(4) Un risque qui concerne également les industries plus traditionnelles

Le cas de l'acquisition d'Arcelor par Mittal Steel en 2006 peut servir d'illustration au risque de captation du capital technique. Il apparaît, en effet, qu'un aspect stratégique de cette fusion consiste pour le nouveau groupe à développer des technologies avancées d'Arcelor en les mettant en oeuvre dans des usines situées dans les pays en développement, les acquisitions dans les pays à bas coûts étant en effet privilégiées par Mittal Steel parallèlement à la fermeture de sites en Belgique et en Lorraine. Toutefois, si la crainte persiste pour le moyen terme, il faut reconnaître qu'à court terme le groupe envisage des investissements lourds à Dunkerque.

Des similitudes peuvent d'ailleurs être trouvées entre le cas de Pechiney racheté par le groupe canadien Alcan en 2003. En effet, il apparaît clairement que le rachat de l'entreprise française était principalement motivé par l'acquisition du savoir-faire technologique de Pechiney, dont la technologie d'électrolyse notamment est reconnue comme l'une des plus performantes au monde. C'est ainsi qu'Alcan investit en France plus de la moitié de son budget mondial de recherche et développement.

En revanche, s'agissant des activités de production, la dynamique semble être celle d'une diminution des capacités -qui se traduit par des fermetures de sites et des suppressions d'emplois- en Europe occidentale et aux Etats-Unis au profit d'une politique de développement des sites d'Europe orientale et d'acquisition d'unités nouvelles dans les pays à bas coûts.

Par analogie avec les interrogations soulevées par la politique d'exploitation mondiale des brevets d'Arcelor par Mittal, il convient de noter que si Alcan vient de décider de mettre en oeuvre le dernier procédé inventé par Pechiney (technique d'électrolyse dénommée APSO), le choix du site utilisateur parmi plusieurs localisations possibles dans le monde n'est pas encore arrêté à l'heure qu'il est.

Ces exemples pourraient constituer de légitimes motifs de fierté, dans la mesure où ils montrent que notre capacité d'innovation est reconnue et que, à l'occasion de l'intégration de nos entreprises dans des groupes internationaux, notre savoir-faire peut être mieux valorisé puisque mis en oeuvre dans des usines du monde entier.

Toutefois, cet exemple doit nourrir des inquiétudes dans la mesure où, au-delà des pertes d'emplois immédiatement liées à la rationalisation du fait de l'intégration dans un groupe, le modèle retenu pourrait tendre à n'utiliser la France que comme un laboratoire, sans chercher à prendre appui sur cette capacité d'innovation pour développer des nouvelles activités de production et donc des emplois prioritairement localisés en France.

La prise de contrôle d'une entité par un centre de décision extérieur peut donc constituer une perte de substance pour l'ensemble de son environnement.

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