3. Une planification stricte et efficace des travaux parlementaires
a) Une organisation maîtrisée du travail des assemblées
La fixation consensuelle de l'ordre du jour de chaque chambre permet de discipliner le temps consacré aux débats parlementaires. En moyenne, les chambres siègent moins que le Parlement français.
Le nombre de semaines de séances au Bundestag varie entre 22 et 24 par an. Les députés siègent en général deux semaines par mois. Le lundi soir et le mardi sont généralement réservés aux activités des groupes parlementaires. Les commissions permanentes se réunissent le mercredi, sauf entre 13h30 et 14h30, heure réservée aux questions orales en séance publique.
Le jeudi, le Bundestag se réunit en séance publique à partir de 9 h jusqu'au soir, une pause étant prévue entre 13 heures et 14 heures. De 14 heures à 15 h 30, une nouvelle séance de questions orales est organisée. La séance peut être prolongée jusqu'à 22 heures. Enfin, une séance publique a lieu le vendredi, en principe de 9 heures à midi. Il n'y a pas de séance de nuit.
L e Bundesrat se réunit en séance plénière un vendredi toutes les trois semaines (à 9 h 30) avec une interruption au mois d'août, au cours d'une session unique annuelle qui s'étend du 1er novembre au 31 octobre. Chaque mois, le rythme est le suivant : réunions de commissions (première semaine) ; semaine intermédiaire (deuxième semaine) ; séance plénière (troisième semaine).
Le travail du Bundesrat s'effectue sous une contrainte de temps permanente . Ses réunions sont peu nombreuses car les représentants des Länder au Bundesrat ont besoin de temps pour permettre à leur gouvernement de prendre une décision.
Toutefois, le président du Bundesrat est tenu de convoquer ce dernier à la demande des représentants de deux Länder au moins ou du gouvernement fédéral.
b) Des commissions puissantes au coeur de l'activité législative du Bundestag
Des commissions nombreuses
Le Bundestag décide librement du nombre de ses commissions permanentes pour la durée de la législature . En principe, il existe une commission correspondant pour chaque ministère fédéral mais il y a des exceptions (commission des affaires de l'Union européenne ; commission des sports...).
Les membres des 21 commissions actuelles 153 ( * ) sont nommés par les groupes parlementaires, chacun d'entre eux y étant représenté à la proportionnelle. Quant aux députés non inscrits dans un groupe, ils peuvent siéger dans une commission, participer à ses débats ou déposer des motions, mais ne peuvent pas prendre part à ses votes.
Les textes législatifs dont est saisi le Bundestag sont transmis à la ou aux commissions compétentes saisies au fond et pour avis. En principe, leurs débats ne sont pas publics. Chaque commission organise librement son travail et son ordre du jour. Elle peut ainsi, sauf opposition d'un tiers de ses membres, instituer des sous-commissions à mandats déterminés .
Le président de commission a un rôle déterminant pour parvenir à un accord entre les représentants des groupes sur un texte.
En pratique, les commissions arrêtent la position du Bundestag et peuvent se substituer aux séances publiques
En dépit de leur nombre, les commissions sont des organes déterminants de préparation des décisions du Bundestag. Elles sont à cet égard « tenues de s'acquitter rapidement des tâches qui leur sont confiées » 154 ( * ) .
Le rôle essentiel de leurs membres dans la préparation des projets de loi a été souligné. Lorsqu'elles sont saisies d'un texte législatif à l'issue de la première lecture, elles désignent un rapporteur en leur sein afin de préparer leur recommandation de décision.
Lorsqu'elles prennent position sur un projet de loi, leurs recommandations sont la plupart du temps suivies par l'assemblée. Le rapporteur présente son rapport au cours d'une réunion de commission à laquelle ont accès l'ensemble des membres du Bundestag ainsi que les membres du gouvernement fédéral intéressés 155 ( * ) .
Formellement, les rapports comprennent le texte législatif tel que décrit auparavant, la majorité avec laquelle le texte a été adopté en commission et présentent la recommandation stricto sensu au Bundestag. Pour permettre une comparaison rapide entre le texte initial et les propositions de la commission, ils comprennent aussi une « présentation synoptique », équivalent du tableau comparatif des rapports législatifs français. L'opinion de la minorité de la commission doit aussi figurer dans le rapport.
