(2) Le rachat des Chantiers de l'Atlantique par AKER Yards : le bénéfice de l'effet de métier

Depuis leur rachat par le groupe norvégien Aker Yards 144 ( * ) en 2005, les Chantiers de l'Atlantique (aujourd'hui Aker Yards France) connaissent un regain d'activité qui paraissait inespéré il y a deux ans. Au bord de la disparition fin 2004, les Chantiers de Saint-Nazaire affichent aujourd'hui un carnet de commandes plein jusqu'en 2010 voire 2011 145 ( * ) .

Il est indéniable que cette opération a stimulé la capacité de l'entreprise française à saisir les opportunités qui se sont présentées.

Un des éléments de cette évolution a été le changement de statut des Chantiers de l'Atlantique dans son groupe d'appartenance.

Acquise par Alstom sans enthousiasme de ce dernier 146 ( * ) , l'entreprise de Saint-Nazaire était demeurée périphérique dans la stratégie du groupe. La construction navale occupait, en effet, une place très marginale par rapport au coeur de métiers d'Alstom. Ce faible intérêt pour les Chantiers s'était d'ailleurs aggravé depuis quelques années, Alstom faisant savoir explicitement son souhait de les céder.

Cette situation instable - dont une des traductions était selon le PDG, M. Jacques Hardelay entendu par votre rapporteur, que l'appellation d'Alstom Marine ne s'était jamais imposée - était de nature à décourager les clients potentiels non assurés que les paquebots qu'ils confieraient aux Chantiers de l'Atlantique pourraient être réalisés. Il n'était pas certain que ces derniers resteraient adossés au groupe et encore moins qu'ils pourraient compter sur son soutien pour surmonter leurs difficultés financières, particulièrement graves en 2003 et 2004.

Cette situation a radicalement changé à la suite de l'intégration dans le groupe Aker Yards dont la construction navale est l'unique métier. Les Chantiers de l'Atlantique ne sont plus une activité secondaire à l'avenir incertain mais une des composantes centrales (l'autre étant les chantiers finlandais) d'un leader mondial de la construction navale.

Outre un gain de visibilité et de sécurité pour ses clients et partenaires, l'entreprise française gagne aussi au fait d'être intégrée dans un groupe où les commandes sont réparties entre les différentes implantations selon leur plan de charge et leurs compétences propres, les sites français et finlandais apparaissant complémentaires.

Reste à savoir ce qu'il en sera de l'activité du site lorsque les différents chantiers européens d'Aker Yards feront face à un creux de cycle qui arrivera inévitablement.

Le centre de décision que constitue la division construction navale du groupe norvégien située à Helsinki, n'aura-t-il pas tendance à affecter prioritairement les commandes aux chantiers norvégiens ou finlandais qui constituent sa base historique, au détriment de la filiale française ?

Il n'est pas impossible qu'une telle préférence puisse exister, bien qu'il semble exister un triple avantage au profit de Saint-Nazaire : une capacité d'études et d'innovation technologique très supérieure à celle des autres équipes, une moyenne d'âge de quinze ans plus jeune que celle des chantiers finlandais et norvégiens et enfin le caractère exceptionnel du site de la rade de Saint-Nazaire quant à la dimension des paquebots qui peuvent y être construits et qui n'a pas d'équivalent dans les pays nordiques 147 ( * ) .

Quant à la cession récente à une vingtaine de banques internationales des parts de la holding norvégienne Aker dans Aker Yards 148 ( * ) , si elle peut faire naître des craintes quant à l'évolution de la stratégie du groupe dans un sens plus financier et moins industriel, elle peut aussi s'analyser comme un élément d'affaiblissement de l'ancrage nordique du groupe de construction navale qui pourrait profiter à la filiale française.

Jusqu'à ce jour en tous cas, le rachat par Aker Yards s'est traduit par l'engagement d'une nouvelle dynamique dans nos chantiers navals, tant en matière d'activité que de valorisation de leurs atouts 149 ( * ) .

* 144 Dont la division construction navale est localisée en Finlande.

* 145 En fonction de la confirmation de l'option posée par l'armateur Norvegian Cruise Line.

* 146 En fait, sous la pression de l'Etat actionnaire.

* 147 Les autres sites capables d'accueillir la construction des paquebots ou ferries les plus importants sont allemands (au sein du groupe Aker Yard), italiens et coréens.

* 148 Soit 40,1 % du capital d'Aker Yards, dont Aker était l'actionnaire de référence.

* 149 Et ce, conformément à ce qui était attendu de l'Etat qui a joué un rôle décisif dans ce rapprochement en s'impliquant de façon très active dans la recherche d'une garantie pour l'acquéreur norvégien. Par sa réactivité et sa discrétion, l'action de l'Etat sur ce dossier a sans doute constitué un modèle d'intervention.

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