N° 410

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000

Annexe au procès-verbal de la séance du 14 juin 2000

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant la ratification de la convention relative à la coopération en matière d'adoption d'enfants entre la République française et la République socialiste du Vietnam ,

Par M. Michel CALDAGUÈS,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait, Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle Bidard-Reydet, vice-présidents ; MM. Michel Caldaguès, Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès, secrétaires ; Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Jean Bernard, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Xavier Dugoin, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel, Christian de La Malène, Louis Le Pensec, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano, Michel Pelchat, Xavier Pintat, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas, André Rouvière.

Voir les numéros :

Assemblée nationale
( 11 ème législ.) : 2358 , 2370 et T.A. 525

Sénat
: 392 (1999-2000)


Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser la ratification de la convention relative à la coopération en matière d'adoption d'enfants entre la France et le Vietnam, signée à Hanoï le 1 er février 2000.

Depuis plusieurs années, le Vietnam figure au premier rang des pays d'origine des enfants adoptés en France, représentant à lui seul environ le tiers des adoptions internationales. Cependant, au moment où la communauté internationale, par l'intermédiaire de la convention de La Haye de 1993, tentait d'instaurer un contrôle plus rigoureux des procédures d'adoption, afin de préserver l'intérêt supérieur des enfants, certaines dérives ou irrégularités étaient constatées au Vietnam, par ailleurs non signataire de cette convention.

Cette situation a conduit le gouvernement français à suspendre provisoirement les procédures d'adoption concernant le Vietnam à compter du mois d'avril 1999 et à engager très rapidement des négociations avec les autorités vietnamiennes afin de remédier aux insuffisances qui avaient permis le développement de certaines pratiques douteuses.

Ces négociations ont abouti à la signature, le 1 er février 2000, de la présente convention fortement inspirée des principes de la convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale.

I. LA NÉCESSITÉ DE MIEUX ENCADRER LES ADOPTIONS EN PROVENANCE DU VIETNAM

La nécessité de mieux encadrer les adoptions en provenance du Vietnam a été soulignée par l'Autorité centrale pour l'adoption internationale établie en France en 1998 en application de la convention de La Haye. Elle résulte de trois facteurs :

- ces adoptions ont donné lieu, dans certains cas, à des dérives critiquables du point de vue de la protection de l'intérêt des enfants,

- ces dérives ont amené le gouvernement à suspendre provisoirement les procédures d'adoption en direction de ce pays,

- une solution satisfaisante doit être trouvée de manière urgente, ces adoptions représentant une part majeure des adoptions en France.

A. LE RESPECT DES PRINCIPES FONDAMENTAUX DE L'ADOPTION INTERNATIONALE N'ÉTAIT PLUS TOTALEMENT GARANTI AU VIETNAM

La convention des Nations unies du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant et la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière internationale ont posé un certain nombre de principes en vue de subordonner l'adoption internationale à l'intérêt supérieur de l'enfant et d'éviter toute pratique mercantile à l'occasion du placement de l'enfant.

Les Etats parties à la convention de La Haye se sont engagés, lorsqu'ils se trouvent en situation d'Etat d'origine de l'enfant adopté, à s'assurer :

- de l'adoptabilité de l'enfant,

- de l'obtention des consentements nécessaires d'autres personnes que l'enfant,

- de l'expression de souhaits éventuels de l'enfant,

- du fait que le consentement de la mère, lorsqu'il est légalement requis, a été exprimé après la naissance de l'enfant,

- que les consentements n'ont pas été achetés,

- que les personnes dont le consentement est requis ont été informées des conséquences de leur décision, notamment sur l'éventualité d'une rupture des liens entre l'enfant et la famille biologique,

- et que l'adoption internationale intervient après épuisement des solutions de placement de l'enfant dans son Etat d'origine (principe de subsidiarité).

Chaque Etat partie s'engage en outre à désigner une Autorité centrale chargée d'exercer le contrôle des projets d'adoption.

Le Vietnam, peu concerné par les adoptions internationales jusqu'au début de la dernière décennie, n'a pas encore adhéré à la convention de La Haye, non pas, par désaccord de fond, mais plutôt, semble-t-il, en raison, de difficultés d'application de cette convention compte tenu de son organisation administrative, et notamment des pouvoirs reconnus aux provinces.

