C. AUDITION DE M. ANDRÉ FERTIER, PRÉSIDENT DE CEMAFORRE ET DE EUCREA FRANCE (ACCÈS DES PERSONNES HANDICAPÉES À LA CULTURE)

M. Nicolas ABOUT, président - L'intégration des personnes handicapées dans la Cité ne se limite pas aux seules questions de l'insertion scolaire, professionnelle et à l'accessibilité au cadre de vie, mais doit également leur permettre un égal accès à la culture. Pourtant, de récents rapports ainsi que notre expérience quotidienne soulignent la persistance de nombreux obstacles à une ouverture effective de la culture aux personnes handicapées. C'est pourquoi nous avons souhaité vous entendre sur ce sujet, dans lequel vous vous investissez depuis longtemps. Vous présidez en effet depuis plus de quinze ans l'association CEMAFORRE, qui cherche à promouvoir une réelle égalité des chances pour l'accès à la culture, mais aussi le réseau EUCREA France, qui rassemble des organismes qui agissent dans ce domaine.

Aussi pourriez-vous, en exposé liminaire, nous présenter l'action de ces associations, avant que notre rapporteur vous pose ses questions.

M. André FERTIER - CEMAFORRE est effectivement une association créée il y a une quinzaine d'années avec un enracinement sur des activités de terrain, des activités culturelles pour des personnes ayant subi un traumatisme crânien, des personnes autistes et des personnes âgées dépendantes. Nous avons constaté que dans ce domaine, les réflexions étaient surtout d'ordre intellectuel, portant sur les vertus thérapeutiques de l'Art, sur l'image de la personne handicapée, sur le droit de demander à une personne handicapée de monter sur scène, etc. Or, en tant que responsable associatif, j'ai eu le sentiment que la question n'était pas fondamentalement abordée sous l'angle du respect du droit et surtout sous l'angle de l'accessibilité technique et pratique.

Nous avons souhaité une vision plus globale du sujet et avons donc entrepris, il y a sept ou huit ans, l'édition d'une encyclopédie « Culture handicap » en cinq guides pratiques, qui nous a permis de dresser un constat paradoxal et extrêmement positif : les handicaps ne sont pas du tout un obstacle, comme en atteste le fait que des personnes handicapées aient pu laisser la trace de leur génie par-delà tout handicap dans l'histoire de l'art. Je prendrai pour exemple Beethoven, qui était sourd, Alicia Alonso, qui dirige le ballet national de Cuba depuis des années et qui est aveugle, David Toole, qui est un danseur sans jambes et qui s'est produit il y a deux ans à l'opéra de Lyon lors de la biennale internationale de la danse, Matthews Fraser le batteur anglais sans bras, ou encore Django Reinhardt, qui avait deux doigts paralysés à la main gauche. Le handicap n'est donc pas un obstacle. Cela a été notre premier constat lors de la réalisation de cette encyclopédie.

CEMAFORRE a également eu la volonté d'élargir le champ d'action en créant un site Internet et en développant un centre de ressources national de documentation. Nous avons été interpellés par des associations nationales pour dynamiser un réseau. En 1996 a donc été créé un rassemblement, EUCREA France, qui était issu d'un ancien comité d'une ONG européenne, EUCREA Europe, puisque dans le cadre du programme « Hélios II » avait été créée cette ONG, chaque pays de l'Union européenne ayant un comité EUCREA pour promouvoir les pratiques artistiques des personnes handicapées. Depuis cette date, ce rassemblement regroupe la plupart des associations nationales de personnes handicapées mais aussi des établissements culturels, comme la Cité des sciences, le Centre des monuments nationaux, l'Université Paris V, etc.

Ces organismes sont rassemblés au sein de ce réseau pour mener un combat sur le plan national et international. Le réseau a passé une convention nationale de promotion de l'emploi avec le ministère de l'Emploi pour mener des études sur les emplois-jeunes que j'évoquerai ultérieurement. J'ajoute qu'EUCREA France est membre de la Commission nationale « Culture et handicap » récemment créée.

M. Paul BLANC, rapporteur - Je constate que le problème qui se pose avec le plus d'acuité en matière culturelle est le problème de l'accessibilité. Comment percevez-vous ces obstacles ?

