C. L'IMPORTANCE DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION (TIC)

1. L'accès aux TIC, un enjeu vital pour les territoires de montagne

L'entrée dans ce qu'il est convenu d'appeler la « société de l'information » peut constituer pour les territoires de montagne un facteur de développement ou de déclin, selon qu'ils y ont ou non accès.

a) Les entreprises du secteur des TIC sont plus susceptibles que les autres de s'installer en milieu rural

Les technologies de l'information et de la communication (TIC) présentent l'avantage de permettre de s'émanciper, dans une certaine mesure, des contraintes géographiques qui empêchent habituellement les industries de s'implanter en zone rurale. En effet, si les industries traditionnelles obligent à réunir un grand nombre de personnes en un même lieu, ce qui favorise les zones densément peuplées, ces contraintes concernent relativement peu les entreprises du secteur des TIC.

La mission commune d'information a pu constater ce phénomène en visitant le CETIR (Centre européen des technologies de l'information en milieu rural), incubateur d'entreprises créé à Saint-Laurent de Neste (Hautes-Pyrénées) par notre collègue Josette Durrieu, qui a permis la venue d'une demi-douzaine de PME dans cette commune de 839 habitants. Selon le CETIR, « aujourd'hui, grâce aux nouvelles technologies de l'information, telles Internet, le lieu d'implantation n'affecte en rien la performance des entreprises » 32 ( * ) . Ainsi, la société Klik'n Go, qui y a implanté son siège social, est présente à Paris et au Maroc (sous forme d'une prise de participation dans une autre entreprise) et prépare l'ouverture de nouveaux centres de téléconseillers en Guadeloupe, à Casablanca et dans l'île Maurice. Il importe de souligner que si certaines des activités du CETIR sont fortement liées au monde rural (tourisme, cartographie numérique à destination des collectivités locales), il s'agit d'exceptions : la plupart des entreprises implantées ont une activité qui n'a rien à voir avec la ruralité : télésaisie (objet de l'un des programmes de recherche et domaine d'activité de la principale entreprise implantée, Bigortel), orthodontie, formation à distance, service informatique.

Il convient cependant de souligner que l'exemple du CETIR ne peut être transposable dans l'ensemble des zones de montagne qu'à condition :

- de mobiliser des moyens conséquents (le CETIR a coûté 381.122 euros, dont 109.122 financés par le Feder) ;

- d'assurer l'accès des zones rurales à la téléphonie mobile et à l'Internet à haut débit 33 ( * ) .

UN EXEMPLE DE DÉVELOPPEMENT DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION EN MILIEU RURAL : LE CETIR

I. Présentation

Créé en 1998, le CETIR (Centre européen des technologies de l'information en milieu rural) est une association loi de 1901 ayant pour but la création d'activités nouvelles de services liés au traitement de l'information.

Il a été créé en 1998.

Il regroupe les divers acteurs concernés :

- membres fondateurs, ayant voix délibérative : Communauté de Communes du Canton de Saint-Laurent-de Neste, conseil général des Hautes-Pyrénées, MATRA Systèmes et Information ;

- membres adhérents, ayant voix délibérative : FRANCE TELECOM, EDF-GDF, SOFRED (GIAT industries), NEUROSOFT, DATAGRAPH, ITESOFT  ;

- membres d'honneur, ayant voix consultative : SET-CNRS (Société Environnement Territoire), INRIA (Institut national de recherche en informatique et en automatique), CDDE (Comité Départemental de Développement Economique) des Hautes-Pyrénées, ENI (Ecole Nationale d'Ingénieurs) de Tarbes, IUT (Institut Universitaire Technologique) de Tarbes.

Il est conseillé par un comité d'orientation scientifique présidé par M. Bernard LARROUTUROU, PDG de l'INRIA (Institut national de recherche en informatique et en automatique).

II. Actions

Le CETIR mène trois programmes de recherche et développement :

- traitement de documents par le télétravail (développement d'une plate-forme de traitement de documents intégrant numérisation, lecture automatique et télé-saisie), programme ayant permis l'essaimage de la société BIGORTEL ;

- HyperC@rta (exploitation de diverses informations utiles au tourisme : culture, cartographie, sport, nature, vie pratique, par un système consultable sur Internet) ;

- HYPERGEO (accès à l'information géographique pour des utilisateurs mobiles, une démonstration devant être faite au travers d'un service d'information touristique).

