B. UNE RÉFORME AMBIGUË ET INACHEVÉE

Malgré ces points positifs, la réforme proposée reste malheureusement inachevée, souvent contradictoire dans ses termes. Paradoxalement, alors qu'il a toujours été fort reproché aux caisses d'épargne de bénéficier de distorsions de concurrence, ces contradictions risquent d'empêcher leur développement du fait de charges que leurs concurrents n'auront pas à supporter.

1. La non-banalisation du livret A

Le gouvernement avait posé en préalable à la mission de notre collègue Raymond Douyère qu'il s'abstienne d'étudier l'éventualité de la création d'un livret d'épargne distribué universellement et présentant les mêmes caractéristiques que les livrets A ou bleu.

Il en résulte cette situation paradoxale aux termes de laquelle les caisses d'épargne, désormais établissements de crédit coopératifs généralement quelconques, se voient maintenir un privilège qu'aucun motif d'intérêt général ne justifie. Seul l'avantage concurrentiel qu'il représente à leur profit dans la captation de la jeune clientèle, qui se fidélise facilement, explique leur attachement au maintien de l'oligopole du livret A : il s'agit de la simple défense de leur fonds de commerce.

Cette situation est d'autant plus paradoxale que le projet de loi prévoit que les fonds du livret A doivent être centralisés à la Caisse des dépôts et consignations (voir commentaire de l'article 7). Il rend ainsi plus solide une disposition qui n'est actuellement que de niveau réglementaire. Votre commission avait préconisé cette solution, mais dans le contexte d'une banalisation du livret A, afin que ses ressources ne soient pas détournées de leur objet par des gouvernements souvent laxistes vis-à-vis des établissements de crédit, comme ce fut le cas pour le Codevi.

Le maintien de ce privilège justifie selon le gouvernement le maintien d'un agrément ministériel à la nomination du président du directoire de la Caisse nationale des caisses d'épargne (voir commentaire de l'article 10), la collecte du livret A, source essentielle du financement du logement social, étant considérée comme une mission de service public. Le maintien de la tutelle de l'Etat sur une banque privée ne se justifie pourtant plus. On relèvera de surcroît que pour Raymond Douyère, le fait que la nomination du président du directoire du CENCEP soit soumise à l'agrément du ministre a contribué à miner la légitimité de l'organe central au sein du réseau, le CENCEP étant perçu comme une émanation du pouvoir politique 2( * ) .

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page