ANNEXES

1. Autres interventions en séance des membres de la délégation française

2. Propositions de Recommandation soumises à la signature de ses collègues par M. Jean-Louis Masson

3. Communiqué publié à la suite de l'utilisation de l'anglais par le Président de la Banque centrale européenne lors de son intervention du lundi 21 juin

1. Autre intervention en séance des membres de la délégation française

Séance du lundi 21 juin après-midi :

RAPPORT D'ACTIVITÉ DU BUREAU ET DE LA COMMISSION PERMANENTE

Intervention de Mme Josette Durrieu :

« Je souhaite poser une question sur la démarche engagée par le Bureau le 24 mai dernier au sujet d'une décision prise pour une ONG qui demandait son statut d'ONG consultative. La Fédération européenne des centres d'information sur les sectes demandait à être reconnue. Un rapport a été produit par un éminent collègue, M. Marty, et l'avis de la commission juridique a été, je pense, majoritairement favorable.

Ma question a trait à la procédure. La Commission du Règlement a été sollicitée par le Bureau sur la commission juridique. Est-ce fréquent ? Normal ? Est-il dans le mandat de l'une de ces trois institutions que d'engager une telle procédure assez surprenante ?

Plus de 400 ONG ont reçu l'octroi consultatif et c'est normal puisque nous sommes l'espace des droits de l'Homme, l'expression de toutes les libertés, de toutes les idées. On a le sentiment, à ce propos, d'une rupture du principe d'égalité, voire des idées de tolérance ou de laïcité. Tout cela reste assez confus ici.

Je souhaite savoir si nous restons vraiment un lieu de débat privilégié, un lieu ouvert, un lieu d'information, d'exercice de l'esprit critique et de lutte contre tous les intégrismes. Sommes-nous prêts à lutter ici contre les pressions de ces nombreux lobbies ?

En l'occurrence, le rapporteur cite très clairement l'Église de scientologie qui agit en sous-main. Monsieur le Président, j'ai envie d'avoir des informations et j'ai surtout envie d'être rassurée. »

En réponse M. Samad Seyidov, rapporteur, a apporté les indications suivantes :

« En ce qui concerne la question posée par Mme Durrieu, il indique que des objections se sont manifestées sur la procédure et que le Bureau a été divisé. »

2. Propositions de Résolution et de Recommandation de M. Jean-Louis Masson soumises à la signature de ses collègues

Proposition de Résolution tenant au retrait du statut d'observateur au Conseil de l'Europe dont bénéficient les Etats-Unis compte tenu des exactions commises sur les prisonniers détenus à Guantanamo, en Irak et en Afghanistan.

On peut comprendre quel traumatisme ont provoqué les attentats du 11 Septembre 2001 parmi les citoyens américains. Outre le respect dû aux milliers de victimes, la lutte contre les menées terroristes, internationales par nature, doit être également coordonnée.

Cette approche multilatérale implique le respect des valeurs fondamentales au nom même desquelles cette lutte est menée.

Or, les Etats-Unis, qui se présentent volontiers comme un exemple en matière de démocratie, portent des atteintes graves aux droits les plus élémentaires des prisonniers détenus en toute illégalité sur la base de Guantanamo. Ceux-ci sont l'objet de tortures physiques et psychiques et placés dans une situation de non droit servant de prétexte au refus de toute assistance juridique.

Cette situation devrait susciter une réaction d'autant plus ferme du Conseil de l'Europe que parmi ces prisonniers se trouvent de nombreux nationaux des Etats membres du Conseil de l'Europe.

Les violations des droits de l'Homme par les Etats-Unis ne se limitent pas à Guantanamo. Des exactions sont aussi commises sur les prisonniers irakiens en Irak et en Afghanistan. Cela conforte donc l'idée que ces pratiques relèvent d'une décision institutionnelle cautionnée par les plus hauts responsables des Etats-Unis.

Eu égard à la position de donneurs de leçons que les Etats-Unis prétendent occuper, il est donc indispensable que les leçons ne soient pas à sens unique. Les sévices commis par les Etats-Unis sont d'autant plus inadmissibles qu'ils sont prétendument justifiés au nom de la démocratie, de la liberté et du progrès de l'Humanité.

Compte tenu de la gravité des faits, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe invite les Etats membres à adresser une protestation solennelle au Gouvernement des Etats-Unis. Elle invite aussi le Comité des ministres du Conseil de l'Europe à engager la procédure de retrait du statut d'observateur au Conseil de l'Europe dont bénéficient actuellement les Etats-Unis.

Proposition de Recommandation visant à la saisine de la Cour européenne des Droits de l'Homme par le Comité des Ministres pour avis consultatif sur l'accord donné par l'Union européenne à la transmission aux Etats-Unis des données personnelles relatives aux passagers des lignes aériennes.

