- LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL
- I. UNE EXÉCUTION QUI A MOBILISÉ
LÉGÈREMENT MOINS DE CRÉDITS
EN 2024 MALGRÉ UN MONTANT OUVERT SUPÉRIEUR À
CELUI DE 2023
- II. LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL
SUR LES PROGRAMMES 112 ET 162, LES DEUX PROGRAMMES TERRITORIALISÉS
DE LA MISSION
- I. UNE EXÉCUTION QUI A MOBILISÉ
LÉGÈREMENT MOINS DE CRÉDITS
EN 2024 MALGRÉ UN MONTANT OUVERT SUPÉRIEUR À
CELUI DE 2023
N° 743 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025 |
Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 juin 2025 |
RAPPORT FAIT au nom de la commission des finances (1) sur le projet
de loi, |
Par M. Jean-François HUSSON, Sénateur |
TOME II ANNEXE N° 6b (Programmes 112 « Impulsion et
coordination de la politique d'aménagement Rapporteur spécial : M. Bernard DELCROS |
(1) Cette commission est composée de :
M. Claude Raynal, président ;
M. Jean-François Husson, |
Voir les numéros : Assemblée nationale (17ème législ.) : 1285, 1492 et T.A. 138 Sénat : 718 (2024-2025) |
LES PRINCIPALES
OBSERVATIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL
1. Les crédits exécutés de la mission « Cohésion des territoires » se sont élevés en 2024 à 18,49 milliards d'euros en crédits de paiement, contre 18,51 milliards d'euros un an plus tôt, ce qui représente une très légère diminution de 0,1 %. En autorisations d'engagement, la diminution est un peu plus marquée (18,69 milliards d'euros en 2024 contre 18,83 milliards d'euros en 2023, soit une baisse de 0,7 %).
2. Au sein de la mission dans son ensemble, les deux programmes territorialisés 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 162 « Interventions territoriales de l'État » ne pèsent que 2,82 % des crédits de paiement exécutés en 2024, même si leur importance dans les politiques menées par les acteurs locaux va bien au-delà de cette donnée statistique. Cette part est en très légère augmentation par rapport aux 2,6 % constatés l'an passé.
3. Le programme 112 fait l'objet d'une hausse des dépenses constatées en crédits de paiement entre 2023 et 2024 (+ 39,5 millions d'euros pour s'établir à presque 380 millions d'euros, soit + 11,7 %). Cette progression est pour partie liée à la montée en puissance de plusieurs dispositifs, comme le programme France Services ainsi qu'à la revalorisation de la subvention pour charges de service public dédiées à l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT).
4. À l'inverse, les crédits exécutés sur le programme 162 connaissent une diminution en crédits de paiement entre 2023 et 2024 (- 6,6 millions d'euros pour s'établir à 141,9 millions d'euros, soit - 4,5 %) avec toutefois des disparités très importantes entre les actions. Les comparaisons sur ce programme sont peu probantes en raison du caractère très étanche des actions entre elles et des évolutions très marquées d'une année sur l'autre de chacun des dispositifs.
5. Le rapporteur spécial note, comme chaque année, pour les programmes 112 et 162, l'importance des mouvements de crédits infra-annuels, aboutissant à des surconsommations ou à des sous consommations selon les actions par rapport à la loi de finances initiale. Ceux-ci rendent peu fiables les prévisions initiales et incertaines les lignes de conduite suivies par les différentes politiques publiques concernées.
I. UNE EXÉCUTION QUI A MOBILISÉ LÉGÈREMENT MOINS DE CRÉDITS EN 2024 MALGRÉ UN MONTANT OUVERT SUPÉRIEUR À CELUI DE 2023
La mission « Cohésion des territoires » est composée de six programmes portant des politiques de natures diverses, allant de la politique du logement à celle de l'aménagement du territoire :
- le programme 109 « Aide à l'accès au logement » porte principalement les crédits des aides personnelles au logement ;
- le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » porte les subventions pour charges de service public allouée aux deux opérateurs rattachés (l'Agence nationale de cohésion des territoires et Business France) et comprend le fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) qui finance une partie des contrats de plan État-régions, ainsi que divers dispositifs, dont « France Services » ;
- le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » finance, via des fonds de concours, les aides à la pierre et, au moyen de crédits budgétaires, d'autres actions relatives au logement, à la construction, à l'urbanisme et à l'aménagement ;
- le programme 147 « Politique de la ville » porte les moyens de l'État consacrés aux quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et au nouveau programme de renouvellement urbain (NPNRU) ;
- le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (PITE) portait, jusqu'en 2024, huit actions spécifiques de portée régionale ou interrégionale (il n'en compte plus que sept depuis 2025) ;
- le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » vise à répondre aux situations d'hébergement d'urgence et à permettre l'accès au logement.
A. LA MISSION « COHÉSION DES TERRITOIRES » REGROUPE DES POLITIQUES VARIÉES BIEN QUE LES CRÉDITS OUVERTS AIENT PROGRESSÉ DE 7 % AVEC UNE EXÉCUTION EN TRÈS LÉGÈRE DIMINUTION
Les crédits exécutés de la mission « Cohésion des territoires » se sont élevés en 2024 à 18,49 milliards d'euros en crédits de paiement, contre 18,51 milliards d'euros un an plus tôt, ce qui représente une très légère diminution de 0,1 %. Cela correspond à une sous-consommation d'environ 1 milliard d'euros par rapport aux 19,5 milliards d'euros de crédits ouverts en loi de finances initiale. En autorisations d'engagement, la diminution est légèrement plus marquée (18,69 milliards d'euros en 2024 contre 18,83 milliards d'euros en 2023, soit une baisse de 0,7 %), ce qui représente environ 1,5 milliard d'euros de moins que les autorisations d'engagement ouvertes en loi de finances initiale (20,2 milliards d'euros en tout).