Parallèlement, le CETIR apporte trois types d'aide aux entreprises :

- aide à l'innovation (conseil et accompagnement des nouvelles PME) ;

- pépinière d'entreprises (accueil des projets élaborés ou dynamisés par le CETIR dans ses locaux pendant la période d'incubation, c'est-à-dire le lancement de l'activité) ;

- hôtel d'entreprises (location à des prix peu élevés et services annexes).

III. Résultats

Le CETIR a permis l'implantation à Saint-Laurent de Neste d'une demi-douzaine d'entreprises représentant une centaine d'emplois.

Source : site Internet du CETIR

b) Les entreprises ont besoin d'avoir accès à la téléphonie mobile et au réseau Internet à haut débit

Il est aujourd'hui essentiel pour une entreprise de disposer de l'accès aux réseaux de télécommunications modernes. Or, les zones rurales sont actuellement à l'écart des réseaux de téléphonie mobile et d'Internet à haut débit.

(1) La téléphonie mobile

En ce qui concerne la téléphonie mobile, un récent rapport du Secrétariat d'Etat à l'Industrie 34 ( * ) a établi un état des lieux de la couverture du territoire et réalisé une analyse économique des zones restant à couvrir :

- 46.000 km² ne sont couverts par aucun réseau (soit 8,4 % du territoire) ;

- 390.000 personnes, soit 0,7 % de la population, n'ont pas accès à un service de téléphonie mobile sur leur lieu de résidence ;

- 1.480 communes ne disposent pas d'une couverture effective de leur centre ;

- la moitié des zones non couvertes se situent au-dessus de 700 mètres d'altitude.

(2) Le haut débit

Selon le schéma de services collectifs de l'information et de la communication, les études convergeraient pour montrer que les dorsales (« backbones ») seraient suffisamment dimensionnées pour répondre à la forte croissance des besoins. Dès lors, la question des hauts débits se poserait essentiellement au niveau des réseaux intermédiaires et des réseaux terminaux d'accès aux usagers finaux, c'est-à-dire à celui de la « boucle locale ».

Selon les informations fournies par la DATAR, 80 % du territoire, représentant 25 % de la population, constitueraient des territoires « de fragilité ». La demande étant « trop faible pour assurer aux opérateurs une quelconque rentabilité », la DATAR estime que sans intervention des pouvoirs publics, « ces territoires sont structurellement exclus du haut débit ».

La désertion des zones rurales par les entreprises pourrait de ce fait être importante au cours des prochaines années. La DATAR précise que « les études menées (...) avec l'observatoire ORTEL en 2001 ont montré qu'à l'échéance de 3 ans, l'absence d'une offre de services haut débit conduira un nombre substantiel de PMI/PME (plus de 30 %) à quitter leur site d'implantation pour rejoindre le pôle d'activités voisin bien desservi ». Ce problème n'épargne pas le CETIR, que certaines entreprises pourraient quitter si elles n'obtenaient pas l'accès au haut débit à courte échéance.

2. Les objectifs ambitieux fixés lors du CIADT de Limoges restent à concrétiser

Parmi les trois objectifs de la loi n° 96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications, l'aménagement du territoire était, à côté de l'ouverture à la concurrence et du renforcement du service public, l'une des toutes premières priorités du législateur et du Sénat en particulier.

Avec le lancement du programme d'action gouvernemental pour la société de l'information (PAGSI) en 1997, le précédent gouvernement a affiché sa volonté de créer une « société de l'information pour tous ».

En matière de télécommunications, la montagne fait depuis longtemps l'objet de certaines mesures spécifiques 35 ( * ) . Cependant, elle n'est généralement pas identifiée en tant que telle dans le cadre de la politique de développement des technologies de l'information et de la communication.

La montagne est cependant visée de manière indirecte, car elle est considérée comme un ensemble de zones rurales parmi d'autres, dont l'accès à ces technologies doit être favorisé.

Les objectifs proclamés par les gouvernements successifs sont ambitieux. Encore faut-il que les moyens prévus soient rapidement mis en oeuvre, faute de quoi le déclin des zones de montagne pourrait encore s'accélérer.

a) Des objectifs ambitieux de couverture du territoire

Les deux principaux objectifs sont fixés par le schéma de services collectifs de l'information et de la communication 36 ( * ) :

- « l'établissement d'une couverture territoriale complète des lieux de vie permanents et occasionnels (sites touristiques), ainsi que des axes de transport prioritaires, pour la téléphonie mobile », à l'horizon 2003 ;

- « la disponibilité d'une offre de connexion à 2 Mbits/s à un coût abordable (...) à l'échéance 2005 ».