L'absence d'applicabilité au Vietnam des principes et du cadre juridique définis par la communauté internationale est d'autant plus regrettable que ce pays a vu se produire un certain nombre d'irrégularités, et parfois même de dérives choquantes dont certaines ont été relevées par l'Autorité centrale pour l'adoption internationale. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, ont notamment été constatés :

- le recours à des intermédiaires rémunérés, sans qualification aucune en matière d'adoption, pour la recherche d'enfants au sein même de leurs familles biologiques,

- l'incitation à l'abandon d'enfants par ces intermédiaires moyennant le versement aux familles de sommes d'argent,

- des insuffisances dans les exigences requises pour le recueil des consentements à l'adoption,

- la manipulation de documents d'état civil,

- la séparation de fratries, notamment d'enfants jumeaux,

- la mise en cause, et dans certains cas la condamnation pénale, de personnes étant intervenues, à divers échelons, dans les procédures d'adoption.

Ces faits, qui ne sont sans doute pas généralisables, paraissent suffisamment graves pour justifier un meilleur encadrement juridique des procédures mises en oeuvre d'un commun accord entre la France et le Vietnam en matière d'adoption.

RECOMMANDATION DE L'AUTORITÉ CENTRALE

POUR L'ADOPTION INTERNATIONALE

" A l'issue de la réunion du 12 mars 1999 ;

Vu le rapport établi par la Mission de l'Adoption internationale le 4 février 1999 sur la situation de l'adoption internationale au Vietnam ;

Ayant pris connaissance des observations de la partie vietnamienne lors des discussions bilatérales franco-vietnamiennes à Paris le 26 février 1999 ;

L'Autorité centrale pour l'adoption internationale constate que les principes posés par l'article 21 de la Convention des Nations unies sur les droits de l'enfant (notamment subsidiarité de l'adoption internationale et absence de profit indu au bénéfice d'intermédiaires) sont trop fréquemment ignorés et donc bafoués, et que, dans beaucoup de cas, les procédures ne présentent pas les garanties requises pour assurer le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant et la sécurité juridique des adoptants.

Par ailleurs, l'Autorité centrale pour l'adoption internationale constate que plus des deux tiers des enfants adoptés originaires du Vietnam sont âgés de moins de six mois et qu'environ la moitié d'entre eux sont adoptés directement dans leurs familles biologiques.

En conséquence, l'Autorité centrale pour l'adoption internationale recommande :

- qu'un projet d'accord franco-vietnamien en matière d'adoption soit présenté aux autorités vietnamiennes dans les plus brefs délais,

- que, dès la remise du projet aux autorités vietnamiennes -et après information préalable de ces autorités-, les visas en vue d'adoption ne soient plus délivrés que pour les enfants remis et confiés aux familles françaises par l'intermédiaire des organismes français habilités et des autorités vietnamiennes compétentes dont la liste nous sera communiquée par le gouvernement vietnamien,

- que cette dernière mesure prenne effet dès la remise du projet d'accord, mais sans affecter les procédures en cours.

La reprise des nouvelles procédures d'adoption sera subordonnée à l'entrée en vigueur de l'accord. "

B. LES ADOPTIONS EN PROVENANCE DU VIETNAM ONT ÉTÉ PROVISOIREMENT SUSPENDUES PAR LE GOUVERNEMENT FRANÇAIS EN AVRIL 1999 JUSQU'À LA CONCLUSION D'UN ACCORD DE COOPÉRATION ENTRE LES DEUX PAYS

La situation de l'adoption internationale au Vietnam a conduit les autorités gouvernementales françaises, dûment alertées par l'Autorité centrale pour l'adoption internationale, créée en 1998 conformément à la convention de La Haye, et en liaison avec les autorités vietnamiennes, à réagir au début de l'année 1999.

A l'occasion d'une visite, au mois de janvier 1999, du vice-ministre de la justice vietnamien, la question des conditions de l'adoption internationale a été abordée. Les discussions alors engagées ont permis de constater de nombreux points de convergence entre les deux pays et surtout la nécessité de conclure un accord bilatéral dans les plus brefs délais.

Le 12 mars 1999, l' Autorité centrale pour l'adoption internationale recommandait la préparation d'un projet d'accord franco-vietnamien et la suspension de la délivrance des visas en vue d'adoption dès la remise de ce projet d'accord aux autorités vietnamiennes.

Alors qu'un premier projet d'accord était préparé par les deux parties le gouvernement français annonçait, le 29 avril 1999, sa décision " de suspendre provisoirement les procédures d'adoption entre la France et le Vietnam jusqu'à la conclusion d'un accord de coopération entre les deux pays ". Il précisait que des négociations seraient engagées rapidement pour établir un cadre juridique bilatéral permettant la reprise des adoptions entre les deux pays dans un délai aussi rapproché que possible.