Évolution des crédits de la mission « Cohésion des territoires » en 2024
(en millions d'euros et en pourcentage)
2023 |
Exécution 2023 / LFI 2023 |
2024 |
Exécution 2024 / LFI 2024 |
Exécution |
|||||||
2024 / 2023 |
|||||||||||
LFI |
Exécution |
en volume |
en % |
LFI |
Exécution |
en volume |
en % |
en volume |
en % |
||
177 - Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables |
AE |
2 825,8 |
3 068,7 |
+ 242,9 |
+ 8,6 % |
2 900,9 |
3 103,5 |
202,6 |
+ 7,0 % |
34,8 |
+ 1,1 % |
CP |
2 850,6 |
3 076,5 |
+ 225,9 |
+ 7,9 % |
2 925,7 |
3 131,3 |
205,6 |
+ 7,0 % |
54,8 |
+ 1,8 % |
|
109 - Aide à l'accès au logement |
AE |
13 371,3 |
13 290,8 |
- 80,5 |
- 0,6 % |
13 656,4 |
13 102,2 |
- 554,2 |
- 4,1 % |
- 188,6 |
- 1,4 % |
CP |
13 371,3 |
13 290,8 |
- 80,5 |
- 0,6 % |
13 656,4 |
13 102,2 |
- 554,2 |
- 4,1 % |
- 188,6 |
- 1,4 % |
|
135 - Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat |
AE |
1 567,1 |
1 395,6 |
- 171,5 |
- 10,9 % |
2 459,5 |
1 466 |
- 993,5 |
- 40,4 % |
70,4 |
+ 5,0 % |
CP |
1 145,8 |
1 089,2 |
- 56,6 |
- 4,9 % |
1 867,7 |
1 217,9 |
- 649,8 |
- 34,8 % |
128,8 |
+ 11,8 % |
|
112 - Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire |
AE |
380,8 |
396,8 |
+ 16,1 |
+ 4,2 % |
444,9 |
396,8 |
- 48,1 |
- 10,8 % |
0,0 |
0,0 |
CP |
313,8 |
340,1 |
+ 26,3 |
+ 8,4 % |
395,5 |
379,6 |
- 15,9 |
- 4,0 % |
39,5 |
+ 11,6 % |
|
147 - Politique de la ville |
AE |
597,9 |
565,4 |
- 32,5 |
- 5,4 % |
640 |
523,9 |
- 116,1 |
- 18,1 % |
- 41,5 |
- 7,3 % |
CP |
597,9 |
565,5 |
- 32,4 |
- 5,4 % |
640 |
524,1 |
- 115,9 |
- 18,1 % |
- 41,4 |
- 7,3 % |
|
162 - Interventions territoriales de l'État |
AE |
158,0 |
116,4 |
- 41,6 |
- 26,4 % |
100,6 |
103,5 |
2,9 |
+ 2,8 % |
- 12,9 |
- 11,1 % |
CP |
104,5 |
148,5 |
+ 44,0 |
+ 42,1 % |
53,2 |
141,9 |
88,7 |
+ 167,0 % |
- 6,6 |
- 4,5 % |
|
Total mission |
AE |
18 900,9 |
18 833,7 |
- 67,1 |
- 0,4 % |
20 202,4 |
18 695,9 |
- 1 506,5 |
- 7,5 % |
- 137,8 |
- 0,7 % |
CP |
18 383,8 |
18 510,6 |
+ 126,8 |
+ 0,7 % |
19 538,5 |
18 497,1 |
- 1 041,4 |
- 5,3 % |
- 13,5 |
- 0,1 % |
Note : AE : autorisations d'engagement. CP : crédits de paiement. LFI : budgétisation en loi de finances initiale, y compris les prévisions de fonds de concours (FDC) et attributions de produits (ADP). Exécution : consommation constatée dans le projet de loi de règlement ou de résultats de la gestion.
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Cette diminution se traduit néanmoins par un rythme de consommation des crédits très varié en fonction des programmes :
- les crédits du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » poursuivent leur augmentation (+ 34,8 millions d'euros en crédits de paiement en 2024, après une augmentation de 191,1 millions d'euros en 2023 et 207,9 millions d'euros en 2022) ;
- les crédits du programme 162 « Interventions territoriales de l'État », bien qu'ayant connu en 2024 une diminution importante tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement ouverts, ont largement dépassé les prévisions initiales (167 % au-delà de la prévision initiale en crédits de paiement, soit un dépassement en exécution de 88,7 millions d'euros, bien au-dessus des 53,2 millions d'euros qui avaient été ouverts en LFI), en raison d'une structure de crédits constituée en grande partie par des reports, des transferts en gestion et des crédits de fonds de concours. Comme chaque année, le périmètre et la structure du programme rendent les comparaisons avec les exercices précédents peu probants, mais il faut aussi souligner que c'est l'une des contreparties de la souplesse du PITE. Au global, si l'on compare l'exécution constatée en 2024 à celle de 2023, la baisse en autorisations d'engagement atteint 11,1 % et celle en crédits de paiement est de 4,5 % ;
- les crédits des programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » connaissent une trajectoire diamétralement différente de celle du programme 162 puisqu'ils sont caractérisés en 2024 par une importante sous-exécution par rapport aux crédits initialement ouverts, alors même que le niveau d'exécution constaté dépasse, pour ces deux programmes, celui de 2023 ;
- enfin, les crédits des programmes 109 « Aide à l'accès au logement » et 147 « Politique de la ville » sont en diminution en volume exécuté (respectivement de 1,4 % et 7,3 %, en AE comme en CP).
