4. LES ÉVOLUTIONS DE LA PROPULSION DES LANCEURS

I. 4.1. UNE FORTE PRESSION DU MARCHÉ

La compétition est forte dans le domaine des lancements. Arianespace, premier opérateur commercial de lancement au monde, est face à de nombreux concurrents, sans être dotée des même avantages qu'eux. En effet, ceux-ci disposent soit de technologies développées et produites dans des conditions économiques échappant aux référentiels occidentaux (ex-URSS, bientôt la Chine), soit sont soutenus par des programmes militaires et institutionnels, dont le volume est supérieur ou égal à l'ensemble du marché commercial (USA). Ces conditions d'une part fertilisent et enrichissent les industriels de ces pays de technologies directement transposables, et d'autre part leur procurent un volume d'activité et des marges permettant d'absorber dans des conditions idéales les importants frais fixes qui sont la marque de l'industrie spatiale.

L'opérateur européen se trouve parfois même face à une alliance bénéficiant des deux avantages ( Sea Launch / Boeing - Proton / Longue Marche).

Il est dès lors essentiel en Europe de donner à Arianespace tous les atouts pour conforter sa position sur le marché des lancements.

Au plan de la propulsion cela suppose de mener de front deux actions fondamentales : non seulement améliorer les performances générales des lanceurs Ariane, mais aussi contribuer à diminuer les coûts récurrents.

II. 4.2. EVOLUTION DES TECHNOLOGIES DE LA PROPULSION

A l'heure actuelle tous les systèmes de transport spatial dans le monde reposent sur l'utilisation de la propulsion fusée chimique solide ou liquide.

La propulsion solide

La propulsion solide employée sur Ariane 5 (dans une moindre mesure sur Ariane 4) est caractérisée par une forte densité énergétique ; elle est particulièrement bien adaptée pour délivrer de très fortes poussées pendant des durées de une à deux minutes. Malgré des performances relativement modérées, son coût de production attractif par rapport à la propulsion liquide, en a généralisé l'utilisation pour la propulsion des lanceurs au décollage (moteurs d'appoint ou moteurs principaux). La propulsion solide permet également d'assurer toute la propulsion de petits ou moyens lanceurs multi-étages. Seule la Russie n'a pas développé de lanceurs spatiaux utilisant cette filière (à part un ou deux missiles reconvertis récemment en lanceurs spatiaux), ayant décidé à l'époque de l'URSS, de privilégier la performance au détriment des aspects économiques.

La propulsion solide va encore évoluer en se développant vers des systèmes bas coûts dans lesquels le coût de production sera réduit et la mise en oeuvre simplifiée. Sur Ariane 5 ces évolutions répondront aux enjeux de performances et de baisse des coûts.

La propulsion liquide

La propulsion liquide offre des performances plus élevées, tout particulièrement si on retient le mélange oxygène/hydrogène liquides (dit cryotechnique en raison des basses températures des ergols de -250°C). Ce dernier nécessite de maîtriser des problèmes complexes de mise en oeuvre, de stockage , de matériaux, de thermique, etc,... Seuls les Etats-Unis, la Russie et l'Europe maîtrisent et mettent en oeuvre régulièrement cette technologie. L'expérience européenne élaborée depuis les années 60, puis la mise en oeuvre sur Ariane 1 à 5, permet aux acteurs de ce continent d'envisager sérieusement une amélioration à la fois des performances et des coûts de développement comme de production.

La propulsion liquide classique, dite "stockable", va probablement s'orienter vers une recherche de propergols non toxiques et bon marché.

Enfin les moteurs à oxygène/hydrocarbure, qui présentent un bon compromis performances/coût, une mise en oeuvre assez aisée, un encombrement des réservoirs inférieur à celui des moteurs oxygène/hydrogène, peuvent continuer à se développer.

Dans ce domaine la Russie et dans une moindre mesure les Etats Unis possèdent une avance considérable sur l'Europe qui a volontairement choisi de concentrer ses efforts sur la propulsion cryotechnique.

L'utilisation du méthane fait notamment l'objet de recherches à l'heure actuelle et présente l'avantage d'une performance supérieure à celle du kérosène et d'une mise en oeuvre connue au plan industriel.

Pour la propulsion d'étages supérieurs, divers propergols non toxiques sont expérimentés dans le but de simplifier les opérations de mise en oeuvre. On peut citer l'eau oxygénée, associée à l'alcool méthylique.

Les coûts de lancement à l'aide des véhicules non réutilisables actuels peuvent encore être sensiblement réduits grâce au développement de nouvelles technologies "bas coûts" en production telles que prévues aux US dans les lanceurs Atlas 5 ou Delta 4 et en Europe dans les réflexions sur l'évolution d'Ariane 5 (à l'Horizon 2010).

La propulsion pour les véhicules réutilisables.

Pour le futur lointain, une idée communément répandue est qu'un accès "routinier" à l'espace, à faible coût, apparaîtra lorsqu'on aura su développer, un système de transport spatial réutilisable. De nombreux programmes ont été proposés et amorcés dans le passé (tout récemment le projet X33/Venture Star) et ont été abandonnés après avoir mesuré l'écart technologique qu'il faudra combler pour parvenir à des projets réalistes. La NASA engage néanmoins actuellement un programme "Space Launch Initiative" de 5 milliards € sur cinq années, pour identifier et développer les technologies nécessaires avant d'engager un programme de développement.

S'agissant des nouveaux systèmes de propulsion, notamment pour le transport spatial réutilisable, une voie prometteuse pour le moyen/long terme est d'associer des moteurs "aérobies" et fusée au sein de systèmes "combinés". L'utilisation de l'air comme oxydant durant la première phase du vol dans des turbo ou statoréacteurs permet de réduire la masse du véhicule au décollage.

Les défis techniques résident dans la réalisation de moteurs très légers, capables d'atteindre de très hautes vitesses dans l'atmosphère et donc soumis à de hautes températures.

la propulsion dans l'espace,

Pour la propulsion dans l'espace, qu'il s'agisse de contrôle d'attitude de satellite ou de transfert interplanétaire, de nouveaux types de propulsion sont à l'étude ou en développement. La propulsion plasmique, notamment, qui accélère des ions dans un champ électrostatique généré à partir d'une source d'énergie électrique est actuellement en cours d'application sur des satellites de télécommunication, permettant d'augmenter soit leur masse utile, soit leur durée de vie. Comme on l'a vu c'est une voie très prometteuse.

D'autres systèmes envisagent l'utilisation de l'énergie solaire pour chauffer un fluide et l'éjecter au travers d'un système propulsif.

Pour les missions importantes, habitées ou non vers Mars, il semble que l'énergie nucléaire soit nécessaire pour réaliser des véhicules de tailles réalistes et capables d'effectuer des aller-retour dans des délais acceptables.

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