2. Vers une politique culturelle fédérale ?

Les difficultés de Berlin à assumer son rôle culturel de capitale et les réticences des Länder à en assurer le coût sont symptomatiques du débat qui divise l'Allemagne sur l'opportunité d'une politique culturelle conduite au niveau fédéral, dont la perspective de la construction européenne semble pourtant accroître la nécessité.

a) Le fédéralisme culturel : un modèle remis en cause

L'attachement des Länder à leurs spécificités culturelles, mais également les réticences que peut provoquer en Allemagne l'idée d'une politique culturelle fédérale en référence à la période de la dictature hitlérienne, expliquent l'absence, jusqu'à une date récente, d'instances fédérales dotées de compétences culturelles.

La souveraineté des Länder en matière culturelle garantie par la loi fondamentale de 1949 n'a pas été remise en cause lors de la réunification et s'est imposée dans l'ex-RDA, jusque-là soumise au principe de centralisme démocratique.

En effet, les textes constitutionnels reconnaissent ce principe, même s'ils ne le mentionnent pas expressément. Son affirmation est déduite des articles 30, 70 et 83 qui déterminent la compétence des Länder de manière générale, dès lors que la loi fondamentale ne comporte pas de dispositions contraires. Les textes constitutionnels n'accordent de compétences à la Fondation que dans les domaines qui relèvent exclusivement de celle-ci, à savoir : les affaires culturelles extérieures, le droit d'auteur, l'aide au cinéma, la protection sociale des artistes, le droit fiscal, la représentation nationale, la protection du patrimoine allemand et la politique en faveur des nouveaux Länder.

Cependant, outre la Constitution, nombreux sont les textes qui déterminent les responsabilités respectives des différents échelons territoriaux, qu'il s'agisse, par exemple, de la constitution des Länder ou des lois relatives aux différents secteurs de création artistique.

En pratique, il s'avère que la répartition des compétences entre le Bund et les Länder en matière culturelle est une notion assez peu explicite. Cette situation rendait donc inévitables les polémiques qui ont surgi dans les cas pour lesquels le partage n'était pas expressément réglé, à l'image de celles qui sont nées autour du financement de la Fondation prussienne ou du subventionnement de la ville de Berlin, sujets qui ont pu être considérés par les Länder comme des entorses au fédéralisme. Ainsi, si la « nationalisation » d'institutions berlinoises, telles le Mémorial de l'Holocauste, le festival de Berlin, l'Académie des Beaux-Arts, le Musée juif ou la Maison des cultures du monde, n'a pas soulevé d'opposition, il en est allé autrement pour les théâtres berlinois, comme le Deutsche Theater, qui sont subventionnés par la Fédération, bien qu'ils soient de taille comparable à des institutions situées à Hambourg ou à Munich qui sont à la charge des Länder.

La prééminence des Länder en matière culturelle ne signifie pas pour autant que domine en ce domaine un absolu polycentrisme. Les Länder se sont, en effet, dotés de plusieurs instances communes de concertation et de coordination.

L'organe principal est constitué par la Conférence permanente des ministres de la culture des Länder (Kulturministerkonferenz, KMK), qui comprend plusieurs commissions et sous-commissions et qui joue le rôle d'une instance de réflexion et de délibération dans le domaine de la culture et de l'éducation. Au sein de cet organe, les décisions sont prises au niveau de chaque Land et le principe de la décision à l'unanimité s'impose pour les décisions d'intérêt commun. En ce qui concerne l'audiovisuel, domaine réservé des ministres-présidents, la fonction de coordination est assurée par la Conférence des ministres-présidents. Par ailleurs, existe la fonction de président de la commission de radiodiffusion des Länder, traditionnellement attachée à celle de ministre-président de Rhénanie-Palatinat.

Par ailleurs, dans le cadre de la coopération franco-allemande, a été créée la fonction de ministre plénipotentiaire. Cette fonction fédérale destinée à faciliter la coopération bilatérale franco-allemande dans des domaines relevant de la compétence des Länder est confiée à un ministre-président, désigné pour 4 ans par le Gouvernement, sur proposition de la Conférence des ministres-présidents. Traditionnellement, elle est confiée, en alternance entre les deux grands partis, à un ministre-président d'un Land frontalier.

Toutefois, la construction européenne conjuguée aux processus de la réunification, a souligné les limites du modèle fédéral en matière culturelle.