La très grande majorité des crédits de la mission correspond à des dépenses largement contraintes : il s'agit de dépenses de guichet (les aides au logement du programme 109 représentent 75 % des crédits de la mission en 2023), ou de dépenses fortement déterminées par l'évolution de la situation économique et sociale (dépenses d'hébergement et de veille sociale portées par le programme 177) et donc difficilement pilotables.
La mission comporte très peu de dépenses de personnel, même si celles-ci ont connu une importante hausse sur l'exercice 2024 en raison du remboursement, financé sur le programme 112, des administrations qui mettent à disposition du personnel exerçant les missions des nouveaux chefs de projets « villages d'avenir » (4 192 740 euros exécutés en AE comme en CP en 2024 pour 8 millions d'euros ouverts).
Désormais, deux programmes comportent donc des dépenses de personnel : le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » comme indiqué, ainsi que le programme 147 « Politique de la ville », qui comprend une partie de la masse salariale des délégués du préfet. Sur le programme 147, les dépenses de personnel sont quasiment stables (passant de 1 347 086 euros en 2023 à 1 387 402 euros en 2024, aussi bien en AE qu'en CP). Au global, la mission affiche donc un total de dépenses de personnel de 5 580 142 euros exécutés, soit une hausse importante de 314 % mais qui demeure limitée en valeur absolue (+ 4 millions d'euros environ) puisque l'essentiel des dépenses de personnel en lien avec les activités de la mission « Cohésion des territoires » est en fait porté par la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».
Enfin, il faut souligner les effets importants des mouvements infra-annuels de gestion sur les crédits de la mission.
On relèvera en premier lieu l'annulation de plus de 736 millions d'euros, en AE comme en CP, avec le décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits. Ces annulations, intervenues moins de six semaines après la promulgation de la loi de finances pour 2024, ont touché tous les programmes de la mission à l'exception du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » dont le besoin de financement s'est une nouvelle fois traduit par l'ouverture de moyens supplémentaires en loi de finances de fin de gestion (cf. infra).
Montant des AE et
des CP annulés par le décret
du 21 février 2024
portant annulation de
crédits, par programme
(en euros)
Autorisations d'engagement annulées |
Crédits de paiement annulés |
|
177 - Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables |
- |
- |
109 - Aide à l'accès au logement |
300 000 000 |
300 000 000 |
135 - Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat |
358 922 453 |
358 922 453 |
112 - Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire |
26 114 412 |
26 114 412 |
147 - Politique de la ville |
49 064 685 |
49 064 685 |
162 - Interventions territoriales de l'État |
2 698 796 |
2 698 796 |
Total mission |
736 800 346 |
736 800 346 |
Source : Commission des finances du Sénat à partir du décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits
En second lieu, la loi de finances de fin de gestion (LFG) du 6 décembre 2024 a eu pour effet de réduire, au total, les moyens alloués à la mission de 350,8 millions d'euros en AE et de 434,9 millions d'euros en CP.
AE et des CP ouverts et annulés en loi de finances de fin de gestion
(en euros)
Autorisations d'engagement ouvertes |
Autorisations d'engagement annulées |
Crédits de paiement ouverts |
Crédits de paiement annulés |
|
177 - Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables |
250 000 000 |
- |
250 000 000 |
- |
109 - Aide à l'accès au logement |
- |
224 191 058 |
- |
224 191 058 |
135 - Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat |
- |
302 078 062 |
- |
381 314 440 |
112 - Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire |
- |
20 033 674 |
- |
18 033 674 |
147 - Politique de la ville |
- |
51 397 930 |
- |
51 397 930 |
162 - Interventions territoriales de l'État |
- |
3 067 420 |
- |
9 996 069 |
Total mission |
250 000 000 |
600 768 144 |
250 000 000 |
684 933 171 |
Différentiel entre les ouvertures et les annulations en LFG |
- 350 768 144 |
- 434 933 171 |
Source : Commission des finances du Sénat à partir de la loi n° 2024-1167 du 6 décembre 2024 de finances de fin de gestion pour 2024
Ce total résulte d'un double effet ayant consisté à :
- ouvrir 250 millions d'euros supplémentaires, en AE comme en CP, destinés à abonder le programme 177 afin de maintenir le nombre de places du parc d'hébergement que le gouvernement s'est engagé à maintenir ouvertes. Cette ouverture n'était en rien surprenante puisque la mission d'information de la commission des finances sur la dégradation des comptes publics depuis 2023 avait constaté1(*) que l'insuffisance des crédits ouverts en 2024 était connue du Gouvernement avant même la promulgation de la loi de finances initiale et le ministre en charge du logement avait, dès le 8 janvier 2024, annoncé un besoin de crédits supplémentaires de 120 millions d'euros. La mission avait aussi constaté que s'y ajouteraient d'autres dépenses d'un montant au moins équivalent, aboutissant à l'ouverture de crédits ici rappelée ;
- annuler un total de 600,8 millions d'euros en AE et 684,9 millions d'euros en CP sur les autres programmes.