L'Union européenne vient de donner son accord pour que les compagnies aériennes transmettent aux Etats-Unis les données personnelles concernant les voyageurs qui achètent un billet d'avion pour se rendre dans ce pays. Dorénavant, les agents américains du Bureau des douanes et de la protection des frontières auront automatiquement accès à ces informations recueillies par les agences de voyages et les compagnies aériennes. Le transfert des données personnelles sera en effet systématisé au départ de l'Europe, en vertu d'un accord signé en mai 2004 entre les Etats-Unis et l'Union européenne. Cette coopération renforcée s'inscrit dans le climat d'hystérie sécuritaire qui règne actuellement aux Etats-Unis et qui fait peu de cas des droits de l'Homme.

L'accord en cause porte d'autant plus atteinte aux libertés individuelles que les données recueillies à titre commercial sont utilisées à des fins sécuritaires, ce qui est contraire aux principes garantis par la Convention européenne des droits de l'Homme. Certes, les exigences américaines peuvent contribuer à la lutte contre le terrorisme, mais les risques de dérapage sont importants. On en a déjà fait l'expérience avec la zone de non-droit de Guantanamo et aussi avec le recours à la torture en Irak et en Afghanistan.

La plupart des groupes politiques du Parlement européen (à l'exception notable du Parti populaire européen) se sont d'ailleurs inquiétés des conséquences individuelles de cet accord. Le Parlement européen a même voté une résolution dans ce sens le 13 mars 2003. De plus en France, la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés (CNIL) a elle aussi tiré la sonnette d'alarme. Cependant, depuis lors l'administration américaine a exercé des pressions sur les compagnies aériennes européennes en les menaçant de lourdes sanctions au cas où elles ne donneraient pas accès à ces données personnelles. L'Union européenne a malheureusement fini par céder.

Les dispositions de l'accord répertorient 34 catégories d'informations personnelles. Leur transmission prend le contre-pied des législations européennes car parmi les données transmises, on aurait : le détail des vols effectués par le passé vers d'autres pays, les habitudes alimentaires (végétarien, consommation de porc ou d'alcool...), les problèmes de santé, l'adresse, l'état civil détaillé, le numéro de carte bancaire, le nom des personnes accompagnantes et la position de leurs sièges dans l'avion, l'adresse de facturation du billet, des indications susceptibles de faire apparaître l'origine raciale ou l'orientation religieuse, les contacts à terre du passager, l'historique des changements apportés dans le fichier du voyageur...

Le Conseil de l'Europe ayant vocation à défendre les libertés, son Assemblée parlementaire demande donc au Comité des ministres de saisir pour avis la Cour européenne des Droits de l'Homme, par application de l'article 47 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, afin qu'elle dise si l'accord susvisé est conforme aux grands principes du droit de cette Convention ; de même, l'Assemblée invite le Comité des Ministres à saisir d'une demande identique d'appréciation, le Commissaire aux Droits de l'Homme du Conseil de l'Europe, sur la base de l'article 3, paragraphes c) et g) de la résolution (99)50 instituant le Commissaire aux Droits de l'Homme du Conseil de l'Europe.

Proposition de Recommandation tendant à rétablir les droits des habitants de l'île de Diego Garcia auxquels la Grande-Bretagne refuse la possibilité de réintégrer leur terre ancestrale.

L'atoll de Diego Garcia appartient au Royaume-Uni. Toutefois, un accord secret de 1961 signé entre Harold McMillan et John F. Kennedy, l'a désigné comme « un point d'appui stratégique » anglo-américain dans l'océan Indien contre l'Union soviétique. Washington souhaiterait y établir un centre de communications et de ravitaillement de sa flotte. La double condition en était que l'archipel des Chagos soit exclu du processus de décolonisation mis en oeuvre par Londres et que ses habitants soient évacués « pour des raisons de sécurité ». En échange, les Etats-Unis consentiraient une réduction de 14 millions de dollars sur l'acquisition de fusées Polaris par le Royaume-Uni pour l'équipement de ses sous-marins nucléaires.

Le « déplacement » des habitants autochtones commença dans le plus grand secret au début des années 70, avec pour destination, l'île Maurice et les Seychelles. Londres fit alors savoir aux « déportés » qu'ils n'avaient aucun droit territorial sur les îles où leurs ancêtres seraient venus d'autres pays d'Afrique et de l'océan Indien comme « travailleurs contractuels ». Les 426 familles qui vivaient du maraîchage, de la pêche côtière, de l'élevage et de la culture du coprah se retrouvèrent privées de leurs biens et sans aide, dans les bidonvilles de Port-Louis, de Maurice et de Victoria aux Seychelles. L'alcoolisme, la drogue, la misère ravagèrent leur communauté tandis que les Etats-Unis, forts d'un bail de 50 ans renouvelable pour une période de 20 ans supplémentaires, transformaient Diego Garcia en place forte.