L'arrivée au pouvoir des sociaux-démocrates, associée à l'entrée des Verts au Gouvernement, a constitué un changement politique, qui a permis la création du poste de ministre délégué du Gouvernement fédéral pour la culture et les médias.

Le domaine de compétence de ce ministre comprend :

- les affaires culturelles, qui relevaient jusqu'à présent du département « culture et médias » du ministre fédéral de l'intérieur ;

- la conservation du patrimoine culturel des déplacés et des réfugiés ;

- l'encadrement culturel des étrangers apatrides et des populations immigrées ;

- les lieux de mémoire et les monuments commémoratifs ;

- l'audiovisuel, le cinéma et le livre, qui étaient auparavant du ressort du ministre fédéral de l'économie et des technologies ;

- la promotion culturelle de la capitale de Berlin et les affaires culturelles concernant la région de Bonn, désormais désignée sous le terme de « ville fédérale de Bonn », qui étaient confiées jusque-là au ministre fédéral des transports, de la construction et de l'habitat ;

- la politique des médias, qui relevait auparavant du ministère de la formation et de la recherche.

Il convient de souligner que la politique culturelle extérieure reste du domaine du ministère des affaires étrangères. Cependant, aux termes d'un accord entre la Chancellerie et le ministre des affaires étrangères, le ministre délégué siège aux conseils des ministres européens de la culture et de l'audiovisuel à la place du représentant de ce dernier.

L'Allemagne est donc représentée aux conseils des ministres de la culture et de l'audiovisuel de la manière suivante :

- le ministre délégué à la culture ;

- un ministre de la culture d'un Land proposé par le Bundesrat pour une durée de trois ans reconductible ;

- un ministre président d'un Land choisi parmi trois ministres-présidents désignés pour trois ans par le Bundesrat, si des questions audiovisuelles sont à l'ordre du jour.

Le poste de ministre délégué a été occupé successivement par :

- M. Michael Neumann (1998-janvier 2001) ;

- M. Julian Nida-Rumelen (janvier 2001, septembre 2002) ;

- et Mme Christina Weiss (depuis septembre 2002), que la délégation de la commission a eu l'honneur de rencontrer dans le cadre d'une audience qui s'est tenue à la Chancellerie.

b) Un rôle du Bund encore modeste

Dans un communiqué daté du 29 septembre 2002, la Chancellerie précisait que la politique culturelle fédérale s'orientait autour de deux axes fondamentaux :

- d'une part, « la création des conditions les plus favorables possible pour l'art et la culture » ;

- d'autre part, diverses actions à vocation nationale : l'encouragement des institutions culturelles d'une importance nationale, la culture de la capitale, l'infrastructure culturelle des Länder de l'Est et la politique culturelle étrangère.

Comme le communiqué prend soin de le préciser, si le Gouvernement fédéral « se déclare en faveur de la responsabilité nationale de l'Allemagne pour la culture », « le fédéralisme culturel n'en sera pas menacé ».

Bien que leurs marges de manoeuvre soient, en pratique, assez limitées, plusieurs avancées sont à mettre à l'actif des ministres délégués successifs. Ces avancées peuvent être présentées selon la typologie utilisée par la chancellerie dans le communiqué évoqué plus haut.

En ce qui concerne l'aménagement de la législation, plusieurs dispositions sont à mentionner.

On citera ainsi :

- une modification de la loi sur les droits d'auteur, qui reconnaît aux auteurs et artistes un droit légal de perception d'une rémunération appropriée ;

- la loi sur la réglementation des droits d'auteur dans la société de l'information, applicable depuis août 2003. Ce texte prévoit, d'une part, l'interdiction de contourner les mesures techniques destinées à la protection des droits d'auteur sans l'accord du titulaire des droits et, d'autre part, des exceptions aux droits exclusifs en faveur de certaines catégories de bénéficiaires, notamment dans les domaines scolaires et scientifiques ;

- la réforme du droit des fondations et des dons. Des aménagements aux règles fiscales et au droit civil ont permis d'encourager de manière significative la création de fondations. Ces institutions, déjà nombreuses (11 000 en 2002), connaissent désormais un intérêt renouvelé, en particulier dans le domaine culturel comme le prouve la réforme des opéras de Berlin qui s'appuie sur la création d'une fondation pour procéder aux réformes administratives nécessaires ;

- la réforme de l'imposition des artistes étrangers ;

- la loi sur le prix fixe du livre, entrée en vigueur le 1 er octobre 2002, qui consacre un principe depuis longtemps appliqué ;

- la protection sociale des artistes, notamment pour les plus âgés d'entre eux, afin de leur assurer une couverture maladie.

