2. La mise en oeuvre de réformes importantes

a) La nouvelle loi sur les investissements étrangers

Une nouvelle loi sur l'attraction et la protection de l'investissement étranger en Iran a été adoptée en 2002 et pourrait permettre de drainer les financements internationaux dont l'économie a besoin.

La définition de l'investisseur étranger a été modifiée et inclut désormais les sociétés iraniennes, notamment celles dont les capitaux sont partiellement possédés par des entreprises étrangères. Les conditions d'octroi de l'autorisation gouvernementale ont également été revues : l'octroi d'une telle autorisation est maintenu pour tous les types d'investissements mais des conditions générales pour le traitement des demandes ont été introduites (l'investissement doit contribuer à la croissance économique, ne pas mettre en danger la sécurité nationale ou l'intérêt public, ne pas créer de monopole pour l'investisseur étranger).

Par ailleurs, la valeur totale des marchandises et des services résultant de l'investissement étranger ne doit pas dépasser respectivement 25 et 35 % de celle du secteur d'activité et du sous-secteur concernés. Enfin, la propriété du sol reste interdite, comme le prévoit la Constitution, ce qui a pour conséquence d'interdire aux entreprises intervenant dans le domaine énergétique d'agir sur l'amont.

L'investissement étranger est dès lors possible de deux façons :

- Investissement direct (IDE) dans les domaines où le secteur privé est autorisé à opérer.

- Buy-back (contrat de contre-achat) et BOT (Build, Operate, Transfer). L'introduction de ces deux types d'opération constitue également une nouveauté. La nouvelle loi prévoit également la possibilité d'investissement d'un Etat étranger sous réserve d'approbation du Parlement.

Les investisseurs étrangers jouissent désormais des même droits et protections que les investisseurs locaux. Enfin, en cas de nationalisation ou expropriation, une compensation « équitable » est prévue.

Au total, la nouvelle loi apporte des améliorations substantielles mais elle maintient, et même introduit, de fortes contraintes. Parmi les points positifs, il convient de signaler que l'autorisation d'investissement n'est plus du ressort du conseil des ministres mais de la Commission d'investissement, ainsi que l'introduction des formes d'investissement comme les « buy-backs » et les BOT.

La loi ne lève cependant pas les exigences auxquelles sont soumis les investisseurs étrangers en Iran. Les entreprises étrangères sont toujours exclues de l'amont pétrolier et gazier, les investissements doivent toujours faire l'objet d'une autorisation pour bénéficier de la nouvelle législation, l'exequatur des décisions arbitrales rendues à l'étranger est toujours soumis à l'approbation des autorités iraniennes pour les entités publiques, et le rapatriement des bénéfices en devises reste limité.

Ces sujétions s'appuient sur la Constitution pour les dispositions concernant la propriété et la soumission à une approbation du Parlement de l'arbitrage étranger pour les entités publiques, ainsi que sur le Troisième plan quinquennal pour les mesures relatives aux rapatriements des devises.

La loi introduit même de nouvelles limites avec les plafonds sectoriels, soumettant un peu plus l'investisseur étranger à l'appréciation de la Commission d'investissement. La manière d'appliquer la loi par cette Commission comptera encore bien plus que la lettre du texte.

b) Des réformes notables mais encore insuffisantes

Le rythme de la croissance économique paraît insuffisant pour absorber la hausse de la population active (750.000 personnes par an) et permettre une progression significative du PIB par habitant. L'étendue des réformes à accomplir demeure, selon beaucoup d'experts, encore substantielle. En définitive, le défi de l'économie iranienne , caractérisée par sa forte dépendance au secteur pétrolier, réside aujourd'hui dans la diversification des productions . Or, les restrictions pesant sur les importations depuis dix ans contribuent à restreindre l'offre locale, non renouvelée, car l'appareil productif national tend à se dégrader. Dans le même temps, le fonctionnement de l'Etat gagnerait sans nul doute à certaines évolutions : la fiscalité n'est pas jugée efficace par les experts internationaux, les subventions s'élèvent à plus de 10 % du PIB et l'Etat continue à contrôler 85 % de l'appareil productif.

Dans un climat d'opposition tant des conservateurs que des réformateurs appartenant à la gauche islamique et partisans d'une économie dirigée, le président de la République a néanmoins réussi à mettre en oeuvre un certain nombre de réformes :

- le taux de change a été unifié ;

- le tarif douanier, qui limite toujours les importations, a été progressivement adapté pour passer d'un système non-tarifaire au système tarifaire exigé par une éventuelle entrée à terme de l'Iran à l'OMC ;

- une réforme fiscale a été introduite en mars 2003 : les nouveaux barèmes fiscaux, réduits de 54 % à 25 % pour l'impôt sur les bénéfices, constituent un encouragement important pour les entreprises locales et étrangères.

Comme l'a souligné à la délégation M. Réza Adbollahi, président de la Commission des affaires économiques du Madjlis, le terrain serait prêt, avec ces réformes, pour un renforcement des coopérations économiques franco-iraniennes, notamment dans le domaine de l'automobile ou de l'énergie.

Ces réformes sont, à l'évidence, de nature à favoriser l'immersion de l'économie iranienne -encore marquée par une certaine autarcie- dans les échanges internationaux. Mais sont-elles suffisantes ? Les efforts du gouvernement pour attirer des capitaux étrangers n'ont-ils pas eu une efficacité toute relative (si l'on exclue les financements en « buy-back » dans le secteur pétrolier) et la nouvelle loi sur l'investissement étranger, après plus d'un an d'application, ne paraît-elle pas encore insuffisante pour renverser la tendance ?

Or, le décollage des investissements étrangers est primordial pour l'économie iranienne. D'une part, le pays répondrait ainsi en partie au manque de financement interne, notamment dans le secteur pétrolier où le vieillissement des infrastructures commence à devenir un facteur limitatif de la production. D'autre part, cela permettrait de desserrer la contrainte externe. En effet, même si la conjoncture pétrolière, jusqu'à présent favorable, a éloigné le risque de nouveaux incidents de paiement après les rééchelonnements de 1998, et si la dette externe est réduite (elle représente moins de 15 % du PIB et moins de 30 % des recettes en devises), une diminution de la « rente » pétrolière suite, par exemple, au retour de l'Irak sur le marché pourrait faire réapparaître un risque de liquidité.

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