II. LA POLITIQUE DE LA FRANCE EN AFRIQUE À L'ÉPREUVE

Parce que la France n'a jamais délaissé l'Afrique, parce qu'elle est restée fidèle aux liens tissés par l'histoire et a voulu soutenir le développement du continent, en un mot, parce que, seule parmi les anciennes puissances coloniales, elle peut se prévaloir d'une vraie politique en Afrique, elle s'est exposée plus que d'autres aux critiques et aux reproches.

L'année 1997 s'est ainsi caractérisée par une attaque en règle contre notre diplomatie en Afrique. La France a été accusée d'ignorer les évolutions profondes du continent, et de s'en tenir à ses liens avec des chefs d'Etat autoritaires et corrompus au mépris des principes affichés au sommet franco-africain de La Baule. Considérée comme la première pièce d'un jeu de domino qui allait emporter toute l'Afrique centrale, la chute du Maréchal Mobutu a été considérée comme un grave revers de notre politique africaine. Ces sombres pronostics ne se sont pas vérifiés. Les troubles n'ont touché que le Congo et le retour au pouvoir d'un homme, Sassou N'guesso, jugé plutôt favorable à la France semble ouvrir à moyen terme une période de stabilité. En outre, faut-il le rappeler, la France n'a jamais eu d'intérêts économiques essentiels au Zaïre. La communauté française ne compte guère que six cents personnes. Enfin, la théorie des dominos ne s'est pas, jusqu'à présent, vérifiée.

Les jugements portés sur la politique de notre pays méritent ainsi plus de nuances. Est-ce à dire que notre action sur le continent ne doive pas s'adapter ? Au contraire, des changements paraissent souhaitables. Encore faut-il, pour en prendre la juste mesure, se reposer sur une analyse sereine et objective de la situation et non sur je ne sais quels partis pris.

A. LES RISQUES DE LA FIDÉLITÉ

La France demeure le premier bailleur de fonds du continent africain. Son aide s'inscrit dans le cadre d'une politique de coopération mise en place depuis la période de la décolonisation. Cependant, la position de la France apparaît aujourd'hui contestée. Cette remise en cause tien à la fois aux mutations du continent africain mais aussi à certaines erreurs ou lacunes dans la gestion de notre politique africaine.

1. La France, premier partenaire de l'Afrique

Tandis que l'aide publique au développement connaît depuis plusieurs années déjà un mouvement préoccupant de recul, la France a su maintenir une aide substantielle.

a) Le reflux historique de l'aide publique au développement

Dans son rapport " coopération pour le développement " (février 1997), l'OCDE dressait un constat alarmant de l'évolution de l'aide publique au développement. L'effort consenti par les pays industrialisés au profit des pays en développement a chuté de 14 % entre 1992 et 1995. Il est passé de 59,14 milliards de dollars en 1994 à 58,89 milliards de dollars en 1995.

L'aide représente en moyenne 0,27 % du produit national brut des pays membres du Comité d'aide au développement : un résultat bien en deçà de l'objectif de 0,7 % fixé par les Nations unies en 1970. Autour de cette moyenne, il existe d'importants écarts entre la participation des Etats-Unis (0,12 %), la plus faible au regard des moyens disponibles, et l'effort consacré à l'aide au développement par les pays scandinaves (au dessus de 0,80 %).

Aide publique au développement en pourcentage du PIB

En % du PIB

1995

1996

France hors TOM

0,48

0,43

Allemagne

0,31

0,32

Canada

0,38

0,31

Etats-Unis

0,10

0,12

Italie

0,15

0,20

Japon

0,28

0,20

Norvège

0,87

0,85

Pays-Bas

0,81

0,83

Royaume-Uni

0,28

0,27

Suède

0,77

0,82

. Un exemple de désengagement : le Japon

L'évolution de l'aide publique japonaise paraît exemplaire d'un certain désengagement de la communauté internationale vis à vis des pays en développement. Au premier rang mondial, en valeur absolue, l'aide publique japonaise a baissé de 35 % en 1996. En outre, le gouvernement japonais envisage une baisse de 10 % de l'aide publique au développement dans la prochaine loi de finances pour 1998. Cette réduction s'inscrit dans la logique -commune à la plupart des autres pays industrialisés- de maîtrise des dépenses publiques, mais elle s'explique également par la volonté de réformer le dispositif de l'aide, sinon l'esprit même de la coopération japonaise. Ainsi, le gouvernement souhaite favoriser une meilleure combinaison des capitaux privés à l'aide publique et d'une certaine façon, cette préoccupation fait écho au souci manifesté par les entreprises japonaises de bénéficier plus directement des concours publics destinés au monde en développement.

. L'Afrique, principale bénéficiaire de l'aide .

L'aide publique au développement bénéficie principalement à l'Afrique qui n'a toutefois reçu que 21,8 milliards de francs en 1995 contre 25 milliards en 1992 (suivent, en ordre décroissant : l'Asie, l'Amérique latine et l'Europe méridionale -par pays, la Chine reste le plus important bénéficiaire de l'aide publique au développement).

b) La France, un effort soutenu

Avec une aide publique au développement de 8,44 milliards de dollars en 1995, la France se situe parmi les premiers bailleurs de fonds derrière le Japon (14,48 milliards de dollars), mais devant les Etats-Unis (7,36 milliards de dollars). Rapporté au nombre d'habitants, l'aide française s'élève à 12 dollars par mois, tandis qu'elle ne dépasse pas deux dollars par mois aux Etats-Unis.

I - Aide bilatérale

24 751

- Dons

19 799

Coopération technique

10 175

Aide projets

2 775

Aide programme

1 749

Allégements de dettes

5 100

- Prêts

3 401

Aide projet

2 437,8

Consolidation de dettes

- 156

Coûts de gestion

- 1 551

II - TOM

4 686

III - Aide multilatérale

8 682

Aide européenne

4 321

- Banques et fonds multilatéraux

3 210

- Nations unies

746

- FASR-FMI

405

TOTAL APD

38 119




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