Au-delà de ces avancées, le ministre délégué a en charge de veiller à la « compatibilité culturelle » des lois. Cette notion très spécifique est définie dans l'accord de coalition du mois d'octobre 2002, qui a souhaité « la prise en considération plus forte de la dimension culturelle de la législation nationale » grâce à la vérification de la « compatibilité des lois et décrets avec la spécificité des activités culturelles et artistiques ». En vertu de ce principe, ont été écartées l'augmentation de la taxe sur la valeur ajoutée sur les objets d'art et la suppression d'avantages fiscaux bénéficiant aux propriétaires de monuments privés.

En ce qui concerne l'action culturelle proprement dite de la Fédération, une avancée importante a été accomplie avec la création en janvier 2002 de la Fondation culturelle fédérale (Kulturstiftung des Bundes ou Bundeskulturstiftung), destinée à assurer la promotion des projets culturels d'importance nationale ou internationale.

Son action consiste à répondre à des demandes provenant des milieux culturels, notamment pour des projets innovants dans le cadre international. Par ailleurs, la fondation peut mettre en place de sa propre initiative des programmes. Les programmes retenus depuis 2002 concernent les thèmes suivants : l'art et la ville, l'axe régional de l'Europe de l'Est, les aspects culturels de l'unification allemande, le « challenge culturel du 11 septembre 2001 » et les échanges entre institutions culturelles des Länder de l'Est et de l'Ouest.

Jusqu'ici, la Fondation a soutenu environ 120 projets dans l'ensemble des domaines artistiques et culturels.

Les projets de la Fondation, installée de manière symbolique dans la ville de Halle, sont élaborés par une directrice artistique, assistée de conseillers. L'organe de décision est le conseil de la Fondation dans lequel sont représentés la Fédération, les Länder et les municipalités ainsi que des représentants des milieux artistiques et culturels.

La Fondation était dotée en 2003 d'un budget de 23,5 millions d'euros, qui a été augmenté en 2004 pour atteindre 38,3 millions d'euros. Cette montée en puissance financière correspond à la volonté du Gouvernement d'affirmer l'existence d'une politique culturelle fédérale.

Cependant, en dépit du dynamisme de la Fédération en ce domaine, son poids dans le financement de la culture apparaît encore assez marginal.

Si, faute d'éléments statistiques homogènes, il est difficile d'évaluer le montant des contributions respectives des municipalités, des Länder et de la Fédération, les équilibres font apparaître la part majeure prise par l'échelon local dans le financement de la culture en Allemagne. La Fédération financerait, selon les sources statistiques utilisées, entre 8,7 % et 5,5 % des dépenses publiques engagées en ce domaine, les Länder et les municipalités intervenant à parts égales pour le reste du financement.

Au total, les dépenses publiques culturelles s'établissent en 2000, selon les sources statistiques, entre 12,32 et 15,54 milliards d'euros, soit un engagement comparable à celui de la France. Selon les dernières statistiques disponibles qui résultent d'une enquête du ministère de la culture sur l'année 1996, les dépenses culturelles des collectivités publiques françaises s'élevaient à 14,7 milliards d'euros. Cependant, leur répartition diffère profondément du modèle allemand, dans la mesure où elles sont assumées à parts égales par l'Etat (7,13 milliards d'euros) et les collectivités territoriales (7,57 millions d'euros).

Les tableaux suivants, de sources administratives différentes, donnent des indications sur le montant et la répartition entre niveaux d'administration des dépenses culturelles.

DÉPENSES PUBLIQUES CULTURELLES

TABLEAU N° 1

(en milliards d'euros et en %)

 

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Municipalités

 
 
 
 
 
 

En milliards d'euros

3,42

3,41

3,52

3,47

3,47

3,47

En % du total

44,6 %

43,2 %

46 %

45,7 %

44,2 %

43,7 %

Länder

 
 
 
 
 
 

En milliards d'euros

3,61

3,90

3,59

3,57

3,68

3,78

En % du total

47,2 %

49,3 %

46,9 %

47 %

46,8 %

47,5 %

Fédération

 
 
 
 
 
 

En milliard d'euros

0,62

0,60

0,54

0,55

0,71

0,70

En % du total

8,2 %

7,5 %

7,1 %

7,3 %

9 %

8,7 %

Source : « Jahrbuch für Kulturpolitik 2000 » (Cultural Policy Yearbook 2000)

