B. L'ÉTAT CENTRAL GARANT DU PATRIMOINE NATIONAL

La protection du patrimoine monumental repose donc, à la base, sur le propriétaire des monuments, privé et public. Mais, s'agissant d'un bien public, il revient à l'État de s'assurer que l'intérêt public qui s'attache à la conservation de certains biens, du point de vue de l'Histoire où de l'art, est bien pris en compte par leurs propriétaires.

L'instruction de l'An II sur la manière d'inventorier et de conserver adressée aux administrateurs de la République au sujet des édifices et des oeuvres d'art, était particulièrement claire à cet égard, lorsqu'elle affirmait : « Vous n'êtes que les dépositaires d'un bien dont la grande famille a le droit de vous demander compte ».

Le rôle de l'État central est d'abord celui d'un régulateur, auquel il incombe de parvenir à la fixation de lignes directrices cohérentes avec les contraintes, notamment budgétaires et politiques, résultant des sacrifices susceptibles d'être supportés par les citoyens ; il est aussi de définir des règles, ainsi que se donner les moyens d'intervenir pour en surveiller l'application.

Le cadre législatif et réglementaire peut-il rester inchangé dans un contexte de patrimonialisation généralisée de l'environnement ? Ceci est d'autant plus difficile que se dessine une redistribution de rôles entre l'État central et les acteurs de terrain que sont les collectivités territoriales.

1. Les débats préalables

La « dilation indéfinie » de la notion de patrimoine « jusqu'aux frontières du flou et de l'incertain », pour reprendre la formule de Pierre Nora, ne constitue pas seulement un problème intellectuel de nature à susciter des réflexions dans les colloques ou les éditoriaux des journaux spécialisés ; c'est aussi une question de politique budgétaire.

L'hypertrophie de la notion conduit à la multiplication des demandes de soutien au titre de la protection du patrimoine et à la tentation pour la puissance publique de répondre à toutes les sollicitations. Mais est-ce vraiment possible ?

Le rôle de l'État, c'est de fixer les règles du jeu ; mais pour ce faire, il lui faut, au préalable, créer les conditions permettant de faire jouer l'interaction entre science et conscience du patrimoine, techniciens et citoyens afin de définir les lignes directrices qui permettront de procéder aux arbitrages que rendent nécessaires des ressources limitées.

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