III. LES CRÉDITS PRÉVUS POUR 1998 DANS LE CADRE DE LA POLITIQUE D'INTÉGRATION DU GOUVERNEMENT

A. LES CARACTÉRISTIQUES DU PROJET DE BUDGET POUR 1998

Les crédits inscrits au titre de l'intégration dans le bleu budgétaire relatif à la santé, à la solidarité et à la ville, s'élèvent à 345,95 millions de francs , une fois déduites les sommes consacrées aux programmes et dispositifs de lutte contre les toxicomanies, dont l'examen relève de l'avis de notre collègue Louis Boyer relatif à la santé. Ces crédits s'inscrivent en légère baisse par rapport à l'année dernière où ils atteignaient 379 millions de francs.

1. Les interventions du budget de l'Etat

Deux catégories de dépenses sont prises en compte.

Il s'agit tout d'abord de financer les frais de fonctionnement des centres d'hébergement et de réadaptation sociale pour les réfugiés (294,7 millions de francs en 1998) qui bénéficient d'une mesure nouvelle positive de 7 millions de francs.

Le dispositif national pour les demandeurs du titre de réfugié politique comprenait, en 1996, 50 centres d'accueil pour les demandeurs d'asile (CADA), soient 3.263 places destinées aux personnes ayant régulièrement déposé une demande d'asile à l'OFPRA et demandant un hébergement au titre de l'aide sociale. Il disposait d'autre part, de 40 centres provisoires d'hébergement pour réfugiés (CPH) ouverts aux personnes ayant obtenu la reconnaissance de leur statut de réfugié par l'OFPRA et pouvant alors bénéficier d'actions d'insertion et de formation financés sur les crédits d'aide sociale de l'Etat.

Le second volet des dépenses porte sur les actions sociales en faveur des immigrants. Il s'agit du financement d'action concernant des contrats d'agglomérations pour 52 communes qui ne sont pas signataires d'un contrat de ville, des interventions sociales dans les centres de rétention, des actions de formation linguistique pour les réfugiés, du soutien scolaire aux élèves du second degré et enfin du règlement de l'allocation d'attente aux réfugiés. L'ensemble représente 77 millions de francs prévus pour 1998.

Ces crédits diminuent par rapport à l'année dernière en raison d'une révision à la baisse du poste budgétaire portant sur les allocations d'attente et les aides financières diverses pour les réfugiés et demandeurs d'asile qui passe de 32 millions de francs en 1997 à 18 millions de francs en 1998 en raison d'une diminution des effectifs.

Les demandeurs d'asile peuvent en effet préférer une solution individuelle plutôt qu'un hébergement collectif. Ils bénéficient alors de l'allocation d'insertion versée par les ASSEDIC sur fonds publics de l'ordre de 1.300 francs par mois et disposent de ce fait d'une couverture médicale.

2. Les organismes impliqués dans la politique d'intégration

Ces crédits méritent d'être replacés dans la perspective des interventions des divers organismes compétents en matière d'immigration. Il convient de citer :

- l'Office des migrations internationales (OMI), établissement public administratif doté d'un budget de 218 millions de francs en 1997, chargé de mettre en oeuvre la politique des pouvoirs publics en matière d'entrée et de travail des étrangers, de favoriser l'emploi à l'étranger et la mobilité internationale des Français ; l'office est alimenté grâce à ses ressources propres et perçoit notamment des redevances versées par les employeurs de main d'oeuvre étrangère, des pénalités pour l'emploi des clandestins étrangers et de redevances forfaitaires pour services rendus aux usagers ;

- la SONACOTRA est une société anonyme d'économie mixte, créée en 1956, dont le capital est détenu à 58 % par l'Etat ainsi que par la Caisse des dépôts (28 %) et le Crédit Foncier (14 %).

Elle a pour objet de construire, aménager et gérer des locaux d'habitation à caractère social, avec ou sans services, destinés à des personnes ou familles étrangères ou françaises disposant de ressources modestes, parmi lesquelles les travailleurs isolés, les ménages ayant des difficultés particulières à se loger, les jeunes en formation professionnelle ou en apprentissage (ainsi que les étudiants disposant de faibles ressources) et les travailleurs en mobilité.

Employant 1.586 salariés, la SONACOTRA a généré un chiffre d'affaires de 1.211,4 milliards de francs pour l'exercice 1996 constitué à 97,5 % de recettes liées aux redevances et loyers.

- La Commission nationale pour le logement des immigrés (CNLI) et son secrétariat général, créés en 1976, disposent dorénavant de ressources adossées à celles de l'Union Economique et Sociale du Logement (UESL) comme on l'a vu plus haut.

- L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) est un établissement public administratif, créé par une loi du 25 juillet 1952, placé sous la tutelle du ministère des affaires étrangères, doté d'un budget de 133 millions de francs en 1994. L'office est chargé de délivrer, aux réfugiés et apatrides, les documents nécessaires à leur insertion après instruction de leur demande.

B. LA POLITIQUE DE L'INTÉGRATION ANNONCÉE PAR LE MINISTÈRE DES AFFAIRES SOCIALES

La question de l'intégration des étrangers régulièrement accueillis sur notre sol est au coeur du pacte républicain et la France est toujours soucieuse de se montrer à la fois ferme et généreuse dans la tradition d'ouverture qui est la sienne.

