DEUXIEME PARTIE : DES OPPORTUNITÉS POUR NOS ENTREPRISES À LA CONQUÊTE DE L'EUROPE CENTRALE ET ORIENTALE

Dans ce contexte économique dynamique quoique fragile, la France tient déjà une place importante, à la faveur de relations politiques en plein développement depuis la chute du régime soviétique et, plus précisément, du soutien constant de la France à la candidature de la Hongrie à l'Union européenne (comme à l'OTAN d'ailleurs).

Pourtant, comme le lui a fait observer M. Philippe Zeller, Ambassadeur de France en Hongrie, l'histoire des relations franco-hongroises aura longtemps été marquée par une certaine distance, qui n'est pas le simple effet de l'éloignement géographique.

L'occupation turque puis la domination des Habsbourg auront longtemps été des freins à des contacts et des échanges plus directs. Pour autant, de nombreuses périodes de rapprochement (notamment du temps de la dynastie des Anjou, ce que n'a pas manqué de relever M. Christian Gaudin, sénateur du Maine-et-Loire, membre de la délégation) ont également jalonné cette histoire. Après la Révolution de 1848 qui avait rapproché les deux pays, la signature en 1920 du Traité de Trianon, auquel l'historiographie hongroise rattache le nom de Clémenceau (président du Conseil) et par lequel la Hongrie a perdu deux tiers de son territoire, a créé une blessure encore sensible.

La relance des relations bilatérales a été particulièrement marquée depuis 1997 et s'est traduite aux plans politique, diplomatique mais aussi économique, technique, administratif et culturel.

I. DES RELATIONS DÉJÀ INTENSES AVEC LA FRANCE

A. UN PARTENARIAT ÉCONOMIQUE DÉJÀ BIEN AVANCÉ

1. Une intensification récente des échanges commerciaux

En 2006, l'Union européenne fait figure de principal partenaire commercial de la Hongrie : elle lui achète 74 % de ses exportations et lui fournit 67,5 % de ses importations. Si l'Allemagne reste le premier partenaire de la Hongrie en absorbant 29,5 % de ses exportations et en détenant une part de marché en Hongrie de 27,1 %, la France représente 4,7 % des importations hongroises et apparaît comme le quatrième fournisseur de la Hongrie , après la Russie (énergie), la Chine (électronique) et l'Autriche (partenaire historique). La France est le quatrième client de la Hongrie , absorbant 4,9 % de ses exportations.

Depuis la période de transition au début des années 1990, les échanges bilatéraux entre la France et la Hongrie ont fortement augmenté ; en 10 ans, ils ont été multipliés par 5, passant de 1,1 Md Euros en 1996 à 5,5 Mds Euros en 2006. Cette forte hausse masque toutefois une intensification récente . Alors qu'entre 2000 et 2004, les échanges ont augmenté à un rythme de + 4 % par an, la croissance s'est fortement accélérée ces deux dernières années pour atteindre + 12 % en 2005 et + 14 % en 2006. Depuis 1999, le solde commercial de la France avec la Hongrie est en outre légèrement déficitaire ; en 2006, il s'établissait ainsi à -89 MEuros.

Enfin, au sein des nouveaux pays membres, la Hongrie demeure le troisième marché client de la France (après la Pologne et la République Tchèque), et son deuxième fournisseur, derrière la Pologne . Au niveau mondial, la Hongrie est le 32 ème débouché de la France et son 30 ème fournisseur.

Les échanges entre la France et la Hongrie se font essentiellement dans l'industrie (en particulier les secteurs automobiles, électriques et électroniques) et dans une moindre mesure dans les biens de consommation (notamment pharmaceutiques) ; dans le même temps, les produits agricoles et agro-alimentaires représentent un point faible des échanges bilatéraux (220 M Euros, soit 5 % des échanges agro-alimentaires totaux de la Hongrie, contre 30 % encore au début des années 1990), partiellement compensé il est vrai par la forte implantation des entreprises françaises du secteur (Danone, Bonduelle, Bongrain, Cecab, Epis France ou Soufflet) sur le territoire hongrois.