Lorsque des commissions ont été saisies pour avis, un seul rapport est élaboré par tous les rapporteurs, comprenant un rappel de l'origine du texte, les recommandations des commissions saisies pour avis puis celles de la commission saisie au fond, puis un exposé des amendements présentés par les groupes.
Simultanément, à l'issue de la première lecture, la commission du budget peut être chargée par l'assemblée plénière de vérifier la compatibilité d'un texte entraînant des coûts importants avec la situation budgétaire. La commission saisie au fond n'est pas libre d'ignorer son avis car son rapport est directement soumis à l'assemblée en deuxième lecture. Cette dernière devra trouver un moyen de combler les déficits éventuels.
Originalité intéressante : les commissions permanentes ont même le pouvoir de se substituer aux séances publiques sur les textes les plus techniques , qui n'y sont plus examinés depuis la réforme de 1995. Ainsi, la ou les commissions concernées par un texte, ainsi que les députés qui s'y intéressent, peuvent se réunir pour statuer lors d'une délibération publique élargie en commission afin d'organiser un débat et d'émettre une recommandation sur ce texte 156 ( * ) .
En pratique, des salles spéciales, disposant d'une tribune pour l'accueil du public et d'une tribune pour la presse et les caméras, sont prévues au Bundestag pour accueillir de telles réunions.
Ces dernières concernent la délibération finale au cours de laquelle est adoptée la recommandation de décision de la commission. Avant cette délibération, la commission discute successivement des dispositions du texte. Son président appelle les chapitres et paragraphes de ce dernier sur lesquels les rapporteurs, d'autres membres de la commission, des représentants du gouvernement fédéral ou du Bundesrat peuvent exprimer leur point de vue. A ce stade, des amendements formels peuvent être proposés et adoptés (à la majorité simple des présents).
Au Bundesrat, des réunions de commissions peu fréquentes
Le Bundesrat comprend 16 commissions permanentes , chacune étant présidée par le représentant de l'un des Länder, dont la répartition des tâches est en principe calquée sur celle des ministères fédéraux . Chaque Land délègue un membre dans chacune de ces commissions, qui y dispose d'une voix (ministres-présidents en général à la commission des affaires étrangères et à la commission de la défense ; ministres spécialisés ou fonctionnaires dans les autres).
Elles examinent les textes pour formuler des recommandations à l'assemblée plénière, faisant émerger des accords entre Länder. A partir de leur position, les gouvernements des Länder déterminent ensuite les consignes de vote de leurs représentants au Bundesrat. Peu fréquentes, les réunions des commissions ne sont pas publiques.
c) Des séances publiques au rôle secondaire strictement encadrées
Au Bundestag, des séances publiques, « redynamisées » récemment, qui ont surtout pour objet d'informer l'opinion de l'activité parlementaire
Les séances plénières, présidées par le président 157 ( * ) (aujourd'hui M. Norbert Lammert de la CDU) ou l'un des vice-présidents (5 aujourd'hui), élus pour la législature, sont publiques. Président et vice-présidents forment le Bureau ( Presidium ), qui discute des affaires intérieures de la chambre. Le président appelle les points à l'ordre du jour, accorde la parole et assure la discipline des débats.
La présence en séance est obligatoire. Les députés doivent signer des listes de présence . Le bureau de séance , composé du président et de deux secrétaires, dont l'un appartient à l'opposition, tient la liste des orateurs, dresse acte des débats et établit les résultats des votes en séance publique. Le vote est personnel. Il existe plusieurs procédures (assis/levé ; vote nominal ; vote secret ; Hammelsprung 158 ( * ) ).
La recevabilité des amendements, qui peuvent être déposés par les groupes (en deuxième et troisième lectures) et les députés à titre individuel (en deuxième lecture), est examinée par la présidence.
Les débats en séance publique , concentrés sur les points forts ou polémiques d'un texte, sont strictement limités à une durée fixée par le Comité des doyens, qui est en pratique respectée. La gestion du temps de parole relève surtout des groupes . Après l'élection du Bundestag, une grille de répartition du temps de parole est établie entre eux, chacun recevant un temps de parole proportionnel à son effectif au Bundestag (voir tableau ci-dessous). Les ministres voient aussi en principe leur temps de parole décompté sur celui du groupe auquel ils appartiennent mais la Loi fondamentale leur garantit qu'ils peuvent s'exprimer quand ils le souhaitent.