M. André FERTIER - Les principaux obstacles se situent au niveau des institutions d'accueil. Pour ce qui est de l'état des lieux général, on s'accorde à reconnaître que nous en sommes encore, comme au siècle dernier, à considérer que l'accès des personnes handicapées à la culture relève exclusivement du caritatif et du bénévolat et que les personnes handicapées ne sont finalement que des bouches à nourrir. Or, le respect de la dignité humaine consiste à les reconnaître comme des êtres de culture.

M. Jean CHERIOUX - C'est faux ! Nous ne considérons pas les personnes handicapées comme des bouches à nourrir dans les établissements que nous gérons ! Je ne peux pas vous laisser dire des choses pareilles !

M. André FERTIER - Ce n'est absolument pas ce que j'ai voulu dire !

M. Nicolas ABOUT, président - Je crois que M. Fertier souhaitait souligner que seules les associations leur permettent l'accès à la culture, à la différence des institutions.

M. André FERTIER - En effet, c'est exactement ce que j'ai voulu dire et je pense que la richesse des expériences pilotes repose précisément sur les associations, tant nationales que locales. Mais les associations que j'évoque n'ont jamais porté sur les personnes handicapées le regard que je viens d'évoquer, loin de là !

Pour en revenir aux différents obstacles, les institutions d'accueil qui, dans certains cas, sont gérées par des associations, n'ont pas eu à ce jour de mission précise concernant des obligations de projets culturels d'établissement et n'en ont d'ailleurs pas les moyens. Elles n'ont pas non plus de référent pour les actions culturelles ni pu développer à ce jour de professionnalisme adapté au regard des handicaps de ces personnes et au regard d'exigences de qualité d'action culturelle.

S'agissant des personnes vivant à domicile, à part certaines actions de portage de livres ou de vidéos à domicile, il n'y a pas de services culturels de proximité développés aujourd'hui qui mènent vraiment des actions de manière satisfaisante, à l'exception de quelques expériences isolées.

Au niveau des grands établissements culturels, quelques-uns (la Cité des sciences, le Louvre ou le Muséum d'Histoire naturelle par exemple) se sont mis en réseau et se sont dotés de cellules accessibilité. Ils ont ainsi développé un professionnalisme adapté très intéressant et une richesse sur lesquels il faudra s'appuyer pour aller de l'avant.

En ce qui concerne le tissu associatif, je pense que les associations, avec les moyens limités dont elles disposent, ont fait des efforts considérables pour que les personnes handicapées soient reconnues comme des citoyens à part entière. Toutefois, à ce jour, elles n'ont pas pu travailler avec une concertation suffisante avec les acteurs traditionnels de l'action culturelle. Je ne le leur reproche d'ailleurs pas du tout, dans la mesure où cette initiative ne leur incombe théoriquement pas.

M. Jean CHERIOUX - Là est le coeur du problème ! Vous estimez que c'est nécessaire, et pas les associations ! Votre approche de la culture n'est pas la seule qui soit ! Il en existe d'autres, qui ne sortent pas forcément d'un moule unique !

M. André FERTIER - Je ne suis pas en train de vous faire part de ma pensée, mais de dresser un constat !

Puisque nous évoquons les institutions d'accueil, je tiens à citer l'exemple de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, où vivent des milliers de personnes handicapées dépendantes, ne serait-ce que dans les services de gériatrie. Or, l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris n'a que cinq personnes recrutées avec un statut d'animateur et la formation requise. Le reste du personnel qui mène des actions d'animation se compose pour l'essentiel d'aides soignantes, qui mènent d'ailleurs dans certains cas des actions très riches, mais n'ont jamais bénéficié de formation dans le secteur culturel ni sur le thème de l'articulation entre l'action culturelle et la problématique spécifique du handicap. Ces hôpitaux, dans leur ensemble, n'ont pas bénéficié à ce jour, comme l'attestent un certain nombre d'études, de financement des politiques culturelles par les villes.

Par ailleurs, des milliers de petites associations mènent des actions extrêmement riches, mais n'ont pas de solutions pour les pérenniser et les développer de manière professionnelle, et mériteraient d'être davantage soutenues, dans la mesure où elles constituent un très intéressant vivier de richesses.

