CHAPITRE IV
DES FONCTIONS DE MAIRE ET D'ADJOINT

L'article 88-3 de la Constitution dispose que les citoyens de l'Union ne peuvent exercer les fonctions de maire et d'adjoint.

Le présent chapitre propose en conséquence d'insérer dans le code général des collectivités territoriales (CGCT) les mesures organiques permettant de répondre à cette exigence.

Là encore, ces nouveaux articles " L.O. " dudit code ne pourront être modifiés, le cas échéant, que par une loi organique votée dans les mêmes termes par les deux assemblées.

Article 8
(Article L. 2122-4 du code général des collectivités territoriales)
Exclusion des ressortissants communautaires
des fonctions de maire ou d'adjoint

Cet article propose d'insérer dans le code général des collectivités territoriales un nouvel article L.O. 2122-4-1 aux termes duquel " le conseiller municipal qui n'a pas la nationalité française ne peut être élu maire ou adjoint, ni en exercer même temporairement les fonctions ".

Cette disposition a une double portée.

1. Une inéligibilité spécifique : la non-possibilité pour un ressortissant communautaire d'être élu maire ou adjoint s'analyse comme une inéligibilité, dont la méconnaissance pourrait être sanctionnée dans les mêmes conditions que toute élection d'un maire inéligible (l'élection comme maire d'un conseiller municipal qui n'aurait pas 21 ans révolus, par exemple).

2. Une interdiction de portée générale : les conseillers municipaux étrangers ne pourront exercer, même temporairement, les fonctions de maire ou d'adjoint. Cette interdiction vise plusieurs cas de figure, notamment :

- la délégation de fonctions (article L. 2122-18 du CGCT). On sait que le maire peut déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement des adjoints, à des membres du conseil municipal. Le texte proposé interdira que les fonctions du maire soient déléguées aux membres non français du conseil municipal ;

- la délégation spéciale prévue par l'article L. 2121-35 du CGCT (en cas de dissolution d'un conseil municipal, par exemple) ;

- le remplacement du maire dans la plénitude de ses fonctions par un des conseillers municipaux désigné par le conseil ou pris dans l'ordre du tableau, dans les cas prévus à l'article L. 2122-17 du CGCT (en cas de suspension du maire, de révocation, etc.).

Le présent article répond donc bien à la posée par l'article 88-3 de la Constitution.

Votre commission des Lois propose au Sénat d'adopter cet article.

Article 9
(Article L.O. 2121-6-1 du code général des collectivités territoriales)
Dissolution de plein droit d'un conseil municipal
dont le nombre des conseillers français serait insuffisant
pour permettre l'élection du maire et d'un adjoint

· Cet article propose de compléter la section 3 du chapitre premier du titre II du livre premier de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales (" Organes de la commune ") par un nouvel article L.O. 2121-6-1 aux termes duquel le conseil municipal serait dissous de plein droit s'il ne comporte pas en son sein un nombre suffisant de conseillers de nationalité française pour permettre l'élection du maire et d'un adjoint (c'est-à-dire l'effectif minimal de l'exécutif municipal, tel qu'il est déterminé par l'article L. 2122-1 du CGCT).

En d'autres termes, un conseil municipal ne comportant pas au moins deux Français serait dissous de plein droit.

· Votre commission des Lois a décidé de supprimer cette disposition.

Un conseil municipal ne comportant aucun Français ou n'en comportant qu'un seul représente une hypothèse d'école tellement improbable qu'elle ne justifie pas d'adopter une disposition organique spécifique. A la limite, en acceptant d'acter cette possibilité dans la loi organique, le législateur semblerait même l'envisager comme un aléa somme toute banal dans la vie d'une commune.

D'autre part, cet article propose d'instituer une solution spécifique pour régler une situation qui, d'un point de vue juridique, ne l'est pas. On peut tout-à-fait imaginer d'autres cas où un conseil municipal serait confronté à la même impossibilité d'élire au moins un maire et un adjoint, par exemple si tous les conseillers municipaux ont moins de 21 ans.

Le droit en vigueur permet déjà de régler de telles situations, moyennant le recours à la dissolution selon les procédures habituelles. Une disposition particulière n'est donc pas nécessaire.

C'est pourquoi votre commission des Lois propose au Sénat de supprimer purement et simplement cet article.

Article additionnel après l'article 9
(article L.O. 238-1 du code électoral)
Interdiction de cumuler deux mandats de conseillers municipaux,
en France et dans un autre Etat de l'Union européenne

A partir du moment où le projet de loi organique ne reconnaît pas aux ressortissants communautaires le droit de " double vote " -c'est-à-dire la possibilité de voter aux élections municipales à la fois en France et dans un autre Etat de l'Union européenne- il paraît logique d'interdire aussi le " double mandat ".

Or, le projet de loi organique ne comporte pas de disposition particulière à cet égard, et en cas de double mandat, rien n'indique qu'il pourrait être fait application de l'article L. 238 du code électoral, aux termes duquel " nul ne peut être membre de plusieurs conseils municipaux ". Les incompatibilités étant " de droit étroit " -et en l'absence d'une disposition organique expresse- les juridictions pourraient en effet considérer que les assemblées délibérantes des collectivités territoriales de base des autres Etats de l'Union européenne ne sont pas des conseils municipaux au sens de l'article L. 238.

La directive du 19 décembre 1994 autorise les Etats à étendre leur régime national d'incompatibilités " à des fonctions équivalentes exercées dans d'autres États membres ".

Pour prévenir les contentieux, votre commission des Lois propose de tirer parti de cette faculté prévue par la directive et d'introduire dans le chapitre du code électoral traitant des incompatibilités une disposition organique selon laquelle le ressortissant communautaire ne pourra être à la fois membre d'un conseil municipal en France et de l'assemblée délibérante d'une collectivité territoriale de base dans un autre Etat de l'Union européenne.

Cette disposition ne créerait pas d'inéligibilité -on voit d'ailleurs mal comment empêcher un ressortissant communautaire d'être élu dans un autre Etat de l'Union européenne, si la législation de cet Etat le lui permet- mais amènerait l'intéressé à devoir opter dans les dix jours à compter du jour où l'incompatibilité serait connue. A défaut d'abandonner l'un ou l'autre de ses deux mandats incompatibles, il serait déclaré démissionnaire d'office de son mandat de conseiller municipal.

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