TITRE II - DISPOSITIONS PERMANENTES

A. Mesures fiscales

ARTICLE 49 - Institution d'un crédit d'impôt à raison des dépenses d'entretien de l'habitation principale

Commentaire : le présent article crée un crédit d'impôt sur le revenu portant sur les dépenses de travaux d'entretien et de revêtement de surfaces, à l'exception des réparations locatives, effectués dans la résidence principale. Ce dispositif est un substitut à l'application du taux réduit de TVA sur les travaux portant sur les logements existants, impossible en l'état actuel du droit communautaire. L'Assemblée nationale a relevé les plafonds de dépenses initialement prévus .

I - CHAMP D'APPLICATION

Le présent dispositif s'applique à tous les contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu (qui doivent déclarer leur revenu à ce titre), qu'ils soient propriétaires ou locataires de leur logement.

Il concerne la résidence principale lorsqu'elle est située en France ,

ce qui est traditionnel pour les avantages fiscaux relatifs au logement. La condition d'ancienneté de l'immeuble, deux ans, est plus nouvelle : aucun avantage fiscal ne concernait jusqu'alors l'immobilier ancien récent. Cette condition interdit de bénéficier de l'avantage fiscal pour des travaux consécutifs à une construction ou reconstruction, mais pas, semble-t-il, en cas d'agrandissement .

La consistance précise des travaux éligibles est plus difficile à cerner, et ne sera connue avec précision que lors de la publication de l'instruction fiscale d'application.

Le présent article prévoit que ces travaux doivent être de deux sortes :


• Il peut s'agir de dépenses d'entretien, actuellement exclues des autres avantages fiscaux, notamment de la réduction d'impôt pour grosses réparations prévue par l'article 199 sexies D du code général des impôts.

Ces dépenses d'entretien sont celles qui "ont pour objet de maintenir un immeuble en bon état et d'en permettre un usage normal sans en modifier la consistance, l'agencement ou l'équipement initial" 1 ( * ) .

Toutefois, au sein des dépenses d'entretien, seules celles qui seraient à la charge du propriétaire si l'immeuble était loué sont éligibles au dispositif. Il s'agit de charges déductibles du revenu brut foncier. Les réparations locatives (au sens de l'article 1754 du code civil) qui seraient à la charge du locataire et qui ne sont pas en principe déductibles du revenu foncier, en sont exclues (décret n° 87-713 du 26 août 1987).

Parmi les travaux d'entretien, seuls les plus gros sont donc concernés : par exemple le changement d'un appareil sanitaire (et non le remplacement d'un joint de plomberie) ; le remplacement d'une fenêtre (et non le remplacement du mastic ou d'un carreau cassé) ; la réfection partielle de l'installation électrique (et non le remplacement d'un interrupteur, d'une prise de courant ou d'une baguette de protection des fils électriques).

Sont également concernés les travaux de réparation d'éléments ajoutés à la suite de dépenses d'amélioration. Toutefois, les dépenses d'amélioration elles-mêmes ne sont pas concernées ; elles peuvent bénéficier de la réduction d'impôt pour gros travaux visée par l'article 199 sexies D. Ainsi la réparation d'un interphone pourrait bénéficier de la mesure, mais pas la pose d'un interphone neuf.


• Il peut également s'agir de dépenses de revêtement des surfaces . Seules ces dépenses peuvent en fait concerner aussi le locataire. Il s'agit des revêtements muraux : papiers peints, tapisseries, carreaux, peintures... Il s'agit aussi des revêtements de sol : parquet, moquette, carrelage.

Le partage entre opérations éligibles et opérations non éligibles sera facilité par l'obligation incombant au contribuable souhaitant bénéficier du crédit d'impôt, de produire des factures des entreprises ayant réalisé les travaux à l'appui de sa déclaration de revenus. Ces factures devront indiquer l'adresse de réalisation des travaux, leur nature et leur montant.

En effet, la plupart du temps, les occupants d'une résidence principale ne recourent pas à une entreprise pour leurs plus menus travaux.

II. MODALITÉS D'APPLICATION DU CRÉDIT D'IMPÔT

Le plafond de dépenses était initialement fixé à 4.000 F pour une personne célibataire, veuve ou divorcée, et 8.000 F pour un couple marié soumis à imposition commune.

L'Assemblée nationale a porté ces plafonds à respectivement 5.000 F et 10.000 F et elle y a ajouté des majorations pour personnes à charge, comme cela existe pour de nombreux avantages fiscaux du même type : 500 F par personne à charge (premier enfant, adulte ou enfant handicapé, jeunes adultes ou étudiants rattachés au foyer fiscal, enfants mariés rattachés au foyer fiscal) ; portés à 750 F pour le second enfant et à 1.000 F par enfant à partir du troisième.

Le crédit d'impôt est lui-même de 15 % de la dépense éligible sous plafond.

Contrairement au régime de la réduction d'impôt pour dépenses de gros travaux, ce plafond n'est pas global sur la période considérée (1er janvier 1998 au 31 décembre 2000), mais annuel . Par conséquent, chaque contribuable verra son droit à avantage fiscal se renouveler chaque année pendant trois ans.

Ainsi, pour un couple marié ayant deux enfants, le plafond pourra atteindre 11.250 francs chaque année pendant trois ans, et l'avantage fiscal, égal à 15 % de cette somme, 1.687,50 F chaque année ; soit au total 5.062,50 F sur la période.