En ce qui concerne les collectivités territoriales, je rappelle que si le ministère de la Culture ne représente que 1 % du budget de l'Etat, les communes, elles, consacrent à peu près 10 % de leur budget à la Culture. Or, force est de constater que les communes qui sont les premiers porteurs et financeurs de la culture en France ont oublié qu'il y avait aussi des populations handicapées et qu'au niveau des contrats de ville et des contrats Etat-région, pour les volets relatifs à l'action culturelle, les jeunes des quartiers sensibles et certaines catégories défavorisées sont pris en compte, ce qui est une bonne chose, mais les personnes handicapées et les personnes âgées dépendantes sont occultées dans ces dispositifs. Je pense d'ailleurs que ce n'est pas par manque de bonne volonté, mais par méconnaissance du sujet et par manque de repères. Il y a donc bien une nécessité de développer des éléments méthodologiques en s'appuyant sur les très rares expériences qui existent. Il faut ainsi saluer l'expérience qui se développe en ce moment avec la mairie de Paris qui a voté des dispositifs très précis et a entamé un état des lieux sur l'ensemble des sites culturels parisiens, sur l'accessibilité du cadre bâti, de l'offre culturelle et des politiques des établissements. D'autres villes engagent également des programmes de ce type, à l'instar de la ville de Bourges, qui a fait un état des lieux sur l'accessibilité de l'ensemble de ses sites touristiques et culturels. Ce n'est donc pas le désert total ! Cela dit, les communes n'assument pas leurs responsabilités en ce qui concerne les personnes handicapées au niveau de l'action culturelle, ce qui est très regrettable.

A ce jour, l'Etat n'a pas développé de projet structuré en termes de planification et d'actions culturelles pour faciliter l'accès des personnes handicapées à la culture, alors que des projets structurés ont été développés, notamment pour les jeunes des quartiers sensibles avec les opérations dites des cafés musique ou encore des actions destinées à développer les pratiques artistiques à l'école. Il est inutile de préciser que ces dernières n'ont que peu de chances de bénéficier à des personnes handicapées, eu égard aux difficultés qu'elles rencontrent en matière d'intégration scolaire.

M. Paul BLANC, rapporteur - Quelles sont les propositions de la commission nationale « Culture et handicap », annoncée le 25 janvier 2000 et installée le 23 mai 2001, et comment pourraient-elles être mises en oeuvre ? En outre, cette commission a-t-elle, selon vous, la possibilité de renforcer l'intervention de l'Etat dans ce domaine, par le biais de suggestions ?

M. André FERTIER - J'ai été très heureux de l'instauration de cette commission nationale à laquelle j'ai d'ailleurs participé activement. Comme vous le soulignez, elle a été annoncée le 25 janvier 2000 par le Premier ministre Lionel Jospin mais installée seulement le 23 mai 2001. Il a donc fallu un an et demi pour que son installation soit effective, ce qui ne traduit pas une volonté politique forte. En revanche, entre le 23 mai 2001 et aujourd'hui, cette commission nationale a permis aux représentants des ministères concernés de prendre leurs repères. Cela s'est avéré très positif, puisque quatre sous-commissions ont été créées sur les thèmes suivants : information et communication ; médiation culturelle ; pratiques artistiques et accessibilité architecturale.

Ces quatre sous-commissions ont toujours été coprésidées par un représentant du ministère de la Culture et un représentant du ministère de l'Emploi et ont eu le mérite très important de permettre une concertation entre des représentants des ministères, des associations nationales, des personnes et organismes ressources dans ce domaine et d'élaborer un certain nombre de propositions. Une synthèse de ces propositions a été élaborée par les services des ministères. Les associations nationales ont d'ailleurs souligné que, dans cette synthèse, toutes les questions et propositions relatives au financement ont été écartées. Schématiquement, Mme Catherine Tasca, dans le discours qu'elle a prononcé le 20 février dernier à l'occasion du colloque « Mieux vivre la Cité » a fait part des grands axes de propositions qui incluent les mesures suivantes :

- la nomination de correspondants « Culture et handicap » au sein des directions sectorielles du ministère de la Culture, ce qui est très important ;

- la nomination de correspondants au niveau des DRAC ;

- des actions de formation en direction des acteurs des administrations centralisées et décentralisées des ministères de la Culture et de la Solidarité et des associations nationales ;

- des mesures visant à imposer, en amont, des études sur l'accessibilité avant toute construction ou rénovation financée par le ministère de la Culture, sous peine de sanctions et de rétrocession des subventions ;

- l'élaboration d'une Charte pour les établissements culturels avec la définition d'un minimum à exiger de la part de ces établissements en matière d'accueil du public handicapé ;

- le soutien au développement de centres de ressources « Culture et handicap », même si nos entretiens avec les services nous ont fait prendre conscience de l'absence de financement nouveau attribué à ces hypothétiques centres de ressources.