Ces objectifs ont été confirmés dans le cadre du comité interministériel de l'aménagement et du développement du territoire (CIADT) de Limoges (9 juillet 2001). Le précédent gouvernement a en outre réaffirmé à cette occasion sa volonté d'« assurer un déploiement équilibré des réseaux d'information et de communication sur tout le territoire, en particulier dans les zones défavorisées, les moins développées économiquement ou les moins peuplées » et d'« accompagner dans les territoires la dynamique du PAGSI ».

b) Le cas de la téléphonie mobile

Le précédent gouvernement a décidé la mise en place d'un dispositif de soutien public à l'investissement des collectivités locales et des opérateurs pour la construction de stations de base équipées.

Selon ses termes, « cet engagement vise à assurer dans les trois prochaines années [en 2003 au plus tard] la couverture de l'ensemble des lieux de vie permanents et occasionnels (sites touristiques) et des axes de transport prioritaires, conformément aux objectifs fixés par le schéma de services collectifs de l'information et de la communication ». Seraient donc concernés, notamment, l'ensemble des centres de village qui ne sont aujourd'hui couverts par aucun réseau.

Le coût global de la réalisation de cet objectif a été évalué à 1,4 milliard de francs (215 millions d'euros) sur le territoire métropolitain. Ce chiffre prend en compte l'accord conclu entre le précédent gouvernement et les trois opérateurs mobiles pour la mise en place d'un système d'itinérance locale dans les zones à couvrir (il s'agit de déployer pour chaque zone concernée un réseau unique accessible aux abonnés des trois opérateurs mobiles). A titre de comparaison, selon le rapport précité du secrétariat d'Etat à l'industrie, l'hypothèse d'une couverture à 100 % du territoire par un seul réseau représenterait un investissement d'environ 2,6 milliards de francs (400 millions d'euros).

Ces investissements devaient être cofinancés par les opérateurs à hauteur de 400 millions de francs (60 millions d'euros) et par l'Etat à hauteur de 500 millions de francs (75 millions d'euros), les collectivités locales devant financer les 500 millions de francs (75 millions d'euros) restants. Les investissements de l'Etat et des collectivités locales devaient concerner les stations de base équipées. Le Massif central était considéré comme « zone prioritaire » pour ce dispositif.

Ce dispositif a connu certaines modifications.

- Tout d'abord, Orange et SFR ont accepté d'accroître leur participation à la couverture des mobiles (réduisant d'environ de moitié la charge de la couverture pour les pouvoirs publics, et en particulier pour les collectivités locales), mais en contrepartie ont refusé de souscrire à l'obligation d'itinérance, écartant de ce fait le troisième opérateur, Bouygues.

- Ensuite, l'ART (autorité de régulation des télécommunications) a estimé à 5.000 le besoin de relais, contre 1.500 pour le CIADT.

- Finalement, un accord entre l'Etat et les trois opérateurs semble sur le point d'être conclu au sujet de l'itinérance locale, chaque opérateur acceptant d'en financer un tiers. Lors de son audition par la mission commune d'information, le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire a en effet indiqué qu'un tel accord était en phase d'examen au niveau interministériel.

Ces orientations restent à concrétiser. En particulier, tous les décrets d'application n'ont pas encore été publiés. En outre, le développement de la couverture est actuellement stoppé, les opérateurs attendant que des études soient effectuées par les départements, avant de poser de nouveaux pylônes. Seul Bouygues Télécom pose de nouveaux pylônes, du fait de son retard initial. Interrogés à ce sujet par la commission des affaires économiques du Sénat, M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie, ont confirmé les engagements financiers de l'ancien gouvernement. Ceux-ci doivent encore être concrétisés par la prochaine loi de finances.

En tout état de cause, le développement de l'itinérance doit être assuré. On peut à cet égard renvoyer à la récente proposition de loi de nos collègues Bruno Sido, Gérard Larcher, Pierre Hérisson, François Trucy et Paul Girod 37 ( * ) . Cette proposition tend à imposer l'itinérance dans les zones que les collectivités locales auront identifiées selon la méthodologie mise au point par l'Autorité de régulation des télécommunications, dans le cadre de la convention qu'elle a signée le 17 octobre 2001 avec l'Association des départements de France.

