B. TRAITER DIFFÉREMMENT CERTAINES TÂCHES NE RESSORTANT PAS DIRECTEMENT DE LA MISSION PRINCIPALE DE SÉCURITÉ PUBLIQUE

A la suite notamment des membres de la mission interministérielle sur les régimes de service dans la police et la gendarmerie et des experts d'ACCENTURE, votre rapporteur a souhaité identifier les missions actuellement effectuées par les forces de sécurité intérieure, mais ne relevant pas directement de leur mission de maintien de l'ordre (cf. supra , deuxième partie).

Le présent rapport envisage successivement trois modes de gestion. Ces tâches peuvent être externalisées, gérées par d'autres administrations ou effectuées par des personnels administratifs spécialisés ayant le statut de policier ou de gendarme.

1. L'externalisation

Elle devrait concerner des opérations exclusivement annexes au maintien de l'ordre, susceptibles d'être conduites par des organismes extérieurs à un moindre coût.

L'externalisation de l'entretien et de la maintenance des équipements doit être poursuivie. Outre les locaux, il s'agit notamment des véhicules. A cet égard, le cabinet ACCENTURE a relevé des exemples attestant de marges d'amélioration :

- « à la préfecture de police, la sous-traitance avec un garagiste privé et proche de chaque commissariat n'est pas autorisée. Il faut obligatoirement que les véhicules soient emmenés au garage central. Dans un des commissariats visités, 6 véhicules sont ainsi immobilisés dans ce garage depuis 9 à 12 mois » ;

- « dans une brigade de gendarmerie, il est obligatoire d'envoyer les véhicules hors du département pour des réparations, même mineures. Le temps consommé à chaque fois est de deux heures pour deux gendarmes » 58 ( * ) .

Ces observations témoignent de l'intérêt de poursuivre et d'amplifier l'actuel mouvement d'externalisation d'entretien des locaux et de maintenance des équipements. A cette fin, il convient selon votre rapporteur de comparer les coûts de ces opérations dans l'hypothèse de leur réalisation directe ou de leur sous-traitance. Le coût éventuel d'une formation doit être intégré dans ces comparaisons.

2. La gestion par d'autres administrations

Le transfert à d'autres administrations de certaines missions ne relevant pas directement du maintien de l'ordre pourrait concerner principalement certaines des tâches administratives réalisées au profit d'autres administrations (hors administration judiciaire), suivant la définition donnée en deuxième partie, telles que :

- l'établissement des procurations de vote,

- les demandes de passeport et des cartes d'identité,

- les informations à donner aux familles de personnes décédées,

- l'information sur les titulaires de carte grise.

Ces choix conforteraient des évolutions en cours. A titre d'illustration, la police et la gendarmerie nationales ne s'occupent d'ores et déjà plus des objets trouvés, qui relèvent de services spécifiques.

Il convient d'envisager le traitement le plus approprié de ces différentes missions. Leur transfert à d'autres administrations suppose que celles-ci puissent acquérir une capacité d'expertise en ce domaine, et qu'elle dispose des moyens effectifs de les assumer. La théorie juridique des blocs de compétence pourrait ici trouver à s'appliquer : par exemple, les collectivités locales compétentes pour l'établissement des pièces d'état civil pourraient également être davantage impliquées en cas de perte de ces mêmes titres.

Les transferts de compétences à d'autres administrations - en l'espèce l'administration pénitentiaire ou un service spécialisé - pourraient également être retenus pour les escortes et les gardes de détenus qui incombent aujourd'hui essentiellement aux forces de sécurité intérieure.

Un groupe de travail sur les escortes et les gardes de détenus, animé par l'inspection générale de l'administration et l'inspection générale des services judiciaires, a présenté une note d'étape en décembre dernier. Il ressort des comparaisons étrangères que la plupart des pays ont choisi, à la différence de la France, de confier principalement cette mission à l'administration pénitentiaire (cf. encadré ci-dessous) . Les experts d'ACCENTURE recommandent également cette option, de nature à valoriser le métier de surveillant de prison.

Les besoins en effectifs de l'administration pénitentiaire semblent toutefois devoir constituer une pierre d'achoppement aux accords interministériels à venir.

Des évolutions sont étudiées. Cette proposition a été mise en oeuvre sous une forme expérimentale à Strasbourg, l'administration pénitentiaire étant en charge du transfert de la prison au tribunal. En outre, une hypothèse de travail a été testée au premier semestre 2003, consistant à retenir la qualification de « détenu à risque » comme principal critère pour confier l'escorte et la garde aux forces de sécurité intérieure.

Votre rapporteur se félicite de cette démarche d'audit des missions d'escorte et de garde des détenus, laquelle doit aussi permettre de mesurer la charge effective de travail qu'elle représente, sur la base de données incontestables et de comparaisons internationales.

Les escortes et gardes de détenus à l'étranger : comparaison avec la France

« Une étude comparée a été menée sur l'organisation des escortes et de la garde des détenus dans douze pays 59 ( * ) . Elle fait apparaître une tendance en faveur d'une prise en charge des escortes et des gardes par les services pénitentiaires.

« Actuellement, seuls deux des douze pays étudiés (la Belgique et l'Espagne) ont un système comparable au système français, les services de police y assurant les escortes de détenus. Dans les dix autres, l'administration pénitentiaire est principalement ou intégralement chargée de ces missions. Un système (Angleterre et pays de Galles) présente des caractéristiques atypiques car il y est largement fait appel à des entreprises privées.

« L'Italie et la Grèce ont récemment (respectivement en 1990 et 1999) transféré à l'administration pénitentiaire les missions d'escorte et de garde des détenus, assurées jusqu'alors par les forces de l'ordre. En Belgique, un avant-projet de loi prévoit la création d'un corps spécialisé sous l'autorité du ministre de la justice pour assurer ces missions.

« Même lorsque les missions sont confiées à l'administration pénitentiaire, le recours à la police reste possible (dans le cas des détenus particulièrement dangereux) mais il est très rare dans les pays qui disposent d'équipes pénitentiaires spécialisées ayant bénéficié d'une formation pour accomplir ces tâches.

« Six pays ont mis en place, au sein de l'administration pénitentiaire, ce type d'unité spécialisée, chargée le plus souvent des extractions d'individus particulièrement dangereux, mais également, parfois, de leur escorte sur de longues distances ».

Source : Inspection générale de l'administration et inspection générale des services judiciaires, Note d'étape du groupe de travail sur les escortes et les gardes de détenus, décembre 2002, p. 10-11

* 58 Cf. rapport d'ACCENTURE, p. 91 de l'annexe.

* 59 L'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, le Canada, le Danemark, l'Espagne, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la Grèce, l'Italie, les Pays-Bas, le Portugal

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