CHAPITRE IV

PRINCIPALES OBSERVATIONS DE LA COMMISSION

Votre Commission des finances entend cette année faire deux observations.

I. L'ÉDUCATION NATIONALE CONSERVE SON STATUT DE "PRIORITÉ''

Comme l'an dernier, le projet de loi de finances pour 1996 traduit l'effort exceptionnel consenti par le Gouvernement en faveur de l'éducation nationale.

En dépit d'une contrainte budgétaire de plus en plus rigoureuse, le Gouvernement, continue de dégager des moyens supplémentaires en faveur de l'éducation nationale. Les crédits augmentent en effet de 4,27 % à structures constantes, alors que l'ensemble des dépenses du budget de l'État ne progresse que de 1,8 %.

En outre, il convient de se féliciter de la constance de la politique mise en oeuvre qui privilégie les réformes structurelles et s'inscrit de la sorte dans le long terme.

Conscient de l'importance de l'éducation dans le développement de la Nation, votre Commission des finances ne peut qu'approuver l'effort effectué par le Gouvernement.

Toutefois, il faut être conscient que l'accroissement des moyens ne pourra se poursuivre indéfiniment à un tel rythme et c'est pourquoi votre Commission souhaite que, dès à présent, soient envisagés les voies et moyens d'un développement de l'effort éducatif de la Nation plus axé sur le qualitatif que sur la seule augmentation des crédits.

II. LA NÉCESSITÉ D'UNE ACTION STRUCTURELLE, PLUS AXÉE SUR LE QUALITATIF QUE SUR L'AUGMENTATION DES CRÉDITS.

Depuis 1990, les crédits du budget de l'État consacrés à l'éducation nationale sont passés de 200 milliards de francs à 273 milliards, ce qui représente une augmentation en francs courants de plus de 36 %. Aucun autre département ministériel n'a connu une évolution aussi favorable.

Une telle évolution est d'autant plus importante que la part des autres financeurs publics a cru également de façon significative. Ainsi, sur la même période, les collectivités territoriales ont augmenté leur effort de plus de 44 % en faisant passer de 74,4 milliards de francs à 107,2 les sommes consacrées à l'enseignement scolaire.

Il est clair qu'un tel rythme d'augmentation des crédits ne pourra se poursuivre, alors que les effectifs des élèves, contrairement à ceux des étudiants, auront désormais tendance à stagner voire à diminuer.

Dans son rapport public de 1990, la Cour des comptes constatait en effet que les recrutements dans l'enseignement secondaire étaient arrêtés sans référence aux besoins et restaient mal organisés. Les objectifs de la formation initiale étaient dénaturés et certains établissements étaient excessivement privilégiés. La Cour constatait également que les moyens de la formation continue étaient affectés sans rigueur pour des actions mal connues et des résultats médiocres.

Les déficits de recrutement, soulignés dans le Rapport public, ont fait place, semble-t-il désormais, à des excédents suscités tant par la situation du marché du travail que par les incitations financières mises en oeuvre.

Le recrutement toujours croissant d'instituteurs est réclamé alors que le problème central est celui de l'absence de redéploiement des enseignants lorsque les classes sont fermées.

Par ailleurs, dans ses observations aux Rapports publics 1988 et 1990 sur les instituteurs et les professeurs de l'enseignement secondaire, la Cour des comptes consacrait de longs développements aux graves insuffisances de la politique de formation continue et au fonctionnement inégal des missions académiques à la formation des personnels de l'éducation nationale (MAFPEN). Or, au-delà des seules économies susceptibles d'être retirées d'un meilleur emploi des crédits, c'est surtout l'efficacité du corps enseignant qui est conditionnée par une politique de formation continue, qui à l'inverse de la formation initiale, ne dépend que de l'administration du ministère de l'éducation nationale.

Parmi la longue liste des associations bénéficiant de subventions du ministère de l'éducation nationale, beaucoup sont également subventionnées à titre principal ou subsidiaire par d'autres départements ministériels (jeunesse et sports, culture, affaires étrangères...).

Certes, les subventions en cours ne représentent pas, au total, des sommes considérables au regard du budget du ministère (0,10 %), et leur montant a sensiblement régressé en 1994 (-13,3 %), après une progression de 10,4 % l'année précédente. Ainsi, en 1994, presque 250 millions de francs ont été accordés à 270 associations, contre 290 millions de francs à 287 associations en 1993. L'effort d'économie a porté en priorité sur les subventions les plus importantes tandis qu'une multitude de faibles subventions était préservée. Néanmoins, le contrôleur financier a continué de refuser ou de différer son visa à de nombreuses opérations en considérant que beaucoup de subventions ne relevaient pas de la vocation du ministère ou que les justifications de la demande n'étaient pas suffisants.

Subventions accordées aux associations en 1994

Enfin, l'examen critique de l'organisation de l'éducation nationale pourrait sans doute faire apparaître des gains de fonctionnement non négligeables. Ainsi les structures de l'administration centrale rassemblent 4.100 agents, soit à peine un septième des effectifs administratifs, ce qui confirme le caractère très déconcentré de ce ministère.

Néanmoins, un rapport sur les perspectives d'évolution de l'administration centrale baptisé "centrale 2000" élaboré par une mission interne animée par l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale (IGAEN) et pris en compte par la "mission Picq" a fait ressortir l'organisation complexe des services centraux qui comportent 9 directions dont les compétences se recoupent et se chevauchent.

Dressant le constat "d'une administration centrale embolisée par la gestion, dont les structures éclatées et les modes de fonctionnement sont inadaptés", il préconise une réorganisation autour de cinq grandes directions. La récente transformation, en mai 1995, de la Direction des personnels administratifs, ouvriers et de services en une Direction de l'administration et du personnel n'a pas fondamentalement simplifié la structure.

S'agissant des grands établissements nationaux relevant des enseignements scolaires, dont le paysage a beaucoup évolué au cours des dernières années, un examen d'ensemble, afin de s'assurer de la cohérence de leurs missions et de l'évaluation de leurs activités, serait sans doute nécessaire.

Pour toutes ces raisons, et sans remettre en cause le caractère prioritaire de l'enseignement scolaire, il apparaît désormais nécessaire, compte tenu de l'état préoccupant de nos finances publiques, que, d'une part, le Gouvernement procède au réexamen attentif de certains modes traditionnels de fonctionnement afin de concentrer les moyens nouveaux sur l'amélioration des conditions d'enseignement et que, d'autre part, le Parlement cesse de considérer qu'un bon budget est forcement un budget qui augmente.

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