LA GESTION DES CONGÉS : UNE MARGE DE MANoeUVRE LIMITÉE

Les éléments observés sur le terrain

Des logiciels spécifiques généralement utilisés mais chronophages

La gestion des congés dans les deux forces de sécurité est, en général, établie à partir de logiciels ad hoc : GEOPOL pour la Police Nationale et au sein du module Gestion du service de BB 2000 dans la Gendarmerie Nationale. La Préfecture de Police fait seule exception. Le suivi y est effectué à la main, sans outil informatique et n'est pas centralisé : chaque service suit son propre tableau des absences.

Dans tous les commissariats, GEOPOL est renseigné - car obligatoire - et occupe parfois une personne à temps complet au sein du Bureau d'Ordre et d'Emploi. Le processus de collecte de l'information est à peu près standardisé :

§ le fonctionnaire de police remplit une demande de congé et la transmet à son supérieur,

§ le supérieur la transmet au chef de service puis au service GEOPOL,

§ le service GEOPOL saisit la demande en vérifiant que le fonctionnaire de police dispose d'un solde créditeur.

Le processus est simple mais il oblige une circulation de documents papier qui aboutissent tous vers un seul acteur devant saisir l'ensemble des demandes. La saisie dans GEOPOL est, de plus, relativement fastidieuse.

Cet acteur doit/peut également :

§ remettre un « état des compteurs » périodique à chaque fonctionnaire,

§ recevoir les demandes de rectification.

Une gestion hétérogène des processus

Ces demandes venant de toute part, la gestion prend beaucoup de temps et semble aléatoire :

Exemple : dans un commissariat central, le service chargé de GEOPOL ne reçoit les chefs de service qu'en cas de contestation et ne remet un « état des compteurs » qu'en cas de contestation.

Exemple : dans un autre commissariat central, un « état des compteurs » est remis plus périodiquement et systématiquement. Les chefs de brigade viennent assez librement faire leurs demandes de rectification.

Malgré tout, selon un représentant de l'administration centrale, « GEOPOL sert davantage à calculer les heures à rattraper qu'à effectuer une planification ».

La Préfecture de Police : une absence de gestion standardisée

Cette planification générale demeure de surcroît quasiment impossible à la Préfecture de Police : GEOPOL n'est pas implanté. Chaque chef de service tient ses propres tableaux, sur des supports différents.

Exemple : dans un commissariat central de Paris, chaque chef de service tient son tableau. Le chef de l'Unité de Gestion Administrative et Logistique (UGAL), chargé de la gestion du personnel, ne peut pas donner un tableau récapitulatif des congés pour l'ensemble du commissariat. Il ne suit que les agents de son service. Dans ce même commissariat, le chef de l'Unité de Police de Quartier (UPQ), qui dirige l'ensemble des services de police de quartier, tient son propre tableau parallèlement à celui que tient le chef de l'un de ces services, produisant ainsi un travail redondant.

La faiblesse de l'étude d'impact des congés sur les missions

Lorsque les services en charge de missions opérationnelles assurent également le suivi des repos ou congés des personnels, l'impact sur l'organisation du service peut être considérable.

Exemple dans un commissariat central, le Bureau d'Ordre et d'Emploi (BOE) reçoit et enregistre directement les demandes de congé dans GEOPOL, sans étude de l'impact sur le service prévu ni validation par la hiérarchie. De plus, ces demandes peuvent parvenir au BOE quelques heures seulement avant la prise de service : l'agent appelle alors le bureau pour connaître le nombre de fonctionnaires disponibles pour assurer la mission et décide ensuite de poser sa journée. Les congés sont alors présentés au retour du fonctionnaire. Face à cette situation, le commissaire du Service de Police de Proximité a dû prendre en charge la gestion des effectifs mais aussi le contrôle de la Main Courante Informatique (MCI). Il aura fallu la rédaction d'une note de service et la visite de l'Inspection Générale de la Police Nationale pour accélérer la reprise en main d'un service défaillant et surchargé d'activités annexes.

Par ailleurs, il convient de noter que les absences sont aussi bien mentionnées dans GEOPOL que dans la Main Courante Informatique (MCI). Les informations entrées sont pourtant identiques dans les deux applications en termes de congés. Malgré cela, il reste possible d'observer de multiples saissies.

Dans la gendarmerie, la saisie des congés est relativement standardisée dans l'ensemble des brigades visitées, avec une même préférence pour un support papier utilisé comme brouillon avant toute saisie dans BB 2000. Malgré cette résistance au changement, la méthode combinant prévision sur support papier puis saisie et suivi des congés sur l'outil informatisé offre une assez grande fiabilité dans son ensemble. L'organisation des congés en gendarmerie s'intègre dans l'organisation générale du service, c'est-à-dire que les congés sont posés en respect des droits acquis et tiennent compte de la priorité donnée aux missions imposées à la brigade.

Exemple : le tableau de service du mois en cours est affiché dans une des brigades visitées. Il présente notamment les repos, quartiers libres et congés de chacun. En amont de ce tableau officiel, un tableau au format papier circule parmi les gendarmes que l'on ramasse à la moitié du mois précédent. Le commandant de brigade pose alors toutes les contraintes de service et le saisit dans BB 2000. Cette version officielle est ensuite transmise à la compagnie.

Les congés estivaux des gendarmes sont posés en début d'année après concertation entre tous les membres de l'unité. La décision finale appartient au commandant de brigade qui intègrera le planning définitif dans BB 2000 puis l'expédiera via RUBIS à la compagnie. A ce stade, il est intéressant de noter que, dans la chaîne de transmission, le commandant de compagnie détient un droit discrétionnaire de regard sur la gestion des congés dans ses brigades. Dans cet esprit, il peut donc modifier le planning pour toute considération d'ordre opérationnel voire pour arbitrer un différend entre militaires.

Toutefois, la différence de priorité entre les congés annuels, les repos hebdomadaires et les quartiers libres ne permet pas toujours au commandant de brigade de donner satisfaction à ses personnels. C'est ce qui a pu être observé dans une des brigades visitées, précisément en période estivale où, malgré une gestion anticipé, les contraintes de service bousculent toute l'organisation. Si le maintien des permissions est privilégié, en revanche les repos sautent, les astreintes sous délais se transforment en astreintes simples au domicile. La population étant décuplée, la sécurité des biens et des personnes exige davantage de personnels disponibles. Dans de tels cas, les fichiers BB 2000 ne sont pas systématiquement actualisés avant le début du mois suivant. La compagnie ne dispose alors que de la feuille de service journalière pour connaître la disponibilité des brigades.

La situation est assez différente pour les unités de gendarmerie qui ne sont pas engagées sur le terrain, par défaut d'équipement en BB 2000.

Exemple : au Centre Opérationnel de Gendarmerie (COG) d'un groupement, les 13 gendarmes du service positionnent leur congé sur un tableau Excel. Au niveau du groupement, aucune base commune n'existe sur le réseau. De fait, l'officier responsable des différents services n'est pas en mesure d'obtenir une vision consolidée des périodes de congés des militaires du groupement.

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