En conclusion, je dirai que la création de cette commission nationale a suscité un élan important avec cette émulation de réflexion et de concertation encore jamais vue auparavant, mais même si des bases importantes ont été posées, il y a un risque de démobilisation et de désarroi, faute de moyens mis en oeuvre et de mesures financières décidées.

M. Paul BLANC, rapporteur - Beaucoup de choses sont effectivement annoncées, mais rien n'est prévu pour les financer !

Je souhaiterais revenir sur ce que vous avez appelé des opérations pilote, que l'on pourrait également appeler actions innovantes. Vous avez évoqué les contrats de ville, mais pourriez-vous citer d'autres types d'opérations pilotes qui mériteraient d'être généralisées ?

M. André FERTIER - En effet, car elles sont nombreuses. Aujourd'hui, l'essentiel de ces opérations pilotes repose sur le dispositif « Nouveaux services Emplois-jeunes » pour lequel EUCREA France a fait un état des lieux dans le cadre d'une convention avec le ministère de l'Emploi. Nous avons identifié à peu près 5.000 emplois-jeunes créés dans ce domaine, souvent par des petites associations. La richesse de ces nouveaux services est de mettre l'accent sur l'existence de vrais professionnalismes adaptés. Il convient en effet de prendre conscience du fait que l'accès aux loisirs et à la culture requiert, dans certains cas, un vrai professionnalisme adapté, à l'instar des exemples comme : l'emploi de la langue des signes lors des conférences ; l'apprentissage de la danse en fauteuil roulant ; l'utilisation de l'outil informatique pour la pratique de la musique par les personnes tétraplégiques ou l'accueil de personnes aveugles dans les musées au moyen de documents en relief.

L'émergence de ce professionnalisme adapté ainsi que de nouveaux services d'information, d'accompagnement et d'animation de services adaptés est donc une réalité.

La pérennisation est essentiellement portée par des petites associations qui sont fragiles, mais qui sont sans doute plus créatives et rapides que des associations plus lourdes. Je considère qu'aujourd'hui, la pérennisation est simple et possible, puisque la Caisse des dépôts et consignations a signé, le 20 novembre dernier, une convention avec le ministère de l'Emploi sur ces questions de pérennisation des nouveaux services et de développement de nouveaux centres de ressources. Or, à ce jour, les responsables de la Caisse des dépôts et consignations n'ont pas identifié le domaine loisirs, culture et handicap comme une priorité. Ils l'ont un peu identifié au niveau des personnes âgées car ils se sont dit qu'avec l'instauration de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), des apports financiers permettraient de financer un certain nombre de services. Cela signifie que la porte reste ouverte, mais n'est tout de même pas clairement ouverte. J'ai malgré tout rencontré des agents du ministère de l'Emploi qui m'ont semblé convaincus, mais parviendront-ils à agir suffisamment fermement et rapidement puisque c'est le 16 mai prochain que le Comité de pilotage prendra ses décisions sur les filières à soutenir. Je souhaite, pour ma part, que cette filière des activités de loisirs et de culture pour les personnes handicapées soit pleinement prise en considération, dans la mesure où elle constitue un enjeu considérable en termes de valeurs pour notre société.

La pérennisation existe également au travers des politiques des villes qui doivent parvenir à redéployer un minimum de financement d'actions culturelles vers ces populations. La réponse existe aussi en termes de textes et je pense que la réponse peut éventuellement s'appuyer sur des textes examinés par le Conseil d'Etat en décembre dernier sur les schémas des services collectifs culturels. Ces textes comportent la prise en compte des populations handicapées ainsi que trois dispositifs essentiels qui me semblent parfaitement correspondre à la problématique. Je pense ici aux conseils territoriaux de la culture avec des représentants des différents acteurs concernés ; aux centres de ressources et d'initiatives pour le soutien aux projets et la notion de services culturels de proximité, qui mérite d'être développée.

M. Paul BLANC, rapporteur - Croyez-vous vraiment que la Caisse des dépôts et consignations va continuer à financer ces emplois ?

