N° 198

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 13 décembre 2023

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, visant à garantir le respect du droit à l'image des enfants,

Par Mme Isabelle FLORENNES,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. François-Noël Buffet, président ; M. Christophe-André Frassa, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Marc-Philippe Daubresse, Jérôme Durain, Philippe Bonnecarrère, Thani Mohamed Soilihi, Mme Cécile Cukierman, MM. Dany Wattebled, Guy Benarroche, Mme Nathalie Delattre, vice-présidents ; Mmes Agnès Canayer, Muriel Jourda, M. André Reichardt, Mme Isabelle Florennes, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Philippe Bas, Mme Nadine Bellurot, MM. Olivier Bitz, François Bonhomme, Hussein Bourgi, Ian Brossat, Christophe Chaillou, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine Di Folco, Françoise Dumont, Jacqueline Eustache-Brinio, Françoise Gatel, Laurence Harribey, Lauriane Josende, MM. Éric Kerrouche, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Audrey Linkenheld, MM. Alain Marc, Hervé Marseille, Michel Masset, Mmes Marie Mercier, Corinne Narassiguin, M. Paul Toussaint Parigi, Mme Olivia Richard, M. Pierre-Alain Roiron, Mmes Elsa Schalck, Patricia Schillinger, M. Francis Szpiner, Mmes Lana Tetuanui, Dominique Vérien, M. Louis Vogel, Mme Mélanie Vogel.

Voir les numéros :

Première lecture : 758, 908 et T.A. 84

Commission mixte paritaire : 1308

Nouvelle lecture : 1229, 1693 et T.A. 174

Première lecture : 396, 560, 561 et T.A. 107 (2022-2023)

Commission mixte paritaire : 674 et 675 (2022-2023)

Nouvelle lecture : 27 et 199 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

La proposition de loi visant à garantir le respect du droit à l'image des enfants vise à modifier les règles du code civil relatives à l'autorité parentale, pour y intégrer le respect de la vie privée et le droit à l'image de l'enfant. Ses auteurs, les députés Bruno Studer1(*), Aurore Bergé, Éric Poulliat et les membres du groupe Renaissance et apparentés, souhaitent ainsi mieux sensibiliser les parents sur les conséquences de la diffusion des photos de leurs enfants sur internet, « la question du droit à l'image des enfants [étant] à la confluence entre les enjeux d'exploitation commerciale, de harcèlement et de pédocriminalité »2(*).

Ce texte revient au Sénat après l'échec de la commission mixte paritaire en raison de divergences sur deux points principaux : l'exigence d'un accord des deux parents pour toute diffusion d'une image de leur enfant sur internet, que le Sénat avait ajoutée, à l'initiative de la rapporteure d'alors, Valérie Boyer (article 3) et la création d'une délégation forcée de l'exercice du droit à l'image de l'enfant à un tiers, en cas d'atteinte grave à sa dignité ou à son intégrité morale, que souhaitaient maintenir les députés (article 4).

Lors de son examen en nouvelle lecture, à l'initiative de sa nouvelle rapporteure, Isabelle Florennes, la commission des lois a fait évoluer sa position en renonçant à la nécessité d'un accord des deux parents pour la diffusion d'une image de l'enfant sur internet, en cohérence avec la position exprimée par le Sénat en matière d'inscription des mineurs sur les réseaux sociaux3(*), mais en consacrant dans le code civil l'obligation pour les parents de protéger en commun le droit à l'image de leur enfant. Elle a en revanche maintenu la suppression de l'article 4, refusant la création d'une nouvelle catégorie de délégation forcée de l'autorité parentale partielle.

I. EN NOUVELLE LECTURE À L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UNE LÉGÈRE ÉVOLUTION, MAIS DES DISPOSITIONS PROBLÉMATIQUES MAINTENUES

L'Assemblée nationale a maintenu ses articles 1er et 4, légèrement fait évoluer ses articles 2 et 3, prenant en compte, à la marge, certaines remarques exprimées par le Sénat et maintenu l'apport du Sénat à l'article 5.

A. DES ARTICLES MAINTENUS DANS LEUR VERSION ADOPTÉE PAR LES DÉPUTÉS EN PREMIÈRE LECTURE

L'article 1er de la proposition de loi a été maintenu dans la version adoptée par les députés en première lecture et vise à introduire la protection de la vie privée de l'enfant parmi les obligations des parents au titre de l'autorité parentale, aux côtés de la sécurité, la santé et la moralité (article 371-1 du code civil). Pour mémoire, le Sénat avait accepté d'intégrer la notion de vie privée dans la mission exercée conjointement par les parents dans le cadre de l'autorité parentale, mais uniquement pour expliciter ce qu'est le « respect dû à la personne de l'enfant » mentionné à l'article 371-1 du code civil. Il a refusé de mettre la vie privée au même niveau que la sécurité, la santé et la moralité de l'enfant qui constituent les finalités de l'autorité parentale et dont la protection justifie, dans certains cas, une atteinte à la vie privée de l'enfant.

Les députés ont également rétabli l'article 4 ouvrant la voie à une délégation forcée de l'exercice du droit à l'image de l'enfant lorsque la diffusion de l'image de celui-ci porte gravement atteinte à sa dignité ou son intégrité morale (article 377 du code civil). Le Sénat avait supprimé cette disposition considérant qu'elle n'apportait pas de solution plus efficiente que les mesures d'assistance éducative que peut prendre le juge des enfants dans le cadre de l'article 375 du code civil « si la santé, la sécurité ou la moralité d'un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises ».


* 1  Bruno Studer, député Renaissance de la 3e circonscription du Bas-Rhin, est déjà à l'origine de deux lois concernant la protection des mineurs dans l'univers numérique : la loi du 19 octobre 2020 visant à encadrer l'exploitation commerciale de l'image d'enfants de moins de seize ans sur les plateformes en ligne ; la loi du 2 mars 2022 visant à renforcer le contrôle parental sur les moyens d'accès à internet.

* 2 Exposé des motifs de la proposition de loi n° 396 (2022-2023).

* 3 Loi n° 2023-566 du 7 juillet 2023 visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne.

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