Prévision et exécution des
crédits du programme 177
« Hébergement,
parcours vers le logement et insertion
des
personnes vulnérables »
Source : commission des finances, à partir des lois de finances initiales, des lois de règlement et du projet de loi de fin de gestion
Au total, les annulations de crédits opérées en février puis en fin de gestion ont représenté 6,8 % des AE (soit 1,34 milliard d'euros) et 7,41 % des CP (soit 1,42 milliard d'euros) votés en LFI. Bien que le volume d'annulation de crédits soit important, il n'a pas pénalisé l'exécution budgétaire des programmes les plus concernés par ces mesures, du fait d'estimations de dépenses assez supérieures aux besoins.
Au sein de la mission dans son ensemble, la part des deux programmes territorialisés n'a que peu évolué : ils pèsent en tout 2,82 % des crédits de paiement exécutés en 2024, contre 2,6 % en 2023.
Il faut toutefois souligner que leur perception par les acteurs locaux va bien au-delà de cette donnée statistique qui, par ailleurs, ne tient pas compte du niveau très important des dépenses fiscales rattachées au programme 112.
B. DES DÉPENSES FISCALES QUI DEMEURENT PARTICULIÈREMENT ÉLEVÉES
Avec 87 dépenses fiscales rattachées à titre principal, la mission Cohésion des territoires est, parmi les missions du budget général, celle comportant le plus grand nombre de dépenses fiscales et celle affichant l'un des montants les plus élevés : il a atteint, en 2024, un total de 15,5 milliards d'euros2(*).
Le rapporteur spécial souligne que le montant ici repris, qui agrège le total des dépenses fiscales rattachées à titre principal à la mission diffère de celui affiché par le Gouvernement dans le rapport annuel de performances pour 2024, en raison d'une nouvelle méthode de comptabilisation utilisée par ce dernier qu'il juge spécieuse et dont il ne partage pas la philosophie (cf. l'encadré infra). Afin de permettre une comparaison objective avec les exercices antérieurs, le rapporteur spécial, comme la Cour des comptes d'ailleurs, recourt aux chiffres qui résultent de la méthode de comptabilisation qui a toujours été utilisée jusque-là.
Une méthode de comptabilisation des
dépenses fiscales portant sur la TVA
qui diminue artificiellement
les données présentées par le Gouvernement
Depuis 2024, le Gouvernement proratise le coût des dépenses fiscales en fonction de leur affectation finale : il mentionne dans le RAP un montant total de dépense fiscale « étatique », amputé de la fraction de TVA transférée aux collectivités territoriales et aux organismes de sécurité sociale.
Le montant des dépenses fiscales assises sur la TVA s'en trouve ainsi artificiellement réduit de moitié. Le rapporteur spécial désapprouve totalement cette méthode qui ne permet pas de disposer d'une vision globale du manque à gagner pour les finances publiques : d'ailleurs il a fallu annexer au projet de loi de finances pour 2025 un tableur permettant de connaître les montants des diminutions de recettes de TVA avant prise en compte des transferts, ce qui est source d'une nouvelle complexité.
De surcroît, il est injustifiable d'appliquer cette méthode pour la seule TVA (même si on comprend bien que les montants importants de TVA en jeu permettent d'afficher politiquement un total plus raisonnable de dépenses fiscales) alors qu'il n'est pas appliqué à d'autres impositions partagées entre plusieurs affectataires (la TICPE par exemple).
Pour la mission « Cohésion des territoires », ce changement de méthode se traduit par un montant de dépenses fiscales affiché inférieur de 4,9 milliards d'euros à ce qu'il est en réalité.
Ainsi, la part des dépenses fiscales dans le total des dépenses augmente de nouveau légèrement pour s'établir en 2024 à 46,6 % de l'ensemble des dépenses de la mission, contre 46,1 % un an plus tôt.
Total des dépenses budgétaires et fiscales exécutées en 2024, par programme
Source : Cour des comptes (analyse de l'exécution budgétaire 2024)
Comme chaque année, ces « niches fiscales » sont concentrées très largement sur le programme 135, qui pèse 90,9 % du total de la dépense fiscale rattachée en 2024 à la mission, contre 90,4 % un an plus tôt. Très loin derrière, le programme 112 représente 6,2 % du même total, contre 5,8 % en 2023. Les autres programmes pèsent en tout moins de 3 % des dépenses fiscales.
Les dépenses fiscales du programme 135 représentent 11,56 fois le montant des crédits consommés dans ce programme, alors même que ces crédits incluent une part importante de fonds de concours. 92,04 % des dépenses du programme 135 sont ainsi des dépenses fiscales. S'agissant des deux programmes territorialisés de la mission, comme chaque année, les disparités sont massives puisque les dépenses fiscales représentent plus de 71 % des dépenses du programme 112, tandis que le programme 162, compte tenu de sa structure même, ne comporte aucune dépense fiscale (cf. infra).
