CHAPITRE III - L'ACCESSION À LA PROPRIÉTÉ

La relance de l'accession à la propriété est la réussite la plus manifeste du Gouvernement dans la politique du logement, surtout grâce à l'essor de l'avance à taux nul.

La réforme de son financement, qui fait désormais peser en totalité sur le " 1 % logement" le poids de l'avance, peut néanmoins susciter quelques inquiétudes.

I. LA RÉUSSITE DU PRÊT À TAUX ZÉRO

Le Gouvernement avait initialement prévu de distribuer 120.000 prêts à taux zéro par an. Le rythme actuel est plus proche de 130.000 à 135.000.

Fin août 1996, 100.000 prêts avaient été enregistrés par la société de gestion du fonds de garantie à l'accession sociale (SGFGAS) depuis octobre 1995. Fin septembre, ce chiffre avait atteint 131.000.

Les parts de marché sont les suivantes :

- Crédit agricole 35 %

- Crédit mutuel 14 %

- Crédit foncier 13 %

- Crédit immobilier 12 %

- Caisses d'épargne 11 %

Pour tenir compte de la baisse des taux d'intérêt, la durée plafond de remboursement de l'avance a été légèrement allongée par un arrêté du 24 octobre 1996, notamment pour les tranches de revenu relativement plus élevées. Dans ces tranches (au-delà de 165.000 francs annuels), la brièveté de la durée de remboursement rendait difficile l'utilisation du prêt à taux zéro.

Pour les revenus les moins élevés (sous 124.300 francs), un différé de remboursement est prévu. Il permet de ne rembourser le prêt qu'après une longue période au cours de laquelle il ne représente aucune charge. Cela permet aux accédants de financer les autres prêts qui représentent environ 63 % du montant de l'acquisition pour ces ménages (17 % pour le prêt à taux zéro, 20 % d'apport personnel).

*Cette durée a été allongée d'un an par rapport au décret du 2 octobre 1995

Les plafonds de ressources sont fixés en fonction de la taille du ménage et selon que le logement est situé dans l'un des départements de l'Île-de-France ou dans le reste du territoire.

Environ trois accédants sur quatre sont éligibles au prêt à 0 %.

Le coût budgétaire moyen d'une opération d'accession avec un prêt à 0 % est égal au montant de la subvention versée par prêt. Le montant constaté est en moyenne de 67.000 francs par prêt sur la totalité des prêts, y compris ceux destinés à l'acquisition-amélioration d'un logement ancien comportant entre 20 et 35 % de travaux.

Les prêts distribués se ventilent de la façon suivante selon le niveau de ressources des ménages :

Source : SGFGAS

Ce tableau permet d'observer que 78 % des bénéficiaires se situent dans les tranches de revenus qui ouvrent droit à une durée de remboursement de 17 ans avec différé d'amortissement. Leurs revenus sont inférieurs à trois SMICs.

Le prêt à 0 % n'ouvre pas droit par lui-même à l'APL, mais l'emprunteur peut en bénéficier à condition que le financement de l'opération comporte un prêt conventionné ou un prêt d'accession sociale qui sont désormais les seuls financements ouvrant droit à cette aide personnelle. Selon les statistiques provisoires portant sur le premier trimestre 1996, le prêt à 0 % est associé à un PAS dans 46 % des cas et à un PC dans 12 % des cas, soit environ 58 % des prêts pouvant ouvrir droit à l'APL.

Pour l'année 1996, le Premier ministre a décidé de réduire de 35 % à 20 % la quotité de travaux nécessaire pour bénéficier du prêt à taux zéro. Environ 20.000 opérations auront été réalisées sous cette quotité dérogatoire.

Répartition des opérations (1996)

Neuf

71 %

35 % de travaux

16 %

20 % à 35 % de travaux

13 %

Le logement-type identifié par la société de gestion du FGAS comme étant financé à l'aide du prêt à taux zéro est une maison de 103 m 2 (4 à 5 pièces). Plus de 60 % des biens financés à l'aide de ce prêt sont des logements individuels.

C'est pourquoi on observe une nette reprise de la construction de maisons individuelles, qui avait commencé avec la relance des PAP en 1993-1994 et qui se poursuit aujourd'hui, puisqu'elle excède la construction de logements locatifs depuis le 2ème trimestre 1995.

