D. ... MAIS LA PROFITABILITÉ AUSSI
La
première moitié des années 80 est marquée par une
action négative de la profitabilité sur l'accumulation du
capital, qui atteint son point culminant courant 1983, sous l'effet de la
déformation du partage de la valeur ajoutée en faveur des
salariés (le taux de marge atteint un minimum historique à
21 %). La politique de rigueur instaurée en France à compter
de mars 1983 permet aux entreprises de restaurer leurs marges et
d'accroître leur rentabilité. Toutefois, il faut attendre le
début de 1985 pour que la profitabilité des entreprises joue
favorablement sur l'accumulation du capital, malgré l'accroissement des
taux d'intérêt réels lié à la
désinflation. La seconde moitié des années 80 voit un
impact favorable de la profitabilité des entreprises, qui provient
essentiellement de la reconstitution de leur marge, mais aussi à une
baisse moindre de la productivité du capital. Celle-ci progresse
jusqu'en 1990 et sa contribution au dynamisme de l'investissement
s'accroît pour connaître son apogée en 1990.
Le ralentissement de 1990 et le niveau élevé des taux
d'intérêt, qui avaient nettement progressé dans les
années 1980, avaient resserré les contraintes financières
sur les entreprises. Ce resserrement a contribué à freiner
l'investissement au début des années 1990. Face à cette
situation, les entreprises ont réagi rapidement et n'ont pas
laissé se dégrader leurs ratios financiers en engageant une
stratégie de désendettement.
Les taux d'intérêt réels ont ensuite lentement
baissé et cette baisse s'est accompagnée d'une restauration de la
rentabilité du capital ce qui a conduit à une remontée
progressive de la profitabilité du capital. En 1995-1996, la baisse des
taux d'intérêt réels est plus prononcée, ce qui se
traduit par une nette amélioration de la profitabilité. La
restauration de la rentabilité du capital s'observe quant à elle
dès 1993. La forte substitution du travail au capital favorisée
par les allègements de charge et la modération salariale
interrompent la baisse tendancielle de la productivité du capital, ce
qui améliore durablement la rentabilité du capital.
Mais il faut attendre 1998, et la baisse des taux d'intérêt
réel rendue possible par l'entrée dans la zone euro pour que la
profitabilité retrouve un niveau moyen de l'ordre de 4 % (celui
jugé suffisant par Malinvaud). La contrainte financière se
dessert alors et l'investissement repart. La restauration des marges des
entrepreneurs semble avoir également favorisé l'accumulation du
capital dans d'autres pays européens comme l'Allemagne ou le
Royaume-Uni.
Ainsi, la vigueur de l'investissement constatée depuis 1998 trouve ses
origines non seulement dans la vigueur de la demande mais également dans
la restauration de la profitabilité, grâce notamment à la
forte baisse des taux d'intérêt en 1995-1996.