Part des dépenses budgétaires et
fiscales dans le total des dépenses
par programme
Source : Commission des finances du Sénat
Ainsi, alors que les dépenses fiscales se traduisent en fin de compte par le même impact négatif sur le solde budgétaire que les dépenses budgétaires, il est possible d'esquisser deux cartographies très différentes de la mission « Cohésion des territoires » :
- si on considère les crédits budgétaires, les programmes 109 « Aide à l'accès au logement » et 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » dominent très largement l'exécution de la mission ;
- si l'on prend en compte les dépenses fiscales, ce sont les programmes 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » qui occupent la première place.
II. LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LES PROGRAMMES 112 ET 162, LES DEUX PROGRAMMES TERRITORIALISÉS DE LA MISSION
A. LE PROGRAMME 112 : UNE MISSION D'ACCOMPAGNEMENT DES TERRITOIRES MARQUÉE EN 2024 PAR UNE EXÉCUTION DES CRÉDITS EN HAUSSE
1. Un champ d'intervention particulièrement éclectique sous l'appellation « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire »
L'intervention de l'État en matière d'aménagement du territoire se traduit davantage, depuis quelques années, par un accompagnement des collectivités et de leurs groupements que par des politiques conduites directement : il s'agit d'intervenir de manière ciblée selon que sont visés les territoires ruraux, les territoires périurbains ou les centres de villes moyennes.
Ces politiques publiques incluent en premier lieu le programme France Services, lancé début 2020 pour 101,7 millions d'euros de crédits de paiement exécutés en 2024 (dont 56,8 millions portés par l'État à travers le programme 112, le reste étant porté par les opérateurs comme expliqué infra) contre 77,71 millions d'euros consommés en 2023 et 61,62 millions d'euros en 2022. Il s'agit d'un réseau de services publics mutualisés devant permettre aux usagers d'effectuer différentes démarches administratives dans un lieu unique vers lequel ils se rendent, ou qui vient à eux via les maisons France services mobiles, et au sein duquel ils bénéficient de l'aide de conseillers « France services » polyvalents.
La hausse importante des crédits pour 2024 s'agissant de ce dispositif s'explique par un double effet « volume et coût ».
En volume, le nombre de structures France services poursuit son augmentation avec de nouvelles vagues de labellisation en 2024 qui ont porté le total à un peu plus de 2 800 structures France services.
S'agissant du coût, le montant alloué à chaque structure a progressivement été revalorisé. En effet, le financement du réseau France Services suit différents canaux : des crédits sont alloués à l'animation du réseau départemental, tandis que depuis 2019, un financement forfaitaire, par structure, a été acté.
Initialement de 30 000 euros3(*), ce financement forfaitaire, répondant à l'une des préconisations formulées depuis longtemps par le rapporteur spécial4(*), sera progressivement porté à 50 000 euros, forfait qui s'appliquera à compter de 2026, en maintenant le principe d'un co-financement entre l'État et les opérateurs. En 2023, l'État avait donc majoré sa participation de 5 000 euros, portant ainsi à 35 000 euros le forfait par structure, à travers une revalorisation du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT). Les opérateurs ont ensuite majoré leur participation en 2024 pour financer les 5 000 euros supplémentaires par structure, en parallèle de l'arrivée des deux nouveaux opérateurs dans le dispositif au 1er janvier 2024. Cette arrivée a d'ailleurs conduit à une nouvelle répartition du financement du fonds national France services (FNFS) entre les opérateurs comme l'illustre le tableau ci-après.
Alimentation du FNFS par les opérateurs
(en euros)
Opérateur |
2023 |
2024 |
||
Ministère de l'Intérieur |
13,75 % |
5 051 750 |
13,92 % |
7 038 029 |
DGFIP |
13,75 % |
5 051 750 |
10,21 % |
5 161 221 |
CNAV |
6,50 % |
2 388 100 |
9,28 % |
4 692 020 |
MSA |
6,50 % |
2 388 100 |
4,33 % |
2 189 609 |
CNAF |
11,75 % |
4 316 950 |
11,86 % |
5 995 358 |
CNAM |
13,75 % |
5 051 750 |
12,69 % |
6 412 427 |
France Travail |
13,75 % |
5 051 750 |
8,97 % |
4 535 619 |
La Poste |
13,75 % |
5 051 750 |
7,32 % |
3 701 482 |
Ministère de la Justice |
6,50 % |
2 388 100 |
3,92 % |
1 981 075 |
DGEC |
6,71 % |
3 390 800 |
||
Anah |
10,78 % |
5 451 170 |
||
TOTAL |
100,00 % |
36 740 000 |
100,00 % |
50 548 810 |
NB : DGFIP : direction générale des finances publiques ; CNAV : Caisse nationale d'assurance vieillesse ; MSA : Mutualité sociale agricole, CNAF : Caisse nationale des allocations familiales ; CNAM : caisse nationale de l'assurance maladie ; DGEC : direction générale de l'énergie et du climat ; Anah : Agence nationale de l'habitat.
Source : Commission des finances du Sénat
Alternativement, jusqu'en 2026, l'État et les opérateurs majoreront donc de nouveau leur participation de 5 000 euros pour atteindre le montant forfaitaire de 50 000 euros par structure. Pour l'instant, la trajectoire telle qu'elle résulte de la loi de programmation des finances publiques5(*) (LPFP) est donc respectée.