M. André FERTIER - Dans la convention du 20 novembre, des sommes considérables sont attribuées à la pérennisation et je pense personnellement que cela ne devrait être qu'une phase de transition et d'accompagnement. Les communes qui, aujourd'hui, n'assument absolument pas leurs responsabilités dans ce domaine, doivent les assumer. Par la suite, il faudra peut-être affirmer la notion du droit à compensation pour répondre au fait que les personnes handicapées qui ne peuvent bénéficier des établissements culturels sont pénalisées et doivent donc bénéficier de mesures de compensation. L'instauration de ce droit à compensation en matière culturelle mériterait peut-être d'être examiné, ainsi que la mise en place d'une allocation d'intégration culturelle et de loisirs dans certains cas extrêmes, qui me semble nécessaire. En effet, l'accès aux loisirs et à la culture me semble être un préalable à l'intégration scolaire et professionnelle. En termes de financement, les dispositifs existent. C'est la volonté ministérielle qui fait défaut !

M. Paul BLANC, rapporteur - Que pensez-vous du sponsoring d'entreprise ?

M. André FERTIER - Je n'y suis pas du tout opposé. Le cercle des partenaires du programme Culture à l'hôpital a d'ailleurs été une dynamique intéressante. J'ai moi-même proposé que les organismes bénéficiaires de la taxe sur la copie privée s'organisent en cercles des partenaires pour un programme « Culture et handicap », mais je pense que la priorité serait que les collectivités territoriales assument leurs responsabilités en termes de financements et de stratégies en direction de ces populations. Je considère depuis des années que le problème financier n'est pas un vrai problème. Si le ministre de la Culture s'intéressait un tant soit peu au sujet, il y aurait réellement des possibilités techniques assez simples. Toutefois, à ce jour, aucune mesure n'a été prise.

M. Paul BLANC, rapporteur - Ne pensez-vous pas que les problèmes de l'accessibilité dans leur ensemble ne devraient pas plutôt être envisagés dans le cadre plus général de l'accessibilité à la Cité, c'est-à-dire qu'à partir du moment où le principe de l'accessibilité de tous les lieux à tous est posé, le problème spécifique de l'accessibilité de la culture ne se poserait plus ?

M. André FERTIER - Je ne le crois pas. Je suis tout à fait conscient du caractère grotesque d'une mise aux normes des établissements culturels, par exemple, si le métro qui permet de s'y rendre n'est pas lui-même accessible. Je voudrais souligner que l'accessibilité ne concerne pas que les personnes handicapées motrices, mais également les personnes handicapées mentales, visuelles et auditives. Ces dernières ne doivent pas être oubliées et leur accompagnement nécessite une réflexion poussée. Je dirais en outre que la problématique des transports sera davantage présente à l'esprit des décideurs lorsque les personnes handicapées seront elles-mêmes davantage présentes au coeur des activités culturelles. Il ne faut donc pas attendre pour aller de l'avant.

En conclusion, je suis ces dossiers depuis des années et je regrette la trop faible implication des politiques. J'ai ainsi participé à une réunion avec M. Philippe Douste-Blazy, lorsqu'il était ministre de la Culture, qui avait nommé un chargé de mission « Culture et handicap ». Mais celui-ci a mené l'ensemble de ses interlocuteurs en bateau et a même été mêlé à une procédure de demande de rétrocession de subventions qui devaient être attribuées à des personnes handicapées. Mme Catherine Trautman, quant à elle, avait pris des engagements précis lors de la journée de la dignité, mais n'a jamais tenu sa promesse, ce que ses propres conseillers ont reconnu à l'occasion d'entretiens que j'ai eus avec eux. Ils m'ont confié qu'ils jugeaient dérisoires et inacceptables les moyens qui étaient mobilisés. A l'heure actuelle, j'ai des réunions régulières avec les membres du cabinet de Mme Catherine Tasca qui reconnaissent que les moyens ne sont pas mis en oeuvre.

Je m'interroge donc sur la possibilité, pour le Parlement ou une commission d'enquête voire de vigilance, d'interpeller les futurs ministres de la Culture sur leurs engagements fermes en termes de planification et de moyens financiers et d'examiner de plus près la situation et les dysfonctionnements de ces dix dernières années en la matière.

M. Nicolas ABOUT, président - Nous transmettrons vos remarques aux différents ministres, anciens et futurs. Je ne manquerai pas d'intervenir auprès de Mme Catherine Tasca, pour lui faire part de vos réflexions. Je ne doute pas qu'elle est très sensible au problème des personnes souffrant de handicaps ou de déficiences et je connais ses engagements sur la culture.

M. André FERTIER - Je tenais également à souligner, bien que ce soit en marge du dossier de la culture, le travail remarquable accompli par Mme Michèle Demessine, dans le domaine du tourisme.

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