Répartition de la construction depuis 1994
(en milliers de logements)

Individuel

Collectif

1994

145,0

157,3

1995

143,3

142,6

1996 (glissement annuel fin septembre)

147,2

126,7

La diminution du coût moyen des opérations (620.000 francs au dernier trimestre 1995 contre 569.000 francs actuellement) à quotité de prêt à taux zéro inchangée dans l'ensemble du financement peut laisser penser que le montant moyen des prêts restera aux alentours de 100.000 francs, et non 120.000 francs comme on l'imaginait au moment du lancement de la réforme.

C'est pourquoi le Gouvernement estime à 58.300 francs en 1997 la subvention moyenne par prêt. Cela reste un pari puisque celle-ci a été de 67.000 francs sur les huit premiers mois de 1996 8 ( * ) .

C'est pourquoi votre rapporteur tient à faire part d'une certaine inquiétude quant au bouclage du financement des prêts à taux zéro à l'avenir. 7 milliards de francs sont prévus en 1997 contre 7,8 milliards de francs en 1996. Or, le transit de l'ensemble de ce financement par le compte d'affectation spéciale n° 902-30 aboutit à un contingentement de fait de l'avance, dont le ministre du logement avait initialement obtenu qu'elle soit délivrée à guichet ouvert.

À cet égard, votre rapporteur ne peut que citer ce qu'écrivait notre rapporteur général sur le projet de loi de finances 1996 à propos du prélèvement sur la participation des employeurs à l'effort de construction destiné à financer une partie de la réforme :

"À supposer que ce prélèvement ne génère par lui-même aucun frais supplémentaire, son effet sur l'économie du logement serait au mieux neutre : les 900 millions de francs prélevés seront autant de prêts à l'accession à la propriété et au secteur locatif que les collecteurs ne pourront plus réaliser. Compte tenu des caractéristiques des prêts du 1 % logement (très faible taux : 1 à 3 %, longue durée), leur substituer des avances à taux nul ne présente pas une différence considérable.

"Cette neutralité sera-t-elle durable ?

"À terme, le Gouvernement ne sera-t-il pas tenté de faire porter sur le 1 % logement la totalité du poids de la réforme de l'accession à la propriété ? On a vu que cette réforme ne présente pas une des caractéristiques souhaitées par les services du budget, à savoir une parfaite maîtrise budgétaire. Celle-ci pourrait être atteinte si l'avance à taux nul était entièrement financée par le compte d'affectation spéciale n° 902-28, puisqu'un CAS ne peut dépenser davantage qu'il n'a de recettes" 9 ( * ) .

Compte tenu des réserves de l'avance à taux nul en autorisations de programme, il n'y a pas péril en la demeure pour le moment. Les versements effectués à la SGFGAS ont atteint une moyenne mensuelle de 287 millions de francs de janvier à août 1996, soit un rythme annuel de 3,45 milliards de francs. Il conviendra toutefois d'être très vigilant, car la construction est en grande difficulté et s'accroche au prêt à taux zéro comme à une bouée de sauvetage.

En 1996, les versements de l'État à la SGFGAS jusqu'au 31 août 1996 ont été les suivants :

(En millions de francs)

Versements de l'État à la SGFGAS

Janvier

532,487

Février

156,623

Mars

239,344

Avril

262,748

Mai

307,973

Juin

10,987

Juillet

400,785

Août

388,457

L'ensemble des versements de l'État à la SGFGAS effectués en 1996 l'ont été à partir du chapitre 65.48/40 du budget du logement à l'exception du versement du mois de juillet effectué à partir du compte d'affectation spéciale n° 902-28 "fonds pour l'accession à la propriété".

* 8 1 La baisse des taux d'intérêt paraît n'avoir aucun lien immédiat avec cette baisse. En effet, la durée des prêts est révisée chaque trimestre pour que la subvention reste constante. Seule une variation de la ventilation des prêts entre les différents niveaux de ressources des ménages et une variation du montant moyen devraient faire évoluer la subvention moyenne.

* 9 Rapport n°77 - Sénat - 1995 - 1996 - Tome II fascicule 1 p. 170

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