Isolé du reste de l'océan Indien, l'atoll, avec ses structures portuaires et aéroportuaires, accueille aujourd'hui de nombreux navires prépositionnés de la marine américaine et sert de base de départ aux bombardiers B 52 et B 1 dans leurs missions de longue distance. En 2001, la plate forme de 44 hectares établie sur un récif en forme de fer à cheval a joué un rôle essentiel dans les missions de bombardement en Afghanistan. Aujourd'hui, elle tient une place décisive pour l'appui d'autres bases US en Afrique, au Proche-Orient et en Asie du Sud-Est. Elle sert aussi comme centre de détention supplétif de Guantanamo. Des prisonniers soupçonnés d'appartenir à Al-Qaida y sont détenus et sans doute victimes de sévices dans le secret absolu. Depuis 35 ans, les îlois luttent pour pouvoir regagner leur atoll. Un combat qui leur a valu d'être reconnus en 2000, comme des sujets à part entière de la Couronne britannique.

En effet, en novembre 2000, la High Court de Londres avait jugé « illégal » leur « déplacement », reconnaissant fondé leur « droit au retour » sur la terre ancestrale. Mais le gouvernement de Tony Blair ne l'entendait pas ainsi. Arguant d'une pseudo étude sur la possibilité de réinstaller une communauté de quelque 8 500 « Chagossiens », il s'est employé à faire traîner l'enquête en longueur. Ses experts concluent, aujourd'hui, que la population serait exposée « à des événements naturels de nature à rendre leur existence difficile ». A plus long terme, le réchauffement de la planète et ses conséquences sur le niveau des océans, rendraient leur vie impossible... La mauvaise foi est évidente car si le relèvement du niveau des océans était une menace, pourquoi alors les Etats-Unis s'accrocheraient-ils à leur base stratégique ?

S'appuyant sur ce faux prétexte, un décret-loi a été pris, discrètement, le 10 juin 2004 par le Foreign Office, alors que l'Irak et les élections européennes occupaient l'actualité. Ce décret fait interdiction aux autochtones de Diego Garcia, la plus grande île de l'archipel des Chagos, de jamais regagner le territoire d'où ils ont été expulsés il y a 35 ans par les autorités britanniques. A juste titre, le chef de file du Mouvement des îliens du Territoire britannique de l'océan Indien (BIOT), M. Alan Vincatassin, estime que « c'est inacceptable ». Il dénonce donc « l'exigence américaine de ne pas avoir de témoins sur cette île transformée en base militaire ».

En conséquence, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe estime qu'il est inacceptable de violer ainsi les droits historiques des Chagossiens de réintégrer leur terre ancestrale de l'île de Diego Garcia ; que la véritable raison de leur expulsion est l'utilisation de la base de Diego Garcia, laquelle sert aux Etats-Unis et à la Grande-Bretagne d'appui militaire pour le bombardement de populations civiles en Irak et en Afghanistan.

En conséquence, l'Assemblée invite le Comité des Ministres à demander aux parties intéressées de rétablir les Chagossiens dans leur droit, à compenser le préjudice moral et matériel que leurs familles ont subi à la suite de leur déportation et plus généralement, à appliquer loyalement et sans restriction le jugement de la High Court de Londres de novembre 2000.

3. Communiqué publié à la suite de l'utilisation de l'anglais par le Président de la Banque centrale européenne lors de son intervention du lundi 21 juin

La délégation française de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a quitté l'hémicycle pour protester contre l'attitude de M. Jean-Claude Trichet, ancien gouverneur de la Banque de France, actuel Président de la Banque centrale européenne, qui a choisi de s'exprimer en anglais à la tribune.

La délégation française tient à rappeler que le français est l'une des deux langues officielles du Conseil de l'Europe et elle attend des Français nommés dans des instances européennes qu'ils s'expriment en français chaque fois que l'occasion leur en est donnée. Le Président de l'Assemblée parlementaire au Conseil de l'Europe avait donné cette possibilité à M. Trichet qui a choisi délibérément de ne pas l'utiliser.

La délégation française a donc quitté l'hémicycle et agira de même si elle devait constater d'autres fois des errements similaires.

Elle a décidé d'informer le Premier ministre de sa réaction.

M. Bernard SCHREINER, Président (UMP)

Mme Josette DURRIEU (S)

M. François LONCLE (S)

M. Pierre GOLDBERG (PC)

M. Rudy SALLES (UDF)

M. Jacques LEGENDRE (UMP)

M. Jean-Marie GEVEAUX (UMP)

M. Daniel GOULET (UMP)

M. Jean-Louis MASSON (NI)

Le présent rapport retrace les principaux débats auxquels ont participé les membres de la Délégation parlementaire française (vingt-quatre députés et douze sénateurs) à l'Assemblée du Conseil de l'Europe lors de sa troisième partie de session, du 21 au 25 juin 2004 : suivi de la situation en Turquie, en Arménie et Bosnie-Herzégovine ; questions sociales et économiques aussi : gestion des ressources en eau, rôle de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement notamment ; monétaires enfin : l'euro et la grande Europe.

Page mise à jour le

Partager cette page