B. L'ALLIANCE ATLANTIQUE FACE A LA NOUVELLE POLITIQUE AMÉRICAINE

1. Quelle vocation pour l'OTAN dans la stratégie américaine ?

Dans les semaines qui ont suivi les attaques terroristes, un grand nombre de commentateurs ont souligné que malgré l'invocation, pour la première fois depuis 1949, de l'article 5 du traité de Washington relatif à la garantie de défense collective, les Etats-Unis avaient fait peu de cas des offres de service de l'Alliance atlantique et l'avaient totalement laissée à l'écart de la campagne militaire en Afghanistan.

Au cours de la visite de la délégation à Washington, plusieurs responsables politiques américains, notamment au Congrès, se sont félicités de la contribution militaire apportée par plusieurs pays alliés aux opérations en cours, et notamment celle de la France, à travers le déploiement de son groupe aéronaval et sa participation aux actions aériennes depuis le porte-avions Charles de Gaulle et le Kirghizistan.

Il est cependant vrai que ces contributions alliées ont été fournies sur une base strictement bilatérale, et non dans le cadre de l'OTAN. Par ailleurs, les Etats-Unis ont considéré qu'en tant que pays agressé, il leur appartenait à eux seuls de conduire la riposte, l'apport de contributions extérieures ne devant en rien remettre en cause le caractère unilatéral et purement national de la campagne militaire.

Au-delà des circonstances particulières du conflit en cours, l'idée semble s'être imposée aux Etats-Unis selon laquelle c'est « la mission qui détermine la coalition » . L'expérience de l'opération « Force alliée » au Kosovo est fréquemment présentée comme le symbole d'un contrôle politique excessif et de la lourdeur des alliances, face aux nécessités de l'efficacité opérationnelle. La préférence va donc à la constitution de coalitions de circonstance non institutionnalisées , ne remettant pas en cause l'autonomie de décision des Etats-Unis, et au sein desquelles les pays alliés ou amis contribuent à la hauteur de leurs possibilités.

Pour certains observateurs, l'attitude américaine impliquerait le déclin de l'OTAN en tant qu'outil militaire et son évolution vers une communauté politique bientôt élargie à près d'une dizaine de nouveaux membres. Dans ce contexte, un partage des tâches confinerait l'OTAN aux opérations « autres que la guerre ».

Dans ses contacts au Département d'Etat et au Pentagone, la délégation retire le sentiment que l'actuelle administration cherche à effacer l'impression de « marginalisation » de l'OTAN qui avait suivi le lancement de la campagne en Afghanistan. De fait, les autorités américaines continuent de croire à l'utilité de l'OTAN, même si le rôle que l'on veut voir jouer à l'organisation se définit moins par rapport aux buts de celle-ci qu'en fonction des besoins des Etats-Unis.

Il s'agit là d'un renversement de logique assez net. Conçue comme une garantie pour les pays européens de voir l'Amérique du nord venir à leur secours en cas de conflit avec le pacte de Varsovie, l'OTAN aurait désormais pour vocation essentielle d'apporter une contribution à la sécurité globale, en donnant toutefois priorité aux menaces qui, aujourd'hui, préoccupent davantage les Etats-Unis que l'Europe.

Dans cette optique, l'OTAN garde tout d'abord, aux yeux des autorités américaines, sa valeur d'organisation politique, et les interlocuteurs de la délégation ont souligné que le large appui du Congrès au prochain élargissement illustrait la confiance conservée à l'organisation.

Mais Washington entend désormais inciter l'OTAN à se transformer et à s'adapter aux nouvelles réalités, notamment à la lutte contre le terrorisme et les armes de destruction massive.

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