Durée
|
CDU/CSU
|
SPD
|
FDP
|
La Gauche
(Die Linke)
|
Bündnis 90/Les Verts
|
1/2 |
9 |
9 |
5 |
4 |
4 |
3/4 |
14 |
14 |
6 |
5 |
5 |
1 |
19 |
19 |
8 |
7 |
7 |
1 ¼ |
24 |
24 |
10 |
9 |
9 |
1 ½ |
29 |
29 |
12 |
11 |
11 |
1 ¾ |
33 |
33 |
14 |
12 |
12 |
2 |
38 |
38 |
16 |
14 |
14 |
2 ½ |
48 |
48 |
20 |
18 |
18 |
3 |
57 |
57 |
24 |
21 |
21 |
4 |
76 |
76 |
32 |
28 |
28 |
5 |
95 |
95 |
40 |
35 |
35 |
10 |
190 |
190 |
80 |
70 |
70 |
Source : Bundestag
Les séances plénières ont avant tout pour objet l'information de l'opinion. C'est pourquoi en 1995 , le Bundestag a adopté une série de mesures destinée à redynamiser leurs débats :
- une « heure d'actualité » peut être organisée en début de séance sur un thème d'intérêt général, à la demande du Comité des doyens, d'un groupe ou de trente et un membres du Bundestag ;
- les thèmes fondamentaux sont débattus le jeudi pour une durée de quatre à six heures, ce « débat du jeudi » étant généralement télévisé. Le temps de parole de chaque intervenant est limité à dix minutes ;
- le débat en séance publique peut être suspendu si le nombre de membres présents n'est pas suffisant (sur initiative du président avec accord des groupes, d'un groupe ou de 5% des présents).
Des séances publiques sobres et rapides entérinent les accords entre Länder au Bundesrat
En assistant à une séance plénière du Bundesrat, le 19 mai, la mission a pu constater que les séances plénières avaient pour principal objet de constater les accords passés entre Länder . Auparavant, les représentants des Länder conduisent un dialogue où chacun tente de rallier les autres à sa position (conférence préparatoire). Leur ordre du jour 159 ( * ) est dense (47 points examinés en moins de 2 heures le 19 mai).
La présidence du Bundesrat est exercée pour un an par l'un des chefs de gouvernement d'un Land, aujourd'hui M. Peter-Harry Carstensen, selon un ordre établi en fonction de la population des Länder 160 ( * ) .
Quelques questions suscitent un débat approfondi, les autres points sont discutés, à partir du rapport de la commission, par les orateurs qui justifient la position de leur Land ou, pour les sujets les plus élémentaires, sont simplement consignés par écrit au procès-verbal. Une des caractéristiques des séances du Bundesrat est la sobriété des débats . Les interruptions sont rares, les rappels à l'ordre inexistants. Il n'existe pas de limitation du temps de parole. Les membres du gouvernement ont un droit de réponse permanent.
Il n'y a pas d'obligation de présence lors des séances du Bundesrat pour ses membres. En effet, la Loi fondamentale prévoit que chaque Land ne peut s'exprimer que d'une seule voix au Bundesrat . Lors des votes (à main levée), un représentant exprime l'ensemble des suffrages du Land à partir des consignes de vote données par son gouvernement.
Le Tribunal constitutionnel fédéral a reconnu le droit pour un membre du Bundesrat de contredire le vote du délégué du Land dont il est originaire mais le vote du Land est alors considéré comme nul.
* 153 Un député peut être membre de plusieurs commissions.
* 154 Article 62 du Règlement du Bundestag.
* 155 Es qualité, les membres du Bundesrat ont accès aux réunions de commission et aux séances du Bundestag.
* 156 Article 69a du Règlement du Bundestag. Un quart des membres de la commission saisie au fond peut exiger que le sujet fasse plutôt l'objet d'une discussion générale en séance.
* 157 Il est en principe issu du groupe parlementaire le plus nombreux.
* 158 Les députés quittent la salle des séances puis y rentrent, sur un signe du président, en passant sous l'une des trois portes marquées par « oui », « non » ou « abstention ».
* 159 Questions au gouvernement ; projets de loi issus de la commission de médiation ; décisions du Bundestag sur des projets de loi ; initiatives des Länder ; projets de loi du gouvernement ; rapports gouvernementaux ; projets d'actes de l'Union européenne ; prescriptions juridiques ; règlements administratifs généraux ; autres décisions.
* 160 Le président est conseillé par le conseil consultatif permanent, composé de 16 plénipotentiaires des Länder.