·  Le 26 mars 1997, M. Eric Raoult, alors ministre délégué à la ville et à l'intégration avait présenté un programme de mesures, préparées en liaison avec M. Hamlaoui Mekachera, délégué à l'intégration, articulé autour de sept orientations majeures :

- remettre aux personnes autorisées à entrer dans notre pays un guide bilingue des droits et devoirs et des règles de vie en France intitulé " le contrat d'intégration " ;

- encourager l'apprentissage de la langue française par des crédits de formation ;

- développer les actions d'accompagnement scolaire en cohérence avec les projets éducatifs des établissements d'enseignement ;

- restructurer les foyers de travailleurs migrants ;

- renforcer la procédure du parrainage bénévole vers l'emploi en entreprise ou dans le secteur non marchand ;

- lutter contre les discriminations dans les domaines de l'emploi du logement et des loisirs, notamment par l'ouverture d'un service téléphonique ;

- réduire les délais d'instruction des dossiers de naturalisation.

·  Interrogé par votre rapporteur sur la politique d'intégration qui serait suivie en 1998, le ministère de l'emploi et de la solidarité, sans reprendre à son compte l'ensemble du dispositif proposé par M. Eric Raoult avant la dissolution de l'Assemblée nationale, conserve néanmoins certains de ses éléments.

Il est rappelé à titre liminaire que " la politique d'intégration a pour objectif premier de développer les conditions d'une rencontre harmonieuse des populations autorisées à séjourner durablement sur notre territoire avec la population française ".

Puis la réponse aux questionnaires évoque les axes de la politique d'intégration :

" - favoriser l'accueil des familles rejoignantes régulièrement autorisées à se regrouper en France en systématisant les visites d'accueil, développant les actions d'apprentissage du français ;

" - encourager l'insertion sociale des femmes par le développement des associations de femmes issues de l'immigration qui constituent des relais vers la société d'accueil, et des lieux de médiation entre les générations ;

" - accompagner la réussite scolaire des enfants en développant tant au sein de l'Education nationale les actions d'accueil des enfants rejoignants et de renforcement que des actions d'accompagnement scolaire dans les quartiers ;

Ces actions qui mobilisent à travers divers dispositifs des financements de l'Etat, du FAS et de la CNAF ont concerné en 1997 90.000 élèves pour un montant de 90 millions de francs.

" - favoriser l'accès à l'entreprise des jeunes, notamment à travers les actions de parrainage vers l'entreprise. A ce titre en 1997, 300 réseaux ont pu être constitués concernant 11.000 jeunes et mobilisant 20 millions de francs. "


Il est rappelé que la rénovation des foyers de travailleurs migrants constitue un axe important qui mobilisera 1,850 milliard sur cinq ans.

Enfin, il a été précisé à votre rapporteur qu'en 1998, le Gouvernement entendait prioritairement " développer les actions d'accueil des personnes étrangères autorisées à s'installer durablement en France : familles rejoignantes, conjoints de Français, familles de réfugiés, soit environ 20.000 personnes. "

A partir de bilans établis par l'OMI, il s'agirait d'adapter les modalités d'accueil à la nature des problèmes rencontrés : formation linguistique ou professionnelle, insertion sociale.

Pour cela, dans le cadre de plans départementaux, l'ensemble des services de l'Etat ainsi que les services sociaux spécialisés seraient mobilisés afin de favoriser la première insertion de ces familles au sein de la société d'accueil.

·  En tout état de cause, la politique d'intégration conduite par le ministère de l'emploi et de la solidarité ne constitue que le troisième volet d'une politique des migrations dont les deux autres sont la maîtrise des flux migratoires et la coopération avec les pays en développement.

C'est pourquoi il est difficile de juger dès aujourd'hui de la politique suivie, dans la mesure où le Gouvernement s'est engagé par ailleurs dans une importante réforme du droit de la nationalité ainsi que des conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France.

Dans un premier temps, le ministre de l'intérieur a pris une circulaire du 24 juin 1997 portant réexamen de la situation de certaines catégories d'étrangers en situation irrégulière. Cette procédure est actuellement en cours d'exécution.

Dans un second temps, sur la base du rapport remis par M. Patrick Weil au Premier Ministre dans le cadre d'une mission d'étude des législations de la nationalité et de l'immigration , M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, et Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, ont présenté au Conseil des ministres du 24 octobre dernier deux projets de loi, l'un relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile , l'autre à la nationalité et modifiant le code civil .

Tout au plus peut-on remarquer que si, dans les textes actuels, des dispositions sont prévues afin d'assouplir l'attribution du statut de réfugié, notamment par une reconnaissance de la notion d'asile territorial lorsque l'étranger serait exposé, en cas de refus d'admission, à des traitements inhumains ou dégradants " ou à des risques majeurs pour sa sûreté personnelle ", aucune conséquence budgétaire ne semble être tirée pour 1998 quant à une éventuelle augmentation du nombre de réfugiés.

Votre Commission a pris acte des intentions émises par le Gouvernement et a souhaité pouvoir porter un jugement global lorsque les mesures nouvelles, qui devraient prochainement être examinées par le Parlement, seront adoptées.

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Votre Commission a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés à la ville et à l'intégration du ministère de l'emploi et de la solidarité dans le projet de loi de finances pour 1998.

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