2. Le retard pris par les établissements publics de santé dans le développement de leurs systèmes d'information

Ainsi que l'a souligné précédemment votre rapporteur spécial, les systèmes d'information hospitaliers sont aujourd'hui largement inadaptés aux besoins de la politique d'informatisation dans le secteur de la santé.

Ils le sont du point de vue des budgets consacrés, encore loin d'être à la hauteur, mais aussi du point de vue de leur organisation, puisque la prise de conscience par les professionnels de santé et les pouvoirs publics du caractère stratégique pour l'hôpital des systèmes d'information n'est venue que très tardivement .

Ainsi, la plupart des systèmes d'information hospitaliers concerne essentiellement la gestion administrative des patients et des personnels. En revanche, l'informatisation du dossier patient, de l'imagerie médicale, des blocs opératoires et des unités de soins est très insuffisante : 90 à 95 % des hôpitaux n'ont pas informatisé leur coeur de métier, à savoir le parcours de soins. L'enjeu crucial aujourd'hui, du point de vue de l'informatisation des structures hospitalières, est celui de la médicalisation de leurs systèmes d'information .

En effet, si, aujourd'hui, la totalité des structures hospitalières dispose, sur un support informatique, des résultats biologiques, de compte-rendus opératoires, de compte-rendus d'imagerie ou de compte-rendus d'anesthésie, ces documents ne sont pas intégrés dans un véritable système d'information ; de même les prescriptions médicamenteuses sont rarement disponibles sur ordinateur.

Aujourd'hui la contribution des systèmes d'information à l'amélioration de la qualité de la prise en charge des patients dans les hôpitaux est très au-dessous de ce que l'on doit en attendre .

Ce constat résulte notamment de l'absence de perception, jusqu'à très récemment, de la dimension stratégique des systèmes d'information par les responsables hospitaliers, notamment les directeurs d'établissements hospitaliers.

Il résulte également de difficultés pratiques parmi lesquelles l'absence de maturité des offres logicielles françaises intégrées sur l'ensemble du champ à couvrir, le niveau très élevé de l'ingénierie du changement nécessaire, la charge de travail qui pourrait peser sur les médecins et enfin la difficulté à standardiser les référentiels et processus informatiques.

3. Le cloisonnement des systèmes d'information

Une des faiblesses majeures des systèmes d'information de santé en France réside dans leur absence d'interopérabilité, à la fois interne et externe .

a) Du point de vue de l'hôpital

Au sein d'un même hôpital, le partage de l'information entre services peut se révéler problématique, notamment entre le service des urgences et les autres services hospitaliers, comme l'a indiqué à votre rapporteur spécial, M. Patrick Pelloux, président de l'Association des médecins urgentistes hospitaliers de France (AMUHF) lors de son audition.

En outre, le niveau de compatibilité des logiciels informatiques entre les hôpitaux est faible, les applications informatiques étant encore assez systématiquement « propriétaires » et peu communicantes (souvent même au sein de la gamme de produits d'un même fournisseur).

Ainsi que l'a souligné Mme Rose-marie Van Lerberghe, directrice générale de l'AP-HP lors de son audition par votre rapporteur spécial, si les solutions sont homogènes et mettent en oeuvre les mêmes solutions logicielles s'agissant des systèmes de gestion administrative, le paysage informatique est très différent s'agissant du patient et du parcours de soins. En effet, il existe une hétérogénéité sur le plan géographique (certains sont équipés, d'autres peu voire pas) et sur le plan des solutions mises en oeuvre. Au sein de l'AP-HP, on peut ainsi distinguer :

- deux hôpitaux ayant bénéficié d'un fort investissement informatique à leur création : Robert Debré et l'Hôpital européen Georges Pompidou (HEGP) qui bénéficient de solutions « patient » avancées. Ainsi à l'HEGP, hôpital que votre rapporteur spécial a pu visiter, chaque patient dispose d'un dossier unique, conservé (donc accessible en cas de retour du patient à l'hôpital), incluant les consultations, les hospitalisations, les compte-rendus, les résultats d'examen et la prescription de médicaments qui n'est cependant pas encore déployée sur tout l'hôpital ;

- des hôpitaux pour lesquels une solution commune patient (prescriptions, soins) est en cours de déploiement : il s'agit notamment des hôpitaux de gériatrie ;

- des hôpitaux disposant de dossiers médicaux spécifiques, donc hétérogènes, au niveau de chaque service.

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L'impératif d'ouverture et d'interopérabilité des systèmes informatiques progresse cependant, en s'appuyant sur la normalisation internationale. Le chemin à parcourir reste toutefois long (au moins cinq ans) pour voir les normes s'appliquer systématiquement aux applications sur le terrain .

Ainsi, avec l'appui de la DHOS, le groupement pour la modernisation du système d'information hospitalier (GMSIH) a développé depuis sa création une action de promotion des normes internationales du nom de IHE (Integrating Healthcare Enterprise), menée en collaboration avec les éditeurs hospitaliers.

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