En matière agricole, la délégation a pu relever, lors de la visite qu'elle a effectuée de la très grande ferme d'Enyingi Agrar Rt , que la Hongrie, ayant subi la perte de débouchés à l'Est, se trouve aujourd'hui confrontée à la qualité des produits agricoles de l'Ouest 15 ( * ) et n'est pas encore en mesure d'exporter vers ces marchés prometteurs, d'autant qu'elle ne transforme quasiment pas la production agricole de base qu'elle peut pourtant fournir en abondance.

La ferme d'Enyingi Agrar Rt fait partie des dernières fermes d'Etat hongroises à avoir été privatisée, puisque la privatisation a eu lieu en novembre 2004. Aujourd'hui, les salariés détiennent 10 % des parts de la ferme, et les 90 % restant sont répartis entre les membres de la direction et un investisseur en position minoritaire, la société IKR (qui est l'un des principaux distributeurs de matériel et de produits agricoles en Hongrie).

La ferme emploie 300 salariés, elle a une activité de grandes cultures et un élevage laitier et a dégagé un résultat net de 9 à 12 % en 2006, ce qui n'a pas manqué d'étonner les sénateurs de la délégation, comparant ce chiffre au rendement moyen (de 1 à 4 %) du capital dans les exploitations françaises.

Les grandes cultures

7.500 ha de terres sont cultivées, dont 6.500 ha loués à l'Etat, et 1.000 ha à des propriétaires privés, le loyer annuel atteignant 1 million d'euros (ce cas de figure est rare en Hongrie, puisqu'il a été précisé que 99 % de la surface agricole utile était propriété privée 16 ( * ) ). Les principales cultures sont le blé (graines et semences), l'orge, le maïs (dont une partie est destinée à l'élevage, environ 4.000 t par an), la betterave à sucre (contrats pour 1.000 ha), la luzerne (également pour l'élevage) et le tournesol. La ferme dispose de sa propre usine de production d'aliments.

L'élevage

La ferme est constituée de 3 cheptels : 2 laitiers (Holstein Friz), et un troupeau de veaux :

- 450 vaches laitières (à quelques km du site visité par la délégation),

- 1.750 vaches laitières,

- 1.200 veaux (6 à 22 mois).

La production quotidienne de lait tourne autour de 45.000 litres. Le quota laitier annuel de la ferme est de 19 M litres (quota hongrois = près de 2 Mds litres). Le rendement moyen est de 8.200-8.400 litres/vache. La quasi intégralité de la production est livrée à une usine de la société SOLE, pour conditionnement en lait de consommation (et un petit débouché fromager).

La structure de nos échanges avec la Hongrie reflète par ailleurs plus globalement le rôle essentiel des grandes entreprises dans ces échanges . Ainsi, alors que 4.700 sociétés françaises exportent vers la Hongrie, 60 % des ventes sont assurées par les 80 entreprises les plus importantes .

Au premier trimestre 2007, les exportations françaises ont ralenti, sans doute pénalisées par l'application du plan d'austérité hongrois. Ce sont les biens d'équipement professionnels et les produits de l'industrie automobile qui ont le plus reculé, dans le sillage de l'investissement et de la consommation. L'essoufflement des échanges commerciaux imputable au plan d'austérité pourrait néanmoins être contrebalancé par les effets positifs attendus de l'année économique de la France en Hongrie.

* 15 De ce point de vue, la délégation n'a pas pu évaluer le niveau des normes sanitaires de production, notamment laitière puisque l'accès à la salle de traite ne lui a pas été donné.

* 16 A ce sujet, la Hongrie a instauré un moratoire sur l'achat de terres par des ressortissants non hongrois jusqu'en 2011 et vise à le prolonger jusqu'en 2014.

Page mise à jour le

Partager cette page