c) Mesures juridiques complémentaires
Peut-être notre pays devrait-il s'inspirer des pratiques
en
vigueur dans d'autres pays et notamment en Grande-Bretagne, où l'on fait
spontanément une plus grande place à l'initiative privée
d'intérêt général.
Contrairement à la France où l'Administration a tendance à
ignorer le monde associatif considéré comme poursuivant des fins
particulières, au Royaume-Uni, on s'appuie beaucoup, pour
l'exécution même du service public, sur le monde des organisations
à but non lucratif.
Au nom de
l'Arm length principle
, la Grande Bretagne
préfère « agir à distance » et confier
une partie de son action en matière culturelle à des organismes
indépendants comme le
Art Council
ou le
National Heritage
Memorial Fund
. Bien qu'encadré par la loi et en dépit de
l'adjectif de National figurant dans son nom, le National Trust est une
association bénévole entièrement indépendante de
l'État et qui ne reçoit pas de subventions
régulières de l'État. Tous ceux qui ont visité les
châteaux du
National Trust
ne manquent pas de remarquer le
professionnalisme dont fait preuve cette organisation notamment grâce
à l'apport des bénévoles.
C'est avec cet exemple en tête qui ne peut bien sûr être
transposé en l'état, que votre rapporteur spécial estime
qu'il faut étudier une adaptation de notre droit et des pratiques
administratives pour mieux reconnaître l'apport des associations
réformer le droit des fondations et faciliter l'emploi des
bénévoles.
(1) Reconnaître le rôle des associations
Il
convient de
réévaluer le rôle des associations
comme
la place du mécénat, surtout,
du bénévolat,
tant au niveau de la gestion que de l'animation voire de l'étude des
monuments.
Sans aller jusqu'à associer les représentants des associations de
propriétaires aux réunions de la Conférence administrative
régionale, ce qui a semblé aller trop loin dans l'économie
mixte, il a paru en revanche souhaitable de
créer une instance de
concertation
régionale
, une sorte de comité
régional pour la protection et la mise en valeur des monuments
historiques, au sein duquel pourraient être débattues toutes les
questions réglementaires générales intéressant les
propriétaires privés, y compris la programmation
financière ou la gestion locale des monuments gérés par le
centre des monuments nationaux..
(2) Promouvoir les emplois saisonniers et le bénévolat
A
défaut de promouvoir le bénévolat comme en
Grande-Bretagne, on pourrait songer à prévoir des
allègements de charges comme c'est le cas avec le contrat
« vendanges » et à développer l'usage des
chèques emplois-service
pour les travaux temporaires afin de
favoriser l'ouverture saisonnière au public.
Votre rapporteur rejoint ainsi l'initiative qui a conduit M. Henri de Raincourt
à déposer devant le Sénat à l'occasion du
débat sur le projet de loi portant création d'un dispositif de
soutien à l'emploi des jeunes en entreprise, un amendement qui tendait
à
faciliter l'offre d'emplois saisonniers aux jeunes
,
lycéens ou étudiants, pendant leurs vacances.
Sur un plan pratique, il s'agirait, dans un souci de simplification, de
créer un
chèque emploi services
assorti d'un
allègement de charges.
Le ministre des affaires sociales a évoqué, avant que l'auteur de
l'initiative ne retire son amendement, une série d'obstacles techniques.
Ainsi, dans le cas des jeunes saisonniers, la situation est beaucoup plus
complexe parce que les salariés exercent leurs activités dans
tous les secteurs et sont donc, à ce titre, couverts par autant de
conventions collectives. En outre, les éléments variables des
contrats de travail sont nombreux - durée de travail, heures
supplémentaires, congés, primes diverses, avantages en nature -
et nécessitent une information très détaillée,
ainsi qu'une large consultation des partenaires sociaux.
En dépit de ces arguments, il y a là une piste dont votre
rapporteur spécial espère que le ministre fera étudier la
faisabilité auprès des URSSAF et des partenaires sociaux, comme
il s'y est engagé.
(3) Réfléchir à une adaptation du droit des fondations
Une voie
complémentaire que votre rapporteur spécial se contente
d'évoquer ici compte tenu de sa nature juridique, consisterait à
aménager le
régime des fondations.
Il s'agirait, d'une part, et sur un plan plus général que le
domaine du patrimoine, d'augmenter les avantages dont bénéficient
les fondations reconnues d'utilité publique, en ce qui concerne les dons.
D'autre part, dans le but de permettre aux familles de conserver
l'intégrité de leurs biens, il s'agirait de favoriser la
constitution de fondations consacrées à la perpétuation
d'un monument et de son contenu. La piste mérite d'être
explorée, étant entendu que le problème est moins de
nature fiscale, que juridique, parce qu'il faut arbitrer entre
l'intérêt du monument et ceux des héritiers.
Mais l'objectif important, reste
la préservation d'une certaine
continuité familiale
, qui seule est de nature à
préserver les monuments historiques de la menace que comportent
certaines acquisitions spéculatives qui -on l'a vu avec l'affaire des
châteaux japonais - peuvent s'accompagner de dégradations
irrémédiables. Il ne faudrait pas qu'une gestion à courte
vue transforme certains de nos monuments historiques en supports
privilégiés pour le blanchiment d'argent d'origine douteuse ou
pour servir de support à des placements défiscalisés, au
risque de voir des monuments dénaturés par l'affectation qui en
est faite ou par une division en lots peu compatible avec son esprit.