Conformément aux recommandations de l'Autorité centrale, des mesures étaient également prises pour éviter que la suspension des adoptions n'affecte les procédures en cours. Il a ainsi été décidé que la suspension n'affecterait pas les procédures engagées par les adoptants arrivés sur le sol vietnamien avant le 9 mai 1999 inclus, de même que les procédures initiées par les candidats à l'adoption rentrés en France dans l'attente de la remise officielle de l'enfant. Il s'agissait d'éviter autant que possible que les familles adoptantes ne subissent le contrecoup de cette mesure.

Ainsi, la majorité des candidats à l'adoption concernés par des procédures en cours ont pu les mener jusqu'à leur terme, 220 visas ayant été délivrés entre mai et juin 1999.

Une cinquantaine de personnes, en cours de procédure d'adoption à Ho Chi Minh-Ville, ont été confrontées à des difficultés suite à la décision du gouvernement vietnamien de suspendre l'examen des demandes d'adoption présentées par des ressortissants français à compter du 20 mai 1999. Toutes les familles concernées ont pu néanmoins revenir avec leurs enfants adoptifs en France à la fin du mois de septembre 1999.

A la fin de l'année 1999, une vingtaine de dossiers d'adoption restaient encore en instance pour des raisons diverses, parfois indépendantes de la mesure de suspension française. Le ministère de la justice vietnamien a récemment donné son accord au règlement de huit de ces dossiers.

C. LA MISE EN PLACE D'UNE SOLUTION SATISFAISANTE EST D'AUTANT PLUS URGENTE QUE LES ADOPTIONS EN PROVENANCE DU VIETNAM REPRÉSENTENT UNE PART MAJEURE

Apparue dans les années 1960, l'adoption internationale a connu récemment une expansion rapide, sous le double effet du développement de préoccupations humanitaires à l'égard de pays frappés par la pauvreté ou la guerre et de la réduction du nombre d'enfants adoptables en France, elle-même liée aux évolutions de notre société : baisse de la natalité, diminution du nombre de grossesses non désirées, attitude plus ouverte à l'égard des mères célibataires.

La France est ainsi devenue, après les Etats-Unis, le deuxième pays au monde pour l'accueil d'enfants de pays étrangers. L'adoption internationale, qui n'y concernait encore que moins de 1 000 enfants en 1980, représentait plus de 3 000 adoptions en 1995, plus de 3 500 en 1997 et près de 3 800 en 1998. On ne peut d'ailleurs que souligner avec satisfaction à quel point cet essor de l'adoption internationale contredit les insinuations ou les exploitations abusives de sondages qui prétendent déceler dans le tempérament de nos compatriotes des relents de xénophobie.

Comme le montre le tableau figurant page suivante, l'adoption d'enfants nés à l'étranger représente ainsi plus des deux tiers de l'ensemble des adoptions d'enfants en France.

Il est frappant de constater la part majeure qu'occupe aujourd'hui le Vietnam dans ces adoptions -1 069 enfants en 1995, 1 393 en 1996, 1 328 en 1997 et 1 343 en 1998- soit, selon les années, entre 35 % et 38 % de l'ensemble des adoptions internationales. Au cours de l'année 1999, marquée par la suspension des procédures au cours du deuxième trimestre, 731 enfants vietnamiens étaient encore adoptés, soit 20,4 % de l'ensemble des adoptions internationales.

Sur les cinq dernières années, le nombre d'adoptions en provenance du Vietnam a dépassé de très loin celles de tous les autres pays. Occupant une part majeure dans l'adoption en France, les adoptions en provenance du Vietnam ne sauraient donc être durablement suspendues sans affecter le fonctionnement de notre système et les nombreuses familles souhaitant engager une procédure d'adoption.