DÉPENSES PUBLIQUES CULTURELLES

TABLEAU N° 2

(en milliards d'euros et en %)

 

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Länder et municipalités

 
 
 
 
 
 

En milliards d'euros

5,77

6,01

5,85

5,95

5,86

5,95

En % du total

93,5 %

96,9 %

96,45 %

96,35 %

93,7 %

94,5 %

Fédération

 
 
 
 
 
 

En milliard d'euros

0,40

0,19

0,21

0,22

0,39

0,35

En % du total

6,5 %

3,1 %

3,55 %

3,65 %

6,3 %

5,5 %

Source : « Kulturfinanzbericht 2000 » (Cultural Finance Report 2000)

Le tableau ci-après indique la répartition des dépenses culturelles publiques par secteurs.

 

1995

2000

Spectacle vivant (théâtre et musique)

 
 

En milliards d'euros

5,38

5,47

En % du total

44,6 %

44,4 %

Bibliothèques

 
 

En milliard d'euros

1,28

1,34

En % du total

10,6 %

10,9 %

Musées

 
 

En milliards d'euros

0,97

1,02

En % du total

15,7 %

16,2 %

Monuments et sites

 
 

En milliards d'euros

0,32

0,34

En % du total

5,1 %

5,4 %

Conservation (autres)

 
 

En milliards d'euros

1,02

1,04

En % du total

16,5 %

16,5 %

Administration

 
 

En milliard d'euros

0,47

0,42

En % du total

7,5 %

6,6 %

Source : « Kulturfinanzbericht 2000 » (Cultural Finance Report 2000)

On notera que le principal poste des dépenses publiques culturelles est le spectacle vivant (théâtre et musique).

Il apparaît donc, au regard de la répartition des dépenses, que les Länder et les villes demeurent les acteurs principaux de la politique culturelle allemande. Si l'intervention du niveau fédéral peut susciter des polémiques, son rôle n'obère pas l'action locale, tant par la nature des projets soutenus que par les sommes en jeu et ne constitue pas à proprement parler une remise en cause du fédéralisme culturel. Elle apparaît, en revanche, déterminante pour assurer, notamment au niveau international, la lisibilité de la politique culturelle allemande, qui souffrait jusque-là d'absence d'organes fédéraux.

c) Un exemple de politique culturelle fédérale : l'action en faveur du cinéma

Si les Länder apportent, selon des modalités très différentes, un soutien à l'industrie cinématographique, la Fédération conduit une politique en ce domaine depuis le vote de la première loi sur le cinéma en 1968.

Cette politique est gérée par l'Office fédéral d'aide au cinéma allemand (FFA) qui siège à Berlin.

Avant d'examiner ses modalités d'intervention, il peut être utile de dresser un rapide panorama de la situation actuelle de l'industrie cinématographique allemande.

L'Allemagne connaît actuellement un recul sensible de la fréquentation des salles. Ainsi, au troisième trimestre 2003, dernière donnée disponible, le nombre des entrées a continué de baisser par rapport au trimestre précédent (- 12,1 %), de même que le chiffre d'affaires des exploitants (- 13,3 %). Sur les neuf premiers mois de l'année, le nombre d'entrées atteint 102 millions, contre 116,1 millions sur la même période en 2002, soit le niveau le plus faible jamais atteint depuis cinq ans. Cette phase de décrue de la fréquentation intervient après une période de forte croissance.

En ce qui concerne la production, l'Allemagne se distingue de la France par la faiblesse de la présence du cinéma national sur les écrans. La part de marché du cinéma national atteint 15,7 % en 2001 (+ 9,4 % par rapport à 2000) en termes d'entrées et 18,4 % en recettes (contre 12,5 % en 2000). La part du cinéma américain passe de 81,9 % en 2000 à 77 % en 2001. Les oeuvres européennes disposent d'un accueil très limité et très variable d'une année sur l'autre.

Il convient toutefois de souligner que le cinéma allemand connaît un renouveau et recueille à nouveau la faveur des spectateurs avec des films comme Good bye Lenin ou Rosenstrasse .

