C. DES MIGRANTS EN MAL D'INTÉGRATION PROFESSIONNELLE

1. Les entrées indirectes de ressortissants étrangers sur le marché de l'emploi sont bien plus importantes que les entrées directes

Aux entrées directes de ressortissants étrangers entrant en France pour exercer une activité professionnelle, et munis du titre de séjour correspondant, il convient d'ajouter les entrées indirectes d'étrangers sur le marché de l'emploi l'année même de leur arrivée en France à un autre titre que l'exercice d'une activité professionnelle (regroupement familial par exemple) et les entrées différées qui concernent les étrangers déjà présents sur le territoire français le 1 er janvier de l'année considérée, qui n'avaient pas accédé au marché du travail et, qui y accèdent au cours de cette même année.

Sur 87.800 ressortissants de pays tiers, issus d'une immigration à caractère permanent, entrés sur le marché de l'emploi en 2006, seuls 10.300 avaient accédé au territoire français au titre de l'immigration professionnelle. Les entrées indirectes sur le marché de l'emploi sont déterminantes.

Entrées sur le marché de l'emploi des ressortissants de pays tiers

2004

2005

2006

Entrées directes

7.000

8.900

10.300

Entrées indirectes

61.400

58.400

59.700

Entrées différées

17.800

17.800

17.800

Total

86.200

85.100

87.800

Source : M. Jean-François Léger. Les entrées sur le marché de l'emploi français. Estimations pour la période 2004-2006. Chiffres issus des enquêtes « emploi » de l'INSEE

2. Le problème de l'intégration professionnelle des primo-arrivants

Les entrées sur le marché de l'emploi, indirectes ou différées, à la différence de l'immigration professionnelle directement liée à un contrat de travail, ne débouchent pas toutes sur une activité rémunérée, salariée ou non. Si toutes ces entrées sur le marché de l'emploi débouchaient sur un contrat de travail , et sous réserve de déterminer une méthodologie fiable au numérateur et au dénominateur, on pourrait considérer le taux de 50 % d'immigration professionnelle voulu par le Président de la République comme déjà atteint . L'accès au travail constitue un enjeu majeur pour l'intégration des ressortissants étrangers provenant de pays tiers et venus par exemple au titre du regroupement familial.

Ainsi, selon l'ANAEM, 61,4 % des signataires du contrat d'accueil et d'intégration en 2006 déclaraient avoir eu une activité professionnelle avant leur arrivée en France, mais 30,6 % seulement déclaraient en exercer une en France .

Cette situation résulte pour une large mesure d'une carence des politiques publiques visant à l'intégration professionnelle des primo-arrivants , que le gouvernement s'efforce de corriger par la mise en place d'un bilan de compétences 2 ( * ) , d'abord facultatif, puis obligatoire, dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration mis en oeuvre par l'ANAEM.

3. Les 98,9 millions d'euros de crédits attribués par l'Acsé aux associations en 2008 négligent le secteur de l'intégration professionnelle

Le ministère de l'immigration, de l'identité nationale, de l'intégration et du développement solidaire hérite d'une situation budgétaire paradoxale : le programme 104 « intégration et accès à la nationalité » du budget 2008 dote l'Agence nationale de la cohésion sociale et de l'égalité des chances (ACSé) de 98,6 millions d'euros de crédits d'intervention pour « intervenir notamment en matière d'observation et d'analyse de l'immigration, d'intégration, d'apprentissage du français pour les migrants non primo-arrivants, mais aussi de diagnostics territoriaux avec les acteurs locaux pour construire localement une stratégie d'action concertée en faveur de l'intégration ou de la lutte contre les discriminations ou pour conduire des études de niveau national ou local (ainsi en 2006, une étude sur la mobilité résidentielle des ménages immigrés) ». Ce volume de crédits considérable était distribué en 2006 à quelque 4.803 organismes, dont 86 % étaient des associations, dans des domaines très divers dont le logement et l'apprentissage du français.

Mais, pour ce qui concerne l'accès à l'emploi, les financements de l'ACSé sont essentiellement tournés vers la lutte contre les discriminations , axe politique essentiel, mais qui recoupe la mission de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE). Ses subventions, très émiettées, négligent des actions d'intégration professionnelle active. Elles pourraient consister en des partenariats avec des organismes intervenant dans le domaine de l'initiative économique par exemple, ou dans celui du tutorat.

Le transfert des crédits d'intervention en faveur des primo-arrivants, de l'Acsé vers le nouvel opérateur de l'immigration, prévu dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), devra dès lors s'accompagner d'une réorientation de la politique de subvention aux associations , et d'un redéploiement des financements existants vers, outre l'apprentissage du français et le logement des populations immigrés, des associations oeuvrant de manière efficace en faveur de l'intégration professionnelle des primo-arrivants .

* 2 Bilan de compétences gratuit introduit par l'article 5 de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006, rendu obligatoire par l'article 7 de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007.

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