RÉPARTITION, PAR PAYS D'ORIGINE, DES ADOPTIONS INTERNATIONALES

DE 1995 À 1999

Pays

1995

1996

1997

1998

1999

Total

VIETNAM

1 069

1 393

1 328

1 343

731

5 864

COLOMBIE

321

303

234

294

303

1 455

ROUMANIE

123

175

132

178

302

910

BRESIL

208

234

167

143

143

895

MADAGASCAR

125

161

174

174

218

852

GUATEMALA

80

108

161

151

186

686

BULGARIE

97

110

121

140

188

656

RUSSIE

42

145

173

156

116

632

ETHIOPIE

121

76

110

155

142

604

HAÏTI

52

79

75

90

151

447

COREE

96

70

77

87

89

419

MALI

70

102

92

73

70

407

POLOGNE

64

67

61

78

54

324

INDE

69

64

79

52

58

322

CAMBODGE

34

41

53

62

129

319

THAÏLANDE

52

48

51

77

86

314

LETTONIE

32

60

56

83

72

303

DJIBOUTI

54

48

43

71

72

288

BURKINA FASO

37

39

22

30

34

162

MEXIQUE

40

35

32

30

23

160

CHILI

31

25

38

25

30

149

TUNISIE

32

31

18

17

16

114

COTE D'IVOIRE

15

24

17

9

27

92

CHINE

3

0

2

23

57

85

LIBAN

11

13

27

20

13

84

UKRAINE

0

0

3

29

51

83

Autres pays

150

215

182

187

231

965

TOTAL

3 028

3 666

3 528

3 777

3 592

17 591

II. LA CONVENTION FRANCO-VIETNAMIENNE SUR LA COOPÉRATION EN MATIÈRE D'ADOPTION : UN TEXTE LARGEMENT INSPIRÉ DE LA CONVENTION DE LA HAYE

Fruit d'un processus particulièrement rapide, tant dans sa négociation que dans sa phase de ratification, la convention franco-vietnamienne sur la coopération en matière d'adoption d'enfants du 1 er février 2000 s'inspire très largement de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, dont les principes essentiels pourront donc s'appliquer aux procédures d'adoption entre la France et le Vietnam.

A. DES NÉGOCIATIONS RAPIDES

Comme cela a été indiqué précédemment, la conclusion rapide d'un accord bilatéral subordonnant la reprise des procédures d'adoption, constituait la contrepartie indissociable de la mesure de suspension provisoire prise par le gouvernement français le 29 avril 1999.

Sur la base d'un premier projet d'accord à la disposition des parties dès la fin avril 1999, des négociations ont donc été promptement engagées dans un esprit constructif, au cours de deux séries de discussions, à Hanoï fin juin et à Paris fin octobre 1999.

Les principaux points de discussion tenaient moins aux principes mêmes de l'accord, que sur divers aspects de procédures, notamment :

- la définition des compétences respectives du pays d'accueil et du pays d'origine lors du prononcé des décisions d'adoption, la France ayant souhaité et obtenu que les juridictions françaises conservent la possibilité de prononcer des décisions d'adoption plénières,

- la reconnaissance de plein droit des effets des décisions rendues dans chaque pays,

- la définition de nouvelles procédures tenant compte des compétences dévolues aux autorités locales vietnamiennes en matière d'adoption, et notamment aux comités provinciaux.

Ce dernier point a notamment conduit à préserver, dans la procédure d'adoption, la compétence reconnue aux provinces en matière d'adoption par la législation vietnamienne , ces dernières étant chargées de la transmission à la famille adoptante des renseignements relatifs à l'enfant adopté, mission qui relève de l'Autorité centrale pour les pays signataires de la convention de La Haye.

Après approbation de part et d'autre, la Convention était signée par les deux parties le 1 er février 2000 à Hanoï, soit 9 mois seulement après le début des négociations.

En déposant le projet de loi autorisant la ratification de cette convention le 3 mai dernier et en l'inscrivant à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale le 6 juin, puis à celui du Sénat le 21 juin, le gouvernement français, tout comme le Parlement, s'est imposé des délais tout à fait inhabituels en matière de conventions internationales, soulignant ainsi l'urgence de l'entrée en vigueur de cet accord bilatéral important.

B. UN CADRE INSPIRÉ DE LA CONVENTION DE LA HAYE POUR RÉGIR LES RELATIONS FRANCO-VIETNAMIENNES EN MATIÈRE D'ADOPTION D'ENFANTS

Destinée à garantir la régularité et la transparence des procédures d'adoption, la convention franco-vietnamienne s'inspire très largement du droit international et notamment de la Convention de La Haye de 1993.

Elle rappelle, dans son préambule, la nécessité de conduire les adoptions d'enfants " dans le respect de la convention des Nations unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, et notamment ses dispositions concernant la garantie de l'intérêt supérieur de l'enfant et le respect de ses droits fondamentaux, ainsi que dans le souci de prévenir l'enlèvement, la vente et la traite d'enfants et les profits matériels indus à l'occasion de l'adoption ".

Le champ d'application de la convention, défini par l'article premier, se conforme aux critères retenus par la convention de La Haye et vise les adoptions " par une personne ou deux époux " résidant habituellement sur le territoire de l'une des parties d'un enfant résidant habituellement sur le territoire de l'autre partie et n'ayant pas atteint l'âge limite d'adoption fixé par la législation nationale de chaque Etat contractant, cette limite étant de 15 ans au Vietnam.

