B. LES EFFETS DE LA CONCURRENCE

L'émergence de la concurrence dans les services publics, dans le cadre européen, constitue indéniablement un facteur de modération du nombre de grèves.

Depuis 1987, la Commission européenne s'est engagée dans un programme de libéralisation des secteurs relevant traditionnellement du service public industriel et commercial : l'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications a été décidée en 1993. Elle a été suivie par l'ouverture des espaces aériens nationaux. Les directives relatives au transport ferroviaire et l'énergie électrique ouvrent partiellement la voie à l'accès des tiers en concurrence sur les réseaux.

En matière de transport aérien, la disparition du monopole d'Air-France entraîne un changement d'état d'esprit des usagers qui deviennent des clients prêts à changer de compagnie en cas d'interruption du trafic. En ce domaine, le " service minimum " est bien constitué par l'offre de la concurrence.

Il suffit, en outre, d'entendre aujourd'hui la campagne destinée à susciter la souscription par le public de titre Air France, pour constater que la compagnie nationale est entrée dans une autre logique visant non seulement à satisfaire des clients mais aussi à maintenir un impératif de rentabilité.

De même, a été confirmé au cours des auditions que, dans les trois mois qui ont suivi les grèves des services postaux de 1995, il a été observé une forte baisse du trafic de colis envoyés par les entreprises de vente par correspondance suscitant l'inquiétude des postiers sur " l'évasion " de certaines catégories de clients.

L'ouverture des monopoles à la concurrence permet de faciliter la prévention des conflits.

C. L'IMPACT DE L'EUROPE SOCIALE

La perspective de la construction d'une Europe sociale va poser dans des termes nouveaux l'application du principe de continuité des services publics.

Comme le montre l'étude du service des Affaires européennes du Sénat, la situation de la France apparaît relativement atypique par rapport à nos principaux partenaires.

La notion de " service essentiel " est désormais unanimement reconnue. A l'exception du Royaume-Uni, tous les pays ont établi des règles sur l'instauration d'un service minimum en cas de grève dans les services publics essentiels. Sauf en Espagne ou au Portugal, l'organisation du service minimum est négociée avec les partenaires sociaux.

M. Jacques Delors, reçu par votre rapporteur, met l'accent sur les différences entre une culture latine, à laquelle se rattache la France, l'Italie et l'Espagne, qui fait de la grève un moyen d'expression des conflits sociaux, et une culture nordique, plus pragmatique pour laquelle l'essentiel est que la grève s'articule sur un véritable processus de négociation ; ainsi, en Allemagne, la grève n'est possible que pour conclure et faire appliquer des conventions collectives.

La négociation collective au niveau communautaire commence à acquérir une certaine substance depuis l'intégration des accords signés par les partenaires sociaux européens dans le processus d'élaboration des normes.

Elle s'est concrétisée par la conclusion selon la procédure prévue par le protocole social du traité de Maastricht, de deux accords : le premier en décembre 1995 sur le congé parental et le second, en juin 1997, sur le travail à temps partiel.

Dans la perspective de la mise en oeuvre de l'Europe sociale, la reconnaissance des droits des salariés, en particulier dans les services publics, peut aller de pair avec de plus grandes exigences en matière de continuité du service public.

C'est la démarche européenne qui doit permettre de mettre fin aux insuffisances et aux " archaïsmes " du dialogue social dans les services publics en France.

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