Par comparaison, dans le cas de la réduction d'impôt pour gros travaux, l'avantage fiscal maximal de cette famille serait de 8.900 francs globalement sur une période allant du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2001 (soit 5 ans) 2 ( * ) .

Le crédit d'impôt s'impute sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses ont effectivement été payées .

Cette imputation se fait de façon ultime, après :

- les réductions d'impôt ;

- l'avoir fiscal ;

- les autres crédits d'impôt ;

- les prélèvements et retenues libératoires.

Après imputation, la caractéristique essentielle du crédit d'impôt est que la somme résultant de son calcul bénéficie en tout état de cause au contribuable : si l'impôt dû est supérieur, il opère comme une réduction d'impôt, si l'impôt dû est inférieur, la différence est restituée, y compris si l'impôt est nul ou négatif.

Comme toujours, pour ce type d'avantage fiscal, il n'est pas cumulable avec les réductions d'impôt du même type, à savoir celle concernant la résidence principale (article 199 sexies) et les gros travaux (article 199 sexies D). Il ne sera donc pas possible de faire jouer les deux avantages en complément : la réduction d'impôt pour les gros travaux et le crédit d'impôt pour les petits travaux connexes à ces gros travaux.

De façon classique aussi, l'avantage fiscal est rappelé si une condition cesse d'être remplie.

III. PORTÉE ET APPRÉCIATION

Ce dispositif est un substitut à une application du taux réduit de la TVA sur les travaux relatifs à la résidence principale .

En effet, le calcul du taux de réduction a été réalisé pour effectuer une sorte de remboursement de la TVA au contribuable. La TVA représente en effet 17,1 % du coût TTC d'une opération, que le gouvernement a arrondi à 15 % pour simplifier.

Le crédit d'impôt est moins rationnel que ne le serait une baisse du taux de la TVA, en particulier selon la logique que souhaite appliquer le gouvernement :


• il établit une nouvelle petite niche fiscale au sein de l'impôt sur le revenu. La commission DUCAMIN avait en son temps considéré que ce type d'avantage, aussi coûteux globalement pour le budget de l'État que modique individuellement pour chaque contribuable, devrait être supprimé au profit d'un impôt sur le revenu à taux plus bas et à assiette élargie.


• une baisse de la TVA contribuerait au rééquilibrage, souhaité par le gouvernement, entre la fiscalité directe et la fiscalité indirecte ; alors que le crédit d'impôt accentue le déséquilibre ;


• son application sera plus complexe et délicate que ne le serait une baisse du taux de TVA sur l'entretien et le revêtement des logements.

Toutefois, le crédit d'impôt a été préféré à l'application du taux réduit de la TVA pour deux raisons essentielles.

La première est que l'état actuel du droit communautaire ne permet pas une telle extension. L'annexe à la sixième directive TVA précise que le taux réduit n'est applicable qu'aux logements construits ou réhabilités "dans le cadre de la politique sociale."

La seconde est que le crédit d'impôt peut être assorti de plafonds modestes (c'est le cas), et donc se révéler moins coûteux pour les finances publiques. Le rapport du groupe de travail du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie relatif aux possibilités d'évolution des taux de TVA estime ainsi à 21 milliards de francs la perte de TVA occasionnée par une extension du taux réduit aux travaux de toute nature sur les logements existants. Le coût du crédit d'impôt était quant à lui estimé à 1,1 milliard de francs en 1999 dans la version initiale du gouvernement. Les amendements votés par l'Assemblée nationale portent ce coût à 1,38 milliard de francs, qui peut s'analyser ainsi :

- le relèvement des plafonds à 5.000 F et 10.000 F représente un surcoût de 200 millions de francs ;

- la majoration pour charges de famille représente un surcoût de 80 millions de francs.

Toutefois, ainsi que la commission européenne vient de le proposer à l'occasion du sommet sur l'emploi de Luxembourg (20 et 21 novembre), la piste à explorer paraît bien celle d'une réduction du taux de TVA sur l'ensemble des travaux de "rénovation et de réparation de logements", car une telle mesure aurait un fort contenu en emplois et serait plus adaptée à la nature actuelle des besoins des économies européennes, dont le parc de logements a basculé d'une phase de reconstruction dans une phase de rénovation et de renouvellement.

Le gouvernement estime que 1.200.000 contribuables sont susceptibles de bénéficier de cette mesure chaque année, les travaux éligibles s'élevant en moyenne à 9.900 F pour les propriétaires et à 5.600 F pour les locataires.

Comme la réduction d'impôt pour gros travaux, ce dispositif peut être considéré surtout comme une tentative de lutte contre le travail au noir, l'établissement de factures étant nécessaire pour bénéficier du crédit d'impôt. À cet égard toutefois, le groupe de travail précité considère que la tentation du travail clandestin dans l'artisanat du bâtiment n'est pas seulement motivée par le poids de la TVA, mais aussi et surtout par celui des charges sociales, problème auquel le nouveau crédit d'impôt n'apporte pas de réponse.

Mais évidemment, pour appliquer le taux réduit de TVA sur les travaux de bâtiment et pour réduire les charges sociales pesant sur les entreprises, il est nécessaire, au préalable, de réduire de façon nette les dépenses publiques et sociales .

À défaut, et en attendant, il faut se contenter de ce crédit d'impôt, qui n'est qu'un pis aller.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article dans la rédaction de l'Assemblée nationale .

* 1 instruction fiscale du 28 avril 1997 prise pour l'application de la réduction d'impôt pour gros travaux dans la résidence principale.

* 2 20 % de (40.000 F + 2.000 F + 2.500 F) = 8 900 F

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