Origine du financement par structure France services
(en euros)
Part du FNADT |
Part du FNFS |
Total par structure France services* |
|
2023 |
20 000 |
15 000 |
35 000 |
2024 |
20 000 |
20 000 |
40 000 |
2025 |
25 000 |
20 000 |
45 000 |
2026 (prévisionnel) |
25 000 |
25 000 |
50 000 |
Note : total hors bonification pour les France services portées par les collectivités territoriales en zone FRR (la loi de finances pour 2024, comme la loi de finances pour 2025, prévoyait 7,5 millions d'euros de crédits pour financer cette bonification).
Source : Commission des finances du Sénat
Outre les France services, ces dispositifs ciblés se manifestent principalement par le rattachement au programme 112 des crédits destinés :
- au programme « Petites Villes de demain » qui cible un peu plus de 1 600 communes ou intercommunalités de moins de 20 000 habitants qui exercent des fonctions de centralité et qui présentent des signes de fragilité (24,1 millions d'euros en CP consommés pour ce dispositif en 2024, contre 25,55 millions d'euros 2023 et 23,26 millions d'euros en 2022) ;
- au dispositif « Nouveaux lieux, nouveaux liens », lequel comprend deux volets. Le premier volet intitulé « Fabriques de territoires » met à disposition 80 tiers lieux dans des territoires qui en étaient totalement dépourvus et le second volet « Manufactures de proximité » porte 16 tiers-lieux dédiés à la production, qui animent et apportent des services à une communauté en priorité à destination d'artisans ou de « petits » entrepreneurs (le dispositif était initialement financé par le plan de relance et se poursuit désormais dans le cadre du programme 112 avec un total de 10 millions d'euros en 2024 contre 11,78 millions d'euros d'autorisations d'engagement en 2023) ;
- au programme « Territoires d'industrie » par lequel des postes de chefs de projet, à hauteur de 80 000 euros par emploi, sont financés ;
- ou encore, plus marginalement en 2024, le plan « France ruralités » qui a pris depuis 2023 le relai de « l'agenda rural » lancé en 2019, sous le pilotage de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (3,2 millions d'euros consommés en AE comme en CP en 2024 contre 1,4 million d'euros en 2023, ce qui comprend notamment le financement des volontaires territoriaux en administration - les VTA).
Par ailleurs, le programme porte les subventions pour charges de service public allouée aux deux opérateurs rattachés (l'Agence nationale de cohésion des territoires et Business France) et comprend le fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT)6(*) qui finance une part des crédits destinés à la contractualisation entre l'État et les territoires : sans prétendre à l'exhaustivité compte tenu des nombreux mécanismes contractuels concernés, on citera les contrats de plan État-régions (CPER), les contrats de plan interrégionaux (CPIER) de fleuves et de massifs, ainsi que des contrats territoriaux infra-régionaux, principalement axés autour de la transition écologique et de l'accès au numérique.
2. Des dépenses d'exécution en augmentation
Contrairement à ce qui avait été constaté l'an passé, le total des crédits de paiement exécutés sur le programme 112 pour l'année 2024 est en hausse de 11,6 % (en AE, le total exécuté en 2024 est le même qu'en 2023). Cette augmentation de 38 millions d'euros des crédits de paiement consommés (passés de 340,1 millions d'euros à 379,6 millions d'euros) malgré les annulations de crédits intervenues en février puis en loi de finances de fin de gestion, est due à :
- un niveau de CP votés en loi de finances initiale pour 2024 supérieur de 86 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2023 ;
- un niveau plus important de fonds de concours attribués au programme en 2024 (49,06 millions d'euros soit 17 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2023) ;
- des reports de la gestion précédente (2,94 millions d'euros) ;
- des mouvements règlementaires importants (33,58 millions d'euros environ).
Si l'on observe l'évolution des crédits effectivement consommés sous le prisme des différentes actions, cette tendance à la hausse sur le programme s'explique en grande partie par le financement du fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) par lequel transitent les trois-quarts des crédits du programme en 2024, comme lors des exercices précédents, même si les sections locale et générale dudit fonds connaissent cette année des évolutions distinctes.
Comme chaque année, le montant des crédits est en effet très variable selon les actions, en raison du caractère spécifique de certaines d'entre elles.
Évolution des crédits par action du programme 112 entre 2023 et 2024
(en euros)
Exécution 2023 |
LFI 2024 |
Exécution 2024 |
||||
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
|
Action 11 - FNADT section locale |
188 302 416,90 |
130 857 087,49 |
190 525 726,00 |
130 812 235,00 |
152 114 878,21 |
127 769 838,07 |
Action 12 - FNADT section générale |
132 106 050,72 |
126 318 923,05 |
114 344 299,00 |
117 349 540,00 |
151 912 532,80 |
154 097 452,84 |
Action 13 - Soutien aux Opérateurs |
78 502 068,69 |
78 036 412,47 |
93 061 442,00 |
93 061 442,00 |
93 502 148,73 |
94 046 925,73 |
Action 14 - Prime d'aménagement du territoire, contrats de ruralité et pacte État -métropoles |
- 2 062 345,63 |
4 921 492,00 |
- |
7 297 312,00 |
- 774 139,96 |
3 716 284,56 |
Total programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » |
396 848 190,68 |
340 133 915,01 |
397 931 467,00 |
348 520 529,00 |
396 755 419,78 |
379 630 501,20 |
Source : commission des finances du Sénat à partir du rapport annuel de performance
Le montant total des crédits exécutés sur l'action 11, qui porte la section locale du FNADT, c'est-à-dire essentiellement des crédits contractualisés entre l'État et les collectivités territoriales, est en baisse contrairement à ce qui avait été constaté lors des années précédentes. Cette action assure le financement des CPER et des CPIER. Le désengagement contractuel progressif de l'État, principalement pour des raisons budgétaires, se traduit par cette diminution constatée en 2024 qui devrait être beaucoup plus marquée encore pour l'année 2025 en cours. C'est la raison pour laquelle, alors qu'il était prévu en LFI 2024 que l'action 11 soit dotée de 190,53 millions d'euros en AE et de 130,81 millions d'euros en CP, l'exécution constatée en fin de gestion a été de seulement 152,11 millions en AE et de 127,77 millions d'euros en CP.