Les mécanismes fédéraux d'aide au cinéma obéissent à une logique assez comparable à celle du système français tant dans leur financement que dans leurs modalités d'attribution. Les aides sont financées par :

- une taxe additionnelle sur les billets d'entrée prélevée dès lors que le chiffre d'affaires de la salle atteint au moins 66 468 euros. Le montant du prélèvement varie entre 1,5 et 2,5 % du chiffre d'affaires ;

- un prélèvement sur le chiffre d'affaires des éditeurs vidéo (1,8 %) ;

- et une participation des télévisions aux mesures promotionnelles du FFA, soit des recettes proches de celles qui alimentent en France le compte de soutien à l'industrie cinématographique et audiovisuelle.

Le FFA ne dispose pas de subventions budgétaires.

Au total, en 2002, le FFA disposait d'une enveloppe de près de 69 millions d'euros, ce qui représente environ un tiers du total des dépenses publiques consacrées au cinéma.

En ce domaine comme en d'autres, la part des Länder est prépondérante.

Les aides gérées par le FFA poursuivent divers objectifs :

- soutien aux films de long et court métrage ;

- écriture de scénarios ;

- aides à la distribution et à la diffusion ;

- aides aux salles ;

- formation professionnelle ;

- recherche ;

- promotion du cinéma national.

A l'image du système français, le FFA distribue à la fois des aides automatiques et des aides sélectives au profit des secteurs de la production, de l'exploitation et de la distribution.

LES AIDES ACCORDÉES PAR LE FFA

Films de longs métrages

Sont considérés comme de longs métrages les films d'une durée minimale de 79 minutes ou de 59 minutes s'il s'agit de films pour l'enfance et la jeunesse. Les subventions sont accordées selon les deux principes suivants :

Aide automatique (« film de référence »)

Le producteur a droit au soutien automatique s'il a produit un film allemand (ou éventuellement une co-production germano-étrangère) qui, dans le territoire d'application de la loi, a enregistré 100 000 spectateurs un an après sa sortie (50 000 pour les films ayant obtenu une mention (« Prädikat ») de la FBW ou un prix à un festival et 25 000 en quatre ans pour les films documentaires et les films pour enfants).

Aide sélective (avance sur recettes)

La FFA peut également accorder un soutien au projet sous forme d'une avance sur recettes lorsque la demande d'un producteur, sur la base du scénario ainsi que de la fiche technique et de la répartition des rôles, suggère une oeuvre apte à améliorer la qualité et les recettes du cinéma allemand.

La Commission d'avance sur recettes comprend 9 membres. Elle décide de la suite à donner aux demandes déposées. Le montant de la subvention est de 255 646 euros au minimum. Dans des cas particuliers, elle peut atteindre jusqu'à 1 022 584 euros. Le producteur doit participer au budget du film à concurrence de 15 %. La subvention est accordée sous forme de prêt remboursable sous certaines conditions. Après un amortissement de 20 % des coûts de production, le remboursement est exigible à hauteur de 10 % du montant encaissé par le producteur.

Courts métrages

Les courts métrages pouvant bénéficier de l'aide doivent avoir une durée maximum de 15 minutes et une mention « besonders wertvoll » (de haute qualité). Les films de long métrage pour l'enfance et la jeunesse ne sont pas concernés.

La mention de qualité (« wertvoll ») est suffisante si le court métrage a obtenu parallèlement une distinction d'un festival.

Scénarios

La FFA accorde des aides pour l'écriture de scénarios de longs métrages, d'un montant de 25 565 euros, qui peuvent atteindre 51 129 euros dans des cas exceptionnels. Des aides peuvent également être accordées pour le développement ultérieur du scénario.

Distribution

Aide sélective

La FFA accorde des aides pour la distribution ou l'exportation des films allemands sous forme de prêts remboursables sous certaines conditions, dont le montant peut aller jusqu'à 153 388 euros et, dans certains cas particuliers, jusqu'à 306 775 euros.

Une sous-commission composée de 5 membres décide de l'octroi de l'avance sur recettes.

Aide automatique

Depuis une date récente, les distributeurs ont également droit à des subventions automatiques (prêts remboursables sous certaines conditions) accordées pour des films ayant enregistré 50 000 spectateurs un an après leur sortie (limite : 600 000 spectateurs). Pour les documentaires et les films pour enfants, 25 000 spectateurs enregistrés sont exigés en quatre ans. Les distributeurs sont obligés de dépenser les montants accordés pour distribuer un nouveau film allemand.

Exploitation

Aide automatique

Depuis 1968, existe une aide financière calculée pour tous les propriétaires d'un cinéma, qui paient ou qui ont payé la taxe additionnelle sur les films.