Proposition n° 56. : Imposer, par des dispositions législatives, le développement de l'itinérance, en particulier en zone de montagne.

c) Le cas de l'Internet à haut débit

Dans le cadre du programme d'action gouvernemental pour la société de l'information (PAGSI), le précédent gouvernement a fixé pour objectif l'accès de tous aux réseaux à haut débit d'ici à l'année 2005.

Les travaux menés sur la diffusion du « haut débit », notamment par le Conseil Economique et Social (rapport de juin 2001) ou par l'Observatoire des Télécommunications dans la Ville (rapport du groupe «Rural » présidé par le président de la Fédération nationale des maires ruraux, mars 2002), établissent un même constat : laissé à la seule dynamique du marché, l'essor du haut débit conduirait, à l'échéance de 2005, à une polarisation accrue, une part significative de la population (20 à 25 % selon les estimations) et des territoires n'ayant aucun accès au haut débit à des conditions économiquement viables.

A l'occasion de son audition par la mission commune d'information, M. André Marcon 38 ( * ) a estimé que l'équipement en fibres optiques de toutes les communes de France coûterait de l'ordre de 10 milliards d'euros, dont un tiers serait déjà investi.

Afin d'atteindre son objectif, le précédent gouvernement a chargé la Caisse des dépôts et consignations de mettre « ses capacités d'expertise et d'appui au service des collectivités locales pour accompagner et créer un effet de levier dans le déploiement de projets d'infrastructures, de contenus et d'usages que celles-ci engagent ». La Caisse des dépôts et consignations doit intervenir financièrement de deux manières :

- par un accompagnement en investissement sur ses fonds propres, à hauteur de 1,5 milliard de francs (230 millions d'euros) sur 5 ans ;

- par des prêts à taux préférentiels sur 30 ans aux collectivités locales, en cofinancement avec les établissements de crédits, à l'intérieur d'une enveloppe de 10 milliards de francs (1,5 milliard d'euros).

Le précédent gouvernement a également décidé d'ouvrir la possibilité d'un recours aux infrastructures du Réseau de Transport et d'Electricité (RTE), pour le déploiement de réseaux de télécommunication en fibres optiques qui desserviraient les zones les moins équipées. Cette technologie représente en effet un coût deux à trois fois moins élevé que l'enterrement de la fibre optique. L'intérêt principal du RTE réside dans le réseau à haute tension (63 ou 90 kV), qui assure la répartition de l'électricité à l'échelle régionale et départementale et dessert généralement la périphérie des principales agglomérations de chaque département (à partir de 5.000 à 7.000 habitants, ce qui représente environ les deux tiers de la population française).

D'autres technologies, susceptibles de se développer à plus long terme, concernent l'offre de services de télécommunications à haut débit par radio ou par satellite.

La Caisse des dépôts et consignations a vu le nombre de dossiers de financement d'infrastructures passer de 60 à 120 projets depuis le CIADT de Limoges, et estime qu'elle aura financé, à la fin de l'année 2002, une vingtaine de ces projets. C'est encore peu comparé aux besoins.

3. Le rôle essentiel des collectivités territoriales

a) Le rôle des collectivités territoriales dans le financement des infrastructures
(1) Un rôle important

L'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales prévoit que les collectivités, ou les établissements publics de coopération intercommunale ayant bénéficié d'un transfert de compétence à cet effet, peuvent créer des infrastructures destinées à supporter des réseaux de télécommunications (canalisations, chambres de tirage ou fibres noires destinées à supporter des réseaux filaires, pylônes et alimentation électrique pour les infrastructures de boucle locale radio ou de téléphonie mobile...). Ces infrastructures peuvent ensuite être mises à la disposition d'opérateurs ou d'utilisateurs par voie conventionnelle, dans des conditions « objectives, transparentes et non discriminatoires ».

Ainsi, les collectivités locales sont appelées à jouer un rôle important en matière de financement des infrastructures.