À l'inverse, l'action 12 qui correspond à la section générale du FNADT, c'est-à-dire au financement des engagements non pris dans le cadre d'une contractualisation, est caractérisée par une hausse significative des montants exécutés qui sont passés, entre 2023 et 2024, de 132,1 millions d'euros à 151,9 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 126,3 millions d'euros à 154,1 millions d'euros en crédits de paiement.
Elles correspondent notamment à la mise en oeuvre des dispositifs de soutien aux territoires sur la base de dispositifs plus ou moins pérennes dans le temps (France services, petites villes de demain, action coeur de ville, nouveaux lieux nouveaux liens, territoires d'industries, avenir montagne, villages d'avenir, etc.). Cette augmentation importante est principalement liée à la montée en puissance du dispositif France Services (cf. supra).
Comme l'an dernier, l'action 13 « Soutien aux opérateurs » ressort, en hausse, ce qui bénéficie à l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) dont la subvention pour charges de service public a été augmentée de quasiment 20 millions d'euros en 2024. Le rapporteur spécial regrette toutefois la baisse des moyens en loi de finances initiale pour 2025, en particulier au regard des besoins de la ruralité qu'il a eu l'occasion de souligner à plusieurs occasions7(*).
L'action 14, quant à elle, porte des dispositifs qui sont soit en extinction, soit rattachés aujourd'hui à d'autres programmes. La prime d'aménagement du territoire (PAT), qui constituait l'essentiel de l'action, a pris fin au 31 décembre 20208(*). De surcroît, la loi de finances pour 2018 a acté l'arrêt du financement de nouveaux engagements concernant les contrats de ruralité et des pactes État-métropoles sur le programme 112, transférés vers le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (RCT). En conséquence, plus aucun crédit ne figure en AE depuis 2021. Il faut même souligner que les autorisations d'engagement constatées ressortent pour 2024, comme ce fut le cas l'an passé, en écriture négative dans Chorus à - 774 139,96 euros après retraitement, ce que le rapport annuel de performances pour 2024 justifie ainsi :
« Les clôtures d'engagement juridiques sur des années antérieures à 2024 qui n'ont pas fait l'objet d'une opération autorisée de recyclage doivent être écartées. Ces clôtures ont conduit à un ajustement à la baisse du montant des engagements, en générant une écriture négative dans Chorus. ».
B. LE PROGRAMME 162 « INTERVENTIONS TERRITORIALES DE L'ÉTAT » : HUIT ACTIONS TERRITORIALISÉES AUX ORIENTATIONS TRÈS VARIÉES DONT L'UNE S'EST ACHEVÉE EN 2024.
Comme chaque année, le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (PITE) a connu une exécution très variable selon les actions du programme, ainsi qu'un volume important de mouvements infra-annuels de crédits, qui rend toute comparaison peu probante.
Créé en 2006, ce programme était encore composé, en 2024, de huit actions territorialisées9(*) répondant à des enjeux très variés. Il est abondé par des contributions de différents ministères et des fonds de concours.
Évolution des crédits par action du programme 162 entre 2023 et 2024
(en euros)
Exécuté 2023 |
LFI 2024 |
Exécuté 2024 |
||||
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
|
Action 02 - Eau et Agriculture en Bretagne |
7 418 805,21 |
5 996 106,10 |
1 885 122,00 |
1 866 265,00 |
5 872 702,26 |
6 382 171,20 |
Action 04 - Plans d'investissement pour la Corse |
45 379 846,43 |
60 555 591,09 |
47 907 005,00 |
3 787 563,00 |
48 161 564,39 |
69 948 070,97 |
Action 08 - Volet territorialisé du plan national d'action chlordécone |
6 679 235,57 |
6 567 410,45 |
4 263 723,00 |
4 227 500,00 |
6 448 289,59 |
6 028 719,93 |
Action 09 - Plan littoral 21 |
8 399 046,48 |
3 861 186,50 |
8 000 000,00 |
4 205 454,00 |
7 246 867,06 |
3 345 744,17 |
Action 10 - Fonds interministériel pour la transformation de la Guyane |
40 890 857,37 |
65 587 015,31 |
11 608 184,00 |
11 539 668,00 |
29 299 797,38 |
49 190 360,45 |
Action 11 - Reconquête de la qualité des cours d'eau en Pays de la Loire |
56 516,00 |
1 308 733,00 |
57 002,00 |
658 732,00 |
53 866,70 |
622 502,20 |
Action 12 - Service d'incendie et de secours à Wallis-et-Futuna |
2 028 605,24 |
2 028 542,76 |
2 067 544,00 |
2 049 874,00 |
1 931 384,59 |
1 882 998,42 |
Action 13 - Plan Sargasses II |
5 510 490,30 |
2 598 740,98 |
4 857 770,00 |
4 816 500,00 |
4 490 475,64 |
4 493 690,18 |
Total programme 162 - Interventions territoriales de l'État |
116 363 402,60 |
148 503 326,19 |
80 646 350,00 |
33 151 556,00 |
103 504 947,61 |
141 894 257,52 |
Source : commission des finances du Sénat à partir du rapport annuel de performances
L'action 02 « Eau et agriculture en Bretagne » vise à améliorer la qualité de l'eau en incitant les agriculteurs et les autres acteurs économiques à réduire les atteintes à l'environnement et à respecter les normes nationales et européennes.
