B. ÉLARGIR L'HORIZON DES ÉLÈVES PAR UNE ORIENTATION ACTIVE

1. La connaissance du monde extérieur

Le monde de l'éducation est aujourd'hui encore un monde clos. Le plus souvent, ni les élèves, ni les professeurs ne connaissent l'univers professionnel de l'entreprise.

Faute de disposer d'une connaissance suffisante de l'extérieur, les enfants s'orientent vers un métier correspondant à la catégorie socioprofessionnelle de leurs parents qui est le premier facteur d'orientation. En outre, les inégales ambitions mises en avant par les familles sont le plus souvent entérinées par la procédure d'orientation.

M. Patrick Chauvet a indiqué à la mission qu'avait été récemment mise en place des classes de découverte professionnelle, dès la troisième, qui permettent aux collégiens d'approfondir leur connaissance des métiers et d'acquérir une première expérience professionnelle 156 ( * ) . Cette démarche s'inscrit dans le cadre du « p arcours de découverte des métiers et des formations », initié dès la classe de quatrième par la visite d'un lycée agricole, professionnel ou d'enseignement général.

Il a précisé que « cet itinéraire se poursuit au lycée avec un entretien d'orientation conduit par le professeur principal 157 ( * ) en classe de première et bientôt en classe de terminale ». Il s'agit de préparer les élèves à faire un choix éclairé sur leur orientation post-lycée, par la construction d'un projet personnel, ce qui contribuera à limiter ensuite les échecs. Un entretien d'accueil est également prévu lors de l'arrivée des élèves en lycée agricole ou professionnel.

Est par ailleurs expérimentée à Nantes une plate-forme regroupant les établissements scolaires, le milieu associatif, les missions locales, les entreprises et les agences pour l'emploi. L'objectif, selon M. Jean-Marie Lenzi, chargé de mission auprès du délégué interministériel à l'orientation, est « de favoriser et de permettre une meilleure adéquation entre la formation initiale et les caractéristiques du bassin d'emploi » 158 ( * ) .

La mission est favorable à ces mesures mais estime qu'il faut aller beaucoup plus loin.

Si l'on souhaite que les élèves puissent avoir le désir de s'orienter vers des métiers diversifiés, il faut leur en donner une expérience concrète.

La mission proposera ainsi d'instituer chaque année un stage en entreprise à l'ensemble des élèves de la quatrième à la seconde.

Elle est convaincue que cet effort permettra un échange social beaucoup plus important. En effet aujourd'hui deux élèves en légère difficulté en fin de troisième, l'un issu des couches populaires, l'autre d'un milieu favorisé, choisiront probablement l'un la voie professionnelle, et l'autre de s'accrocher dans la voie générale, même si leurs goûts et leurs aspirations ne les poussent pas dans ces directions. La découverte des métiers par les stages permettrait d'affiner leurs goûts, de renforcer leurs convictions et de choisir l'orientation plutôt que de la subir. Elle favoriserait une orientation davantage conforme à leurs goûts qu'à leurs aptitudes scolaires, qui ne doivent pas être les seuls critères de choix d'une filière 159 ( * ) .

La participation active des enseignants à la construction de ce projet suppose également qu'ils reçoivent des centres d'information et d'orientation (CIO) une formation et un soutien logistique adaptés.

La mission préconise à cet égard, ainsi que l'a proposé le Haut Conseil pour l'éducation, qu'une fonction de professeur référent en orientation soit créée , pour rapprocher à la fois les élèves et les professeurs de la personne qui donne des conseils en matière orientation.

En effet, les conseillers d'orientation-psychologues ne sont pas forcément la première personne que l'élève ira voir pour parler de son avenir professionnel. Le recrutement de ces conseillers, limité aux licenciés en psychologie, pourrait au demeurant être revu afin de l'adapter aux véritables enjeux de ce métier. A tout le moins, les personnels d'orientation devraient approfondir et actualiser en permanence la connaissance concrète de leur environnement extérieur, comme le proposait le rapport de la mission sénatoriale d'information sur la formation professionnelle 160 ( * ) .

La mission propose, à cet égard, de dissocier la fonction de conseiller d'orientation, qui pourrait être exercée par un professeur, de celle de psychologue scolaire , dont l'intervention plus ponctuelle serait adaptée aux élèves ayant des problèmes de cet ordre.

M. Jean-Marie Lenzi a également insisté sur la nécessaire rationalisation du réseau local d'insertion, qui comprend outre les missions locales, les bureaux d'information jeunesse, les permanences d'accueil, d'information et d'orientation (PAIO) et les maisons de l'emploi, estimant que « la mise en cohérence des informations relatives aux métiers et aux carrières passe, d'une part, par la fusion de ces structures en un guichet unique et, d'autre part, par l'amélioration des systèmes publics d'information en ligne sur les filières de formation ».

La mission souhaite enfin insister sur le fait que la connaissance du monde extérieur passe, pour les élèves défavorisés, par une information complète sur les filières d'excellence et une incitation à y accéder . Ainsi, les dispositifs tels que les conventions de Sciences-Po avec des lycées en ZEP sont-ils intéressants et s'inscrivent parfaitement dans les objectifs de la mission : organiser une discrimination positive en faveur des jeunes issus des milieux défavorisés , valoriser les filières d'excellence qu'ils connaissent mal, et mettre en avant des réussites sociales symboliques qui leur permettent de croire en leur chance.

* 156 Audition du 19 février 2008 de M. Patrick Chauvet, chef de bureau de l'orientation à la sous-direction de l'orientation, de l'adaptation scolaire et des actions éducatives.

* 157 M. Patrick Chauvet a précisé que 30 000 professeurs principaux ont déjà été mobilisés pour mettre en place les entretiens d'orientation et que les diplômés récemment sortis des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) ont également reçu une formation à l'orientation, mais a reconnu que la réflexion en la matière restait encore embryonnaire.

* 158 Audition du 19 février 2008 de M. Jean-Marie Lenzi, chargé de mission auprès du délégué interministériel à l'orientation.

* 159 Comme c'est le cas aujourd'hui avec la filière Scientifique du lycée général que choisissent de nombreux bons élèves en dépit d'une préférence pour les matières littéraires ou économiques.

* 160 Rapport d'information de M. Bernard Seillier, fait au nom de la mission commune d'information sur le fonctionnement des dispositifs de formation professionnelle (n° 365 - 2006-2007) du 4 juillet 2007.

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