Tel est tout d'abord le cas en ce qui concerne la téléphonie mobile 39 ( * ) . Ce mouvement devrait s'accélérer, dans la mesure où le CIADT de Limoges a, comme on l'a vu, décidé de mettre en place un système de cofinancement des infrastructures de téléphonie mobile entre l'Etat et les collectivités locales, le Massif central étant considéré comme « zone prioritaire ».

En ce qui concerne l'Internet à haut débit, de nombreuses collectivités locales se sont engagées dans la réalisation de réseaux de collecte à haut débit. Il s'agit de réseaux intermédiaires entre ceux de desserte des clients et les réseaux longue distance. L'objectif est de rendre ainsi possible l'apparition d'offres de services à haut débit de la part des opérateurs.

(2) Une simplification du cadre juridique par la loi du 17 juillet 2001

Après une première modification intervenue dans la loi n° 99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, les modalités d'intervention des collectivités locales ont été simplifiées par la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel.

La loi du 17 juillet 2001 a supprimé les conditions jusqu'alors exigées par l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales, qui limitaient, à l'excès, leurs initiatives en ce domaine :

- obligation pour la collectivité locale d'établir, par « constat de carence », que France Telecom n'était pas en mesure de lui fournir le service demandé ;

- amortissement sur huit ans des infrastructures réalisées par une collectivité locale.

La possibilité est également reconnue aux collectivités territoriales de mettre les infrastructures concernées à la disposition, non seulement des opérateurs de réseaux, mais également d'utilisateurs finaux.

En outre, les collectivités territoriales ont désormais l'autorisation de déduire, du coût de location facturé aux opérateurs, les subventions publiques qui peuvent être consenties « dans certaines zones géographiques ». Ainsi, les collectivités territoriales des zones rurales, en particulier des zones de montagne, devraient pouvoir subventionner les infrastructures de télécommunications.

(3) Propositions de réformes

Plusieurs réformes sont envisageables. Il convient de souligner à cet égard que l'évolution du cadre réglementaire des télécommunications est inévitable à court terme. En effet, elle est prévue dans le dispositif même de la loi de réglementation des télécommunications du 26 juillet 1996, et le nouveau « paquet télécom » adopté par l'Union européenne doit être prochainement transposé.

(a) Permettre aux collectivités locales de jouer un rôle d'opérateur ou de subventionner des opérateurs ?

Dans son rapport sur l'adaptation de la régulation publié en juillet 2002, l'ART estime nécessaire d'aller plus loin.

En effet, le dispositif actuel présente un double inconvénient :

- un manque de clarté du cadre juridique : selon l'ART, les débats qui ont entouré la rédaction d'un projet de circulaire d'application ont mis en lumière les difficultés de mise en oeuvre du dispositif, notamment lorsqu'il s'agit d'établir une frontière entre « réseaux de télécommunications » et « infrastructures passives », débat qui se heurte selon elle à « des difficultés techniques insurmontables » ;

- l'impossibilité pour certaines zones d'être desservies par les opérateurs dans des conditions de rentabilité suffisante, même avec une aide des collectivités locales.

Ainsi, l'ART propose de permettre aux collectivités locales :

- de subventionner les opérateurs (afin de respecter les principes de la concurrence, établis au niveau européen, il sera vraisemblablement nécessaire de définir les zones dans lesquelles cette intervention se justifie) ;

- de jouer un rôle d'opérateur dans les zones les moins desservies (les collectivités territoriales devant respecter certaines règles afin de ne pas fausser la concurrence).

Les collectivités locales ne pourraient cumuler ces deux types d'intervention sur une même zone géographique.

En conclusion, on peut souligner que les collectivités locales doivent faire preuve de patience et de prudence en matière d'investissements dans les infrastructures de télécommunication . En effet, elles engagent des initiatives qui pourraient être dépassées sur le plan technologique, alors qu'elles devront rembourser des annuités d'emprunt durant de nombreuses années. En particulier, le Conseil d'administration de France Télécom a décidé d'ouvrir le haut débit par le biais de l'ADSL, qui permet d'utiliser les fils existants, alors que certaines technologies permettront de disposer d'un débit supérieur (fibre optique, boucle locale radio, satellite).

Proposition n° 57. : Faciliter l'intervention des collectivités locales dans le domaine des télécommunications, en leur permettant de subventionner des opérateurs ou de jouer un rôle d'opérateur.

