b) Les autres apports agronomiques
Outre sa contribution au processus d'enrichissement des sols, la biodiversité des milieux agricoles est à la fois un facteur de productivité globale agricole, un moyen de limiter la pollution, un support de résistance aux modifications environnementales et un milieu de contention des ravageurs.
(1) Un facteur de productivité agricole
Cette faculté des écosystèmes peut s'approcher de deux façons :
- au regard de la productivité totale des facteurs employés .
Un article paru il y a peu 55 ( * ) dans « Science » établit que les biocarburants issus de prairies à grande biodiversité et cultivées avec peu d'insecticide avaient une efficacité de lutte contre l'effet de serre plus de 200 % supérieure à celles des grandes monocultures de maïs, produisant de l'éthanol avec beaucoup d'intrants.
- en fonction de la biomasse produite.
Plusieurs études établissant une corrélation positive entre le nombre d'espèces herbacées dans un espace et la biomasse produite.
Une étude européenne faite dans plusieurs pays établit cette corrélation :
Cette étude confirme une expérimentation de même nature faite aux Etats-Unis, dont les résultats sont proches, à cette réserve près que cette dernière fait apparaître un plateau de productivité au-delà de 15 espèces.
Cette augmentation de la productivité, en relation avec le degré de biodiversité, peut s'expliquer par différents phénomènes de complémentarité :
- entre les végétaux manquant d'azote et ceux le fixant mieux dans le sol,
- entre les végétaux qui injectent plus de flux carbonés dans le sol et ceux qui en injectent moins.
(2) Un facteur de dépollution
Des études, menées en Europe et aux Etats-Unis, ont montré que l'accroissement de la biodiversité d'une parcelle affecte négativement la présence de nitrate dans le sol.
(3) Un support de résistance aux modifications de l'environnement
La biodiversité des écosystèmes est « une mémoire de réussite » puisqu'elle est la résultante, dans l'hémisphère Nord, de l'évolution d'écosystèmes qui ont réussi à résister aux variations de l'environnement depuis la dernière glaciation.
Conserver cette mémoire est donc essentiel dans la perspective du changement climatique.
(4) Un mécanisme de limitation des ravageurs
L'INRA de Rennes a montré que la destruction des zones bocagères a eu un effet sur la montée des pucerons ravageurs des cultures. En open field, ces ravageurs ne sont plus contrôlés, alors qu'en zone bocagère ils subissent un double contrôle - assez raffiné puisque variable suivant les conditions hygrométriques - soit d'un champignon, soit d'un hémisphère.
Des expériences similaires effectuées également par l'INRA, mais en milieu forestier, ont montré que l'insertion de feuillus dans une plantation industrielle de conifères faisait baisser l'impact des ravageurs, probablement parce que ceux-ci hébergent deux fois plus de prédateurs de ces ravageurs que la monoculture forestière de pins.
Malgré ces études, la destruction du bocage, des talus et haies se poursuit, aux limites du Poitou et de la Vendée notamment, car la grande presse, la presse quotidienne régionale et la presse professionnelle en font trop peu état et véhiculent encore le productivisme, de même que les modalités d'application de la politique agricole commune.
* 55 David Tilman - Science - Décembre 2006