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024

Prises dans leur ensemble, les Asso, dont les dépenses et les recettes représentent plus d'un quart du PIB, devraient donc présenter un excédent de 0,6 point de PIB en 2024, en légère diminution par rapport à l'excédent de 0,7 point de PIB attendu en 2023.

Bien entendu ces recettes, dépenses et soldes sont les mêmes que ceux figurant dans le rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques en cours de discussion.

Les administrations de sécurité sociale (Asso)

Les administrations de sécurité sociale regroupent les régimes d'assurance sociale et les organismes dépendant des assurances sociales (principalement les hôpitaux à financement public) (Odass).

Les régimes d'assurance sociale comprennent principalement :

- le régime général ;

- divers fonds : Fonds de solidarité vieillesse (FSV), mais aussi Fonds commun pour les accidents du travail (FCAT), Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), Service social d'allocation aux personnes âgées (Saspa), Fonds de compensation des organismes de sécurité sociale (FCOSS), etc. ;

- les autres régimes de base des salariés (régimes spéciaux d'entreprises et d'établissements publics, salariés agricoles, etc.) ;

- les régimes des non-salariés (dont la mutualité sociale agricole) ;

- l'Unédic ;

- les régimes complémentaires d'assurance vieillesse des salariés (Agirc-Arrco...) ;

- depuis un reclassement effectué en 2011 par l'Insee, la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) et le Fonds de réserve des retraites (FRR), jusqu'alors considérés comme des organismes divers d'administration centrale (Odac).

Les organismes dépendant des assurances de sécurité sociale (Odass), qui dépendent des administrations de sécurité sociale, comprennent :

- les hôpitaux de l'assistance publique, ainsi que les hôpitaux privés financés par la dotation globale hospitalière (attribuée par les caisses de sécurité sociale) ;

- les oeuvres sociales intégrées aux organismes de sécurité sociale (oeuvres sociales de la Cnaf, écoles d'infirmiers) ;

- Pôle emploi (hors indemnisation du chômage).

Le tableau ci-après, tiré du rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2024, donne la décomposition de ces chiffres ainsi que leur traduction en milliards d'euros2(*).

Solde, recettes et dépenses des administrations de sécurité sociale

(en milliards d'euros)

 

2023

2024

Asso

20,8

17,3

Recettes 

750,9

778,6

Dépenses 

730,1

761,3

Régime général + Fonds de solidarité vieillesse

- 7,8

- 8,7

Recettes 

508,7

530,7

Dépenses 

516,5

539,4

Unédic

2,8

3,7

Recettes 

43,7

44,9

Dépenses 

40,9

41,2

Régimes complémentaires

8,2

7,4

Recettes 

109,4

113,3

Dépenses 

101,2

105,9

Cades

18,4

16,3

Recettes 

21,4

19,6

Dépenses 

3,1

3,3

FRR

- 1,6

- 1,6

Recettes 

0,7

0,7

Dépenses 

2,3

2,3

Organismes divers de sécurité sociale

0,5

0,9

Recettes 

122,7

126,4

Dépenses 

122,2

125,5

Source : Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2024

Notes de lecture :

- Ces soldes, recettes et dépenses, sont présentés en comptabilité nationale.

- Les recettes et dépenses des Asso sont présentées ici après consolidation (c'est-à-dire retraitées des transferts entre caisses, sans impact sur le solde). Toutefois, ce n'est pas le cas des régimes ou groupes de régimes, dont le solde est affecté par les transferts internes aux Asso. En conséquence, la somme des recettes et des dépenses des sous-ensembles ne correspond pas au total des Asso.

- De même, les recettes et dépenses du RG+FSV ne sont pas consolidées (des transferts internes entre caisses du RG et FSV), contrairement, par exemple, à la CCSS. Ce retraitement, ou son absence, n'a cependant là non plus aucun effet sur le solde total RG+FSV.

Cette décomposition montre bien que l'essentiel des quelque 17,3 milliards d'euros d'excédents prévus pour les Asso en 2024 provient de l'amortissement de la dette sociale auquel procède la Cades, qui est enregistré comme un excédent. De même, la diminution (de 3,5 milliards d'euros) entre 2023 et 2024 de l'excédent anticipé pour les Asso proviendrait essentiellement de la Cades (dont l'excédent, particulièrement élevé en 2022 du fait de recettes majorées par l'inflation, serait réduit par le transfert à la CNSA, à compter du 1er janvier 2024, de 0,15 point de CSG, soit 2,6 milliards d'euros3(*), et par l'augmentation des charges d'intérêt découlant de la hausse des taux).

Cette décomposition montre également la situation favorable attendue pour l'assurance chômage (excédents de 2,8 milliards d'euros en 2023 et 3,7 milliards d'euros en 2024), après les années 2020 et 2021 particulièrement difficiles, notamment du fait de la prise en charge par le régime à hauteur d'un tiers des dépenses d'activité partielle. Selon les prévisions publiées en septembre 2023 par l'Unédic4(*), la dette du régime, qui a atteint 63,6 milliards d'euros fin 2021, devrait poursuivra sa décrue entamée en 2022, pour ne représenter « que » 51,2 milliards d'euros à la fin de l'année 2024.

S'agissant des régimes de retraite complémentaires légalement obligatoires, ils verraient leur excédent passer de 8,2 milliards d'euros en 2023 à 7,4 milliards d'euros en 2024, les recettes augmentant moins rapidement que les dépenses. En effet, la diminution de l'inflation en 2024 aurait un impact défavorable sur les recettes, alors que son niveau élevé en 2023 majorerait les dépenses de 2024, sous l'effet notamment de la revalorisation de 4,9 % des prestations de l'Agirc-Arrco au 1er novembre 2023.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a supprimé cet article.

III - La position de la commission

Comme indiqué dans le tome I du présent rapport, les prévisions du Gouvernement pour 2024 paraissent optimistes.

On rappelle toutefois que le présent article est purement prévisionnel.

Par ailleurs, l'article liminaire est une disposition obligatoire des LFSS (article L.O. 111-3-2 du code de la sécurité sociale). Son absence susciterait un risque d'inconstitutionnalité de l'ensemble du PLFSS.

C'est pourquoi la commission a adopté, à l'initiative de la rapporteure générale, un amendement n° 185 visant à rétablir cet article dans sa version initiale.

La commission propose de rétablir cet article dans sa rédaction initiale.


* 1 Voir notamment la proposition de loi organique n° 492 (2020-2021) tendant à renforcer le pilotage financier de la sécurité sociale et à garantir la soutenabilité des comptes sociaux de M. Jean-Marie Vanlerenberghe et le rapport du Sénat n° 825 (2020-2021) sur la proposition de loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

* 2 Le Sénat avait proposé, dans le cadre de l'examen de la loi organique, que telle soit la forme de l'article liminaire mais cette proposition n'a pas été retenue.

* 3 Conformément à l'article 3 de la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l'autonomie.

* 4 Reposant sur des hypothèses macroéconomiques moins favorables.

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