Aide sélective

La FFA accorde des subventions d'un montant maximum de 153 388 euros sous forme de prêt sans intérêt pour la création, l'amélioration et la modernisation des salles de cinéma.

Tirage de copies

La FFA peut accorder des subventions pour le tirage de copies de films allemands et étrangers destinés aux salles situées dans les villes de moins de 20 000 habitants.

Vidéothèques

a) Aide aux distributeurs de vidéo

Actuellement, la FFA peut aussi subventionner les éditeurs de vidéo pour des coûts exceptionnels concernant la sortie de films pour l'enfance et la jeunesse.

b) Aide aux vidéothèques

Pour la modernisation, l'amélioration et la création de vidéothèques pour les familles ainsi que pour une meilleure offre dans les vidéothèques adaptée à l'enfance et à la jeunesse, des prêts sans intérêts peuvent être accordés pour un montant compris entre 51 129 euros et 102 258 euros selon les cas.

Une sous-commission composée de 5 membres décide de l'octroi de l'avance sur recettes.

Formation Cinématographique Professionnelle

Des subventions peuvent être allouées pour des mesures de formation cinématographique professionnelle. Elles sont destinées aux débutants dans les domaines artistiques, techniques et commerciaux.

Aide aux mesures de recherche scientifique, aux mesures de rationalisation et aux mesures d'innovation

Financement des mesures de publicité du film allemand en Allemagne et à l'étranger

Dans le souci d'accroître l'efficacité de ce système pour la cinématographie nationale, la loi sur l'aide au cinéma a été modifiée en novembre 2003. L'objectif de la réforme est l'accroissement du montant des subventions, essentiellement grâce à une augmentation de la participation des chaînes de télévision et, plus marginalement, par un relèvement du prélèvement sur les entrées et la vidéo.

Au-delà d'une progression du volume des financements, la réforme vise à aménager les modalités du soutien :

- d'une part, en assouplissant les conditions d'octroi du soutien automatique ;

- d'autre part, en élargissant le bénéfice des aides à l'ensemble des professions concourrant à la réalisation d'un film, notamment grâce à la mise en place de nouvelles aides à l'écriture de scénario. Sur ce point, l'Allemagne rejoint la France ; en effet, à la suite du rapport de M. Charles Gassot, les mécanismes d'aide français ont été adaptés afin de mieux soutenir l'écriture de scénario, action qui s'avère essentielle pour assurer la vitalité de la production, mais également pour améliorer la qualité des films produits ;

- et, enfin, en renforçant l'aide accordée aux salles « art et essai ».

Au-delà de ce dispositif tout à fait comparable au système français même si les sommes en jeu sont moins importantes, l'industrie cinématographique allemande bénéficie d'un régime fiscal avantageux à travers les fonds privés d'investissement dans le cinéma et l'audiovisuel.

Ce système est très profitable aux industries techniques allemandes car les films ayant bénéficié des investissements de ces fonds sont, pour la plupart, en partie tournés ou post-produits en Allemagne.

Cependant, des critiques se sont élevées, d'une part, en raison du coût fiscal de ces fonds dans une période marquée par l'austérité budgétaire, et d'autre part, du fait que ces fonds investissent en priorité sur des films produits par des entreprises américaines au détriment des producteurs allemands.

Ce débat n'est pas sans rappeler la polémique qui a suivi, en France, la décision du Centre national de la cinématographie d'agréer le film de M. Jean-Pierre Jeunet, Un long dimanche de fiançailles , produit par une filiale française de Time Warner.

Conscient de l'importance du dispositif pour l'industrie du cinéma allemand, le législateur n'en a modifié qu'à la marge l'économie. Les choix des films dans lesquels investissent les fonds seront effectués non plus par leurs dirigeants mais par l'ensemble des actionnaires. Cette mesure est destinée à accroître la diversité des films ainsi financés.

On soulignera pour s'en féliciter que le FFA conduit une active politique de collaboration avec les autres organismes des Etats membres de l'Union européenne chargés du soutien au cinéma, et notamment avec le Centre national de la cinématographie (CNC) français. La traduction la plus récente de cette collaboration est la déclaration commune adoptée le 30 janvier dernier de l'ensemble des agences nationales pour le cinéma s'opposant à une remise en cause par la Commission européenne des critères de compatibilité des aides nationales au cinéma avec les dispositions du traité de l'Union européenne.

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