La convention prévoit la mise en place, à l'image des stipulations de la convention de La Haye, d'une Autorité centrale dans chacun des Etats parties (article 2), garante de la régularité et de la transparence des procédures et chargée de s'assurer de l'adoptabilité des enfants. Cette Autorité centrale sera, au Vietnam, le ministère de la justice, et en France, la Mission de l'adoption internationale, déjà compétente pour les adoptions couvertes par la Convention de La Haye. On remarquera que, s'agissant du Vietnam, la convention aboutira à renforcer le poids de l'Etat central, par rapport aux provinces, dans les procédures d'adoption. L'article 4 charge les Autorités centrales de prendre toutes mesures " pour prévenir des gains matériels indus à l'occasion d'une adoption " et " en vue de faire sanctionner de telles pratiques ". Les deux Autorités centrales sont également tenues d'échanger " des informations juridiques, des données statistiques et d'autres renseignements nécessaires " à une bonne application de la convention (article 5).

Destinataires des dossiers de demande d'adoption (article 9), les Autorités centrales doivent s'assurer que les conditions nécessaires à la régularité de l'adoption sont bien remplies (articles 10 et 11). Il s'agit là de reprendre, pour les rendre applicables au Vietnam, l'essentiel des garanties prévues par la convention de La Haye, à savoir :

- l' adoptabilité de l'enfant au regard de la législation du pays d'origine,

- le principe de subsidiarité, selon lequel l'adoption internationale n'est envisagée que si, après examen des possibilités locales de prise en charge de l'enfant, elle s'avère la plus conforme à son intérêt,

- la nécessité du consentement à l'adoption des personnes habilitées à le délivrer,

- l' information, préalablement au consentement, sur les effets juridiques de l'adoption,

- l' absence de paiement ou de contrepartie pour l'obtention du consentement.

L'intervention obligatoire de l'Autorité centrale dans la procédure doit permettre d'éviter les recherches individuelles d'enfants et le recours à des intermédiaires.

Le schéma procédural retenu par la convention franco-vietnamienne s'écarte quelque peu de celui prévu par la convention de La Haye, et ce afin de prendre en compte le rôle dévolu aux provinces en matière d'adoption par la législation vietnamienne.

S'agissant du Vietnam, la convention distingue en effet l'Autorité centrale , c'est-à-dire le ministère vietnamien de la justice, qui se voit confier un certain nombre de responsabilités, et les autorités compétentes selon la législation nationale, à savoir les comités populaires.

Le ministère de la justice, après avoir vérifié que l'enfant est adoptable, procédera à l'apparentement, transmettra au comité populaire le dossier des adoptants accompagné d'une note attestant que toutes les conditions nécessaires sont remplies et formulera un avis sur l'adoption envisagée (article 11-2).

Il revient au comité populaire (article 12) d'adresser aux adoptants une note contenant les renseignements suivants sur l'enfant proposé à l'adoption :

- nom et prénom, sexe, date de naissance, domicile,

- son adoptabilité,

- situation personnelle, familiale et sociale,

- état de santé,

- besoins particuliers, éventuellement.

Les adoptants doivent faire connaître leur réponse au comité populaire qui a effectué la proposition.

S'agissant de la reconnaissance des décisions d'adoption, la convention prévoit des dispositions particulières, la législation vietnamienne ne connaissant pas l'adoption plénière. L'article 7, après avoir rappelé que la décision de confier l'enfant en vue de son adoption relève de la compétence de l'Etat d'origine, précise que lorsque la législation de l'Etat d'accueil prévoit une forme d'adoption requérant une nouvelle décision d'adoption, cette nouvelle décision relève de la compétence des autorités de cet Etat d'accueil.

Les décisions d'adoption vietnamiennes ne seront pas considérées dès leur prononcé au Vietnam, comme des adoptions plénières, directement transcriptibles sur le registre du service central de l'état civil à Nantes, comme cela est le cas pour toute adoption prononcée en application de la convention de La Haye. Les candidats à l'adoption devront donc, s'ils souhaitent le prononcé d'une adoption plénière en France, déposer une requête en ce sens auprès du tribunal de grande instance de leur domicile.

Signalons que la convention comporte un chapitre relatif à la coopération entre les deux parties et qu'elle institue notamment (article 20) un groupe de travail mixte et paritaire se réunissant une fois par an pour évaluer l'application de la convention et formuler des propositions en vue du règlement des difficultés éventuelles.

L'article 23 précise que la convention est conclue pour une durée de cinq ans et sera par la suite renouvelable par période de trois ans, sauf dénonciation par l'une des parties avec un préavis de six mois.

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