2. Les ressources des privatisations non mobilisables

a) Une possibilité sous réserve des objectifs de la stratégie industrielle du Gouvernement

Dans sa déclaration du 21 mars 2000, le Premier ministre avait ouvert une perspective : « Le principe d'une alimentation du fonds de réserve par des ressources tirées de la gestion du patrimoine industriel et financier de l'Etat mérite d'être soigneusement étudié. Les actifs publics sont bien sûr le patrimoine de la Nation tout entière.

« Toutefois, ce Gouvernement a toujours privilégié une stratégie de développement industriel visant à renforcer les entreprises publiques dans la compétition mondiale. C'est d'ailleurs ce qui a permis à ce patrimoine d'acquérir une valeur importante. Il faut donc s'assurer que ces entreprises puissent continuer à bénéficier des capitaux nécessaires à leur développement.

« C'est pourquoi nous devons concilier nos exigences de stratégie industrielle avec la possibilité de contribuer à long terme à la solution du problème des retraites. »

Dès cette date, le Premier ministre avait évoqué la possibilité de compléter le fonds de réserve avec des ressources issues des dividendes de ces entreprises.

Cette possibilité a été très tôt évoquée par les administrations, mais présente selon elles des difficultés très importantes.

b) Une disponibilité entravée par un triple obstacle
(1) Un besoin structurel de financement du secteur public

Ce point est soulevé par les trois directions du ministère de l'Economie et des Finances, dans une note commune du 10 mai 2000.

« Pour dégager des disponibilités financières permettant d'affecter le produit de privatisations au fonds de réserve pour les retraites, il faudrait à la fois décider de nouvelles cessions d'entreprises publiques au secteur privé, et financer les besoins récurrents de recapitalisation des entreprises publiques directement par le budget de l'Etat.

« Comme le montre le budget prévisionnel du compte d'affectation spéciale (CAS) pour 2000, le produit des privatisations et cessions de participations de l'Etat doit être affecté aux besoins en capitaux des entreprises publiques structurellement déficitaires (...). Les besoins récurrents (...) sont de l'ordre de 20 milliards de francs par an, ce qui suppose déjà que des décisions difficiles soient prises pour assurer l'équilibre financier du CAS . »

(2) Des actifs inadéquats pour le passif du fonds de réserve

Le ministère des Finances poursuit.

« La valeur patrimoniale des actifs détenus par l'Etat est très difficile à estimer, à l'exception des entreprises déjà cotées. La valorisation est en effet souvent dépendante des liens économiques et financiers qui demeurent entre l'entreprise et l'Etat : obligations statutaires, engagements de retraites apurés ou non, reprise ou non par l'Etat d'engagements lourds hors bilan. Sous ces réserves, les estimations courantes de la valeur de ce patrimoine aboutissent à un montant d'un peu plus de 1.000 milliards de francs dont les deux tiers sont représentés par EDF et France Télécom.

« L'affectation d'actions d'entreprises publiques au FRR (fonds de réserve des retraites) aboutit en fait à une privatisation différée car, dans l'hypothèse d'un fonds de lissage, le FRR est destiné, à échéance plus ou moins lointaine, à céder ses actifs.

« L'affectation des revenus de certaines entreprises publiques au FRR priverait en outre le CAS de ressources, et créerait une charge durable pour le budget de l'Etat.

« Enfin, l'actif représenté par des entreprises publiques est peu diversifié et peut être considéré comme plus risqué qu'un actif réparti sur l'ensemble du marché. De plus, compte tenu des obligations de service public afférentes à certaines de ces entreprises et, à moins d'une identification claire sous forme de subventions publiques, du coût de ces obligations, la rentabilité de ces actifs est en moyenne probablement inférieure à celle d'un portefeuille diversifié. Cet actif n'offre donc pas les meilleures caractéristiques pour figurer au portefeuille d'un fonds de réserve. »

L'inscription à l'actif du fonds de titres, pour certains spéculatifs 116 ( * ) et peu liquides pour d'autres, est en effet hasardeuse.

* 116 Comme le suggère l'évolution de France Télécom.

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