2. Les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation : des spécialistes de la technique de cassation

Les avocats aux conseils 178( * ) sont des officiers ministériels nommés par arrêté du garde des Sceaux. Ils exercent leur profession à titre individuel (29 cabinets) ou en société civile professionnelle (31 cabinets) 179( * ) .

Ils jouissent d'une compétence exclusive pour les pourvois devant la Cour de cassation et le Conseil d'Etat, où ils exercent tout à la fois les fonctions d'avoué et d'avocat . Comme les avoués à la cour, ils ont la charge de postuler et de conclure en tant que mandataire ad litem . Ils s'apparentent aux avocats dans la mesure où, devant ces deux juridictions, ils sont libres de plaider comme ils l'entendent sans être liés par les instructions de leur client. Enfin, toujours comme les avocats, leurs honoraires ne sont soumis à aucune tarification. Contrepartie de leur monopole, ils sont tenus de prêter leur ministère lorsqu'ils en sont requis.

Les avocats aux conseils peuvent également plaider devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel .

a) Un petit nombre de professionnels

Depuis l'ordonnance du 10 septembre 1817 relative aux avocats aux Conseils et à la Cour de cassation, le nombre des charges est limité à 60 . Aux termes de l'article 4 du décret n° 78-380 du 15 mars 1978, le nombre des associés au sein de chaque office ne peut être supérieur à trois . Les avocats aux conseils ne peuvent donc, en théorie, être plus de 180 mais, en pratique, leur effectif oscille entre 89 et 91 , chiffre actuel .

Me Elisabeth Baraduc, présidente de l'ordre, a déclaré à la mission que la profession n'était pas favorable à une augmentation de ses effectifs, même pour faire face à un surcroît de contentieux, car « l'expérience montre l'existence d'une corrélation entre la croissance du nombre d'avocats et celle du nombre de recours . »

En cas de besoin urgent, les collaborateurs des associés, dont un petit nombre est salarié, sont extrêmement compétents et pourraient rapidement devenir avocats aux conseils en dépit de la difficulté des examens.

Aux termes du décret n° 91-1125 du 28 octobre 1991, l'accession à la profession requiert en effet, sous réserve de certaines dispenses, d'être français ou ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, de détenir une maîtrise en droit, d'avoir été inscrit pendant un an au moins sur la liste du stage ou au tableau d'un barreau, d'avoir suivi une formation de trois ans, dispensée sous l'autorité du conseil de l'ordre, et d'avoir subi avec succès un examen d'aptitude professionnelle.

L'ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation est attaché au maintien de cette sélectivité , justifiée par la spécificité de la technique de cassation .

Un décret n° 2002-76 du 11 janvier 2002 a réformé le régime disciplinaire de la profession, afin de le mettre en conformité avec les exigences posées de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des libertés fondamentales et des droits de l'homme, ainsi que la procédure applicable en cas d'action en responsabilité civile professionnelle.

b) De bonnes relations avec leurs juridictions

A la différence de leurs collègues des barreaux, les avocats aux conseils entretiennent de bonnes relations avec leurs juridictions .

L'entente avec le Conseil d'Etat est parfaite. Selon Me Elisabeth Baraduc, présidente de l'ordre, la réforme des procédures d'urgence 180( * ) , entrée en vigueur le 1 er janvier 2001, a été conduite « en douceur » et dans la concertation.

La loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature a prévu la mise en place, à compter du 1 er janvier 2002, d'une procédure de filtrage des pourvois devant la Cour de cassation 181( * ) . Cette mise en place s'est avérée difficile et parfois conflictuelle. Mais, avec le temps et le dialogue, cette situation devrait évoluer favorablement.

c) La nécessaire réforme de l'aide juridictionnelle

Selon Me Elisabeth Baraduc, le dispositif d'aide juridictionnelle mis en place en 1991 serait inadapté à la Cour de cassation. Les conditions de sa mise en oeuvre en matière pénale auraient d'ailleurs été aménagées, de façon quelque peu prétorienne, par le premier président en accord avec le président de l'ordre.

Le projet de loi relatif à l'accès au droit et à la justice, déposé par le Gouvernement de M. Lionel Jospin sur le bureau du Sénat, prévoit la suppression des bureaux d'aide juridictionnelle dans toutes les juridictions, à l'exception de la Cour de cassation et du Conseil d'Etat, ainsi que de la commission du recours des réfugiés 182( * ) . Ils y jouent en effet un rôle important de filtre des pourvois , complémentaire de la procédure de non-admission, auquel l'ordre est très attaché. Ils permettent ainsi d'éviter, par exemple, qu'une personne n'ayant pas comparu en appel puisse demander à se pourvoir en cassation.

L'ordre souhaite également que le montant de l'indemnité versée aux avocats aux conseils au titre de l'aide juridictionnelle soit revalorisé afin de tenir compte, au moins, de l'évolution de l'indice des prix depuis 1992.

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