II. LE CONTENU DE LA PROPOSITION

1. Définition, durée et mise en oeuvre de la protection temporaire

Par le concept de " protection temporaire " il faut entendre un dispositif exceptionnel assurant, en cas d'afflux massif de personnes déplacées, une protection immédiate et de caractère temporaire à ces personnes , lorsque le système d'asile risque de ne pouvoir traiter ce flux sans provoquer d'effets contraires à son bon fonctionnement. L'afflux massif est défini comme l'arrivée dans la Communauté d'un nombre important de personnes déplacées, en provenance d'un pays ou d'une zone géographique déterminée, qui ne peuvent rentrer dans leur pays d'origine.

La proposition fixe la durée de la protection temporaire à une année, prorogeable automatiquement par deux périodes de six mois . La durée maximale de la protection serait donc de deux ans . Il s'agit là d'un élément crucial du système, qui a donné lieu à de difficiles négociations. En effet, la Commission avait proposé auparavant une période maximale de trois ans, pouvant exceptionnellement être prorogée jusqu'à cinq ans.

Le noyau dur de la directive se trouve dans la méthode de déclenchement et de cessation de la protection temporaire . Dans la présente proposition, l'afflux massif de personnes déplacées (ou la fin d'une telle situation) est constaté par une décision du Conseil prise à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission , qui examinera toute demande introduite par un Etat membre à cette fin. Se basant sur différentes sources d'information, le Conseil prendra la décision après l'examen de trois éléments :

- la spécificité de la situation ;

- l'ampleur des mouvements de population ;

- l'opportunité de déclencher la protection temporaire, en tenant compte des mesures prises sur place (aide d'urgence...).

Il est mis fin à la protection temporaire, soit automatiquement à la fin de la période maximale des deux ans, soit lorsque la situation dans le pays d'origine permet, de façon durable, un retour sûr et dans la dignité des personnes déplacées, dans le respect de la Convention de Genève et de la Convention européenne des droits de l'homme.

Les Etats membres peuvent, d'après la proposition, exclure du bénéfice de la protection temporaire les personnes :

- qui présentent un danger pour la sécurité nationale ;

- qui sont soupçonnées d'avoir commis des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité ;

- auxquelles s'appliquent les clauses d'exclusion de l'article 1F de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés de 1951.

2. Droits reconnus aux bénéficiaires de la protection temporaire

Les Etats membres sont tenus de délivrer des documents de séjour aux personnes bénéficiant de la protection temporaire et de s'assurer qu'elles peuvent facilement (et gratuitement) obtenir des visas. Par contre, la proposition ne couvre pas la question de la liberté de circulation de ces personnes.

Les Etats membres garantissent également aux bénéficiaires de la protection temporaire l'accès :

- à une activité professionnelle (salariée ou non salariée), dans les mêmes conditions que les réfugiés ;

- à un hébergement ;

- au soutien nécessaire en matière d'aide sociale , de subsistance et de soins médicaux ;

- au système d'éducation et de formation national.

Sans reconnaître un droit au regroupement familial , tel que défini dans la proposition de directive du 1 er décembre 1999, la proposition prévoit le droit à l'entrée et au séjour du conjoint ou du partenaire non marié, des enfants, et, sous certaines conditions, d'autres membres de la famille (personnes dépendantes), jusqu'à deux mois avant l'expiration de la période de séjour maximale de deux ans . Tout refus d'une demande de réunion familiale doit être dûment motivé et doit être susceptible d'un recours juridictionnel. Des obligations particulières doivent être respectées envers les mineurs non accompagnés.

En fixant ainsi le niveau des obligations minimales des Etats membres envers les bénéficiaires de la protection temporaire, les Etats membres gardant toute possibilité de prévoir des conditions plus favorables, la proposition de directive vise à concilier les impératifs humanitaires et le caractère suffisamment attractif de la protection temporaire, afin d'éviter un trop grand nombre de demandes d'asile.

Mais ces obligations peuvent faire l'objet d'appréciations contradictoires au sein des Etats membres .

Les Etats membres garantissent que les bénéficiaires de la protection temporaire désirant introduire une demande d'asile puissent le faire au moins à la fin de la période de protection temporaire. Cette demande est examinée selon les critères et les mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile. La proposition laisse donc aux Etats membres la possibilité de prévoir des mécanismes de suspension de l'examen des demandes d'asile et la faculté de prévoir le cumul du statut de demandeur d'asile avec celui de la protection temporaire .

Lors de la cessation de la protection temporaire, le droit commun en matière d'asile, d'entrée et de séjour des étrangers s'applique sur le territoire des Etats membres . Ces derniers facilitent le retour volontaire (et en connaissance de cause) des personnes bénéficiant ou ayant bénéficié de la protection temporaire. Si nécessaire, ils mettent également en place des programmes de réinstallation. Les Etats membres examinent, toutefois, si des raisons impérieuses rendent le retour impossible dans des cas précis et s'il est nécessaire de prolonger le séjour de certaines personnes, comme celles qui nécessitent des traitements médicaux ou psychologiques qu'elles ne pourraient avoir sur place, ou dont les enfants mineurs poursuivent une scolarité dans un Etat membre.

3. Mécanismes de solidarité et de coopération

En termes de solidarité financière, les Etats membres peuvent faire appel au Fonds européen pour les réfugiés pour financer les mesures prévues par la proposition de directive . En effet, au sein de ce fonds pluriannuel, un budget spécifique annuel de dix millions d'euros sur cinq ans est destiné à des mesures d'urgence en cas d'afflux massif de réfugiés ou de personnes déplacées.

S'agissant de la solidarité dans l'accueil physique, le mécanisme est basé sur le double volontariat . Dans une déclaration annexée à la décision du Conseil constatant l'afflux massif de personnes déplacées, chaque Etat membre indique soit sa disponibilité d'accueil des personnes déplacées, de façon chiffrée ou générale, soit les raisons qui justifient son incapacité à accueillir lesdites personnes. Il convient également de constater le consentement des intéressés à être accueillis par un Etat membre.

Par le biais de points de contact nationaux, les Etats membres se transmettent régulièrement les données relatives au nombre de personnes couvertes par la protection temporaire, ainsi que toute information concernant la mise en oeuvre de la protection temporaire au niveau national. Ils coopèrent entre eux, le cas échéant, en vue de transférer la résidence des bénéficiaires de la protection temporaire d'un Etat membre à un autre, sur une base volontaire.

La proposition prévoit l'information et la consultation du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés à différentes étapes de la mise en oeuvre de la protection temporaire. Cette liaison avec le HCR est un élément indispensable, car les personnes concernées par la protection temporaire peuvent tomber dans le champ du mandat du HCR.

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