C. TENIR COMPTE DE L'EVOLUTION DE LA SOCIETE FRANÇAISE
Si l'on souhaite procéder à une réforme d'envergure de notre droit des mutations à titre gratuit, une telle réforme devrait sans doute être menée à la lumière de l'évolution de la société française.
1. La modification de la pyramide des âges
L'amélioration des conditions de vie et de travail
ainsi que
les progrès de la médecine ont considérablement accru
l'espérance de vie des Français. Ceci a eu pour
conséquence de changer radicalement le profil de la pyramide des
âges de la population depuis le début du siècle.
C'est pourquoi, il pourrait être envisagé de calculer la valeur de
l'usufruit et de la nue-propriété d'un bien
démembré d'après la valeur économique réelle
de ces droits et non plus d'après un barème
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)
indexé sur l'espérance
de vie des Français du début du siècle dernier. En effet,
ce barème, tel qu'applicable actuellement conduit à survaloriser
la valeur d'un droit en nue-propriété au détriment de la
valeur d'un droit en usufruit, ce qui pénalise les donations consenties
avec réserve d'usufruit.
Calculer la valeur de l'usufruit et de la nue-propriété d'après une valeur économique et non plus d'après l'actuel barème de l'article 762 du CGI
L'allongement de l'espérance de vie a aussi pour effet
de
retarder la transmission entre vifs du patrimoine, en particulier pour les
ménages qui ne disposent pas d'un patrimoine suffisant pour leur
permettre de préparer longtemps à l'avance sa transmission, sans
compromettre leur niveau de vie.
Or, il ressort des statistiques communiquées par l'administration
fiscale
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*
)
que près de
31% des donateurs ont plus de 75 ans. Afin de ne pas pénaliser ces
contribuables, la réduction de droit de donation de 30% lorsque le
donateur est âgé de plus de 75 ans pourrait être reconduite.
En outre, le rétablissement de cette réduction de droit, et plus
généralement, l'incitation des mutations anticipées,
permettrait à l'Etat de percevoir par anticipation les droits de
mutation. Les droits de donation ainsi perçus constitueraient non
seulement des recettes anticipées mais également un profit
supplémentaire à hauteur de la valeur de capitalisation des
sommes concernées. En outre, les contribuables âgés de 60
ans et plus, appartiennent majoritairement à une population de
contribuables retraités. Or ces contribuables qui ne perçoivent
plus de salaires, consomment en général leur capital plus qu'ils
ne l'accroissent. Ainsi, la perception des droits de mutation par anticipation
pourrait être dans l'intérêt des finances publiques.
A titre d'illustration, prenons l'exemple d'un contribuable âgé de
74 ans qui consent l'année N une donation à son fils afin de
bénéficier de la réduction de droits de 30%. Les droits de
donation exigibles s'élèvent à 10.000 euros. Si l'on
considère que l'espérance de vie de cette personne est encore de
15 ans, le capital représenté par cette somme
rémunérée, par exemple, au taux légal de 3,5% par
an, sera de 16.700 euros en N+15.
Si cette personne ne consent pas de donation en N en raison de l'absence de
rétablissement de la réduction de droits de 30%, les droits de
mutation perçus lors de son décès en N+15 seraient
d'environ 14.300 euros. Cela représenterait donc un manque à
gagner de 2.400 euros pour l'Etat, soit 24%.
Rétablir la réduction de droit de donation de 30% lorsque le donateur est âgé de plus de 75 ans