III. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DE L'ACCORD DU 18 MARS 1993

A. LE PRINCIPE : APPLIQUER LA LOI FÉDÉRALE

Malgré la pétition de principe de l'application de la législation allemande aux forces étrangères stationnées sur le territoire de la République fédérale, de nombreuses dérogations permettent aux forces stationnées de bénéficier dans certains domaines, d'avantages ou de facilités particulières. De sorte que les forces étrangères, selon les domaines concernés, peuvent relever de deux législations différentes : soit le droit allemand, soit le droit de l'Etat d'origine.

Les domaines d'application du droit français, en ce qui concerne nos forces, sont variés : normes françaises quant à la construction, caractéristiques et équipement des véhicules, compétence juridictionnelle française pour les infractions pénales, règlements de sécurité propres à l'intérieur des bâtiments de la force, horaires d'ouverture et de fermeture des magasins des forces. A ces dérogations au droit allemand, s'ajoutent diverses exonérations, notamment fiscales ou douanières. Enfin, en matière de manoeuvres militaires en terrain libre, des facilités particulières sont accordées aux forces étrangères.

La philosophie générale du texte qui nous est soumis consiste donc à réaffirmer la règle de l'application du droit allemand et réduire les dérogations accordées.

B. LES PRINCIPAUX DOMAINES CONCERNÉS

Dans cette logique, les domaines suivants font l'objet de modifications significatives.

1. La circulation

Pour ce qui est des immatriculations des véhicules privés, le texte prévoit la possibilité, sous conditions, d'immatriculations allemandes, ainsi que la possibilité, pour les autorités allemandes, d'exiger la notification des immatriculations spécifiques faites par les forces. S'agissant des mouvements militaires et du transport des matières dangereuses, les autorisations correspondantes seront instruites par la Bundeswehr et les Länders, qui coordonneront l'exécution de ces déplacements.

D'autre part, il est prévu désormais que les services allemands pourront inspecter les installations de contrôle technique des véhicules des forces.

2. Les manoeuvres et exercices

La possibilité pour les forces d'exécuter des manoeuvres à l'extérieur de leurs installations est confirmée, mais celles-ci devront respecter les conditions définies par la loi allemande, notamment en matière de réquisition, de circulation aérienne et de respect de l'environnement. Il en résultera une limitation de la capacité de manoeuvre en terrain libre. Par ailleurs la participation à des manoeuvres d'unités non stationnées en République fédérale nécessitera le consentement des autorités.

En fait, tous les exercices aériens et terrestres, à l'extérieur des emprises mises à la disposition des forces seront soumis à l'approbation des autorités allemandes.

3. L'utilisation des biens immobiliers affectés aux forces

Dans ce domaine la règle est posée de la référence au droit allemand, sauf accords contraires. Les manoeuvres exécutées à l'intérieur des domaines de la force par des unités transférées en RFA pour l'occasion, devront recevoir l'accord des autorités allemandes, sauf s'il s'agit d'unités inférieures à 200 hommes et organiquement liées à l'unité stationnée, auquel cas une simple notification suffira.

Les nouvelles dispositions précisent par ailleurs les conditions d'accès des autorités allemandes aux biens immobiliers des forces « pour la sauvegarde des intérêts allemands ».

Le principe de coopération entre autorités allemandes et autorités de la force pour l'administration des biens affectés à la force est réaffirmé et son domaine élargi à la protection de l'environnement, y compris le recensement et l'évaluation des sites présentant un danger en raison d'une contamination du sol.

Surtout, pour les travaux à réaliser sur ces biens, la règle devient la procédure indirecte, c'est-à-dire le recours, par la force, aux entreprises allemandes, de préférence à leurs propres personnels (procédure directe), sauf pour des travaux d'entretien ou de peu d'importance.

4. Le respect des prescriptions de sauvegarde de l'environnement

Des dispositions nouvelles sont insérées dans l'accord, affirmant la reconnaissance, par les Etats d'origine des forces stationnées en Allemagne, de l'importance de la protection de l'environnement dans le cadre de leurs activités.

Les projets des forces devront faire l'objet d'études quant à leur impact sur l'environnement. Une analyse devra être faite quant aux effets de leurs activités dans tous les domaines : air, eau, flore, faune etc. Si des dégâts sont constatés, ils devront entraîner réparation ou une compensation appropriée.

5. Le droit du travail appliqué aux personnels civils des forces

L'accord est l'occasion, pour les autorités allemandes, d'appliquer, d'une manière plus systématique qu'auparavant, le droit de cogestion des comités d'entreprise. Toute restriction à l'exercice de ce droit ne pourra se fonder que sur des « intérêts militaires ».

A titre provisoire, et jusqu'au 31 décembre 1994, cinq domaines avaient été exclus du droit de codécision : les classements et reclassements d'emplois, les plans sociaux, l'embauche, l'amélioration de la rentabilité du travail, la mise en application de nouvelles méthodes de travail. Cette exclusion temporaire est aujourd'hui terminée.

6. Les questions juridictionnelles

La convention de Londres de 1951 accorde aux autorités des Forces stationnées, un droit de juridiction exclusive sur leurs membres pour les infractions réprimées par la législation nationale (atteinte à la sûreté de l'Etat par exemple), mais ne tombant pas sous le coup de la législation allemande.

Symétriquement, la convention reconnaît aux autorités allemandes une juridiction exclusive pour les infractions punies par la législation allemande et non par la législation de l'Etat d'origine.

Cependant, pour le cas le plus fréquent, à savoir la commission d'infractions punies par les deux législations, les autorités des forces ont priorité de juridiction pour les infractions concernant la sûreté de l'Etat d'origine, les personnes et la propriété des membres des forces ou encore les infractions résultant de négligences dans l'exécution du service. Les autorités allemandes ont priorité de juridiction pour les autres infractions, mais, en application de la convention, ont renoncé, d'une manière générale, à l'exercice de cette priorité, tout en se gardant la possibilité de révoquer cette renonciation dans certains cas.

L'accord nouveau précise que la renonciation (par l'Allemagne à sa priorité de juridiction) ne saurait concerner les cas susceptibles de la peine de mort. Par ailleurs, les « intérêts de l'administration de la justice allemande » légitimant la révocation de la renonciation à la priorité de juridiction sont précisés. Il s'agit d'affaires particulièrement graves :

- infractions relevant de la cour d'appel en premier ressort

- « infractions ayant entraîné mort d'homme, vol avec violences, viol -pour autant qu'elles n'aient pas été dirigées contre un membre d'une force ou d'un élément civil ou une personne à charge »

7. La création d'une procédure de règlement des différends

En cas de litige au sujet de l'interprétation ou de l'application de l'accord, une procédure est prévue à plusieurs niveaux :

- tentative de règlement amiable au niveau le plus bas, voire à un niveau militaire ou civil supérieur

- à défaut de règlement dans les quinze jours, toute partie au différend peut demander la constitution d'une commission consultative, composée d'un nombre de membres correspondant à celui des parties en cause.

Elle peut, lors de son travail, requérir l'opinion de toute personnalité ou organisation (OTAN, UEO, OCDE).

Elle dispose de soixante jours pour émettre ses recommandations finales.

Sauf objection dans les quinze jours, par l'une des parties, celles-ci exécutent la solution préconisée par la Commission.

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