(b) Expérimenter diverses solutions techniques

Plusieurs solutions techniques pourraient être expérimentées afin de démocratiser l'accès à l'Internet à haut débit. Ainsi qu'on a eu l'occasion de le souligner, les technologies radio et satellitaire constituent des solutions d'accès potentiellement économiques.

Lors de son audition par la mission commune d'information, le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire a indiqué que « plusieurs expérimentations de grande ampleur permettant de tester des technologies alternatives fixes et sans fil pourraient être lancées : un campus universitaire, un ensemble de résidences, une gare, un aéroport, un ensemble de communes... (...) Ces expérimentations pourraient s'appuyer sur des dispositifs de coopération entre entreprises, établissements de recherche-développement et acteurs publics locaux, l'Etat intervenant par un abondement financier jouant un effet levier (...) et, au besoin, en levant les obstacles réglementaires » 40 ( * ) .

Proposition n° 58. : Expérimenter à grande échelle diverses solutions techniques (radio, satellitaire...) afin de favoriser la démocratisation de l'accès au haut débit en zone de montagne.

b) L'implication des massifs

Les massifs se sont engagés en faveur du développement des technologies de l'information et de la communication (TIC).

Tel a en particulier été le cas du Massif central qui, selon les informations fournies par la DATAR à la mission commune d'information, constitue « une référence dans le secteur » :

- le comité de massif a pris le relais du « groupe d'expérimentation » créé à ce sujet en 1999 ;

- la convention interrégionale de massif prévoit de consacrer 900.000 euros au développement des TIC ;

- l'ADIMAC (Association pour le Développement Industriel et Economique du Massif central et du Centre) emploie à plein temps une personne au sujet des TIC 41 ( * ) ;

- l'Union des chambres de commerce et d'industrie du Massif central a pris l'initiative d'une action de sensibilisation aux TIC (création de cybersites) ;

- le CIADT de Limoges a indiqué que le Massif central était « zone prioritaire » pour le développement de la téléphonie mobile.

Dans le cas des Alpes, la convention interrégionale de massif doit permettre le financement de projets, concernant en particulier l'accès au haut débit par satellite ou par le réseau hertzien.

Dans les Pyrénées, la commission permanente du comité de massif a engagé une réflexion. Le CIDAP (comité interrégional pour le développement et l'aménagement des Pyrénées, créé en 1983) doit en effet dresser une carte destinée à déterminer les zones d'ombre, selon un cahier des charges validé par l'ART (cette étude étant financée par des crédits d'auto-développement de la montagne et les départements concernés).

* 32 Phrase figurant sur son site Internet.

* 33 Le CETIR n'échappe d'ailleurs pas à cette difficulté. L'accès à l'internet à haut débit devrait toutefois y être prochainement assuré.

* 34 Direction générale de l'industrie des technologies de l'information et des postes, Rapport sur la couverture du territoire par les réseaux de télécommunications mobiles, Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, 2001.

* 35 Ainsi, dans le cas de la diffusion de services de communication audiovisuelle, la «loi montagne» prévoit, dans son article 16, que l'action du Conseil supérieur de l'audiovisuel en matière de définition des conditions techniques et d'attribution des fréquences peut faire l'objet d'« aménagements techniques particuliers » afin de « permettre, en zone de montagne, une bonne réception des émissions des services de radiodiffusion sonore ou de télévision par voie hertzienne».

* 36 Qui, selon la loi, «définit les objectifs de développement de l'accès à ces services et de leurs usages sur l'ensemble du territoire, dans le respect des dispositions sur le service universel et les services obligatoires des télécommunications».

* 37 Proposition de loi relative à la couverture territoriale en téléphonie mobile de deuxième génération par la mise en oeuvre prioritaire de prestations d'itinérance locale entre opérateurs, 3 août 2002 (n° 409).

* 38 Président de l'Union des chambres de commerce et d'industrie du Massif central, président de la Chambre régionale de commerce et d'industrie Auvergne, premier vice-président de l'Assemblée des Chambres françaises de commerce et d'industrie (ACFCI).

* 39 Par exemple, dans le cas de la région Limousin la mise en place d'une boucle régionale haut débit est l'une des plus importantes opérations inscrites au contrat de plan (de l'ordre de 50 millions d'euros).

* 40 Réponse écrite.

* 41 Créée en 1975, l'ADIMAC rassemble des industriels, des collectivités territoriales, des organismes de développement et des organismes financiers.

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