L'action 04 intitulée « Plans d'investissement pour la Corse » porte plusieurs projets d'aménagement de l'Ile. Il s'agit de combler les retards de développement de la collectivité par une mise à niveau de ses équipements publics.
L'action 08 « Volet territorialisé du plan national d'action Chlordécone », adossée aux plans Chlordécone mis en oeuvre depuis 2009 en Martinique et en Guadeloupe, porte les mesures du plan IV (2021-2027).
L'action 09 « Littoral 21 » porte la stratégie nationale pour la mer et le littoral conduite conjointement par l'État, le conseil régional d'Occitanie et la Caisse des dépôts et consignations.
L'action 10 « Fonds interministériel pour la transformation de la Guyane » porte la majorité des mesures inscrites, au titre de la participation de l'État, dans le contrat de convergence et de transformation (CCT) de la Guyane pour la période 2019-2022, signé le 8 juillet 2019 avec le président de la collectivité, en vue de réduire les écarts de développement avec l'Hexagone. Il a été prorogé par la suite afin de préparer un nouveau CCT.
L'action 11 « Reconquête de la qualité des cours d'eau en Pays de la Loire », doit répondre aux enjeux écologiques, économiques, d'aménagement du territoire et de santé publique liés à la qualité des eaux ligériennes très dégradées. Cette action s'est achevée le 31 décembre 2024.
L'action 12 « Service d'incendie et de secours de Wallis-et-Futuna » porte, depuis 2021, les crédits permettant aux deux centres de secours d'assurer les interventions courantes et les missions de gestion des crises en l'attente de la révision du statut qui attribuera cette compétence à l'assemblée territoriale. Interrogée par le rapporteur spécial, la direction des missions de l'administration territoriale et de l'encadrement supérieur (Dmates) du ministère de l'intérieur a confirmé ne pas disposer d'informations sur une éventuelle avancée de la réforme statutaire.
L'action 13 « Plan Sargasses II » vise à lutter contre les conséquences du phénomène d'échouage massif d'algues sargasses sur l'arc antillais avec une approche aussi bien curative que préventive.
Au 31 décembre 2024, le montant total des crédits exécutés sur le programme s'élève à 103,5 millions d'euros en AE (contre 116,3 millions d'euros en AE en 2023 et 328,1 millions d'euros en 2022) et à 141,9 millions d'euros en CP (contre 148,5 millions d'euros en 2023 et 137,7 millions d'euros en 2022). Comme chaque année, le différentiel entre les montants exécutés et les crédits ouverts en loi de finances initiale peuvent être assez conséquents pour deux raisons : d'une part, certaines actions bénéficient de mouvements infra-annuels importants et d'autre part le programme fait globalement l'objet de reports de gestion assez conséquents d'un exercice sur l'autre.
La forte diminution en AE sur les deux derniers exercices s'explique principalement par le fait que les moyens alloués à l'action 10 « Fonds interministériel pour la transformation de la Guyane » avaient été sensiblement, mais ponctuellement, revalorisés en cours d'exercice 2022 pour accroitre les moyens alloués à l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFIT France), avant de retrouver un niveau plus conforme aux exercices antérieurs lors de l'exercice 2023.
* 1 Le rapport d'information n° 685 (2023-2024) de la mission d'information, déposé le 12 juin 2024, intitulé « Dégradation des finances publiques : entre pari et déni » est disponible en ligne.
* 2 D'après la Cour des comptes, ce total représente 19 % du montant total des dépenses fiscales de l'État qui s'élèveraient en 2024 à 83,3 milliards d'euros.
* 3 Ce montant est financé différemment selon qu'il s'agit de structures postales (26 000 euros venant du fonds postal national de péréquation territoriale et 4 000 euros provenant du fonds national France Services) ou de structures non postales (15 000 euros provenant des crédits du fonds national d'aménagement et de développement du territoire et 15 000 euros du fonds national France Services).
* 4 Rapport d'information n° 778 (2021-2022) sur le premier bilan du financement des maisons France services fait par M. Bernard Delcros au nom de la commission des finances, déposé le 13 juillet 2022.
* 5 Loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.
* 6 Le rapporteur spécial consacrera prochainement un rapport au FNADT, dans le cadre d'un contrôle budgétaire.
* 7 Rapport d'information n° 337 (2023-2024), déposé le 14 février 2024, de M. Bernard Delcros, fait au nom de la commission des finances, « L'ANCT, une agence à consolider au service des territoires ».
* 8 Conformément aux dispositions du décret n° 2014-1056 du 16 septembre 2014 relatif à la prime d'aménagement du territoire pour l'industrie et les services.
* 9 Il existait sept actions en 2022 auxquelles s'est ajoutées l'action 13 « Plan sargasses II » tandis que l'action « Reconquête de la qualité des cours d'eau en Pays de la Loire » s'est éteinte le 31 décembre 2024.